A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

Tuned Global tire les ficelles du streaming musical

En fait. Le 11 novembre, Virginie Chelles, vice-présidente et directrice marketing communication de Tuned Global, a confirmé à Edition Multimédi@ que le spécialiste australien des applications de streaming musical en marque blanche, ou via API, poursuit son déploiement en Europe, y compris en France.

En clair. Ils ont leur propre application de streaming : Coca Cola, Delta Airlines, Pizza Hut, Lululemon, Samsung et même Universal Music, Warner Music et Sony Music. Sans avoir les inconvénients et les coûts des Spotify, Deezer et autres Apple Music, lesquels doivent négocier directement auprès des multiples producteurs de musique et labels. Se sont aussi lancées facilement les « applis » de streaming musical Tieme Music et Waw Musik, conçues en France pour l’Afrique, respectivement au Ghana et en Côte d’Ivoire.
En Allemagne, Sony Music propose son appli audio Hörspiel Player pour raconter des histoires. Au Royaume-Uni, trois services de musique en ligne ont vu le jour sans difficultés : Reactional Music pour développeurs de jeux vidéo, MediMusic pour soigner avec de la musique, et Pure Energy pour faire des exercices sportifs en musique. Autre exemple : au Danemark, l’opérateur télécoms Tusass (1) va à son tour lancer son propre service de musique en streaming. Quel est le point commun entre ces différents services ? Tous sont clients de Tuned Global, fournisseur australien de solutions clé-en-main, pour entreprises et organisations, de streaming de musique, d’audio voire de vidéo. Pour lancer son propre « Spotify », une société peut ainsi se procurer auprès de Tuned Global un service de streaming en marque blanche, ou les API (2) et les flux de métadonnées (3)) nécessaires à son développement.
Bien que le nouveau service à la demande n’aura pas l’autorisation des maisons de disques pour être disponible dans le monde entier, il pourra néanmoins accéder à un catalogue de plus de 100 millions de titres (4). « Nos clients accèdent à ces catalogues à condition d’avoir signé des accords de licences avec ces labels, et nous pouvons les aider dans cette démarche », nous précise Virginie Chelles. Le fournisseur australien, basé à Melbourne et cofondé en 2010 par son actuel directeur général Con Raso, s’est déployé à San Francisco, Londres et maintenant à Paris. « Nous sommes présents en France depuis janvier 2023, à la suite de ma relocalisation et après avoir travaillé en Australie pour Tuned Global depuis 2014 », indique Virginie Chelles. Par ailleurs, en mars dernier, l’australien a racheté la société suédoise Pacemaker, un de ses clients ayant développé pour DJ une appli de mixage fonctionnant à l’IA. Tuned Global investit aussi le Web3 : NFT et métavers. @

Accessibilité : freins pour les livres numériques ?

En fait. Le 28 novembre prochain, les 24ès Assises du livre numérique, organisées à Paris par le SNE, auront pour thème cette année : « Pour des livres numériques nativement accessibles ». Elles mettront en lumière les contraintes qui pèseront à partir de 2025 sur le marché des ebooks – déjà à la peine.

En clair. Les obligations d’« accessibilité » qui pèseront à partir du 28 juin 2025 sur les maisons d’édition – pour que leurs livres numériques soient utilisables aussi par des lecteurs présentant des handicaps visuels, auditifs ou cognitifs – ne vont-elles pas… handicaper le marché des ebooks en France ? Si l’on peut se féliciter de cette perspective pour les lecteurs concernés, cela n’empêche pas de se demander si ces contraintes techniques, et donc financières, ne vont pas pénaliser les éditeurs sur un marché français du livre numérique qui peine toujours à décoller dans l’Hexagone.
Lors de son assemblée générale annuelle le 29 juin dernier, le Syndicat national de l’édition (SNE) – qui a créé il y a 25 ans les Assises du livre numérique et les organise chaque année – a fait état pour l’année 2022 d’une hausse de seulement 4,4 % du marché français des ebooks. Avec 285,2 millions d’euros de chiffre d’affaires l’an dernier, l’édition numérique pèse encore moins de 10 % du marché global de l’édition en France (9,8 % précisément), soit sur un total de 2,9 milliards d’euros (1) en recul, lui, de -5,4 %. Toujours est-il que la directive européenne « Accessibilité applicables aux produits et services » de 2019 doit entrer en vigueur dans les Vingt-sept, au plus tôt le 28 juin 2025 pour les nouveaux livres numériques publiés à partir de cette date, et au plus tard le 28 juin 2030 pour les titres parus avant ce 28 juin 2025 (2). Sont concernés par cette obligation d’accessibilité des ebooks aux personnes handicapées de nombreux autres appareils électroniques grand public et logiciels d’exploitation (3). Pour les ebooks : le titre, le logiciel d’exploitation associé ainsi que les liseuses numériques devront être nativement « accessibles » aux personnes empêchées de lire. Et dans près d’un an et demi pour les nouveautés. En France, la transposition de la directive s’est faite par un décret daté du 14 août 2023 paru au JORF (4).
La Bibliothèque nationale de France (BnF) a, elle, mis en place la Plateforme de transfert des ouvrages numériques : Platon (5). Au niveau européen, l’ABE Lab (Accessible Backlist Ebooks Laboratory) est une plateforme collaborative aidant les éditeurs sur les solutions et les coûts pour adapter leurs ebooks (6). Bien que la directive ne précise pas de format de fichier, le standard ouvert Epub3 de l’International Digital Publishing Forum (IDPF) fait consensus. @

Rachat d’Activision par Microsoft : pourquoi la Federal Trade Commission s’y oppose toujours

Cinq mois après que la Commission européenne a autorisé – « sous conditions » d’engagements – l’acquisition d’Activision Blizzard par Microsoft, l’autorité antitrust américaine FTC a fait savoir le 13 octobre qu’elle allait continuer à s’opposer à ce big-deal de 69 milliards de dollars.

L’autorité antitrust britannique – la Competition and Markets Authority (CMA) – n’est pas superstitieuse : elle a choisi le « vendredi 13 », en l’occurrence de ce mois d’octobre 2023, pour finalement donner son feu vert à Microsoft pour acquérir Activision Blizzard, mais sans les droits de diffusion en streaming dans le cloud des jeux de ce dernier. Ainsi, les jeux vidéo d’Activision Blizzard – dont les plus populaires comme « Call of Duty », « Diablo », « World of Warcraft », ou encore « Candy Crush » – seront exclus du périmètre de la méga-acquisition pour ce qui concerne les droits de diffusion en Cloud Gaming, lesquels sont cédés au français Ubisoft.

Cloud Gaming : préserver la concurrence
« Nous sommes la seule autorité antitrust au monde à avoir obtenu ce résultat, s’est félicitée le 13 octobre Sarah Cardell (photo de gauche), directrice générale de la CMA. Avec la vente des droits de streaming cloud d’Activision à Ubisoft, nous nous sommes assurés que Microsoft ne puisse pas avoir une emprise sur ce marché important [du Cloud Gaming, ndlr] et en développement rapide. A mesure que le Cloud Gaming se développe, cette intervention permettra aux gens d’obtenir des prix plus compétitifs, de meilleurs services et plus de choix » (1). Le français Ubisoft Entertainment fera donc – à la place de Microsoft qui a présenté cette concession en août dernier – l’acquisition des droits de « Cloud streaming » d’Activision Blizzard en dehors de l’Espace économique européen (EEE), auquel n’appartient plus le Royaume-Uni depuis le Brexit (2). Et ce, pour tout le contenu PC et console d’Activision produit au cours des 15 prochaines années – à savoir jusqu’en 2038.
L’autorité de la concurrence du Cabot Square (Londres) est convaincue que « ce nouvel accord empêchera Microsoft de bloquer la concurrence sur le marché du Cloud Gaming en plein décollage, préservant des prix et des services compétitifs pour les consommateurs britanniques de jeux en nuage ». Ubisoft pourra offrir les jeux vidéo d’Activision Blizzard « sous n’importe quel modèle économique, y compris par le biais de services d’abonnement multi jeux », comme Ubisoft+ (concurrent de Xbox Game Pass ou de EA Play). Cela permettra également de garantir que les fournisseurs de jeux infonuagiques pourront utiliser des systèmes d’exploitation qui ne soient pas forcément Windows de Microsoft pour les titres d’Activision Blizzard, « ce qui réduira les coûts et augmentera l’efficacité ». Une des premières craintes de ce blockbuster deal était que Sony pouvait être la première victime collatérale de cette fusion, le japonais générant un gros chiffre d’affaires avec « Call of Duty » sur sa propre console PlayStation (3). Les revenus de Microsoft dans les jeux vidéo sont inférieurs à ceux de Sony, dont les consoles PlayStation surpassent la Xbox.
La CMA avait bloqué l’opération de concentration Microsoft-Activision le 26 avril dernier en raison des risques d’abus de la position dominante sur le marché du Cloud Gaming (4). L’autorité britannique antitrust a donc donné son feu vert le 13 octobre. « Call of Duty », « Overwatch » ou encore « World of Warcraft » ne passeront pas sous le contrôle nuagique de Microsoft. Alors que la Commission européenne avait été, elle, moins exigeante dans son autorisation sous conditions accordée le 15 mai (5).
Microsoft a pris des engagements auprès de Bruxelles pour une durée de 10 ans, soit jusqu’en mai 2033 : une licence gratuite accordée aux consommateurs de l’EEE, leur permettant de diffuser en streaming sur le service de Cloud Gaming de leur choix, tous les jeux actuels et futurs d’Activision Blizzard pour PC et pour consoles pour lesquels ils disposent d’une licence ; une licence gratuite accordée aux fournisseurs de services de streaming de jeux en nuage, afin de permettre aux joueurs basés dans l’EEE de diffuser en streaming tous les jeux d’Activision Blizzard pour PC et pour consoles. La CMA se dit « convaincue que [les auditions sur ces engagements] fournir[ont] le filet de sécurité nécessaire pour s’assurer que cet accord est mis en œuvre correctement ».

La FTC en appel : audience le 6 décembre
Dans le reste du monde, Edition Multimédi@ constate que la Chine, Taïwan, le Japon, l’Afrique du Sud et le Brésil ont aussi donné leur feu vert à Microsoft. Mais l’obstacle le plus élevé à franchir pour cette opération de concentration sera celui de la Federal Trade Commission (FTC) présidée depuis septembre 2021 par Lina Khan (photo de droite), réputée hostile aux positions dominantes des Big Tech (6). L’autorité antitrust américaine est opposée à ce big-deal – le plus gros jamais envisagé dans l’industrie mondiale du jeu vidéo – annoncé par Microsoft en janvier 2022, mais elle a jusqu’à maintenant échoué à faire bloquer par un juge fédéral l’opération qui va pouvoir a priori être menée à son terme. Sauf coup de théâtre. Car la FTC a fait appel dans le cadre de la procédure judiciaire qui suit son cours aux Etats-Unis : la prochaine audience devant une cour d’appel est prévue le 6 décembre prochain (7).

Microsoft a-t-il crié « Victoire » trop tôt ?
Le 13 octobre, à la suite de l’annonce de la décision de la CMA, la FTC a déclaré auprès de l’agence Reuters qu’elle allait continuer à examiner cette affaire à la lumière de l’accord passé avec le français Ubisoft. « Le nouvel accord de Microsoft et Activision avec Ubisoft présente une toute nouvelle facette de la fusion qui affectera les consommateurs américains, ce que la FTC évaluera dans le cadre de sa procédure administrative en cours. La FTC continue de croire que cet accord est une menace pour la concurrence », a prévenu une porte-parole « Mergers & Competition » de l’autorité antitrust américaine, Victoria Graham.
Pour Microsoft, le feu vert de l’Union européenne puis de la CMA britannique est une grande victoire sur la régulation antitrust. La firme de Redmond (Etat de Washington) compte bien faire le plein de joueurs en ligne en mettant de l’« Activision Blizzard King » (dénomination officielle depuis février 2016) dans le moteur de sa console de jeux vidéo Xbox. Son service par abonnement Game Pass, lequel a franchi pour la première fois la barre des 30 millions de souscripteurs à septembre 2023 – d’après une indiscrétion durant le procès aux Etats-Unis (8), pourrait doubler dès l’an prochain lorsque tous les jeux d’Activision Blizzard King (« ABK »). « Aujourd’hui [13 octobre 2023, ndlr] est une bonne journée pour jouer. Nous accueillons officiellement Activision Blizzard King dans l’équipe Xbox. Ensemble, nous créerons des histoires et des expériences qui rassembleront les joueurs, dans une culture permettant à chacun de faire de son mieux et de célébrer la diversité des perspectives », s’est réjoui sur X (ex-Twitter) Phil Spencer (photo ci-dessus), le Big Boos des jeux vidéo chez Microsoft (9). Phil Spencer est entré chez Microsoft Game Studios il y a 20 ans, pour devenir ensuite le responsable de la Xbox, avant d’être nommé en septembre 2017 vice-président de Microsoft Gaming. Il supervisera les activités d’« ABK », dont l’actuel PDG, Bobby Kotick, restera en poste jusqu’à fin 2023 (10). L’ex-firme de Bill Gates est de moins en moins « Windows-centric » (si l’on peut dire) et entend ainsi marquer de son empire « les jeux, le divertissement et la culture pop » (dixit Phil Spencer). Et celui-ci de rassurer la communauté des gamers, et au passage les autorités antitrust du monde entier : « Que vous jouiez sur Xbox, PlayStation, Nintendo, PC ou mobile, vous êtes les bienvenus ici – et vous le resterez, même si vous ne jouez pas votre franchise préférée sur Xbox. Parce que lorsque tout le monde joue, nous gagnons tous » (11).
Le procès antitrust en cours aux Etats-Unis a permis non seulement de dévoiler les 30 millions d’abonnés actuels au Xbox Game Pass, mais aussi de faire fuiter la « Roadmap to 2030 » de Microsoft Gaming, mise en ligne notamment le 19 septembre dernier par le site américain The Verge. Selon ce document confidentiel (12), datant cependant d’avril 2022, l’on y apprend que Microsoft vise les 100 millions d’abonnés à la fin de la décennie en cours.
La firme de Redmond prévoit aussi une nouvelle console Xbox Series X en novembre 2025 sous le nom de code « Brooklin » et dotée d’une nouvelle manette baptisée « Sebille ». Elle serait précédée en septembre 2025 de la Xbox Series X (nom de code « Ellewood ») avec elle aussi sa nouvelle manette « Sebille ». Et l’on apprend même que la 10e génération de consoles Xbox (« Gen 10 ») est programmée pour l’année 2028. Après la fuite de cette roadmap confidentielle, Phil Spencer a dû relativiser la portée de ces révélations : « Tant de choses ont changé » (13) depuis ce document établi en avril 2022. Quoi qu’il en soit, même si MicrosoftActivision est maintenant sur les rails, la FTC est décidé à empêcher cette « entente » de prospérer.

« COD » sur PSP de Sony durant 10 ans
« L’acquisition constitue une menace pour la concurrence », a insisté sa porte-parole Victoria Graham, quand bien même que Microsoft ait proposé de mettre l’une des principales franchises de jeux d’Activision, « Call of Duty », à disposition des autres consoles pendant 10 ans – notamment de la PlayStation de Sony (14). Ni le département de la justice américaine (DoJ) ni la Maison-Blanche n’ont commenté cette affaire antitrust en cours d’instruction. En 2021, la FTC avait réussi à bloquer sur le marché stratégique des semiconduc-teurs le projet d’acquisition d’ARM par le géant des puces graphiques et d’IA Nvidia, lequel avait aussitôt jeté l’éponge. C’est une issue encore possible pour la fusion « Microsoft-Activision ». @

Charles de Laubier

IA générative : le prompt engineering va révolutionner la presse en éditant des journaux sur mesure

L’ingénierie rapide – prompt engineering – s’apprête à révolutionner le monde des médias en général et de la presse en particulier. Ce processus puissant utilisé par les IA génératives va permettre à un lecteur de créer son journal sur mesure, en fonction de ses préférences et centres d’intérêt.

Attention : tsunami en vue pour la presse. Les IA génératives s’apprêtent à prendre des airs de rédacteur-en-chef et de chef d’édition. Grâce à la puissance du prompt engineering, les «ChatGPT» vont permettre potentiellement à chaque lecteur de pouvoir générer sur mesure son propre journal d’actualités en fonction de ses critères et ses thèmes préférés. De quoi court-circuiter les médias traditionnels encore attachés à l’« œuvre collective » qu’est un journal écrit par des journalistes.

Un journal personnalisé en 10 mn chrono
Lors d’un meetup organisé fin septembre par Comptoir IA, deux jeunes frères (1) ont fait frémir des dirigeants de médias traditionnels et des éditeurs de presse qui ont assisté à leurs dix minutes de démonstration. Thibaut et Pierre de La Grand’rive (photos) ont créé cet été leur société, Delos Intelligence, présentée comme une « agence de service et de conseil informatique spécialisée dans l’IA générative ». Respectivement président et directeur général, Thibaut (24 ans) et Pierre (26 ans) ont présenté leur projet qui pourrait disrupter le monde des journaux et du journalisme.
« Après le lancement de ChatGPT, nous nous sommes lancés dans le projet “Autonews”, qui s’appelait à l’origine “Newstaylor”. Il s’agit d’un journal complètement automatique. Il a fallu pour cela s’approprier l’ingénierie du prompt ou prompt engineering. Et avec cette idée que, demain, le média serait probablement individuel, individualisé. Ou en tout cas que l’on tendrait vers ça. Et demain peut-être auronsnous chacun nos propres articles en fonction de nos demandes ou de nos préférences », a expliqué Pierre de La Grand’rive. Prompt engineering, quèsaco ?C’est la méthode ou processus puissants qu’utilisent les ChatGPT, Midjourney et autres Bard pour optimiser leurs résultats produits par leurs IA génératives. Appliqué à la presse et à l’actualité, cela donne un journal sur mesure réalisé automatiquement en un temps record. « On a, avec l’IA générative, une explosion de créativité dans le cadre de ce qui est possible pour la machine. On veut aussi bouleverser par ce projet les cadres rigides des médias. On propose des articles et des formes d’articles novatrices et ambitieuses », a poursuivi celui qui est aussi directeur technique, et ingénieur IA générative. Son frère cadet, Thibaut de La Grand’rive, se présente, lui, comme directeur commercial. « Autonews va chercher 600 articles lus (sélectionnés) et en fonction des profils indiqués ; il rédige 50 articles complètement, différents à partir des mêmes actualités. Et ce, réalisé en l’espace de 10 mn, ce qui met au défi pas mal de rédactions de journaux traditionnels », a indiqué ce dernier. Pour personnaliser son journal, il suffit d’indiquer son profil et ses centres d’intérêt (politique, économie, international, culture, sport ou autres thèmes), son âge et son temps de lecture disponible (10 mn de métro ou 50 mn de voiture jusqu’à son travail).
« Vous pouvez avoir la taille d’article en fonction de ce que vous indiquez à la machine, a souligné Thibaut de La Grand’rive, avec des tons d’écriture : brief d’actualités pertinentes, ton enfantin du type “Le Petit Quotidien”, ton traditionnel du journal d’avant, ou encore ton conversation entre deux experts dans leur domaine. En résonnance, Autonews adaptera l’intégralité du contenu de votre journal en fonction de votre profil. C’est dans cette démarche que nous voulions faire le journal sur mesure ». Son frère aîné, lui, a précisé qu’un seul prompt ne suffisait pas pour traiter toute l’actualité. Il y a donc fallu créer toute une chaîne de prompts, le fameux prompt engineering. « L’IA générative va amener la machine à raisonner et inclure véritablement ce raisonnement à l’intérieur d’un code pour jouer le rôle de rédac’ chef pour sélectionner les actualités parmi les trop nombreuses par jour. Nous avons été surpris par la qualité de rédaction de ces articles », a confié Pierre de La Grand’rive.

Jacques Rosselin et David Guiraud inquiets
Présent à ce meetup, Jacques Rosselin, le fondateur de Courrier International (exploitant 800 médias sources et ayant nécessité jusqu’à 40 journalistes) leur a demandé si l’on pourrait « faire Courrier International avec une personne maintenant ? ».Réponse de Pierre, l’ingénieur IA générative : « Honnêtement, avec une personne, peut-être pas, mais tenir un journal avec quatre personnes avec un bon responsable marketing et un bon ingénieur qui font bien fonctionner leurs méninges, oui, vous pouvez vous positionner ». De son côté, devant l’Association des journalistes médias (AJM) le 5 octobre, David Guiraud – ancien dirigeant du Monde et des Echos, et actuel président de Ouest-France (2) – a indiqué avoir assisté à ce meetup : « On se retrouve déjà avec un flot de contenus et face à une concurrence énorme. Le risque est que l’on soit pris dans cette sorte de tsunami qui nous empêche de faire notre travail ». @

Charles de Laubier

Le Média, une nouvelle chaîne autorisée par l’Arcom

En fait. Le 20 octobre, soit un peu plus de trois mois après avoir eu le feu de l’Arcom via une convention signée le 12 juillet 2023, la chaîne de télévision Le Média TV peut être diffusée sur les « box » des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) en France. Mais pour l’instant, seul Free l’accueil sur le canal 350.

En clair. Le Média veut défier les grandes chaînes d’information en continu que sont BFMTV (détenue par le groupe Altice de Patrick Drahi), LCI (du groupe TF1 de Martin Bouygues), de CNews (du groupe Vivendi de Vincent Bolloré) et de Franceinfo (du groupe France Télévisons/Radio France de l’Etat). Le président de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), Roch-Olivier Maistre, a signé le 12 juillet 2023 une convention de douze pages (1) autorisant la société éditrice Le Média à « diffuser ou distribuer » sa chaîne Le Média TV (son nom officiel) « par les réseaux n’utilisant pas des fréquences assignées par l’Arcom ».
Autrement dit, cette nouvelle venue dans le PAF (2) – au nom du pluralisme (3) – peut-être disponible sur les réseaux IPTV (« box ») et le câble (comme l’ex-Numericable d’Altice/SFR), mais pas sur les fréquences hertziennes de la TNT. Conventionnée par l’Arcom, la chaîne Le Média devait être lancée le 20 octobre sur les « box » des opérateurs télécoms Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free. Or seul ce dernier a bien voulu l’accepter sur sa Freebox où elle est accessible sur le canal 350. Conformément à sa convention, Le Média a une « programmation consacrée à l’information politique et générale, notamment au travers d’émissions de débats, de magazines ou de directs ». En ligne depuis sa première émission diffusée sur YouTube le 15 juin 2018 (l’association à l’origine du projet avait été créée, elle, en 2017), la webTV sur YouTube (4) totalise près de 1 million d’abonnés (983.000 précisément au 27 octobre). Il faudra du temps au « Média » pour espérer voir son audience « IPTV » sortir de son caractère confidentiel comme cela a été le cas lors de ses débuts sur la Freebox. Il faudra aussi des moyens financiers à la société éditrice indépendante – dont les statuts furent transformés en société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) en avril 2021.
Pour l’heure, sa campagne sur KissKissBankBank (5) porte ses fruits : 246.683 euros apportés par 5.180 contributions au 27 octobre (à 8h), dont 75 % seront consacrés aux salaires de l’équipe, sachant qu’il lui faudra plus pour être pérenne. Cosignataire de la convention avec Roch-Olivier Maistre, Khadija Jebrani est la responsable administrative et présidente du directoire de la « SCIC SA » Le Média, qui est une société anonyme à capital variable, et à conseil d’administration et directoire. @