Traque anonyme par des cookies publicitaires : l’Europe harmonise l’information aux internautes

Tandis que les navigateurs web Google, Safari, Firefox ou Edge ont proscrit les cookies publicitaires, les sites web continuent le suivi à la trace des internautes mais de façon anonyme, pour peu que ces derniers y aient consentis. Encore faut-il qu’ils soient bien informés avant de décider.

Pour le commissaire européen Didier Reynders (photo), en charge de la Justice (protection des consommateurs comprise), c’est l’aboutissement de longs mois de réflexion, avec les professionnels concernés, sur la manière de mieux informer les consommateurs avant de choisir s’ils acceptent – ou pas – d’être suivis à la trace lors de leur navigation sur Internet. Même si l’année 2024 annonce la fin généralisée des cookies publicitaires, les internautes ont la possibilité de consentir à livrer des données anonymes les concernant à des fins publicitaires. L’Union européenne (UE) veut harmoniser les conditions d’informations des consommateurs du Net avant de donner ou pas leur accord.

Des principes finalisés en janvier 2024
Continuer à être « tracké » ou pas ? Telle est la question. Avant de donner leur consentement individuel à chaque fois qu’ils se rendent sur un site web ou une application, les internautes européens – au nombre de 404 millions dans l’UE (1) – doivent être mieux informés. C’est l’objectif de la « réflexion sur la façon de mieux habiliter les consommateurs à faire des choix efficaces concernant les modèles de publicité basée sur le suivi » initiée il y a près d’un an par la Commission européenne et intitulée « Cookie Pledge » – en français, « Engagement en matière de cookies »).
Ce sont des principes qui devront être appliqués et respectés dans les Vingt-sept par l’écosystème du Net composé des éditeurs de sites web (ou d’applications mobiles) et des annonceurs publicitaires. Ces engagements complèteront les obligations imposées par la directive « ePrivacy » (2) et le règlement général européen sur la protection des données (RGPD), sous peine de sanctions financières infligées par les « Cnil » européennes (3).

La disparition prochaine de Vivendi signe l’échec de la stratégie de synergies d’Arnaud de Puyfontaine

C’est un échec pour Arnaud de Puyfontaine, bras droit de Vincent Bolloré et stratège des synergies au sein de Vivendi. La convergence entre les métiers d’édition, de publicité et de médias n’a pas porté ses fruits, ni au sein du conglomérat ni en Bourse. L’éclatement de ses activités met fin à l’aventure Vivendi.

Avec Vincent Bolloré, ce n’est pas « Veni, vidi, vici » (le « Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu » cher à Jules César), mais plutôt « Veni, vidi, vixi » qui, en paraphrasant Victor Hugo, pourrait devenir « Vivendi est venu, Vivendi a vu, Vivendi a vécu ». Après plus de quinze ans de valorisation boursière décevante, et malgré la scission en septembre 2021 d’Universal Music, qui était soi-disant « l’arbre qui cachait la forêt », le président du directoire de Vivendi (« la forêt »…), Arnaud de Puyfontaine (photo), a échoué à faire un groupe intégré de la maison mère de Canal+/ StudioCanal, d’Editis (deuxième français de l’édition revendu en juin 2023 à Daniel Kretinsky pour pouvoir racheter le numéro un de l’édition Hachette), du groupe de presse Prisma Media et du publicitaire Havas. Dix ans après la prise de contrôle de Vivendi par Vincent Bolloré, ce dernier a décidé de façon radicale d’envisager le démembrement du groupe de l’avenue de Friedland (où est basé historiquement le siège social du conglomérat depuis l’époque de Jean-Marie Messier). Son fils Yannick Bolloré, président du conseil de surveillance de Vivendi, et Arnaud de Puyfontaine lui-même ne sont à l’origine de ce revirement stratégique (1). Passée la surprise générale, les actionnaires en sauront plus sur ce projet de split lors de la présentation des résultats annuels 2023 prévue en mars prochain.

Vivendi ne sera pas le « Disney européen » rêvé par Vincent Bolloré
Pourtant, lors de la finalisation du « rapprochement » entre Vivendi et Lagardère le 21 novembre dernier – il y a à peine 55 jours ! –, le groupe de Vincent Bolloré se « réjoui[ssait] » encore : « Cette opération lui confère une toute nouvelle dimension en confortant ses positions d’acteur majeur de la culture, des médias et du divertissement, et en devenant un leader mondial de l’édition, du travel retail et des expériences ». Ce qui allait dans le sens de la stratégie de convergence des contenus que s’échinait à mettre en œuvre Arnaud de Puyfontaine (« ADP ») depuis 2014 pour tenter de concrétiser le rêve de son principal actionnaire Bolloré de faire du conglomérat multimédia un « Disney européen ».

Publicité et live : Netflix devient plus que jamais un concurrent frontal de la télévision traditionnelle

Publicité, live streaming, mesure d’audience : Netflix marche de plus en plus sur les plates-bandes des chaînes de télévision traditionnelles – au point de menacer leur avenir dans leurs pré-carrés nationaux. Et Nielsen commence à comparer la première plateforme mondiale de SVOD avec les TV hertziennes ou câblées.

« Nous avons lancé notre partenariat de mesure [d’audience] avec Nielsen aux Etats-Unis ce mois-ci, en octobre. Nous sommes donc très enthousiastes. Nous avons une longue liste d’autres partenaires dans d’autres pays avec lesquels nous devons offrir la même capacité ; alors nous sommes impatients de le faire », a annoncé le 18 octobre Gregory Peters (photo), co-PDG (1) de Netflix, lors d’une conférence téléphonique sur les résultats du troisième trimestre.
La première plateforme mondiale de la SVOD est décidée à se mesurer aux chaînes de télévision traditionnelles, au sein même du même agrégat audiovisuel – « The Gauge » – de l’institut américain de mesure d’audience Nielsen. Une révolution dans le « AAL », qui est aux Etats-Unis ce que le « PAF » est à la France (2). Les premiers résultats de « l’engagement » des téléspectateurs aux Etats-Unis portent sur le mois de septembre et montrent que Netflix s’arroge à lui seul chaque jour 7,8 % en moyenne de la part du temps d’écran TV américain. Non seulement, la plateforme de SVOD cocréée il y a plus de 15 ans par Reed Hastings coiffe au poteau les chaînes de télévision traditionnelles, mais elle se place aussi en seconde position – juste derrière YouTube – des grands streamers aux Etats-Unis. Dans le AAL, le streaming vidéo évolue en tête de l’audience audiovisuelle avec un total de 37,5 % de part du temps d’écran TV américain, bien devant la TV par câble (29,8 %) et la TV hertzienne (23 %).

Accord pluriannuel entre Nielsen et Netflix
C’est la première fois que Netflix voit ses contenus en streaming (séries, films, directs) mesurés par le géant américain de la mesure d’audience Nielsen aux côtés des mesures d’audience des programmes des chaînes linéaires de télévision. Octobre marque donc le mois de la concrétisation chiffrée aux Etats-Unis de l’accord pluriannuel qui avait été annoncé par Nielsen et Netflix en janvier dernier. « The Gauge » a d’abord été déployé au Mexique et en Pologne, les deux autres pays concernés par cet accord sans précédent et où les premiers résultats d’audience « TV & Streaming » ont été divulgués à partir du mois de mai (3).

Elon Musk reste déterminé à faire de X (ex-Twitter) une appli tout-en-un en s’inspirant de WeChat

Cela fera un an en octobre que l’homme le plus riche du monde (1) a racheté Twitter 44 milliards de dollars. Et il y a près de quatre mois, il a recruté Linda Yaccarino comme patronne de X pour transformer avec elle l’ex-Twitter en « everything app ». Elon Musk prend modèle sur le chinois WeChat.

Souvenez-vous. Elon Musk avait annoncé la couleur en mai dernier avec la nomination de Linda Yaccarino (photo) à la tête de X Corp (ex- Twitter) : « Je suis ravi d’accueillir Linda Yaccarino en tant que nouvelle PDG de Twitter ! @LindaYacc [son ancien compte devenu depuis @lindayaX, ndlr] se concentrera principalement sur les opérations commerciales, et moi sur la conception de produits et les nouvelles technologies. Au plaisir de travailler avec Linda pour transformer cette plateforme en X, l’application universelle » (2).

Bientôt sur X : appels vidéo et e-paiement
Dans une interview accordée le 10 août dernier à la chaîne américaine CNBC, Linda Yaccarino a rappelé cet objectif assigné par l’hyperactif multimilliardaire : « Elon parle depuis très longtemps de X, l’application de tout [everything app]. J’ai rejoint l’entreprise pour m’associer à Elon afin de transformer Twitter en X, l’application complète ». Cette stratégie de transformation de Twitter en une appli tout-enun baptisée X est en marche depuis l’acquisition du site de microblogging en octobre 2022. « Pensez à ce qui s’est passé depuis l’acquisition, a-t-elle rappelé. Les expériences et l’évolution des vidéos en long format et des articles, s’abonner à ses créateurs préférés, qui gagnent maintenant leur vie sur la plateforme (3) ». Et de lever le voile sur la suite : « Bientôt, vous serez en mesure de faire des appels de chat vidéo sans avoir à donner votre numéro de téléphone à quiconque sur la plateforme ».
Autre service en vue : permettre les paiements entre les utilisateurs et les amis et les créateurs. Plus que jamais l’ex-Twitter veut devenir une plateforme « all-in-one ». « Le changement de nom représentait vraiment une libération de Twitter, une libération qui nous a permis d’évoluer au-delà d’un état d’esprit et d’une pensée hérités, s’est-elle félicitée. […] Cela va changer notre façon de nous rassembler, de nous divertir, de faire des transactions sur une seule plateforme ». Elon Musk et Linda Yaccarino se sont partagé les rôles au sein de X Corp : conception des produits et nouvelles technologies pour le premier, gestion d’entreprise, partenariats, services juridiques et ventes pour la seconde.

Plus que 33 millions d’utilisateurs mensuels pour le réseau social BeReal : bientôt de la pub ?

Créée en 2020, l’application française BeReal de partage de photos — prises chaque jour à un instant précis avec les deux objectifs du smartphone (avant et arrière pour capturer l’environnement) –est retombée à 33 millions d’utilisateurs par mois, susceptibles d’intéresser de futurs annonceurs. BeReal, l’application de partage de photos prises en « dual camera » (utilisant les deux objectifs, avant et arrière, du smartphone pour capter l’environnement de l’utilisateur), teste en Grande-Bretagne une nouvelle fonctionnalité baptisée « RealPeople ». Il s’agit d’une timeline (un flux ou fil chronologique) de photos prises sans filtres ni retouches par des personnalités telles que artistes, athlètes, acteurs ou activistes. Une appli gratuite à monétiser « Avec RealPeople, nous voulons essayer d’éliminer de la société l’idée que les personnalités publiques vivent dans un univers alternatif et filtré. (…) Tout comme vous, ils partageront de véritables aperçus non filtrés de leur vie quotidienne. », a expliqué BeReal le 1er mai dernier (1). Plus que jamais, BeReal – application créée en 2020 par deux développeurs français, Alexis Barreyat et Kévin Perreau (photo) – ne veut pas être un réseau social comme les autres, mais une sorte d’anti-Instagram voire d’anti-TikTok. Qu’il soit célèbre ou inconnu, l’utilisateur de ce jeune média social est appelé – une fois par jour et en deux minutes après avoir reçu une notification – à prendre une double photo sur le vif, donc plutôt spontanée : la double-photo fait apparaître à la fois l’environnement de l’utilisateur (cliché pris avec l’objectif arrière du smartphone et son selfie (pris en même temps par l’objectif avant). Mais la start-up parisienne – bientôt licorne avant une éventuelle cotation en Bourse – ne veut pas que l’on se méprenne sur la raison d’être de son tout nouveau fil accessible dans l’onglet Discovery : « Nous espérons avoir un impact positif sur la société. (…) RealPeople n’a pas vocation à influencer, d’amasser des likes ou des commentaires, ou de promouvoir des marques. Vous ne verrez pas des photos photoshoppées parfaites, ni des recommandations de produits, ni des publicités clandestines déguisées en posts ». Est-ce à dire qu’il y aura des publicités bien identifiées dans RealPeople en particulier voire dans BeReal en général ? Contacté par Edition Multimédi@, le cofondateur président Kévin Perreau (27 ans), premier actionnaire de BeReal (30,8 % du capital et 40 % des votes) ne nous a pas répondu. Or la question de la monétisation de BeReal se pose, l’application gratuite ayant vu sa fréquentation atteindre un pic en août 2022, à 73,5 millions d’utilisateurs mensuels selon BusinessofApps, en plein emballement médiatique. Mais depuis, « cycle de la hype » oblige, c’est la désillusion, avant une éventuelle remontée. BeReal est tombé à 47,8 millions d’utilisateurs mensuels (2) en février 2023, puis à 33,3 millions en mars dernier (3). Avec près de 80 millions de téléchargements cumulés en trois ans d’existence (73,1 millions à mars 2023, dont 5,9 millions en France), BeReal a perdu des millions de mobinautes en route, alors que son public est jeune (4). L’audience quotidienne – indicateur très suivi par les annonceurs – a elle aussi chuté en-dessous des 10 millions d’utilisateurs par jour (5), à 6 millions en mars dernier, alors qu’ils étaient 20 millions en octobre 2022. De la publicité est-elle envisageable à ce stade ? Après trois levées de fonds réalisées entre mai 2021 et mai 2022 pour un total de plus de 100 millions de dollars, dont 60 millions de dollars il y a an selon TechCrunch, la SAS BeReal a été valorisée 600 millions de dollars l’an dernier en pleine apogée. Reste à savoir si la potentielle licorne française les vaut encore aujourd’hui. A cette désaffection, s’ajoute le fait que TikTok avec « TikTok Now » (ByteDance), Instagram (Meta), and Snapchat (Snap) ont depuis copié la fonction « dual camera » qui était la marque de fabrique du petit réseau social français. BeReal a subi le même sort que l’application de réseau social audio Clouhouse, lancée avec succès par la start-up californienne Alpha Exploration Co, mais retombée dans le cycle de la hype après avoir été copiée elle aussi par les géants du Net (6). BeReal et Clubhouse ont aussi en commun d’avoir eu dans leur premier tour de table financier le fonds d’investissement de Andreessen Horowitz (7). BeReal a en outre obtenu le soutien du britannique Accel Partners, du russe DST Global (enregistré aux Iles Caïmans) ou encore du français Kima Ventures (Xavier Niel). Ces partenaires financiers remettront-ils au pot pour assurer le développement de BeReal et sa monétisation ? Nouvelles fonctions pour plus d’audience Dans un post récent, l’équipe de BeReal – indiquant au passage que ses effectifs ont dépassés les 50 employés – prévient que l’été sera chaud en annonces (8). La multiplication de fonctionnalités nouvelles, comme RealChat (messagerie instantanée), RealPeople (attirer des fans), Bonus BeReal (moments authentiques en journée) ou encore BeReal Audio (partager sa musique du moment écoutée sur, pour l’instant, Spotify et Apple Music), vise notamment à accroître son audience quotidienne – le nerf de la guerre. @

Charles de Laubier