Taxe GAFA (OCDE) : convention multilatérale en vue

En fait. Les 24 et 25 février, s’est tenue la première réunion des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales du G20, lequel avait lieu en Inde à Bangalore. Il a été question de la future taxe « GAFA » de l’OCDE qui s’appliquera une fois la « convention multilatérale » signée par 138 pays. Fin 2023 ?

En clair. L’« accord historique » du 8 octobre 2021, arraché à 136 pays (aujourd’hui 138) par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur les 140 qui se sont engagés auprès d’elle à lutter contre l’évasion fiscale et les paradis fiscaux (1), n’a pas encore produit tous ses effets. Le « pilier 2 » de cet accord – à savoir un taux d’imposition de 15 % minimum sur le bénéfice des multinationales (GAFAM compris) réalisant au moins 750 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel – a été transposé par la plupart des pays, y compris par l’Union européenne avec la directive du 14 décembre 2022 et applicable « au plus tard le 31 décembre 2023 » (2). Pour des pays comme la France et les Etats-Unis, où l’impôt sur les sociétés est respectivement de 25 % (15 % pour les PME) et 21 %, cela ne change rien.
En revanche, le « pilier 1 » de l’accord « OCDE » piétine. Il vise particulièrement les GAFAM, lesquels seront taxés à hauteur de 25 % de leur bénéfice taxable (au-delà d’un seuil des 10 % de profits, pour que ces sommes soient réattribuées aux pays concernés selon une clé de répartition en fonction des revenus générés dans chacun de ces pays (3). Mais cette réaffectation de l’impôt collecté auprès de ces « grands champions » de la mondialisation et de la dématérialisation nécessite une « convention multilatérale » (CML) que doivent signer chacun des 138 pays ayant à ce jour accepté la déclaration du 8 octobre 2021 (4). Aux Etats-Unis, ce texte devra être ratifié par les deux tiers des sénateurs américains – ce qui n’est pas gagné au pays des GAFAM ! L’Inde, qui reçoit cette année le G20 à Bangalore, bloque tant que les pays en développement ne seront pas aidés financièrement dans la mise en œuvre. Tandis que l’Arabie saoudite veut des exceptions.
C’est au sein de l’instance appelée « Cadre inclusif OCDE/G20 sur le BEPS » (5), chargée de remédier à l’évasion fiscale et aux paradis fiscaux, que se joue l’avenir de la fiscalité numérique des géants du Net. La CML, soumise à signature jusqu’au 31 décembre 2023, obligera dès son entrée en vigueur la sup- pression des « taxes GAFA » instaurées dans leur coin par certains pays comme la France, l’Espagne ou le Royaume-Uni. La France, qui fait « cavalier seul » depuis 2019 (3 % du chiffre d’affaires publicitaire des GAFA réalisé en France), compte récupérer 670 millions d’euros en 2023, contre 591 millions en 2022. @

Engagements FTTH : « Orange veut gagner du temps »

En fait. Le 8 février, Laure de La Raudière, présidente de l’Arcep, a profité de son audition au Sénat par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable pour s’interroger sur les recours d’Orange devant le Conseil d’Etat contre l’Arcep – notamment avec une QPC déposée le 5 février. Verbatim.

En clair. « Nous constatons un ralentissement inquiétant des déploiements dans les zones très denses, mis aussi dans les zones moins denses d’initiatives privée : les zones “Amii” (1). Cette situation est problématique car cela prive certains de nos concitoyens du bénéfice de la fibre. Nous avons donc, en mars 2022, mis en demeure Orange de respecter ses engagements pris auprès du gouvernement : couvrir 100 % des locaux de la zone Amii Orange, dont au plus 8 % en raccordable à la demande. Orange avait d’abord contesté cette décision de mise en demeure devant le Conseil d’Etat, estimant s’être engagé sur un volume de lignes à déployer (2). [Or, en réalité] il s’agit d’un engagement de couverture d’une liste de communes qui doit être complète à une date donnée. Plus récemment, Orange a déposé [le 3 février 2023, selon Le Monde (3)] une demande de QPC (4), d’une part sur le pouvoir de sanction de l’Arcep, mais aussi sur la constitutionnalité de l’article L33-13 du CPCE (5). Cet article est justement la base juridique rendant ses engagements, pris auprès du gouvernement, juridiquement opposables. Orange demande au Conseil d’Etat de transmettre la QPC au Conseil constitutionnel et ainsi de sursoir à statuer sur la mise en demeure de l’Arcep dans l’attente de la décision. En réalité, ce qu’Orange cherche à faire, c’est a minima gagner du temps par rapport à ses engagements. C’est retarder la décision du Conseil d’Etat sur la mise en demeure elle-même. Voire que le Conseil d’Etat ne soit jamais en mesure de se prononcer sur le fond, dans l’incapacité juridique de confirmer la mise en demeure de l’Arcep ».
« Doit-on comprendre que les engagements d’Orange – pris devant le gouvernement – n’avaient pas de valeur en 2018 ? Qu’Orange renie ses engagements ? Doit-on comprendre que de nombreux habitants des Sables-d’Olonne, de La Roche-surYon, de Brive-la-Gaillarde et de bien d’autres communes en zones Amii Orange vont devoir attendre longtemps la fibre ? Doit-on comprendre qu’Orange défie les objectifs assignés à la régulation par la volonté du Parlement ? Doit-on comprendre enfin qu’Orange préfère tenter d’arracher son sifflet au gendarme des télécoms, plutôt que viser l’atteinte des objectifs qu’il s’était lui-même fixé en 2018 ? La stratégie d’Orange sur ses déploiements en zones Amii – à l’aube de la fermeture du réseau cuivre – reste un mystère ». @

Accord avec la presse : Microsoft traîne des pieds

En fait. Le 6 février, Marc Feuillée, directeur général du groupe Le Figaro, s’est exprimé dans Mind Media en reprochant notamment à Microsoft de ne toujours pas rémunérer les éditeurs au titre des droits de la presse – contrairement à Google et Facebook, et malgré ses engagements de février 2021.

En clair. « Microsoft avait (…) annoncé publiquement en janvier et février 2021 vouloir discuter et rémunérer les éditeurs, et faire mieux que Facebook et Google, or je n’en vois pour l’instant pas le résultat », a déploré Marc Feuillée, directeur général du groupe Le Figaro (1), dans une interview accordée à Mind Media et publiée le 6 février. La firme de Redmond (Etats-Unis) s’était en effet engagée – il y a aura deux ans le 22 février prochain – à « travailler ensemble sur une solution pour faire en sorte que les éditeurs de presse européens soient payés pour l’utilisation de leur contenu par des gatekeepers [comme Microsoft avec son moteur de recherche Bing, son portail d’actualités MSN, ou son application Microsoft Start, ndlr] qui ont une puissance dominante sur le marché ».
Un communiqué (2) avait même été signé par Casper Klynge, alors vice-président de Microsoft en charge des affaires publiques européennes et basé en Belgique, et quatre organisations européennes d’éditeurs de presse : European Publishers Council, News Media Europe, Newspaper Publishers’ Association/ENPA et European Magazine Media Association/EMMA. Ensemble, ils appelaient en outre à « un mécanisme d’arbitrage de type australien en Europe pour garantir que les gatekeepers rémunèrent équitablement les éditeurs de presse pour l’utilisation du contenu ». Microsoft entendait ainsi se distinguer de Google et de Facebook qui, à l’époque, étaient très réticents à rémunérer les médias pour l’utilisateur de leurs contenus sur respectivement le moteur de recherche et le réseau social. Depuis, Google et Facebook ont finalement trouvé un accord avec la presse en Europe – notamment en France, soit à la suite d’un contentieux (Google), soit dans un rapport de force (Facebook).
Mais toujours rien à ce jour du côté de la firme dirigée par Tim Cook. Casper Klynge, qui a quitté Microsoft fin 2022, avait indiqué que l’application Microsoft News (ex-MSN News et Bing News) – rebaptisé depuis Microsoft Start alias MSN (3) – permettait à Microsoft de partager « une grande partie » des revenus avec les éditeurs de presse. Et que le paiement de droits voisins était « une prochaine étape logique ». Pas de résultat depuis. « Toutes les autres plateformes refusent de discuter sérieusement, a regretté Marc Feuillée. Ma conclusion c’est que la loi française n’est pas assez précise et doit être amendée par le législateur ». @

Les influenceurs sous l’oeil de Bercy et de l’UMICC

En fait. Le 31 janvier se termine la « concertation » sur les influenceurs lancée le 8 janvier par Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, lequel prendra en mars des « mesures » d’« encadrement » de ce métier. Parallèlement, l’UMICC s’est constituée.

En clair. « Les 150.000 créateurs de contenus que compte la France font partie de nos vies et sont une formidable source de créativité et de richesse lorsque les règles sont claires et connues », avait déclaré Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, aussi en charge de la consommation et du numérique, sur Twitter le dimanche 8 janvier dernier. « J’ai besoin de vous. Participez au maximum à la concertation pour mieux accompagner et encadrer les influenceurs. Votre avis compte ! » (1). Bercy veut annoncer « des mesures retenues courant mars » en fonction des contributions à la consultation publique ouverte en ligne jusqu’au 31 janvier (2).
« La réflexion (…) doit permettre de protéger les consommateurs et les créateurs de contenus », assure le ministère de Bruno Le Maire, qui avait organisé le 9 décembre 2022 une table ronde avec des agences, des influenceurs, des annonceurs et la Direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), rattachée à Bercy (3). Tandis que, parallèlement, trois propositions de loi pour réguler les influenceurs ont été déposées par de nombreux députés. Sont soumises à commentaires onze mesures, déclinées en quatre thématiques : droits et obligations des influenceurs ; propriété intellectuelle ; protection des consommateurs ; gouvernance du secteur. Pour ce dernier point, il s’agit de créer «un label » et de créer « une fédération professionnelle ».
C’est ce qu’entreprend l’Union des métiers de l’influence et des créateurs de contenu (UMICC) fondée le 18 janvier par sept agences d’influence marketing : Smile Conseil, Bump, Follow, Point d’Orgue, Reech, Influence4You et Spoutnik. « Webedia a fait sa demande d’adhésion et 80 autres acteurs également, tandis qu’une centaine de créateurs de contenu ont fait part de leur volonté d’adhérer », indique à Edition Multimédi@ Carine Fernandez, présidente de l’UMICC. Toutes les agences sontelles les bienvenues ? « Concernant Shauna Events [agence de la “papesse de l’influence” Magali Berdah, ndlr] et We-Events [du groupe AWPG de l’animateur Arthur, ndlr], ils pourraient en faire la demande. Cependant, pour l’heure et en l’état, au regard des accusations qui sont portées, nous ne souhaitons pas que ces agences et certains influenceurs qui ne respectent aucune règle déontologique ou éthique puissent être membres de l’UMICC », nous précise-t-elle. @

La 5G tant vantée poursuit lentement son décollage

En fait. Le 10 février, l’Arcep dévoilera les chiffres de son observatoire des services mobiles pour le quatrième trimestre. Selon les estimations de Edition Multimédi@, le parc de la 4G dépasserait pour la première fois les 70 millions de cartes SIM en France. En revanche, la 5G resterait sous la barre des 10 millions.

En clair. La 5G fait toujours pâle figure en France, alors que les quatre opérateurs télécoms (Orange, Bouygues Telecom, Free Mobile et SFR) promettaient au grand public du très haut débit mobile et de nouveaux usages, avec des débits jusqu’à dix fois supérieurs à ceux de la 4G (1). Force est de constater que, depuis les débuts de la commercialisation de la 5G il y a plus de deux ans, les clients mobiles (forfaits ou prépayés) ne se précipitent pas. Selon les chiffres de l’Arcep publiés le 12 janvier dernier sur le troisième trimestre 2022 du marché des communications électroniques, le nombre de cartes SIM actives en 5G ne dépasse pas les 6,2 millions (2) – ne pesant que 7,5 % du parc de carte mobiles actives en France. Et bien loin des 69,7 millions de clients 4G.
Si la croissance trimestrielle d’un peu plus de 21,5 % observée au troisième trimestre s’est poursuivie au quatrième trimestre l’an dernier, selon l’hypothèse basse de Edition Multimédi@, la 5G terminerait l’année 2022 avec à peine plus de 7,5 millions de clients mobiles – pesant seulement 9% du parc mobile total. Et toujours très loin des quelques 70 millions d’abonnés 4G attendus à fin 2022. Même en prenant cette fois une hypothèse haute intégrant l’effet « cadeaux de Noël », la 5G devrait rester sous la barre des 10 millions de clients. Comme l’Arcep ne précise pas dans son observatoire des services mobiles les chiffres de la 5G (ni de la 4G ni de la 3G), il faudra attendre finalement non pas le 10 février mais le 6 avril prochain pour avoir la confirmation de cette tendance poussive. @