Plateformes de SVOD : casse-tête des mots de passe

En fait. Le 22 février, Elon Musk – PDG de Tesla et de SpaceX – a lancé sur Twitter à ses 74,5 millions d’abonnés la réflexion suivante : « Le divertissement devient un cauchemar avec nom d’utilisateur/mot de passe/2FA ». Avec un même semblant justifier « The Pirate Bay » face à la multiplication des plateformes de SVOD.

En clair. Le milliardaire Elon Musk s’est fendu d’un tweet auprès de ses 74,5 millions d’abonnés pour exprimer sont désarrois face à la multiplication des codes d’accès (nom d’utilisateur et mot de passe), doublé de plus en plus d’une demande d’authentification à deux facteurs, dite 2FA. Et comme les plateformes de SVOD continuent de se multiplier, l’accès à l’offre légale devient un casse-tête dont se plaint à sa manière et publiquement le PDG de Tesla et de SpaceX. «Le divertissement devient un cauchemar avec nom d’utilisateur/ mot de passe/2FA », a-t-il lancé le 22 février à ses twittos, en accompagnant son propos d’une illustration (même) quelque peu osée et semblant justifier un retour à la plateforme The Pirate Bay face à la multiplication des services de SVOD et de leurs codes d’accès respectifs à authentification forte.
Les logos de Netflix, Disney+, Amazon Prime Video, HBO Max et Paramount+ y sont montrés face à un logo de The Pirate Bay (1). De là à ce que Elon Musk fasse l’apologie du piratage sur Internet – pour lequel ce site historique, créé en 2003 en Suède pour le partage de fichier sur réseau peer-to-peer et sous le protocole BitTorrent, a été condamné à plusieurs reprises –, il n’y a qu’un pas. Depuis (au 24-02-22), ce tweet évocateur a reçu 195.000 “J’aime” et a été retwetté 19.000 fois ! En France, il y a un an, l’ex-CSA et l’ex-Hadopi n’avaient-ils pas constaté dans leur rapport sur « la multiplication des services de SVOD » (2) que le piratage est un moyen de « [ne pas] multiplier les abonnements payants » ? Dans un autre tweet posté le même jour, Elon Musk a enfoncé le clou à propos des codes d’accès cauchemardesques : «M Night [le réalisateur de films Night Shyamalan, spécialiste des intrigues, ndlr] devrait faire un film d’horreur à ce sujet – ça résonnerait » (3). Le second plus riche du monde (selon Forbes) émet implicitement une mise en garde aux industries culturelles et aux plateformes de streaming sur la complexité de l’accès à leurs contenus. Il a même « liké » un tweet illustré pro-piratage (4). Selon un classement de TorrentFreak, site d’actualité sur le piratage (5), Disney+ en a le plus pâti en 2021, suivi de Netflix, d’Apple TV+ et d’Amazon Prime Video. Contre le partage des mots de passe, Netflix avait tenté d’enrayer il y a un an cette pratique par une campagne de « Verification Code » (6), plutôt mal vécue dans les foyers. @

Fusionner l’Arcep et l’Arcomaurait fait sens à l’ère de la convergence du numérique et de l’audiovisuel

Alors que l’Arcep – appelée jusqu’en 2005 Autorité de régulation des télécommunications (ART) – fête ses 25 ans, et que le CSA et l’Hadopi sont devenus l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), la fusion de celle-ci avec l’Arcep sera-t-elle la prochaine étape ?

Le pôle numérique Arcep-CSA, créé il y a près de deux ans par les deux régulateurs dans le cadre d’une convention, est devenu depuis le 1er janvier le pôle numérique Arcep-Arcom (1). Cette mission commune est pilotée par la direction des études, des affaires économiques et de la prospective de l’Arcom et la direction marchés, économie et numérique de l’Arcep. Le rôle de coordination est assuré alternativement par les deux directeurs. Ces deux directions ont à leur tête respectivement Christophe Cousin (photo de gauche) et Anne Yvrande-Billon (photo de droite).

De très nombreux points communs
La coordination de ce pôle numérique est assurée alternativement par ces deux directeurs, pour un mandat d’un an. C’est Anne Yvrande-Billon qui est coordonnatrice jusqu’au 30 juin. Depuis sa création, ce pôle commun aux deux régulateurs mène des études communes sur les sujets numériques, met à disposition du grand public des données de référence communes, organise des ateliers de travail entre services de l’Arcep et l’Arcom, et conduit des travaux sur la protection des mineurs contre les contenus pornographiques en ligne. Actuellement, deux études sont en cours : l’une sur les enjeux environnementaux de l’audiovisuel et l’autre sur les principes et enjeux économiques de la recommandation algorithmique. Tous les deux sont attendus cette année. Une précédente étude commune est déjà parue sur la multiplication des services de SVOD (mars 2021), en lien à l’époque avec l’Hadopi et le CNC (2). Quant au référentiel commun des usages numériques, il a fait l’objet d’une première édition il y a un an maintenant (3) et est sur le point d’être mis à jour (couverture et accès à l’internet, équipement des foyers, usages liés à internet et à l’audiovisuel) et enrichi d’indicateurs complémentaires. Surtout qu’il a vocation à constituer un observatoire de référence sur le numérique.
Concernant la prévention de l’exposition des mineurs à des contenus pornographiques en ligne, l’Arcep et l’Arcom sont parties prenantes dans la mise en place de la plateforme « jeprotegemonenfant.gouv.fr » il y a un an avec le secrétaire d’Etat en charge de l’Enfance et des Familles, Adrien Taquet, et le secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques, Cédric O. Il s’agit de sensibiliser les parents sur l’exposition massive des mineurs à la pornographie, de faciliter le recours aux dispositifs de contrôle parental, et de contribuer à instaurer le dialogue parents/enfants sur l’éducation à la sexualité et la pornographie. Un protocole d’engagements de prévention a été signé par plusieurs acteurs du numérique (4), dont les quatre opérateurs télécoms (Orange, Bouygues Telecom, Free et SFR), mais aussi Facebook, Google, Microsoft, Samsung, Apple, Snap ou encore Qwant. Enfin, dans le cadre du pôle numérique Arcep-Arcom, plusieurs ateliers sont organisés sur des sujets aussi différents que, par exemple, « la régulation par la donnée », « le conventionnement des chaînes audiovisuelles » ou encore « la régulation et l’aménagement numérique du territoire ».
La distribution de la presse, que régule l’Arcep depuis la loi du 18 octobre 2019 modernisant la distribution de la presse (5), est aussi un domaine commun avec l’Arcom lorsqu’il s’agit de régler des différends concernant les kiosques numériques. A l’époque, l’ancien président de l’Arcep, Sébastien Soriano, avait regretté que cela relève d’une codécision Arcep-Arcom et que par ailleurs la DGCCRF ait à s’occuper de son côté des agrégateurs de journaux (Google Actualités, Apple News, Yahoo News, …). Une « division » et un « ajout de complexité » avaitil signalé dans La Correspondance de la Presse.
Face à tant de points communs à l’ère de la convergence du numérique et de l’audiovisuel, il n’était pas étonnant que le projet de loi portant sur « la régulation et la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique » ait envisagé un temps de désigner des membres croisés entre les collèges respectifs de l’Arcep et de l’Arcom. Il était même prévu l’instauration d’un mécanisme de règlement des différends commun aux deux autorités. « Les sujets communs entre l’Arcep et le CSA sont peu nombreux [et inexistants entre] l’Arcep et l’Hadopi », avait contesté Sébastien Soriano dans son avis du 22 octobre 2019 sur le projet de grande réforme audiovisuelle, abandonnée ensuite.

Arcep-Arcom : « Je t’aime, moi non plus »
Laure de La Raudière, qui lui a succédé, est sur la même longueur d’onde puisqu’elle s’est « félicit[ée]» dans son avis du 30 mars 2021 que le nouveau projet de loi – finalement promulgué le 26 octobre 2021 (6) – « ne repren[ne] pas [ces] dispositions ». Pour autant, cette loi-là fait état néanmoins d’une compétence commune à l’Arcep et à l’Arcom: celle des fréquences, sous l’autorité du le Premier ministre (7), étant entendu que la bande de fréquences 470-694 Mhz reste jusqu’au 31 décembre 2030 à la TNT, relevant des compétences de l’Arcom. @

Charles de Laubier

Lutte contre le piratage audiovisuel : la riposte légale du régulateur et de la justice s’organise

La piraterie – notamment audiovisuelle – est un fléau qui, avec le numérique, peut aller jusqu’à mettre en cause la viabilité de l’industrie de la culture et du divertissement. Pour lutter contre, deux textes de loi (une proposition et un projet arrivés aux Sénat) renforcent l’arsenal judiciaire.

Par Fabrice Lorvo*, avocat associé, FTPA.

Responsabilité des hébergeurs : renforcer la modération en ligne, mais éviter les censures

Les patrons de Facebook, Google et Twitter ont été auditionnés le 25 mars au Congrès des Etats-Unis sur « le rôle des médias sociaux dans la promotion de l’extrémisme et de la désinformation » (1). Aucun ne s’oppose à une réforme de la responsabilité des plateformes. L’Europe, elle, a pris de l’avance.

Par Olivia Roche, avocate, et Prudence Cadio, avocate associée, cabinet LPA-CGR avocats

La SVOD dépasse à elle seule et pour la première fois en France le milliard d’euros de chiffre d’affaires

C’est un bond de 43 % sur un an ! La vidéo à la demande par abonnement (SVOD), qui laisse clouée au sol la VOD à l’acte, a poursuivi son envolée en 2020 pour atteindre plus de 1,2 milliard d’euros. Elle pèse ainsi 83 % du marché français, avec toujours une « prime au leader » qu’est Netflix.

La SVOD en France a le vent en poupe. A elle seule, elle a franchi allègrement la barre du milliard, à plus de 1,2 milliard d’euros. C’est du moins les premières estimations pour l’an dernier avancées par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Ces chiffres provisoires pour l’année 2020 ont d’abord été publiés dans le « Baromètre de la vidéo à la demande » publié en décembre dernier par le CNC, puis repris dans le rapport conjoint de l’Hadopi et du CSA publié le 9 mars dernier sur « la multiplication des services de vidéo à la demande par abonnement : stratégies de développement et impact sur les usages » (1).