Pour ses 15 ans, le bitcoin – dont le créateur reste le plus grand mystère du capitalisme – va faire son 4e halving

Le bitcoin, la plus célèbre des cryptomonnaies lancée en 2009 par un illustre inconnu appelé Satoshi Nakamoto – le plus grand mystère du capitalisme –, a battu record sur record en mars 2024. Et son 4e halving (« réduction de moitié ») attendu le 19 avril 2024 risque de réserver des surprises à ses investisseurs.

Vers le 19 avril 2024, soit dans une dizaine de jours à partir de ce n°319 de Edition Multimédi@ daté du 8 avril, le bitcoin va faire son 4e halving. Cet événement inscrit dans l’ADN du bitcoin – ou plutôt dans sa blockchain éponyme – prévoit, tous les quatre ans, une « réduction de moitié » (signification en français de halving) du nombre de nouveaux bitcoins mis en circulation et sous forme de récompense aux « mineurs ».
Ce sont ces derniers (entreprises ou individus) qui minent la cryptomonnaie pour que les bitcoins existent. Les mineurs sont rétribués pour cette fonction essentielle – demandant d’importantes puissances de calcul informatique très énergivores – par l’octroi d’un certain nombre de bitcoins prédéfini. Ainsi, avec ce 4e halving, la rémunération des mineurs va baisser de moitié pour la quatrième fois depuis le lancement du bitcoin le 3 janvier 2009 : à cette date originelle, le dénommé Satoshi Nakamoto (photo) – dont personne ne connaît l’identité (1) – a été le tout premier mineur de bitcoins (2), au moment où la création d’un nouveau « bloc » sur la chaîne de blocs (la blockchain bitcoin) était payée 50 bitcoins (BTC). Ensuite, lors du 1erhalving le 28 novembre 2012, la rétribution par bloc créé a été réduite de moitié, à 25 BTC. Puis, au 2e halving du 9 juillet 2016, la récompense a été ramenée à 12,5 BTC.

Les 20 millions de BTC atteints a priori en 2026
A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous sommes encore à l’ère du 3e halving depuis le 11 mai 2020, avec 6,25 BTC le bloc miné. Quant à la date du 4e halving, elle est estimée autour du 19 avril 2024 puisqu’un halving a été programmé par l’illustre inconnu Satoshi Nakamoto pour intervenir tous les 210.000 blocs créés sur la blockchain bitcoin. A cette prochaine échéance, un total cumulé de 840.000 blocs aura été atteint avec en tout 19,687 millions de bitcoins en circulation – 15 ans et trois mois après le lancement de la reine des cryptomonnaies. Selon les calculs de Edition Multimédi@, la barre des 20 millions de bitcoins devrait être franchie à mi-parcours du prochain cycle quadri-annuel : soit en 2026. C’est donc à partir du 840.000e bloc, aux alentours du 19 avril prochain, que les mineurs ne recevront plus que 3,125 BTC par bloc créé. Ce tarif-là restera valable pour les 210.000 prochains nouveaux blocs, à savoir jusqu’en 2028. Et ainsi de suite, au rythme d’un halving tous les quatre ans, jusqu’en… 2140, année où sera atteint un total cumulé de 6.930.000 blocs et où la rémunération des mineurs sera réduite à zéro (3).

Capitalisation record du BTC : 1.410 milliards $
La seule rétribution que conserveront alors les mineurs sera la commission qu’ils perçoivent toujours à chaque transaction de bitcoins minés effectuée dans chacun de leurs blocs, dont ils sont à l’origine dans la blockchain. Ces frais de transaction et de sécurisation de la cryptomonnaie dans la chaîne de blocs, appelés aussi « frais de gaz », perdureront, eux, pour assurer la pérennité du bitcoin. Pour la petite histoire, la toute première transaction de BTC (transfert de bitcoin d’une adresse cryptographique à une autre dans la blockchain éponyme) aurait été faite en janvier 2009 par Satoshi Nakamoto lui-même au profit d’un Américain, Hal Finney, développeur informaticien et cryptographe (décédé en 2014).
Si le 4e halving fait couler beaucoup d’encre, c’est qu’il est non seulement précédé depuis le début de cette année par les records sur records battus par le cours du bitcoin, mais aussi parce que cette période quadri-annuel de halving s’accompagne à chaque fois d’une forte hausse de la valeur du BTC – sans exclure des chutes libres comme le 2 avril dernier. En outre, la dizaine d’ETF indexés sur le bitcoin qui ont été autorisés en janvier aux Etats-Unis (nous y reviendrons) ont apporté du crédit à la numéro une mondiale des cryptomonnaies. Toutes les conditions sont donc réunies pour expliquer le « rallye » du BTC observé depuis quelques mois, sans que l’on sache si « plus dure sera la chute » après le 4e halving du 19 avril 2024.
Pour l’heure et depuis l’automne dernier, le BTC est dans un cycle « bullish » (haussier). Après avoir battu son propre record historique du 10 novembre 2021 (68.991 dollars le bitcoin ou 58.000 euros), en affichant un nouveau record historique le 14 mars 2024 (73.573 dollars le bitcoin ou 68.055 euros), le bitcoin a conforté dans le même temps sa position de « valeur refuge » – à l’instar de l’or. Et ce, dans un contexte de forte inflation des prix à la consommation qui perdure et à l’instabilité géopolitique due aux guerres en Ukraine et en Israël/Palestine. Les deux grands gagnants de ce climat incertain qui plane sur le capitalisme sont justement l’or et, toutes proportions gardées, le bitcoin. Qui eut cru à une telle remontada du BTC après l’hivercrypto de 2022 ? Au pire moment du crypto-krach, le bitcoin est descendu à 16.611 dollars (13.000 euros) le 24 novembre 2022. Entre ce creux et le nouveau pic historique, cela correspond à un bon de 342,92 % en 16 mois ! La capitalisation du bitcoin – toujours la plus élevée de toutes les cryptomonnaies – a même inscrit un nouveau record historique le 26 mars 2024 avec 1.410 milliards de dollars investis en BTC (1.300 milliards d’euros) : au moment où nous bouclons ce n°319 de Edition Multimédi@ le 5 avril 2024, sa capitalisation est de 1.405 milliards de dollars (4), ou 1.297 milliards d’euros. Elle se place en septième position par rapport aux plus importantes capitalisations boursières – devant Meta ! (5).
Où qu’il soit et quel qu’il soit, Satoshi Nakamoto peut aussi remercier les Etats-Unis pour l’engouement planétaire apporté à sa création financière décentralisée. Le fait que le gendarme américain de la Bourse – la SEC (Securities and Exchange Commission) – ait finalement autorisé, le 10 janvier 2024, les onze premiers « ETF bitcoin spot » (Exchange Traded Fund au comptant indexé directement sur la reine des cryptomonnaies), cela a « crédibilisé » le BTC. Ce fut aussi un peu comme si le bitcoin faisait indirectement son entrée en Bourse (6). Et le succès de ces ETF bitcoin, auprès d’un public toujours plus élargi, est au rendez-vous. Les onze fonds d’investissement américains émetteurs – Ark Invest, Bitwise, BlackRock, Fidelity, Franklin Templeton, Grayscale, Hashdex, Invesco, WisdomTree, Valkyrie et VanEck – s’en donnent à cœurjoie : 35,6 milliards de dollars (32,7 milliards d’euros) sous gestion au total au 4 avril 2024 (7). Leurs produits ETF bitcoin au comptant sont même proposés par d’autres établissements financiers et non des moindres, comme Morgan Stanley, Wells Fargo, UBS ou encore Merrill Lynch. Comme les onze fonds achètent, eux, directement des bitcoins, ils participent à faire monter le cours du BTC à des sommets jamais vus jusque-là.
Par exemple, le 10 février 2024, le fonds iShares de BlackRock a acheté massivement plus de 5.200 BTC pour près de 250 millions de dollars. Il n’est pas le seul. A noter que la SEC pourrait, d’ici mai prochain selon différentes sources, autoriser cette fois des « ETF ether spot » indexés sur la seconde plus importante cryptomonnaie au monde, créée en 2015 avec sa blockchain Ethereum par le Russocanadien Vitalik Buterin. Ce qui devrait provoquer une embellie de l’ETH (symbole de cette crypto).

Cryptosphère : 2.500 milliards de dollars !
Et lorsque le bitcoin va, tout va dans la cryptosphère. Et inversement. D’après CoinMarketCap au 5 avril 2024, le marché mondial des cryptomonnaies en compte près de 10.000 (9.456 à ce jour) pour une capitalisation globale de 2.500 milliards de dollars (autrement dit 2,5 trillions de dollars), ou 2.300 milliards d’euros. Mais les cryptos sont encore loin d’atteindre les plus de 100.000 milliards de capitalisation cumulés par toutes les Bourses mondiales. Pour l’instant du moins… @

Charles de Laubier

La disparition prochaine de Vivendi signe l’échec de la stratégie de synergies d’Arnaud de Puyfontaine

C’est un échec pour Arnaud de Puyfontaine, bras droit de Vincent Bolloré et stratège des synergies au sein de Vivendi. La convergence entre les métiers d’édition, de publicité et de médias n’a pas porté ses fruits, ni au sein du conglomérat ni en Bourse. L’éclatement de ses activités met fin à l’aventure Vivendi.

Avec Vincent Bolloré, ce n’est pas « Veni, vidi, vici » (le « Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu » cher à Jules César), mais plutôt « Veni, vidi, vixi » qui, en paraphrasant Victor Hugo, pourrait devenir « Vivendi est venu, Vivendi a vu, Vivendi a vécu ». Après plus de quinze ans de valorisation boursière décevante, et malgré la scission en septembre 2021 d’Universal Music, qui était soi-disant « l’arbre qui cachait la forêt », le président du directoire de Vivendi (« la forêt »…), Arnaud de Puyfontaine (photo), a échoué à faire un groupe intégré de la maison mère de Canal+/ StudioCanal, d’Editis (deuxième français de l’édition revendu en juin 2023 à Daniel Kretinsky pour pouvoir racheter le numéro un de l’édition Hachette), du groupe de presse Prisma Media et du publicitaire Havas. Dix ans après la prise de contrôle de Vivendi par Vincent Bolloré, ce dernier a décidé de façon radicale d’envisager le démembrement du groupe de l’avenue de Friedland (où est basé historiquement le siège social du conglomérat depuis l’époque de Jean-Marie Messier). Son fils Yannick Bolloré, président du conseil de surveillance de Vivendi, et Arnaud de Puyfontaine lui-même ne sont à l’origine de ce revirement stratégique (1). Passée la surprise générale, les actionnaires en sauront plus sur ce projet de split lors de la présentation des résultats annuels 2023 prévue en mars prochain.

Vivendi ne sera pas le « Disney européen » rêvé par Vincent Bolloré
Pourtant, lors de la finalisation du « rapprochement » entre Vivendi et Lagardère le 21 novembre dernier – il y a à peine 55 jours ! –, le groupe de Vincent Bolloré se « réjoui[ssait] » encore : « Cette opération lui confère une toute nouvelle dimension en confortant ses positions d’acteur majeur de la culture, des médias et du divertissement, et en devenant un leader mondial de l’édition, du travel retail et des expériences ». Ce qui allait dans le sens de la stratégie de convergence des contenus que s’échinait à mettre en œuvre Arnaud de Puyfontaine (« ADP ») depuis 2014 pour tenter de concrétiser le rêve de son principal actionnaire Bolloré de faire du conglomérat multimédia un « Disney européen ». Il y a un peu plus de deux ans, le bras droit de Bolloré faisait sien ce rêve synergique, après un premier échec retentissant de Vivendi en 2016 dans le projet avorté de « Netflix latin » envisagé un temps avec le groupe italien Mediaset, appartenant à Sylvio Berlusconi via sa holding Fininvest et nourrissant des ambitions de SVOD européenne via sa nouvelle entité MediaForEurope (MFE).

Pas de « Netflix latin » non plus, split en vue
Le « contrat de partenariat stratégique » du 8 avril 2016 entre Vivendi et Mediaset va rapidement tourner au fiasco (2). L’affaire se terminera devant les tribunaux de Milan et d’Amsterdam (3). A défaut d’« Euroflix » avec Sylvio Berlusconi, Vincent Bolloré se met en tête de faire de Vivendi le « Disney européen » et en confie la tâche à ADP. « J’aime beaucoup un dessin fait en 1957 par Walt Disney (4), que j’ai dans mon bureau, avec Mickey Mouse au milieu et sa vision qui a donné le succès de la Walt Disney Company. Comparaison n’est pas raison, mais, si l’on regarde les valeurs qui ont permis la construction de ce qui est aujourd’hui Disney, la vision de l’ensemble des équipes de Vivendi est de créer un “Disney européen”… », avait avancé le président du directoire de Vivendi, le 12 octobre 2021, lors du festival Médias-en-Seine. ADP y croyait à cette convergence, prenant à témoin le célèbre petit ours Paddington, dont les droits de propriété intellectuelle ont été acquis par StudioCanal en 2016 : « Il s’agit de créer dans l’ensemble de nos métiers des passerelles pour que nos marques et nos projets travaillent ensemble. Par exemple : Paddington est exposé à la fois à travers Canal+ (Paddington 3 a été lancé en production et série de télévision), Editis (pour des livres) et bientôt chez Prisma (pour la presse) », avait-il démontré comme la voie stratégique à suivre pour devenir ce « Disney européen » (5). Vivendi a même été appuyé en 2017 par un jeune candidat à l’élection présidentiel, un certain Emmanuel Macron, ancien ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique (2014-2016) de François Hollande. Parmi les promesses de celui qui deviendra à 39 ans le 8e président de la Ve République : « Créer les conditions de l’émergence d’un “Netflix européen” exposant le meilleur du cinéma et des séries européennes » (6). En vain. Cette ambition politico-culturelle s’est avérée sans lendemain.
Après avoir cédé en 2014 ses actifs télécoms (SFR, Maroc Telecom et GVT), soit après s’être délesté en 2013 de l’essentiel de ses parts dans Activision Blizzard (jeux vidéo), Vivendi devait devenir – selon son nouveau patron Vincent Bolloré, tout fier d’avoir acquis à l’époque Dailymotion – « un groupe mondial, champion français des médias et des contenus ». Mais l’industriel breton ne réussira pas à dissiper le flou stratégique qui entoure son conglomérat (7). Le cours de Bourse de Vivendi et sa capitalisation boursière n’ont cesser de traduire la perplexité des investisseurs sur l’une des plus anciennes valeurs cotées du CAC 40, en tant que groupe issu historiquement de la Compagnie Générale des Eaux et de Vivendi Universal de l’ère Messier.
D’ailleurs, après près d’un quart de siècle de présence, la sortie le 16 juin 2023 de Vivendi de cet indice des plus emblématiques entreprises françaises cotées et son retour le 18 décembre dernier, soit… six mois après, en disent long sur le « Je t’aime, moi non plus » du conglomérat avec les marchés financiers. Rien qu’entre septembre 2021, date de la scission d’Universal Music (encore détenu à hauteur de 10 % du capital), et aujourd’hui, malgré l’annonce en décembre 2023 du split envisagé, Vivendi a vu sa capitalisation boursière s’écrouler – passant de 38 milliards d’euros à seulement 10 milliards (8). On imagine bien Vincent Bolloré – 12e plus grande fortune de France (9) – exaspéré au point de décider le démantèlement de Vivendi décidément toujours maltraité à ses yeux. Le groupe Bolloré détenait un peu plus de 29 % du capital de Vivendi, alors que des rumeurs faisaient état depuis des mois d’une possible OPA de l’actionnaire de référence breton sur le reste du capital du conglomérat. Si le seuil des 30 % du capital était franchi, l’OPA serait obligatoire, ce que ne souhaite pas Bolloré. Pour éviter cette éventualité, le Breton a même cédé quantité de ses propres actions via sa Compagnie de Cornouaille (du nom de la région de Bretagne d’où il est originaire). A défaut d’OPA, le président désenchanté a surpris tout son monde en annonçant le 13 décembre 2023 « étudier un projet de scission de la société en plusieurs entités, qui seraient chacune cotées en Bourse, structurées notamment autour de : Canal+ […], Havas […], [et] une société d’investissement ».

Acquisitions et participations en vue
« Depuis la distribution cotation d’Universal Music Group en 2021, Vivendi subit une décote de conglomérat très élevée, diminuant significativement sa valorisation et limitant ainsi ses capacités à réaliser des opérations de croissance externe pour ses filiales », a justifié le directoire de Vivendi (présidé par ADP) auprès du conseil de surveillance (présidé par Yannick Bolloré). La « société d’investissement », elle, aura vocation à « déten[ir] des participations financières cotées et non cotées dans les secteurs de la culture, des médias et du divertissement » et « inclurait notamment la participation majoritaire dans le groupe Lagardère, un leader mondial dans l’édition et le travel retail ». A suivre… @

Charles de Laubier

Boosté par le cloud et l’IA, Microsoft conteste à Apple sa première place mondiale des capitalisations boursières

Le capitalisme a ses icônes, et la seconde est Microsoft. La valorisation boursière de la firme de Redmond, que dirige Satya Nadella depuis près de dix ans, atteint – au 1er décembre 2023 – les 2.816 milliards de dollars et pourrait bientôt détrôner Apple de la première place mondiale. Merci aux nuages et à l’IA. (Cet article est paru le lundi 4 décembre 2023 dans Edition Multimédi@. L’AG annuelle des actionnaires de Microsoft s’est déroulée comme prévu le 7 décembre) La prochaine assemblée générale annuelle des actionnaires de Microsoft, qui se tiendra le 7 décembre et cette année en visioconférence (1), se présente sous les meilleurs auspices. L’année fiscale 2022/2023 s’est achevée le 30 juin avec un chiffre d’affaires de 211,9 milliards de dollars, en augmentation sur un an (+ 7 %). Le bénéfice net a été de 72,4 milliards de dollars, en légère diminution (- 1 %). Et les résultats du premier trimestre de l’année 2023/2024, annoncé en fanfare le 24 octobre dernier, ont encore tiré à des records historiques le cours de Bourse de Microsoft – coté depuis plus de 37 ans. A l’heure où nous bouclons ce numéro de Edition Multimédi@, vendredi 1er décembre, la capitalisation boursière du titre « MSFT » – actuelle deuxième mondiale – affiche 2.816 milliards de dollars (2) et talonne celle du titre « AAPL » d’Apple dont la première place, avec ses 2.954 milliards de dollars (3), est plus que jamais contestée. Depuis la nomination il y a près de dix ans de Satya Nadella (photo) comme directeur général (4) pour succéder à Steve Ballmer, Microsoft a ainsi vu sa capitalisation boursière multiplié par presque dix. Les actionnaires de la firme de Redmond (Etat de Washington, près de Seattle) en ont pour leur argent (voir graphique), depuis vingt ans qu’elle s’est résolue à leur distribuer des dividendes – ce qui n’était pas le cas avec son cofondateur et premier PDG Bill Gates. Assemblée générale annuelle le 7 décembre Après avoir mis Microsoft sur les rails du cloud en faisant d’Azure – dont il était vice-président avant de devenir directeur général du groupe (5) – sa première vache à lait (87,9 milliards de dollars de chiffre d’affaires lors du dernier exercice annuel), Satya Nadella a commencé à faire de l’IA générative le moteur de tous ses produits et services. « Avec les copilotes, nous rendons l’ère de l’IA réelle pour les gens et les entreprises du monde entier. Nous insufflons rapidement l’IA dans chaque couche de la pile technologique et pour chaque rôle et processus métier afin de générer des gains de productivité pour nos clients », a déclaré fin octobre cet Indo-américain (né à Hyderabad en Inde), qui est aussi président de Microsoft depuis près de deux ans et demi (6). « Copilotes » (copilots) est le terme qu’il emploie volontiers pour désigner les outils alimentés par l’IA destinés à être intégrés à tous les produits et services de l’éditeur du système d’exploitation Windows, des logiciels Office 365, du cloud Azure et des serveurs associés, du navigateur Edge, du moteur de recherche Bing, de la console de jeux vidéo Xbox et de son Cloud Gaming, ou encore du réseau social professionnel LinkedIn. La Française Catherine MacGregor Bref, Microsoft mise plus que jamais sur l’IA générative, directement issue de son partenariat à quelque 13 milliards de dollars (49 % du capital inclus) avec la société californienne OpenAI que redirige à nouveau Sam Altman depuis le 22 novembre (7), grâce aux interventions intéressées de Satya Nadella (8). Ces « copilotes » sont appelés à devenir la nouvelle interface des utilisateurs, particuliers ou entreprises. A 56 ans, le PDG de Microsoft présidera le 7 décembre une assemblée générale annuelle des actionnaires qui s’annonce la plus révolutionnaire et « intelligente » en termes technologique pour l’entreprise, laquelle fêtera son demi-siècle d’existence en avril 2025. Mais Satya Nadella devra aussi donner des gages à ses actionnaires sur la bonne utilisation de l’IA déployées tous azimuts. « Nous reconnaissons également [notre] responsabilité de veiller à ce que cette technologie[de l’IA] qui change le monde soit utilisée de façon responsable. Le travail de Microsoft sur l’IA est guidé par un ensemble de principes fondamentaux : l’équité, la fiabilité et la sécurité, la confidentialité et la sécurité, l’inclusion, la transparence et la responsabilité », ont déclaré les membres du conseil d’administration dans une lettre aux actionnaires datée du 19 octobre (9), en prévision de la prochaine assemblée générale. D’ailleurs, quatre jours avant d’évincer – le 17 novembre et à la surprise générale – son patron Sam Altman (10), l’ancien conseil d’administration d’OpenAI avait reçu une lettre de chercheurs l’avertissant que « l’IA pouvait menacer l’humanité » (11), alors que son patron (réintégré le 22 novembre) développe un projet de super-IA baptisé « Q* » (prononcez « Q-Star ») et relevant de la catégorie des surpuissantes AGI (Artificial General Intelligence). Quoi qu’il en soit, OpenAI aura plus que jamais besoin des superordinateurs de Microsoft accessibles dans le cloud pour lui apporter la puissance de calcul nécessaire. Plus largement, la gouvernance de Microsoft joue la carte de la diversité des activités et des profils. Sur les 12 membres du conseil d’administration, la plupart candidats au renouvellement de leur mandat, 11 sont indépendants. Parmi les deux nouveaux administrateurs indépendants soumis au vote des actionnaires le 7 décembre : une Française, en la personne de Catherine MacGregor (51 ans), née Catherine Fiamma au Maroc, directrice générale de l’énergéticien français Engie, ex-GDF Suez (dans le capital duquel l’Etat français détient toujours une golden share et compte deux administrateurs). Ingénieure CentraleSupélec, elle a passé onze ans chez Schlumberger (devenu SLB). « [Catherine MacGregor] apportera à Microsoft des informations importantes et une expérience mondiale », se félicite déjà le conseil d’administration. C’est la première personnalité française qui entre au conseil d’administration du « M » de GAFAM. Mais elle n’aura pas de rôle opérationnel au sein de la firme de Redmond, dont le seul « Frenchie » à avoir atteint le plus haut niveau de direction chez Microsoft est JeanPhilippe Courtois (près de 40 ans de maison), actuel viceprésident en charge des partenariats nationaux de transformation et membre du comité exécutif. Il fut le deuxième dirigeant le mieux payé de Microsoft (12) Les actionnaires de Microsoft auront, le 7 décembre, un tout premier bilan de la stratégie IA de Microsoft depuis l’accord financier et technologiques avec OpenAI annoncé en janvier dernier (13). Du « ChatGPT » a été injecté partout dans les produits Microsoft, y compris avec l’offre « OpenAI Service ». Avec l’IA, Satya Nadella pense pouvoir atteindre son objectif de «faire d’Azure “l’ordinateur du monde” », le chiffre d’affaires de l’activité cloud ayant dépassé les 110 milliards de dollars sur l’exercice 2022/2023 et Azure représentant plus de 50 % du total. @

Charles de Laubier