Le système d’exploitation Linux fête ses 30 ans : un « cancer » qui fait désormais du bien à Microsoft

« Linux est un cancer qui s’attache, en termes de propriété intellectuelle, à tout ce qu’il touche. C’est ainsi que fonctionne la licence », fustigeait il y a 20 ans Microsoft par la voix de son PDG d’alors, Steve Ballmer. Son successeur, Satya Nadella, a adopté cet OS open source créé il y a 30 ans.

C’est à un journaliste du Chicago Sun-Times, lors d’un déjeuner de presse le 31 mai 2001, que Steve Ballmer avait tiré à boulets rouges sur le système d’exploitation libre de droit lancé dans sa première version le 17 septembre 1991 par son créateur le Finlandais Linus Torvalds (photo). « Linux est un cancer », avait osé affirmer le PDG de Microsoft à l’époque – et successeur du fondateur Bill Gates – dans sa réponse à la question « Considérez-vous Linux et le mouvement opensource comme une menace pour Microsoft ? » (1).

Du « cancer » à la greffe ouverte
L’ancien patron de l’éditeur de Windows avait aussi assuré que Linux n’était pas une menace pour son système d’exploitation pour PC : « Oui. C’est une bonne concurrence. Cela nous forcera à innover. Cela nous forcera à justifier les prix et la valeur que nous offrons. Et ce n’est que sain ». Ce qu’il considérait comme une tumeur maligne a finalement été adopté par son successeur et actuel PDG depuis février 2014, Satya Nadella. Microsoft adhère en novembre 2016 à la fondation Linux (2) qui standardise les développements open source autour du noyau (kernel) de Linus Torvalds. La firme de Redmond en est même devenue membre platinum aux côtés de Facebook, Huawei, IBM/Red Hat, Oracle, Samsung, Tencent, AT&T, Nec, Ericsson ou encore Intel. Les dénigrements envers Linux de la part de Microsoft, alors soupçonné d’abus de position dominante avec Windows (3), ont laissé place à une lune de miel qui perdure : depuis 2015, Linux fonctionne sur Azure, le cloud devenu core business de Microsoft ; depuis 2017, le célèbre logiciel libre peut faire tourner une base de données SQL Server de Microsoft. Satya Nadella entend ainsi rendre le groupe moins dépendant de l’OS (4) historique Windows, lequel est de plus en plus concurrencé par Android de Google et dans une moindre mesure par l’iOS d’Apple.
Le patron indo-américain a ainsi élargi le champs d’action de Microsoft, en adoptant un écosystème (Linux) bien plus vaste que le sien et en augmentant sa communauté de développeurs informatiques (logiciels, applis mobiles, sites web, objets connectés, …). En 2018, Microsoft a en outre racheté la plateforme de développement de logiciels libres GitHub pour 7,5milliards de dollars. Comptant à ce jour plus de 65 millions de développeurs et 3 millions d’organisations, la désormais filiale de Microsoft est considérée comme le plus grand hébergeur au monde de « code source », avec plus de 200 millions de dépôts de projets logiciel. Puis c’est en 2019 que la firme de Redmond met un noyau de Linux dans Windows 10, en lieu et place d’un simple émulateur, afin de satisfaire un peu plus les Linuxiens. La même année, cette « politique d’ouverture » pousse Microsoft à rendre disponible 20.000 lignes de code pour permettre à Linux d’être utilisé sous Windows Server. En 30 ans d’existence, Linux a ainsi su s’imposer partout et souvent à l’insu des utilisateurs eux-mêmes. Conçu à l’origine pour les ordinateurs personnels basés sur le micro-processeur Intel x86, Linux est devenu de fait le système d’exploitation le plus répandu au monde. Basé sur Linux, Android de Google pour smartphones – 72,2 % des OS mobiles dans le monde, selon StatCounter (5) à juillet 2021 – lui assure en effet une emprise indirecte sans précédent et à faire pâlir l’éditeur de Windows qui a subi un cuisant échec avec son Windows Phone (0,02% de parts de marché mobile…).
Pour autant, directement sur les ordinateurs de bureau cette fois, Linux n’est présent que sur près de 2,4 % du parc mondial – là où Windows s’arroge encore 73 % de parts de marché, et loin devant les 15,4 % de l’OS X d’Apple (6). Mais là aussi, Google s’appuie sur Linux pour son Chrome OS qui occupe 1,2 % du parc des ordinateurs de bureau via les Chromebook. C’est sur les serveurs web que Linux est plébiscité par 40 % d’entre eux dans le monde, d’après W3Techs : à fin août, Linux est en effet utilisé par 51.9 % des serveurs web utilisant une catégorie d’Unix, lequel fait fonctionner 77,3 % des serveurs web – contre 22,9 % pour Windows (7). Enfin, sur dans la catégorie des superordinateurs, Top500.org a indiqué en juin dernier que Linux fait tourner pas moins de 52,8 % d’entre eux (8).

Gaming, Smart TV et objets connectés
« J’utilise Linux pour le contrôle intégral de la station de travail sur laquelle j’opère, justifie Sornin, un des nombreux aficionados de l’OS de Linus Torvalds. Le côté open source est très bénéfique en termes de sécurité et de perfectionnement du système d’exploitation. En revanche, le gaming sur Linux est un peu moyen ». Les jeux sur mobile, eux, performent sur Android alias Linux. Avec par ailleurs l’explosion des appareils intelligents – Smart TV par exemple – et objets connectés (IoT), le meilleur rival et partenaire de Microsoft est encore voué à un bel avenir. Linus Torvalds, lui, a lancé le 29 août (9) un appel à tester la version 5.14 du kernel. @

Charles de Laubier

Indissociable du Web depuis près de 25 ans, Flash – logiciel d’animation vectorielle – tire sa révérence

Le 31 décembre 2020, comme annoncé dès 2017 par la société Adobe qui en fut l’héritière en rachetant Macromedia il y a tout juste quinze ans, le logiciel de lecture d’animations vectorielles Flash Player disparaîtra. Animations, jeux vidéo, publicités ou encore arts graphiques en ont profité.

« Comme les standards ouverts tels que HTML5, WebGL et WebAssembly ont mûri au cours des dernières années, la plupart maintenant fournissent de nombreuses capacités et fonctionnalités que les pionniers des plugins offraient et sont devenus une alternative viable pour le contenu sur le Web » (1), avait expliqué en juillet 2017 la société américaine Adobe Systems, dirigée depuis le début de cette année-là par Shantanu Narayen (photo), pour justifier l’abandon de Flash.

Les industries culturelles « flashées »
Sur le Web, et ses contenus plus ou moins culturels tels que les jeux vidéo, les animations, les vidéos, la publicité ou encore les arts graphiques, le lecteur multimédia Flash a connu son heure de gloire jusqu’au milieu des années 2000. Ce standard d’animation vectorielle est utilisé par YouTube dès sa création en 2005. Disney fait même partie des nombreuses entreprises qui étaient devenues des adeptes du « f ». Son extension « Stage3D » en 2011 a donné une troisième dimension aux images, jusque sur Android (Google) and iOS (Apple). Les navigateurs web – Internet Explorer de Microsoft, Firefox de Mozilla, Chrome de Google ou encore Safari d’Apple – ont tous adopté Flash Player pour permettre à des milliards d’internautes de lire des quantités de contenus multimédias. C’est l’entreprise Macromedia qui fut à l’origine du succès planétaire de Flash. Après avoir racheté en novembre 1996 à la start-up FutureWave le logiciel « FutureSplash Animator » de dessins vectoriels et d’animations frame-by-frame, ce dernier fut rebaptisé « Macromedia Flash 1.0 » avec, d’un côté, un éditeur de graphiques et d’animations (Macromedia Flash) et, de l’autre, un lecteur multimédia (Macromedia Flash Player). En le proposant gratuitement en téléchargement et comme plugin pour les navigateurs web, le Flash Player s’est propagé dans le cyberespace pour devenir un lecteur quasi-universel. En 2005, année du rachat de l’entreprise par Adobe, il était installé sur environ 3 milliards de terminaux – soit sur bien plus de « machines » que ne l’était tout autre format média (2).
Mais face à la montée en puissance créative du HTML historique, notamment avec l’avènement des « feuilles de style en cascade » (3), les sites web construits entièrement sur Flash sont rapidement tombés en disgrâce, reléguant ce format de design au rang de simple plugin vidéo ou interactif. Avec le lancement de l’iPhone en 2007 et l’apparition du développement web Dynamic HTML (adopté par Netscape) et la norme HTML5 (du W3C), plus adaptés à l’interactivité et à la vidéo, le support Flash commence à ne plus être assuré. Steve Jobs a sonné la fin de la récrée dans une « lettre ouverte » publiée le 15 avril 2010 et intitulée « Thoughts on Flash », où le cofondateur christique et gourou de la marque à la pomme détaille sur plus de trois pages (4) les six raisons justifiant son rejet de Flash : ses principaux griefs sont que la plateforme Flash d’Adobe est « propriétaire », comprenez non-ouverte, et qu’elle soulève des problèmes de sécurité. Un extrait de cette open letter résume à elle seule les enjeux réels du bras de fer entre les deux entreprises américaines : « Adobe a déclaré à plusieurs reprises que les appareils mobiles d’Apple ne peuvent pas accéder au “Web complet” parce que 75 % des vidéos sur le Web sont en Flash. Ce qu’ils ne disent pas, c’est que presque toute ces vidéos sont également disponibles dans un format plus moderne, H.264, et visible sur les iPhone, iPod et iPad. YouTube, avec [il y a dix ans, ndlr] environ 40 % de la vidéo du Web, brille dans une application groupée sur tous [nos terminaux] ».
Shantanu Narayen, PDG d’Adobe (5), lui oppose AIR – anciennement Apollo (6) – qui permet aux développeurs de créer sans problèmes des applications et des jeux multiplateformes pour iOS, Android, Windows et Mac OS. Adobe aura même gain de cause en justice pour forcer l’écosystème fermé (lui-aussi) d’Apple d’accepter d’autres environnements de développement que le sien (7). Adobe fait de « Adobe Animate » son nouvel environnement de création Flash, mais en l’ouvrant sur HTML5… ouvrant la boîte de Pandore. Finalement, le 25 juillet 2017, Adobe annonçait le « End-Of- Life » (8) de Flash et de son Flash Player. Des développeurs ont bien résisté, en vain, avec notamment une pétition en faveur d’un Flash ouvert (9).

Navigateurs web et Adobe désactivent
Mais les navigateurs web, à commencer par Chrome de Google et Firefox de Mozilla, vont alors désactiver par défaut Flash dans leurs mises à jour (10). Edge de Microsoft a suivi. En janvier 2021, tous le bloqueront. Et Abobe prendra part à cette mise à mort en désactivant, à partir de l’an prochain, les installations existantes. Les nostalgiques de Flash, eux, n’ont plus qu’à se rendre par exemple sur Internet Archive (11) qui, depuis près d’un quart de siècle, sauvegarde le Web. Un émulateur et une librairie Flash (12) ont été mis en place. @

Charles de Laubier

Non-respect d’une licence de logiciel par le licencié : manquement contractuel ou contrefaçon ?

Deux affaires récentes ont opposé respectivement Free et Orange à des éditeurs de logiciels, lesquels les accusaient de contrefaçon. Mais le non-respect d’un contrat de licence de logiciel par le détenteur de cette licence de logiciel peut soit relever de la contrefaçon, soit du manquement contractuel.

Par Charles Bouffier, avocat, cabinet August Debouzy

La question de la nature de la responsabilité de toute personne qui souscrit à une licence pour l’utilisation d’un logiciel (le « licencié ») mais qui ne respecte pas les termes du contrat de licence du logiciel a donné lieu ces dernières années à des solutions jurisprudentielles contrastées en droit français (1). Et ce, compte-tenu du principe de non-cumul des responsabilités (2). Cette question délicate se trouve au coeur de deux affaires récentes opposant des opérateurs – respectivement Free Mobile et Orange – à des éditeurs de logiciels.

Affaire « Free » : question préjudicielle
Le 16 octobre 2018, la Cour d’appel de Paris (3) a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans le cadre d’une affaire opposant Free Mobile à la société IT Development (4). Les faits sont les suivants : la société IT Development a consenti par contrat à la société Free Mobile une licence sur un logiciel de gestion de déploiement de réseaux mobiles dénommé ClickOnSite. Arguant d’une décompilation non-autorisée et de modifications apportées au code-source de son logiciel en violation du contrat de licence, notamment pour créer des formulaires, la société IT Development a fait procéder à une saisie-contrefaçon dans les locaux d’un sous-traitant de l’opérateur Free Mobile puis a assigné ce dernier en contrefaçon de logiciel. En défense, Free Mobile a opposé que les actes invoqués ne constituent pas une violation de droits de propriété intellectuelle, mais une inexécution contractuelle. Par jugement du 6 janvier 2017, le TGI de Paris a considéré qu’il était reproché à la société Free Mobile « des manquements à ses obligations contractuelles, relevant d’une action en responsabilité contractuelle et non pas des faits délictuels de contrefaçon de logiciel, de sorte que l’action en contrefaçon initiée par la demanderesse est irrecevable » (5). La Cour d’appel de Paris, elle, a accepté de surseoir à statuer et de renvoyer à la CJUE la question préjudicielle suivante : « Le fait pour un licencié de logiciel de ne pas respecter les termes d’un contrat de licence de logiciel (par expiration d’une période d’essai, dépassement du nombre d’utilisateurs autorisés ou d’une autre unité de mesure, comme les processeurs pouvant être utilisés pour faire exécuter les instructions du logiciel, ou par modification du code-source du logiciel lorsque la licence réserve ce droit au titulaire initial) constitue-t-il : une contrefaçon (au sens de la directive 2004/48 du 29 avril 2004 [sur le respect des droits de propriété intellectuelle, dite IPRED, ndlr]) subie par le titulaire du droit d’auteur du logiciel réservé par l’article 4 de la directive 2009/24/CE du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur, ou bien peut-il obéir à un régime juridique distinct, comme le régime de la responsabilité contractuelle de droit commun ». Très attendues, les conclusions de l’avocat général de la CJUE ont été publiées le 12 septembre dernier (6). Après avoir réduit la portée de la question préjudicielle à la seule hypothèse de la modification du code source du logiciel (au motif que les trois autres seraient étrangères aux faits litigieux), l’avocat général suggère à la CJUE d’y répondre de la façon suivante : « Il y a lieu d’interpréter les articles 4 et 5 de la directive (…) concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur, pris avec l’article 3 de la directive (…) relative au respect des droits de propriété, en ce sens que :
• La modification du code source d’un programme d’ordinateur, effectuée en violation d’un contrat de licence, constitue une atteinte aux droits de propriété intellectuelle qui appartiennent au titulaire du droit d’auteur sur le programme, à condition que cette modification ne soit pas exonérée d’autorisation conformément à la directive [sur la protection juridique des programmes d’ordinateur].
• Le fondement juridique de l’action que le titulaire des droits d’auteur sur un programme informatique peut exercer contre le titulaire de la licence, pour cause de violation des facultés propres du titulaire des droits, est de nature contractuelle lorsque le contrat de licence réserve ces facultés au titulaire du programme, conformément à l’article 5 paragraphe 1, de la directive [sur la protection juridique des programmes d’ordinateur].

Des facultés réservées au titulaire
• Il appartient au législateur national de déterminer, en respectant les dispositions de la directive [IPRED] et les principes d’équivalence et d’effectivité, les modalités procédurales nécessaires à la protection des droits d’auteur sur le programme d’ordinateur en cas de violation de ces derniers, lorsque cette violation implique simultanément une violation de ces droits et un manquement contractuel. » Ainsi, selon l’avocat général de la CJUE, si le manquement reproché au licencié consiste dans le non-respect d’une clause contractuelle par laquelle le titulaire s’est expressément réservé l’exclusivité de certaines des facultés énumérées dans la directive concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur, « la qualification juridique du différend serait uniquement contractuelle » et il n’y aurait alors pas de place pour la contrefaçon. En revanche, la modification du code source d’un programme d’ordinateur effectuée en violation d’un contrat de licence se situe en dehors de la réserve des facultés énumérées dans cette directive. Elle implique une décompilation (afin de reconstituer le code source du logiciel), qui ne figure pas parmi les facultés précitées et qui n’est permise qu’à des fins d’interopérabilité, sous réserve de certaines conditions (8).
Aussi, selon l’avocat général, un tel manquement « pourrait être qualifié, simultanément, de manquement contractuel et de violation du devoir général du respect du droit d’auteur selon les contours définis par la loi […]. Dans ce cas de figure, le principe de non-cumul serait applicable ». Par application de la règle de non-cumul – et sous-réserve de la conformité de cette règle avec le droit de l’Union européenne (en particulier la directive IPRED) ce qu’il appartiendra à la juridiction de renvoi de dire, le fondement de l’action du titulaire serait alors de nature contractuelle.

Parallèle avec l’affaire « Orange »
En attendant l’arrêt de la CJUE sur cette question, un parallèle peut être fait avec une autre affaire récente. Le contentieux impliquant des licences de logiciel libre est suffisamment rare(lire ci-dessous une autre affaire « Free » de 2008) pour que l’on s’attarde sur un jugement du TGI de Paris du 21 juin 2019 rendu dans une affaire opposant l’éditeur de logiciel libre Entr’ouvert aux sociétés Orange et Orange Applications for Business (10). L’opérateur télécoms avait répondu à un appel d’offres de l’Agence pour le gouvernement de l’administration électronique (ADAE) en vue de la conception et de la réalisation d’un portail informatique, en proposant un outil interfacé avec la bibliothèque logicielle Lasso éditée par la société Entr’ouvert sous licence libre GNU GPL version 2. Estimant que la mise à disposition par Orange de cette bibliothèque à son client ne respectait pas les articles 1 et 2 de cette licence libre, la société Entr’ouvert a fait procéder à une saisie-contrefaçon au siège d’Orange puis l’a assigné en contrefaçon de droit d’auteur devant le TGI de Paris. En substance, elle reprochait à l’opérateur télécoms une déclaration d’utilisation de la version 0.6.3 de la licence litigieuse – alors qu’il aurait également employé la version 2.2.90, ainsi que l’indication prétendument trompeuse à l’ADAE de ce que la bibliothèque serait un module autonome.

Non-cumul de responsabilité
Orange et sa filiale Orange Application for Business (cette dernière étant intervenue volontairement à l’instance) soulevaient pour leur part l’irrecevabilité de l’action intentée au motif que le litige relèverait de la responsabilité contractuelle et non pas de la contrefaçon. L’opérateur télécoms a été suivi en cela par le TGI. En effet, après avoir rappelé – à l’instar de l’avocat de la CJUE dans l’affaire « Free » – que « la violation des droits réservés de l’auteur [listés à l’article L.122-6 du code de la propriété intellectuelle] est sanctionnée par la contrefaçon » et que « les modalités particulières d’usage pour permettre l’utilisation du logiciel conformément à sa destination, par [le licencié] sont aménagées, selon l’alinéa 2 de l’article L122-6-1 du code de la propriété intellectuelle, par contrat entre les parties », le TGI a finalement considéré « que la société Entr’ouvert poursuit en réalité la réparation d’un dommage généré par l’inexécution par les sociétés défenderesses d’obligations résultant de la licence et non pas la violation d’une obligation extérieure au contrat de licence ». En application du principe de non-cumul de responsabilité, nous dit le jugement, « seul le fondement de la responsabilité contractuelle est susceptible d’être invoqué par la demanderesse, qui doit donc être déclarée irrecevable en son action en contrefaçon et en ses prétentions accessoires ». L’affaire rebondira peut-être devant la Cour d’appel de Paris… @

ZOOM

Il y a dix ans, Free était déjà accusé de contrefaçon – sur sa Freebox
La licence libre GNU GPL Version 2 (GNU signifiant « GNU’s Not UNIX » et GPL « General Public License ») avait déjà été au cœur il y a dix ans d’une précédente affaire de contrefaçon portée devant le TGI de Paris : l’affaire « Free/ Welte, Andersen et Landley » qui avait défrayé la chronique à l’époque. En 2008, les auteurs de deux logiciels libres (Iptables et BusyBox) avaient assigné Free en contrefaçon de leurs droits d’auteur devant le TGI de Paris. Ils reprochaient à l’opérateur télécoms l’utilisation, dans la Freebox, des deux logiciels litigieux sans permettre l’accès à leurs codes sources, en méconnaissance des termes de cette licence GNU GPL Version 2 (https:// lc.cx/Assign2008). Free s’était alors défendue en expliquant que le terminal n’était pas vendu mais simplement prêté, ce qui l’exonérait — selon son fondateur Xavier Niel — de toute obligation de divulgation dudit code source. Un accord avait finalement été conclu en juillet 2011 entre les parties mettant fin au procès (https:// lc.cx/FSF-Free2011). Cet accord prévoyait notamment le libre accès aux codes sources des logiciels libres utilisés dans les Freebox. Compte-tenu de cette issue amiable, le TGI n’avait pas eu à se prononcer sur la recevabilité de l’action en contrefaçon des demandeurs pour non-respect des termes de la licence GNU GPL Version 2. Huit ans après, l’occasion lui en a été donnée dans le cadre d’une affaire visant cette fois-ci l’opérateur Orange. @

Adobe fête ses 35 ans en pleine forme grâce à ses acquisitions et à la croissance de ses abonnements

L’éditeur de logiciels de création, cofondée il y a 35 ans par Charles Geschke et John Warnock, a basculé avec succès dans le cloud pour y vendre par abonnements ses célèbres logiciels – Photoshop, Acrobat, Illustrator, … Son PDG, Shantanu Narayen, dispose d’une trésorerie confortable pour d’éventuelles nouvelles acquisitions.

Charles Geschke vient d’avoir 78 ans, le 11 septembre dernier. C’est le cofondateur avec John Warnock du numéro un des logiciels graphiques Adobe Systems – il y aura 35 ans en décembre de cette année. Photoshop, Acrobat, Illustrator, InDesign, Dreamweaver, Flash, …, mais aussi le langage PostScript : tous ces outils de création sont reconnus et utilisés mondialement dans la création,
le développement, les médias, le marketing, la communication et l’audiovisuel. Bien qu’il n’ait plus de fonctions opérationnelles dans le groupe depuis son départ à la retraite en 2000, Charles Geschke en a été néanmoins président du conseil d’administration jusqu’en janvier dernier.
Depuis le début de l’année, Shantanu Narayen (photo) lui a succédé tout en conservant ses fonctions de directeur général d’Adobe qu’il assume depuis décembre 2007. Cet Indien de 54 ans, né à Hyderabad, fêtera l’an prochain ses 20 ans chez Adobe Systems.

Au total, selon les calculs de Edition Multimédi@, Adobe investi en moins de dix ans quelque 4 milliards de dollars dans sa croissance externe (Omniture, Day Software, Demdex, Auditude, Efficient Frontier, Neolane, Fotolia
et TubeMogul).

Abonnements dans le cloud : 80 % du chiffre d’affaires
Il est à la tête d’une icône de la Silicon Valley (à San José), ni start-up mais multinationale ni licorne mais cotée en Bourse, qui prévoit de dépasser cette année les 7 milliards de dollars de chiffre d’affaires – à 7,24 milliards, selon le consensus d’analystes financiers – grâce à une croissance attendue de 23 % sur un an. Adobe Systems, dont le siège administratif est depuis dix ans situé dans le petit paradis fiscal américain qu’est l’Etat du Delaware, devrait aussi accroître sa rentabilité par rapport au résultat net affiché en 2016 et en hausse de plus de 85 % à 1,1 milliard de dollars.
Pour une entreprise du logiciel qui a survécu à 35 ans de grandes révolutions, aussi bien des technologies que des écosystèmes (d’Internet au cloud), c’est une belle performance. Adobe affiche – au 29 septembre 2017 – une capitalisation boursière
de 72,3 milliards de dollars au Nasdaq à New York, avec une action passée d’environ 30 dollars il y a cinq ans à près de 150 dollars aujourd’hui. En un an, le titre a bondi de 40 %. Ayant pris à temps le tournant de la dématérialisation des logiciels, Adobe est passé avec succès de la vente packagée en magasins à la vente d’abonnements en ligne grâce au mode Software-as-a-Service (SaaS) et maintenant le cloud computing. Depuis janvier dernier, la fameuse Creative Suite – incluant Photoshop, Acrobat, InDesign, Illustrator, Premiere Pro ou encore Typekit – n’est plus commercialisée.
La version 6, disponible depuis cinq ans, a été la dernière à être vendue en boîte.

Abonnements en cloud : 80 % des revenus
Cette année marque donc pour Adobe le basculement complet de son modèle économique dans le nuage informatique. Avec Creative Cloud, ses applications mises
à jour sans surcoûts sont désormais disponibles « exclusivement » via un abonnement (de 23,99 à 66,99 euros par mois) qui comprend aussi des services de tutoriels, des modèles intégrés ou encore – via Adobe Stock et Fotolia – 60 millions d’images, d’illustrations vectorielles, de vidéos et d’éléments en 3D – tous libres de droits. Adobe Sensei marque aussi l’offensive de la firme de San José dans la création complexe à partir d’intelligence artificielle (IA), de marchine learning et de deep learning. Adobe table ainsi sur ses revenus annuels récurrents – ou ARR pour « Annualized Recurring Revenue » – afin de pérenniser sa rentabilité. Les abonnements dépassent pour la première fois cette année les 80 % du chiffre d’affaires annuel (contre 78 % en 2016, par rapport aux 50 % de 2014) et le secteur des médias numériques y contribuent à plus des deux-tiers (plus de 3,3 milliards de dollars en 2016). A la fois présent dans
les médias numériques et le marketing digital, le groupe dirigé par Shantanu Narayen s’adresse à une vaste clientèle, ce qui en fait sa force : créateurs, graphistes, web designers, photographes, cinéastes, développeurs d’applications, professionnels des médias, éditeurs, agences de communication, mais aussi responsables marketing, publicitaires ou encore annonceurs. Adobe est du coup devenu un acteur majeur du
Big Data, avec plus de 90 trillions de transferts de données par an revendiqués.

Mais l’éditeurs des créateurs entend aussi séduire plus que jamais le grand public, comme l’a expliqué le PDG Shantanu Narayen le 19 septembre dernier, lors de la présentation de ses résultats financiers « record » pour le troisième trimestre : « Nous sommes en train de nous étendre dans l’espace créatif bien au-delà de notre base loyale de professionnels. Que cela soit pour “designer” un blog personnel ou pour produire un film court, les capacités de Creative Cloud se développent pour s’adresser aux besoins des jeunes d’aujourd’hui, des experts en médias sociaux et des créatifs enthousiastes, tout en repoussant plus loin les frontières technologiques pour nos pros créatifs les plus exigeants ». Ayant rencontré ses premiers succès sur les ordinateurs de bureau des graphistes professionnels, Adoba a su élargir sa base de clientèle au grand public, doté de tablettes et smartphones. Par exemple, Photoshop se décline en plusieurs applications mobiles telles que Photoshop Sketch, Photoshop Mix, Photoshop Lightroom ou encore Photoshop Fix. Mais c’est dans la création vidéo qu’Adobe voit la demande exploser avec pour les professionnels Premiere Pro, mais aussi Premiere Clip pour « créer des films à la volée à partir d’un smartphone » ou Adobe Spark pour
« créer des publications et graphismes pour les réseaux sociaux, des récits web et des vidéos animées », sans oublier des outils de réalité virtuelle et le 360 degrés renforcés par l’acquisition en juin dernier de la technologie Skybox intégrée dans Premiere Pro
et After Effects. La prochaine conférence annuelle Adobe Max, du 18 au 20 octobre prochains, révèlera son lot de nouvelles versions et applications. Elle devrait aussi sonner le glas du logiciel Flash Player qu’Adobe arrêtera définitivement en 2020 : l’annonce de la fin de ce lecture de vidéo – de moins en moins utilisés sur les navigateurs web – a été faite fin juillet. La croissance de Document Cloud, le pendant de Creative Cloud, permet à Adobe de capitaliser sur son célèbre logiciel Acrobat, devenu standard international dans la création et la lecture de documents, et sur son format PDF créé il y a maintenant 25 ans. Avec Adobe Scan, le PDF s’est aussi démocratisé sur les mobiles. Pour les entreprises, Adobe Sign permet la signature électronique de documents.
Dans le marketing digital, cette fois, où l’on retrouve des outils de communication,
de publicité et de mesure d’audience, la concurrence est plus rude puisqu’Adobe se retrouve face à aussi bien IBM, Oracle ou Salesforce ou SAP que Google ou Yahoo. Mais ses acquisitions successives ces dernières années lui permettent de réaliser 30 % de son chiffre d’affaires dans cette activité. Sa plus grosse acquisition fut celle en 2009 d’Omniture, société spécialisée dans les logiciels de mesures d’audience publicitaire sur Internet, pour 1,8 milliard de dollars. Elle fut suivie pas plusieurs achats de moindre ampleur entre 2010 et 2012 (Day Software, Demdex, Auditude et Efficient Frontier). En 2013, Adobe s’est emparé pour 600 millions de dollars de la société française Neolane spécialisée dans le marketing digital. Puis, après avoir racheté en 2015 Fotolia pour 800 millions de dollars, Adobe a jeté son dévolu l’an dernier sur TubeMogul, un éditeur de logiciel de publicité programmatique, en déboursant 549 millions de dollars.

1,7 Mds $ de cash : nouvelles acquisitions ?
Au total, selon les calculs de Edition Multimédi@, Adobe a investi en moins de dix ans quelque 4 milliards de dollars dans sa croissance externe. Et sa marge de manœuvre reste aujourd’hui intacte ; sa trésorerie a même grossi ces derniers mois en passant
de 1 milliard de dollars fin 2016 à 1,7milliard de dollars de cash disponible au 1er septembre dernier. @

Charles de Laubier

Le marché français du jeu vidéo fait fi de la crise et s’apprête à atteindre 3 milliards d’euros cette année

Pendant que la crise économique perdure, les Français s’amusent. Les jeux vidéo ont généré en 2015 un chiffre d’affaires en croissance de 6 % à 2,87 milliards d’euros et devraient franchir la barre des 3 milliards cette année. C’est un secteur cyclique soutenu par les pouvoirs publics.

« La transition vers les consoles de génération 8 est arrivée à son terme. Le marché a définitivement basculé vers ce 8e cycle. Sur les consoles de salon, nous constatons une migration du public très rapide entre la génération 7 et une génération 8 en très forte croissance », constate Jean-Claude Ghinozzi (photo), président du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (Sell) et par ailleurs directeur de la division grand public de Microsoft France.

En attendant la 9e génération
Le passage à la 8e génération de consoles de salon – avec en tête les trois ténors du marché que sont la Wii U de Nintendo lancée fin 2012 après la 3DS, suivie fin 2013 par la PlayStation 4 (PS4) de Sony alors déjà présent avec la PS Vita, ainsi que par la Xbox One de Microsoft – a été marqué par une mutation à risques du 10e Art vers la dématérialisation, les jeux multijoueurs en ligne et la « gratuité » avec option d’achat en free-to-play. Tandis que de nouveaux entrants – Valve, nVidia, GameStick, eSfere, Razer Edge, Bluestacks encore Ouya – ont tenté de bousculer les positions dominantes. Or, malgré la décroissance des ventes de consoles de -6 % à 712 millions d’euros, recul dû à la « chute rapide plus forte que prévue » de – 69 % du chiffres d’affaires généré par la 7e génération en 2015, le marché global du jeu vidéo en France tire quand même largement son épingle… du jeu en cumulant 2,87 milliards d’euros de revenus, en augmentation de 6 % malgré un contexte générale la crise économique.

« L’année 2016 et l’avenir du secteur en général sont très bien orientés », assure Jean-Claude Ghinozzi, qui anticipe une troisième année de croissance mais sans avancer de chiffres. Cependant, si le marché français du jeu vidéo ne fait ne serait-ce que 5 % de croissance en valeur cette année, la barre des 3 milliards d’euros sera atteinte. Les professionnels du jeu vidéo s’accordent à dire que le marché des consoles de jeux vidéo fonctionne par cycles : « Chaque génération a permis de doubler le chiffre d’affaires de l’industrie ». Cela voudrait-il dire qu’à l’issue de la 8e génération en cours (voir illustration page suivante), laquelle devrait prendre fin d’ici trois ans ou plus, la France du jeux vidéo pèsera environ 5 milliards d’euros entre 2018 et 2020 ? « Nous ne pouvons que l’espérer ! », avait répondu à Edition Multimédi@ l’ancien président du Sell, David Neichel, actuel vice-président Europe d’Activision Blizzard (1).
Pour l’heure, l’année 2016 devrait voir l’arrivée de la nouvelle console de jeux de Nintendo et le lancement prochain des casques de réalité virtuelle. « A court terme, le marché devrait accueillir différentes propositions de casques de réalité virtuelle, très attendue par les joueurs, et un développement du game streaming [ou cloud gaming, ndlr], qui devraient générer des revenus additionnels. De nombreux jeux exploitant pleinement les ressources de la génération 8 de consoles sont également très atten-dus », a expliqué Jean-Claude Ghinozzi, le 9 février dernier, lors de la présentation de la septième édition de « L’Essentiel du jeu vidéo » (2). Rien que sur les consoles, il s’en est vendu l’an dernier un total de 2,46 millions d’unités en France, dont 1,57 million de 8e génération. Le Sell ne confirme pas que la PS4 de Sony s’est la mieux vendue en 2015.

Nintendo et Electronic Arts en tête
Sur le périmètre « logiciels consoles et jeux sur ordinateur », le japonais Nintendo est
le numéro un en France – en volume sur le marché physique – devant les américains Electronic Arts et Activision Blizzard, euxmêmes suivis par le français Ubisoft. En revanche, Nintendo est second sur le même périmètre mais en valeur cette fois, Electronic Arts étant en tête. Le japonais surfe notamment sur sa célèbre franchise Pokémon déclinée non seulement en jeux vidéo mais aussi depuis 1997 en séries télévisées. D’autant que l’année 2016 sera marqué par le vingtième anniversaire des Pokémon justement. Mais c’est surtout avec sa prochaine console de jeu au nom de code « NX » et sur la promesse de jeux sur smartphones à partir de mars que le géant vidéoludique de Tokyo est attendu au tournant pour redynamiser ses ventes, et par là même de tirer le marché français vers le haut.
Les logiciels « physiques » de jeu vidéo (sur CD, DVD ou cartouches) pèsent maintenant moins de la moitié du marché français, soit 46 % du chiffre d’affaires total, tandis que les jeux dématérialisés – téléchargeables et jouables en ligne et en streaming – atteignent 40 %. Et il y a fort à parier que les jeux online – boostés par
le cloud gaming et les compétitions sportives en ligne ou e-sport (voir encadré page précédente) – génèreront, pour la première fois cette année, plus de la moitié des revenus des logiciels de jeux. Ce basculement du physique vers le online sera-t-il destructeur de valeur, comme ce fut le cas dans la presse et la musique, voire actuellement dans le cinéma et l’audiovisuel ? Cela fait partie des incertitudes du secteur. Quant aux casques de réalité virtuelle, très attendus pour ces prochains mois par ceux qui voudront s’immerger dans des jeux vidéo à 360 degrés, ils devraient abonder dans le sens de la croissance du secteur. Le CES de Las Vegas en janvier a donné leur coup d’envoi et leur commercialisation débute avec l’Oculus Rift de Facebook fin mars dans une vingtaine de pays dont la France. Mais le prix (599 dollars) fixé par le réseau social de Mark Zuckerberg, lequel avait racheté Oculus pas moins de 2 milliards de dollars, devrait en dissuader plus d’un. Samsung commercialise déjà Gear VR, notamment pour smartphones. Google se fait les yeux avec un casque en carton, Cardboard, également pour smartphones. Sony finalise la PlayStation VR (ex-projet « Morpheus »), dont les ventes débuteront « au cours du premier semestre 2016 ». C’est du moins ce qu’a promis Andrew House, le patron des jeux vidéo de Sony lors du Paris Games Week d’octobre dernier. Microsoft mise sur ses lunettes de réalité virtuelle Hololens, encore en prototype, qui projettent des hologrammes devant celui qui les porte. Tandis qu’Apple serait en train de concevoir son propre casque de réalité virtuelle, selon le Financial Times. Le taïwanais HTC est également sur les rangs. La réalité virtuelle touchera non seulement les jeux vidéo mais aussi la production audiovisuelle (fictions, documentaires, publicités, …), @

Charles de Laubier

ZOOM

L’Etat au petits soins avec le jeu vidéo
Le Premier ministre Manuel Valls a confié à deux parlementaires – le député (UDI) des Alpes- Maritimes, Rudy Salles, et le sénateur (PS) de Saône-et-Loire, Jérôme Durain – « une mission temporaire ayant pour objet de proposer un cadre législatif et réglementaire favorisant le développement en France des compétitions de jeux vidéo » (selon les propres termes des deux décrets respectifs signés de sa main et datés du 18 janvier 2016). Matignon a commencé des réunions de travail avec les deux parlementaires, lesquels devront remettre leurs proposition d’ici juin prochain.
Sans attendre, le projet de loi « Economie numérique » – adopté par les députés le
26 janvier et en vue pour le Sénat au printemps – prévoit déjà (article 42) un cadre juridique pour le esport, avec un « agrément délivré aux organisateurs de compétitions de jeux vidéo » par le ministre chargé de la Jeunesse, et une « liste des logiciels de loisirs » autorisés.
Cette pratique est en plein boom. Twitch, la plateforme spécialisée dans la diffusion de parties de jeux vidéo en ligne, a été rachetée en août 2014 par Amazon pour 970 millions de dollars. Pour le concurrencer, Google a lancé l’an dernier YouTube Gaming. Et en octobre, Microsoft a inauguré en France sa propre compétition baptisée « Xbox Elite Series ».
L’industrie française du jeu vidéo trouve depuis longtemps une oreille attentive au sein de l’Etat. Elle bénéficie ainsi d’un crédit d’impôt jeu vidéo (CIJV) depuis 2008, d’aides du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et du soutien à l’export. Ce soutien fiscal pour les dépenses de création de jeux vidéo a été étendu et assoupli par décret (3) du 23 juin 2015. @