10 ans du Digital News Report : le shopping en plus

En fait. Le 10 janvier, le Reuters Institute (for the Study of Journalism), de l’Université d’Oxford, a publié son rapport annuel « Digital News Report » – qui a 10 ans – sur les tendances et prévisions du journalisme, des médias et de la technologie pour 2022. L’information et le e-commerce vont se mélanger.

En clair. « Attendez-vous à trouver des actualités mélangées avec plus de shopping en ligne cette année, alors que Instagram, TikTok, et Snap s’appuient sur le commerce électronique », prévient le Digital News Report annuel, qui est publié depuis maintenant dix ans (2012-2022), avec toujours comme auteur principal Nic Newman. Il est chercheur associé au Reuters Institute for the Study of Journalism (RISJ), partie intégrante de l’Université d’Oxford (1). Ce centre de recherche journalistique se présente aussi comme un think tank, financé par la fondation de l’agence de presse mondiale Reuters (2), concurrente de l’Agence France-Presse (AFP), ainsi que par des médias tels que la BBC, Facebook, Google ou encore le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung. Le rapport 2022 du RISJ souligne pour la première fois que « le Social Shopping décolle » et les médias s’engouffrent dans la brèche.
« Qu’il s’agisse de vêtements de sport ou de maquillage, les consommateurs naviguent, découvrent et achètent de plus en plus de produits sur les plateformes de médias sociaux (…). Certains éditeurs cherchent à encaisser [eux aussi], constate le Digital News Report. La grande question est de savoir si cela fonctionnera pour les éditeurs d’actualités. (…) Le commerce électronique est plus adapté aux marques de style de vie [lifestyle], et les informations de dernière minute [breaking news] sont largement banalisées [commoditised]». Vendre sur les réseaux sociaux du contenu journalistique, comme l’on y vend des vêtements ou de l’électroménager, attire de plus en plus d’éditeurs. Articles, podcasts, courtes vidéos ou newsletters électroniques : les « lecteurs » sont invités à acheter pour s’informer tout en faisant leur shopping.
Les recettes issues du « e-commerce » sont d’ailleurs citées par 30 % des éditeurs comme une source de revenu importante pour 2022. Mais le rapport RISJ ne précise pas s’il s’agit d’activités diversifiées de « shopping » (comme au New York Times), d’annonces immobilières ou classées, voire de billetterie en ligne (à l’instar du Figaro), ou bien de vente de contenus éditoriaux en mode « Social Shopping ». Sans doute le « mélange de modèles » dont parle Nic Newman (3). Reste que l’abonnement demeure la principale source de leurs revenus (pour 79 % des éditeurs), suivie de l’affichage publicitaire (73 %), du native advertising (4) et des événements (40 %). @

La chronologie des médias et le fonds de soutien

En fait. Le 5 novembre, le CNC a adopté la mise en place d’un fonds « temporaire » pour « soutenir la production d’œuvres audiovisuelles destinées » aux plateformes de VOD/SVOD. Avant, le 3 novembre, Roselyne Bachelot a rappelé la date butoir du 10 février 2022 pour la chronologie des médias.

En clair. Le 7e Art français au sens large – le cinéma et l’audiovisuel – doivent maintenant donner plus de place aux plateformes de vidéo à la demande par abonnement (SVOD) que sont Netflix, Amazon Prime Video ou encore Disney+. Alors que les discussions et les points de blocage se poursuivent laborieusement autour de la prochaine chronologie des médias, afin de mieux prendre en compte les plateformes de SVOD dans les fenêtres de diffusion des films et dans l’écosystème du financement des films et séries, la ministre de la Culture Roselyne Bachelot a rappelé qu’il restait moins de trois mois pour trouver un accord : « La discussion doit désormais s’acheminer vers son terme (…). L’arrêté qui “étend” la chronologie des médias actuelle aux non-signataires de celle-ci, au premier chef les plateformes, expire le 10 février 2022. Nous ne pouvons venir buter sur cette échéance. Il nous faut impérativement disposer, avant cette date, d’une chronologie modernisée », a-t-il prévenu en clôture des rencontres cinématographiques de l’ARP, le 3 novembre dernier. Cet arrêté signé par Franck Riester (le prédécesseur rue de Valois) a été publié au J.O. le 10 février 2019 et prévoit que l’actuelle chronologie des médias – signée par les professionnels du secteur en septembre et décembre 2018 – est valable « pour une durée de trois ans » (1). Et cette échéance arrive à grand pas, alors les négociations patinent autour de la dernière proposition en date du CNC, celle du 19 juillet dernier (2). Celle-ci prévoit que les Netflix, Amazon Prime Video et autres Disney+ pourraient diffuser de nouveaux films 15 mois après leur sortie en salle de cinéma en France (au lieu de 36 mois actuellement), et même à 12 mois – sous réserve de payer la taxe « TSV » au CNC (3) – voire jusqu’à 6 mois s’ils contribuent au prix fort du décret SMAd (entré en vigueur le 1er juillet) et en cas d’accord avec le cinéma français. La chaîne cryptée Canal+ y est opposé. Sans attendre l’issue du bras de fer autour de la chronologie du cinéma, le CNC a pris les devants pour intégrer les plateformes de SVOD étrangères – soumises aux obligations « SMAd » de financement de films et séries – dans le soutien à la production audiovisuelle. Et ce, en décidant le 5 novembre d’ouvrir jusqu’au 30 avril 2022 un « fonds sélectif plateforme » dit FSP (4). Les œuvres éligibles seront retenues le 5 décembre par le CNC. @

Yahoo, racheté par le fonds new-yorkais Apollo, en fait-il assez contre les fake news ? Le CSA en doute

Jusqu’alors filiale de Verizon, Yahoo est désormais sur une nouvelle orbite depuis son rachat – avec d’autres entités-sœurs comme AOL ou TechCrunch – par le fonds d’investissement américain Apollo. En France, Yahoo devra continuer à rendre compte au CSA de sa lutte contre les fake news.

« Plus encore que l’année passée, Verizon Media se distingue par une déclaration particulièrement étique [d’une extrême maigreur, ndlr], tant sur la forme que sur la quantité des éléments communiqués ». C’est en ces termes que le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a critiqué le 21 septembre la réponse de Yahoo, qui était encore en 2020 la filiale européenne de l’opérateur américain Verizon basée en Irlande (à Dublin). Celle-ci n’a rendu que huit pages parsemées de captures d’écran sur les mesures que Yahoo Search et Yahoo Portal ont pris pour lutter contre les fake news.

Apollo : Yahoo sur une nouvelle orbite
Verizon, qui a cédé en mai dernier ses activités médias (Yahoo, AOL, TechCrunch, Engadget, Autoblog, …) au fonds d’investissement new-yorkais Apollo Global Management pour une acquisition de 5 milliards de dollars finalisée le 1er septembre dernier (1), garde néanmoins une participation minoritaire de 10 % dans son ex-filiale Verizon Media rebaptisée Yahoo, Inc. Verizon avait fait les acquisitions d’AOL et de Yahoo respectivement en mai 2015 pour 4,4 milliards de dollars et en juillet 2016 pour 4,8 milliards de dollars (2). Depuis le 27 septembre, la nouvelle société a un nouveau directeur général : Jim Lanzone (photo), réputé être « un vétéran des médias et des technologies » aux Etats-Unis. Ancien patron de Tinder (3), il succède à Guru Gowrappan qui chapeautait Yahoo chez Verizon Media depuis trois ans et qui devient, lui, consultant chez Apollo (4).
Vingt-sept ans après avoir été cofondé par Jerry Yang et David Filo, puis devenu une icône du Net dans les années 1990 (au point que Microsoft a tenté en vain de l’acheter en 2008 pour près de 45 milliards de dollars…), Yahoo avec sa quinzaine de services édités revendique une audience totale de 900 millions d’utilisateurs dans le monde. Ses contenus – actualités, informations financières et sportives, boutiques, jeux vidéo, etc. – sont issus le plus souvent de partenariats locaux qui tirent parti des synergies instaurées entre publicité (Yahoo Ad Tech), moteur de recherche (Yahoo Search) et média (Yahoo Portal).
En France, d’après Médiamétrie, Yahoo enregistre sur le seul mois de juillet 2021 plus de 27 millions de visiteurs uniques avec un rythme journalier moyen de 8,7 millions de visiteurs uniques. Ce qui place le moteur de recherche et portail média à la dixième place des audiences de l’Internet global (ordinateur et/ou smartphone et/ou tablette), derrière Google, Facebook, YouTube, Amazon, WhatsApp, Instagram, Wikipedia, TousAntiCovid et Leboncoin.fr. Au moment de répondre succinctement au CSA sur ses mesures prises en 2020 pour lutter contre les fausses informations (5), comme ce fut le cas en 2019 pour la première fois, Yahoo était encore pleinement aux mains de Verizon Media qui est à l’origine du maigre rapport via sa filiale irlandaise. Le CSA a ainsi reçu, pour la deuxième édition de son bilan annuel des mesures « anti-fake news » mises en œuvre (6), onze réponses de plateformes – Yahoo, Dailymotion, Facebook, Google, LinkedIn, Microsoft, Snapchat, Twitter, Wikimédia, Webedia, Unify – ayant l’obligation de coopérer conformément à la loi française du 22 décembre 2018 pour lutter contre la manipulation de l’information (7). Mais Yahoo n’a pas répondu pleinement aux attentes de CSA, lequel reproche en outre à Verizon Media d’avoir continué à « refus[er] de coopérer » et à ne pas suivre les indications déjà formulées l’an dernier par le régulateur pour « confirmer l’inclusion des portails d’information proposant des contenus de tiers ». Le groupe américain a persisté à considérer – à tort selon le régulateur car la loi ne prévoit pas de critères d’exclusion – que le portail d’information Yahoo Portal n’avait pas à se soumettre au devoir de coopération prévu par la loi française contre les fake news. Yahoo estime qu’il ne s’agit pas là d’une « plateforme ouverte où les utilisateurs/fournisseurs de contenu peuvent seuls sélectionner et afficher leur contenu ». Reste à savoir si le nouveau patron de Yahoo, Jim Lanzone, entendra la réprimande française afin de mieux coopérer à l’avenir avec le CSA, et notamment de mettre en place un dispositif « facilement accessible et visible » permettant aux utilisateurs de signaler des fausses informations.

L’après-« Oath » et « Marissa Mayer »
Le site d’actualité HuffPost ne fait plus partie, lui, de la galaxie du nouveau Yahoo, puisque l’ex-The Huffington Post a été racheté l’an dernier par Buzzfeed qui en a finalisé l’acquisition auprès de Verizon mi-février dernier, avec des licenciements à la clé (8). Avec le fonds Apollo, Yahoo entame une nouvelle ère après celles plutôt décevantes de Marissa Mayer (9) (2012-2017), d’Oath (10) (2017-2019), puis de Verizon Media (2019-2021). L’opérateur télécoms américain a perdu beaucoup d’argent avec son ex-pôle médias faute de recettes publicitaires suffisantes ; le fonds d’investissement y trouvera-t-il son compte ? @

Charles de Laubier

La plateforme Twitch de live gaming et de VOD, filiale d’Amazon, fête ses 10 ans diversifiée et médiatique

La firme fondée par Jeff Bezos parle peu ou pas – dans ses rapports annuels – de sa filiale Twitch, rachetée en août 2014 pour près de 1 milliard de dollars. Pourtant, avec plus de 100 millions d’utilisateurs (gamers en tête), la plateforme de streaming vidéo – lancée il y a 10 ans – s’impose dans la galaxie Amazon.

Lancée officiellement en version bêta aux Etats- Unis le 6 juin 2011, la plateforme de live streaming Twitch, qui s’est imposée en une décennie dans la diffusion en direct ou à la demande de jeux vidéo et de compétitions d’e-sport, a su séduire à ce jour plus de 100 millions d’utilisateurs dans le monde – dont 2,5 millions connectés en permanence. Sont venus se greffer ces derniers temps des programmes de musique (sous forme de concerts, de spectacles en ligne ou de festivals), des contenus créatifs, des émissions de médias ou encore des défilés de mode.
Twitch fut un spin-off d’un bouquet de chaînes vidéo en ligne baptisé Justin.tv, cofondé cinq ans plus tôt par Emmett Shear (photo), mais fermé par la suite au profit de Twitch que ce dernier dirige encore aujourd’hui comme CEO (1) de Twitch Interactive (2). L’idée originelle de Justin.tv était de s’inspirer de la télé-réalité, notamment en diffusant en lifecasting chaque moment de la vie de l’autre cofondateur, Justin Kan. Mais très vite, la diffusion en continue de vidéos s’est imposée – à commencer par celle de jeux vidéo en streaming où les gamers diffusent, regardent et discutent pour partager leurs performances et leurs passions.

Désormais plateforme de divertissement mondiale
En 2014, la société mère de Justin.tv a été rebaptisée Twitch Interactive, en s’inspirant de l’expression twitch gameplay qui désigne les jeux vidéo enregistrant le temps de réponse du joueur au tir, au combat ou au sport. En août de la même année, Amazon s’en empare pour près de 1 milliard de dollars (3) – au nez et à la barbe de Google qui était aussi intéressé. La firme de Jeff Bezos ne cesse depuis de diversifier les contenus de Twitch.tv pour en faire une plateforme de divertissement mondiale et de jouer des synergies avec son service d’abonnement Prime, incluant Prime Video et Amazon Music. Ces derniers temps, les médias sont venus étoffer ses contenus dans différents pays.
« Le deuxième plus grand nombre de partenaires dans la zone EMEA sont français », a indiqué Damian Burns, vice-président de Twitch pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord dans le cadre d’une enquête sur « la guerre du live » parue en mars dernier dans Le Monde (4). Twitch, c’est plus de 6 millions de streamers en direct chaque mois dans le monde et près de 30 millions de visiteurs par jour. Et environ la moitié de toutes les heures regardées sur Twitch viennent d’Europe.

Présidentielle française sur Twitch
La France est un des pays les plus actifs sur Twitch, où les émissions politiques s’installent en prévision de la présidentielle de mai 2022. Radio France fait sa rentrée avec notamment le duo d’humoristes Pastureau-Vizorek en live sur Twitch. Chez BFMTV, des éditorialistes vont être amenés à « twitcher » en direct dans le cadre de grandes soirées de débats. France Télévisions n’est pas en reste, le groupe public s’étant lancé en début d’année dans un premier live streaming sur Twitch avec le journaliste-animateur Samuel Etienne, lequel s’était rodé durant les premiers confinements de 2020 avec le live twitch #OnVousRépond et « La matinée est tienne » (avec parmi les invités : François Hollande puis Jean Castex).
Le 10 septembre prochain, Mediapart organise un débat entre les candidats à la primaire écologique qui sera retransmis simultanément sur les chaînes Twitch de ses journalistes-chroniqueurs-vidéastes Usul et Ostpolitik. Le talk-show d’actualité politique devient tendance sur Twitch, où « le 1er streamer politique sur #Twitch » (dixit), s’est installé en 2015 avec sa chaîne « Accropolis » devenue « Jean Massiet ». Ce dernier avait organisé en 2019 un « Grand Débathon » sur Twitch, en collaboration avec le vidéaste HugoDécrypte en écho au grand débat national au cours duquel le Premier ministre Edouard Philippe à l’époque et neuf autres ministres avaient répondu pendant une dizaine d’heures aux questions de jeunes et de journalistes. Plus récemment, en juin, ce même Jean Massiet a lancé sur Twitch une émission politique, intitulée « Backseat », dont le nom provient du backseat gaming : le fait pour un non-joueur de suivre, commenter et critiquer un joueur en pleine action. Des personnalités politiques se mettent de plus en plus à « twitcher » en direct, à l’instar de Jean-Luc Mélenchon qui a lancé en mai 2020 sa chaîne « Twitchons ». Autre exemple : la chaîne Public Sénat avait déployé il y a un an son programme « QAG » (questions d’actualité du gouvernement) sur Twitch à l’occasion des élections sénatoriales. A l’heure où la démocratie française est mise à mal par l’abstentionnisme massif, aller chercher les plus jeunes (électeurs ou futurs) sur les réseaux sociaux dans le cadre de la prochaine présidentielle devient tendance. Cette « politisation » de Twitch n’est cependant pas du goût de tous ses utilisateurs : début mars, le premier « chat » de la chaîne d’information en continue d’Altice avait été la cible de réactions négatives, la communauté des gamers regrettant cette dérive vers la « propagande gouvernementale » susceptible d’attirer l’attention du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sur Twitch. Est-ce pour renforcer cette emprise médiatique que Boris Lecoeur a été remplacé il y a un an par Stephan Hadinger à la présidence de la filiale française de Twitch ? Quoi qu’il en soit, la filiale « live streaming » d’Amazon entend s’inscrire dans le nouveau paysage médiatique français sur Internet, là où oeuvrent déjà les YouTube, Loopsider, Brut, TikTok et autres Instagram très prisés des 15-35 ans.
Pour autant, le fonds de commerce de Twitch reste les jeux vidéo en ligne et l’e-sport. Là encore, la France est aux avant-postes des événements en live gaming comme l’illustre le rendez-vous caritatif (5) annuel « Z Event » dont l’édition 2021 – la sixième – est attendue impatiemment après le succès de celle d’octobre 2020 durant laquelle les streamers ont récolté le montant record de 5,7 millions d’euros en un marathon de parties de jeux vidéo de 50 heures durant un weekend (6). Le président de la République Emmanuel Macron avait même salué la performance des gamers. L’e-foot fait aussi des émules. L’Olympique de Marseille (OM) a lancé sa chaîne Twitch. La Ligue de football professionnelle (LFP) a fait de même pour toucher « une cible affinitaire football » – selon l’expression utilisée le 6 juillet dernier par Sébastien Vandame, directeur des partenariats de la LFP lors du rendez-vous professionnel « Game On ! » au Parc des Princes à Paris (7). Le sport est le contenu qui explose le plus sur Twitch : + 1.300 % de croissance en un an !
Parmi les intervenants ce jour-là : Melissa Simoni (photo ci-contre), directrice commerciale France et Bénélux de Twitch depuis deux ans, après avoir été durant cinq ans chez Twitter, en charge notamment de la publicité. « Twitch est le principal service de streaming interactif pour le jeu vidéo, le sport et la musique, c’est 2,5 millions de connectés en permanence, a-t-elle indiqué au “Game On !”. C’est une communauté, un lien entre le streamer et ses fans qui interagissent en live sur la maison des gamers». Amazon y pousse aussi ses propres jeux vidéo tels que « New World » et « Lost Ark ». Et Melissa Simoni de préciser au regard des recettes publicitaires : « Pour les annonceurs, la principale opportunité, c’est l’audience, celle de la GenZ et des Millennials. Ils sont connectés et ne regardent pas la télévision traditionnelle. Lorsqu’elle est sur Twitch, cette audience est captive, immergée. La publicité est très bien acceptée : 64 % des viewers reconnaissent acheter le produit d’une marque mise en avant par un streamer ! Nous travaillons avec toutes les industries (auto, luxe, banque etc.) ».

Cyberharcèlement : #ADayOffTwitch
Cette success story est cependant entachée de cyberharcèlement, de cyberracisme ou de cybermysogynie. Ce qui lui a valu le 1er septembre 2021 de faire l’objet d’un boycott ce jour-là de la part de nombreux streamer pour protester contre ces dérives en ligne. L’hashtag #ADayOffTwitch a été largement respecté pour faire prendre conscience du problème, tandis que le #TwitchDoBetter appelait la plateforme de streaming d’Amazon à mettre en place des solutions pour endiguer le fléau. @

Charles de Laubier

Verizon et AT&T se délestent chacun de leurs médias

En fait. Le 16 mai, l’agence Bloomberg a révélé qu’AT&T discute de la fusion de sa filiale WarnerMedia avec Discovery pour créer un nouveau géant des médias. Ce qui a été confirmé le lendemain. Le 3 mai, c’était Verizon qui annonçait la vente de ses médias Yahoo et AOL à une société d’investissement.

En clair. Deux géants américains des télécoms – Verizon le 3 mai et AT&T le 17 mai – ont annoncé se délester de leurs activités médias respectives, le premier pour les céder à un fonds d’investissement, Apollo Global Management, contre 5 milliards de dollars, le second pour fusionner sa filiale WarnerMedia avec le groupe de télévision payante Discovery. Verizon cède ainsi notamment Yahoo et AOL, qui formeront un nouveau groupe baptisé Yahoo. AT&T procède à une scission (spin off) de ses activités de contenus Warner Bros, CNN ou encore HBO pour former un nouvel ensemble – dont le nom n’est pas encore précisé – avec les entités TLC, HGTV ou encore Eurosport de Discovery. Alors que Verizon cède le contrôle de l’ex-Verizon Media pour ne garder que 10 % du futur nouveau Yahoo, AT&T s’empare au contraire de 71 % du capital du futur «WarnerMedia-Discovery ».
Ces grandes manœuvres semblent sonner le glas de la convergence des télécoms, laquelle avait motivé le rachat de Time Warner en 2018 par AT&T moyennant 85 milliards de dollars. Cette méga-fusion fut validée en février 2019 par la justice américaine (1). De son côté, Verizon avait fait les acquisitions d’AOL et de Yahoo respectivement en mai 2015 pour 4,4 milliards de dollars et en juillet 2016 pour 4,8 milliards de dollars. Est-ce la fin de la convergence télécoms-médias, chère encore au pionnier du genre et principal actionnaire de la galaxie « Liberty », John Malone (2), lequel détient à ce jour 21 % du capital de Discovery, et à son « disciple » Patrick Drahi, le patron fondateur d’Altice (Europe et USA) ? Un troisième géant des télécoms aux Etats-Unis, le câblo-opérateur Comcast, suivra-t-il le mouvement de la « désintégration verticale » avec sa filiale NBC Universal ? Ce groupe avait été acquis entre juillet 2010 (51 % du capital) et février 2013 (100 %) pour un total de 12,3 milliards de dollars. Une chose est sûre : la convergence « cable TV », initiée par John Malone avec TCI dans les années 1980-1990, a perduré à coup de mégafusions dans les années 2000.
Mais c’était sans compter le cord-cutting : les Américains sont de plus en plus nombreux à dissocier leurs abonnements pour profiter de l’audiovisuel sur Internet – Netflix, Amazon Prime Video, Disney+, HBO Max, Hulu, Peacock, Pluto TV, Discovery+, … Le 18 mai, The Information a révélé qu’Amazon négocie le rachat des studios MGM (3) pour 9 milliards de dollars. @