A 60 ans, le Marché du Film se prépare au futur

En fait. Du 14 au 23 mai, parallèlement au Festival de Cannes, se tient le Marché du Film qui fête cette année ses 60 ans d’existence. Au sein de ce marché international du cinéma aux 800 millions de dollars par an, les nouvelles technologies s’invitent et pour la première fois un espace « Cannes XR » est créé.

En clair. « Le Marché du Film génère chaque année environ 800 millions de dollars de chiffre d’affaires (1), comprenant les transactions de financement, de cofinancement,
de ventes ou d’acquisitions. Cette évaluation, faite environ tous les cinq ans, date d’il
y a trois ans. Les revenus sont plutôt dans la stabilité, car les prix de vente ne progressent pas et, par exemple, la VOD offre de nouvelles opportunités mais ses revenus sont plus faibles », indique Jérôme Paillard, directeur exécutif du Marché du film, à Edition Multimédi@. Les technologies numériques font une percée remarquée. Pour ses 60 ans, le Marché du Film ouvre l’espace « Cannes XR » (pour Extended Reality) consacré à la réalité virtuelle (VR), à la réalité augmentée et à la réalité mixte. Ce nouvel espace présente près de 80 films « XR », c’est-à-dire des contenus narratifs, documentaires, fictions ou animations (pas de jeux vidéo donc) utilisant des technologies d’immersion. « Il n’y a pas de long-métrage ; il n’en existe pas dans ces technologies. Ce sont des films qui font entre 5 et 15 voire 20 minutes, car le mode de présentation de la VR dans un casque fait que cela n’est pas assez confortable pour y rester une heure et demie », fait remarquer Jérôme Paillard. Outre les conférences, il y a aura une douzaine d’exposants (2) comme Intel qui montrera la capture volumétrique (filmer dans toutes les directions pour créer un film en 3D) ou Immersify qui présentera la salle immersive pour voir des contenus VR sans casque (contenus panoramiques
sur écran de 180 degrés). « Comme la VR nécessite de monter fortement en résolution pour obtenir un écran beaucoup plus grand – en 360° – qu’un écran de cinéma, nous projetons en ultra-haute définition 8K ou 16K, voire en 64K pour avoir des images immenses couvrant la totalité de la sphère. La VR ne se voit pas forcément dans la salle de cinéma mais dans des lieux comme le “lobby” du cinéma ou des endroits spécialisés appelés LBE (3) », explique-t-il. Et pour la sixième année, le programme Next, lui, présente la blockchain, l’intelligence artificielle et des start-up mettant l’analyse du Big Data, la sécurisation, la distribution ou encore l’audience au service
du cinéma. Globalement, 70.000 professionnels du cinéma sont inscrits sur le réseau social professionnel Cinando, créé il y a dix ans par le Marché du Film et où les films peuvent être visionnés en ligne. @

Cinéma, audiovisuelle, jeu vidéo : la réalité virtuelle subventionnée par le CNC cherche son écosystème

Selon nos informations, le CNC a apporté depuis 2015 son soutien financier à
365 projets dits d’« expériences numériques » (réalité virtuelle, réalité augmentée, créations immersives, …) à hauteur de quelque 6,7 millions d’euros. Depuis octobre, un nouveau fonds « XN » leur est dédié.

Si la réalité virtuelle – présente depuis les années 1990 dans des applications plutôt professionnelles – a commencé à s’imposer en France à partir de fin 2014 comme perspective technologique immersive et créative numérique, l’année 2018 est sans doute celle où la VR (Virtual Reality) devient une réalité de marché grand public et un écosystème prometteur, rejoignant ainsi le cinéma, l’audiovisuel et le jeu vidéo. Cette nouvelle industrie culturelle qui émerge concrétise une convergence entre les autres mondes créatifs, arts graphiques et industries de l’image animée déjà existants, en lui apportant une nouvelle dimension.

Du Fonds nouveaux médias au Fonds XN
Depuis près de deux ans, le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) soutient financièrement la réalité virtuelle en injectant dès 2015 et 2016 dans une soixantaine de projets 3 millions d’euros via son Fonds nouveaux médias. Depuis, les subventions dans la VR de la part de cet établissement public administratif – placé sous la tutelle du ministre de la Culture – n’ont cessé de croître. « Les œuvres immersives, utilisant les technologies de la réalité virtuelle et augmentée, se sont imposées comme le format dominant, en représentant 59 % des investissements : 60 projets, 2,2 millions d’euros investis », indique le CNC dans son rapport d’activité 2017 publié en septembre dernier. Ainsi, l’an dernier, la VR a absorbé 60 % des aides sur une enveloppe totale
de 3,7 millions du Fonds nouveaux médias (1). Ce fonds est doté d’un budget en croissance de plus de 27 % en un an, tandis le nombre de dossiers de candidatures déposés a fait un bond de 26 %.
C’est dans le prolongement de l’ancien Fonds nouveaux médias que le CNC a créé en octobre 2018 le Fonds d’aide aux expériences numériques. D’emblée, ce nouveau fonds est doté de 3 millions d’euros. Surnommé « Fonds XN », il est placé sous la responsabilité de Pauline Augrain (photo de gauche), cheffe du service de la création numérique, lequel regroupe le Fonds d’aide au jeu vidéo, le Fonds nouveaux médias, le Dispositif pour la création artistique multimédia et numérique (Dicréam), et maintenant le Fonds d’aide aux expériences numériques (XN). « Le Fonds XN soutient des œuvres audiovisuelles innovantes fondées sur une démarche de création interactive et/ou immersive », explique le CNC. Ces œuvres immersives et interactives sont définies comme des projets de création audiovisuelle développant une proposition narrative
et destinés à un ou plusieurs supports, lesquels permettent « une expérience de visionnage dynamique fondée sur l’activation de contenus ou par simple déplacement du regard ». Et le CNC de préciser : « Ce champ d’intervention recouvre notamment les œuvres destinées aux technologies immersives (réalité virtuelle et augmentée) et les narrations interactives conçues pour le Web ou les écrans mobiles. Naturellement hybrides et transdisciplinaires, ces œuvres se situent principalement au point de rencontre du cinéma et du jeu vidéo » (2). Le 6 novembre dernier, ont été nommés pour deux ans les membres de la commission du nouveau Fonds XN, dont la présidente, Zabou Breitmann (photo de droite), comédienne, réalisatrice, metteur en scène de métier. Cette commission est en fait dénommée, dans le règlement général des aides financières du CNC, « commission des aides aux œuvres immersives ou interactives » (3). Son vice-président est Nicolas Peufaillit, scénariste. Y siègent également douze membres titulaires, parmi lesquels Anne Careil, responsable marketing stratégique de Sony Pictures (4), Holta Hoxha- Carron, directrice de 1000 Visages Production (5), ou encore James Sénade, directeur des effets visuels (VFX) chez Saint George Studio.
« Intervenant dans le champ du film (Fonds nouveaux médias), du jeu vidéo (Fonds d’aide au jeu vidéo), de l’art contemporain et du spectacle vivant (Dicréam), ces aides offrent un point de vue panoramique et démontrent que la réalité virtuelle traverse bien tous les univers créatifs », relève le CNC qui constate que les projets de films –
d’« inspiration cinématographique » – sont les plus nombreux. Ainsi, 75 % des projets soutenus proposent des narrations immersives fondées sur une démarche documentaire ou une écriture de fiction.

Des habitués : Atlas V, Bachibouzouk, …
La première date limite de dépôt des projets qu’examinera en 2019 cette commission
« XN » nouvellement constituée était fixée au 16 novembre dernier. Prochaine échéance des candidatures : 15 février 2019. Mais les premiers projets aidés par le CNC de réalité virtuelle et/ou de réalité augmentée ne datent pas d’hier car, selon nos calculs, ce ne sont pas moins de 369 projets « XN » qui ont été aidés financièrement par le CNC depuis juillet 2015 – soit sous la forme d’aide à l’écriture et aux auteurs,
soit d’aide au développement et aux producteurs, soit d’aide à la production et aux producteurs.
Parmi les sociétés de production subventionnées (6), l’on retrouve souvent Atlas V (40.000 euros pour « Gloomy eyes », 60.000 euros pour « Vestige » , 35.000 euros pour « Destin », 50.000 euros pour « Evolve Revolve », 180.000 euros pour
« Battlescar », 55.000 euros pour « Le Refuge », 200.000 euros pour « Lights Prodrome », etc.), ainsi que la société Bachibouzouk (25.000 euros pour
« Architectvre », 60.000 euros pour « La Barricade », 65.000 pour « Panama Al Brown, L’énigme de la force », etc.).

Interdisciplinarité, convergence, mixité
Les sociétés de production Cinétévé, Red Corner ou encore Narrative ont aussi été subventionnées (7). « Ces projets, qui se caractérisent par leur diversité (prises de vue réelles ou images de synthèse, différents niveaux d’interactivité…), confirment que la VR est un point de rencontre inédit, particulièrement prolifique, entre des créateurs de culture audiovisuelle et de culture numérique », souligne le CNC. Réalité virtuelle rime avec interdisciplinarité : « Cette mixité va bien au-delà de la convergence entre le film
et le jeu vidéo. Des connexions s’établissent immédiatement avec le spectacle vivant, capable de spatialiser et de chorégraphier la mise en scène, l’architecture qui pense en volume, le son qui joue un rôle clé dans le processus immersif en permettant de guider le regard du spectateur dans une direction ou dans une autre ».
Certaines productions dites « filmiques » en réalité virtuelle se sont même vu octroyer un complément de financement – 590 000 euros en plus investis dans 10 projets en 2017 – par les « aides à la création visuelle ou sonore par l’utilisation des technologies numériques de l’image et du son » (CVS), anciennement « aides aux nouvelles technologies en production » (NTP). A cela s’ajoute le fait que les entreprises qui développent des solutions technologiques innovantes pour les productions en réalité virtuelle peuvent être soutenues – au titre de leur activité de R&D – à travers le Réseau recherche et innovation en audiovisuel et multimédia (Riam), partenariat entre le CNC et Bpifrance. Les société Be Contents, Théoriz, ou encore Reviatech ont ainsi pu en bénéficier entre 2014 et 2016. En 2017, indique le CNC, « une dizaine de projets liés aux technologies immersives et interactives ont ainsi été accompagnés ». Les applications sont variées : il s’agit, par exemple, de concevoir des outils de captation 360° ou des outils de production et post production adaptés aux contenus en réalité virtuelle et aux contraintes inhérentes à ce nouveau format. Le Fonds XN complète en outre les autres dispositifs de soutien à la création audiovisuelle pour le Web que sont le Fonds de soutien audiovisuel des œuvres linéaires (séries digitales notamment) destinées aux SMAd (services de médias audiovisuels à demande) et le Fonds « CNC Talent » destiné aux créateurs vidéos sur Internet (YouTube, Dailymotion, et autres plateformes gratuites).
Au travers de son nouveau Fonds XN, l’établissement public du boulevard Raspail poursuit des objectifs artistiques mais entend aussi favoriser la structuration de cette industrie culturelle émergente : « Les entreprises de productions ont la possibilité d’explorer tous les modèles de financement et de distribution qui permettent de dessiner les contours de ce nouveau marché ». Le marché de la VR et des expériences immersives se structure et devient réalité économique. La deuxième édition du Venice Virtual Reality, section « réalité virtuelle » de la Mostra de Venise, a donné fin août-début septembre un coup de projecteur sur une trentaine d’œuvres en VR, dont huit françaises (« The Horrifically Real Virtuality » par, « Umami », « Spheres : Chorus of the Cosmos », « L’Ile des morts », « Battlescar », « The Roaming – Wetlands », etc.). La France est aux avant-postes de la VR ; le Laval Virtual, grand salon professionnel dédié aux technologies immersives, a fêté ses 20 ans. Aux Etats-Unis, le Sundance Film Festival, le plus grand rendez-vous du film indépendant outre-Atlantique créé il y
a 40 ans, s’est ouvert le premier à la VR il y a près de cinq ans.
La réalité virtuelle n’est pas seulement réservée au cinéma, à l’audiovisuel et aux jeux vidéo ; elle donne une dimension 3D aux musées (Muséum national d’histoire naturelle, par exemple), aux salles de cinéma (Pathé Gaumont Beaugrenelle/La Villette, …), aux édifices du patrimoine (Théâtre antique d’Orange, Rome Reborn, …), aux événements culturels, aux parcs zoologiques (Wild Immersion …), aux reconstitutions historiques, aux complexes sportifs (projet vidéoludique Stadium 2.0 (8), …), ou encore aux parcs d’aventures (Illucity ouvert fin novembre à Paris (9)). L’arrivée de la 5G entre 2020 et 2021 devrait apporter le très haut débit et les faibles temps de latence dont la réalité virtuelle et la réalité augmentée ont besoin pour fluidifier leurs œuvres immersibles.

Europe Creative, MEDIA et VR
La Commission européenne, par la voie de Mariya Gabriel, commissaire en charge de l’Economie et de la Société numérique, a prévenu en mai dernier que « l’Europe devra se montrer innovante dans ses procédés de narration pour prendre en compte les évolutions récentes (…) comme dans le cas de la réalité virtuelle ». Les aides communautaires sont apportées via le volet MEDIA du programme Europe Creative (10). En lançant « Rift », le premier casque de VR, la société Oculus – rachetée en 2014 par Facebook – n’a pas démocratisé la réalité virtuelle auprès de 1 milliard d’individus (comme le promettait Mark Zuckerberg) mais elle a montré la voie. Sony, Samsung, Microsoft, ou encore HTC s’y sont mis aussi. @

Charles de Laubier

TV 4K, jeux vidéo immersifs, réalité virtuelle, voiture autonome, infotainment,… : les promesses de la 5G

Tout le monde parle de la 5e génération de mobile, alors que la norme n’est pas encore fixée. La première version sera présentée en septembre 2018, suivie de la seconde en 2020. Mais la patience sera récompensée : les débits seront jusqu’à 20 fois supérieurs à ceux d’aujourd’hui. Pour quels contenus ?

Dans son rapport « Les modèles de déploiement de la 5G se précisent » (1), publié le 10 juillet dernier, le cabinet d’étude Arthur D. Little (ADL) prévoit une explosion des contenus multimédias grâce à la prochaine génération de réseaux mobiles très haut débit. « Grâce à son potentiel de forte augmentation de la vitesse et de la bande passante, la 5G présente le potentiel propice au développement d’une vaste gamme d’expériences interactives pour les clients, par exemple dans le domaine des jeux vidéo immersifs, la retransmission d’événements sportifs, les voitures autonomes, et l’infotainment en réalité augmentée, avec des usages actuellement en cours de définition », explique Karim Taga, analyste associé chez ADL.

Mobile ou fixe, la 5G se met en 5
Le grand public a donc tout à gagner avec l’arrivée de la 5G prévue à partir de 2018. Les entreprises ne seront pas en reste, pour peu qu’elles développent leurs propres écosystèmes pour bénéficier du très haut débit mobile tels que les Smart Cities ou Smart Manufacturing. Les opérateurs télécoms, eux, sont sur les starting-blocks pour le déploiement du mobile du futur. Le cabinet ADL a identifié cinq modèles de déploiement et d’usages de la 5G :
• Fournir un très haut débit « Gigabit » aux clients particuliers résidentiels, et agir comme un complément efficace aux offres de fibre existantes et de réseaux câblés sur le « dernier kilomètre » du réseau.
• Fournir à l’échelle nationale une expérience mobile de nouvelle génération qui permettra le développement de nouveaux usages et de nouvelles applications, induites par les technologies de réalité virtuelle, l’Internet tactile, etc.
• Fournir une connectivité hautement fiable, avec une faible latence et des solutions pour les entreprises clientes améliorant à la fois l’efficacité et la productivité.
• Développer des écosystèmes industriels digitaux via une connectivité « Machine-to-Machine » permettant de développer de nouveaux écosystèmes de services avec les partenaires, les fournisseurs et les utilisateurs.
• Fournir la nouvelle génération de solutions Infrastructureas- a-Service (IaaS) sur l’ensemble du territoire pour plusieurs pays. « Les acteurs qui ne sont pas opérateurs télécoms sont déjà actifs dans les produits compatibles 5G, avec des expériences pilotes dans la conduite autonome, dans les services de divertissement instructif (infotainment) et d’autres cas d’utilisation. Si les opérateurs télécoms n’agissent pas vite, ces nouveaux acteurs prendront une part de plus en plus grande de ce nouvel écosystème », préviennent les auteurs du rapport, Karim Taga, Richard Swinford et Glen Peres. Selon eux, la 5G est censée pousser plus loin la digitalisation de l’économie à travers les services de cloud, les nouvelles générations de transactions (telles que la blockchain nécessitant de grandes puissances de calculs dans une informatique étendue), le Big Data, la réalité virtuelle (VR), la réalité augmentée (AR), l’intelligence artificielle (AI) et l’Internet des objets (IoT). Et ce, grâce aux larges volumes de données traités et au faible taux de latence dans les communications temps réel.
La 5G s’annonce comme disruptive, aussi bien en mobilité mais aussi – et surtout ? – dans le fixe. Elle pourra en effet être utilisée comme réseau haut débit fixe sans fil dans certaines régions périphériques ou rurales où la fibre optique et/ou les réseaux câblées n’iront pas forcément. « La 5G peut être utilisée pour du Gigabit à la maison. Il y aura des besoins pour fournir des centaines de Mégabits de débits, si ce ne sont pas des Gigabits, pour une part significative de foyers dans un futur proche, induits par la concurrence et stimulés par les applications nécessitant une large bande passante (au-delà de la 4K TV). Beaucoup d’opérateurs télécoms n’ont pas encore mis à niveau leur réseau fixe historique pour offrir des accès Gigabits », explique le rapport ADL. L’arrivée de la 5G s’accompagnera donc immanquablement d’une réflexion sur les modèles économiques à adopter par les opérateurs télécoms et les fournisseurs de contenus/services.

La 5G à l’assaut du living-room
L’écosystème des réseaux « mobile » de cinquième génération ne se fonderont plus seulement sur le chiffre d’affaires générer par l’accès (l’abonnement), mais aussi sur le partage de recettes avec la prochaine génération de fournisseurs de contenus/services. Par exemple, plusieurs fabricants sont en train d’entrer dans le salon des particuliers avec de nouveaux appareils. Cela va de l’américain Apple avec son HomePod, pour transformer le domicile en nouvel environnement virtuel, au français Devialet avec ses équipements sonores de haute qualité pour la maison. Mais il y a aussi de bien d’autres start-up qui cherchent à conquérir ce nouvel Eldorado, comme dans le domaine des jeux de réalité virtuelle permettant à des joueurs respectivement chez eux de jouer et communiquer ensemble comme s’ils étaient dans la même pièce !
Chine : plus grand réseau 5G du monde Selon la GSMA, l’association mondiale des opérateurs mobile (forte de ses 1.100 membres dont 800 opérateurs), c’est la Chine
qui prépare le plus grand déploiement de 5G au monde. « En Chine, les opérateurs mobiles prévoient une période d’essais échelonnés pour les réseaux 5G entre 2017
et 2019, avant le lancement commercial à l’horizon 2020. Suite au déploiement commercial, il est prévu que les connexions 5G en Chine atteindront les 428 millions
en 2025, représentant 39 % des 1,1 milliard de connexions 5G dans le monde à cette date », a indiqué le 27 juin dernier Mats Granryd (photo page précédente), directeur général de la GSMA, à l’occasion de la présentation d’un rapport sur l’Asie-Pacifique (2). La Chine devrait gagner 155 millions de nouveaux abonnés mobiles d’ici fin 2020, soit la seconde plus importante conquête de nouveaux clients mobiles au monde (3). L’Empire du Milieu totalisera alors à la fin de la décennie 1,2 milliards d’abonnés mobile, soit 86 % de sa population.

La France est sans doute la plus symptomatique de ce que peuvent vivre les régions
en termes de couverture mobile. Fin juin, plusieurs organisations de collectivités territoriales – Association des maires de France (AMF), Assemblée des départements de France (ADF), Région de France (RF), Association nationale des élus de la montagne (Anem), Association des maires ruraux de France (AMRF) et Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca) – ont appelé le gouvernement à lancer un « Plan France mobile » comme il y a déjà un
« Plan très haut débit ». Elles demandent à ce que la couverture intégrale du territoire en 5G soit achevée dans les cinq prochaines années à partir du coup d’envoi commercial, et non pas comme la 4G qui fut lancée commercialement fin 2012 mais peine encore à être déployées partout en France. Mais le nouveau gouvernement, lui, a promis « la 4G partout en France d’ici 2020 ». L’Arcep, elle, prépare l’ouverture à partir de septembre prochain du processus d’attribution des fréquences 2,6 Gigahertz (Ghz) et 3,5 Ghz pour le déploiement de la 5G, de l’Internet fixe très haut débit radio (THD radio) et de réseaux mobiles professionnels (dits PMR) sur l’Hexagone, mais il faudra attendre au moins 2020 avant les premiers lancements commerciaux. Cependant, sans attendre l’attribution des licences 5G, les opérateurs télécoms intéressés pourront réaliser des pilotes dans les villes de Lyon, Nantes, Lille, Le Havre, Saint-Etienne et Grenoble dans un premier temps. Pour la THD radio, l’Arcep lance en juillet une consultation publique en vue de débuter le processus d’attribution des fréquences
3,5 Ghz dès septembre prochain. Pour la PMR, la consultation publique aura lieu à l’automne pour le coup d’envoi du processus d’attribution d’ici la fin de l’année. Enfin, pour la 5G proprement dite, les autorisations des opérateurs télécoms disposant déjà de fréquences dans la bande 3,4-3,8 Ghz seront modifiées d’ici la fin de l’année, tandis que la procédure d’attribution des fréquences 5G sera préparée en 2018.
Au niveau européen, les eurodéputés ont adopté le 1er juin dernier une première résolution (4) sur la 5G – 571 voix pour, 32 voix contre et 35 abstentions – pour que la couverture télécoms soit la même dans toute l’Union européenne (UE), tout en évitant un développement numérique inégal entre des secteurs tels que les transports et le tourisme. « L’intelligence artificielle et la robotique exigent des règles claires en matière de sécurité et de responsabilité. Les écoles doivent enseigner les compétences numériques afin de combler le “fossé numérique” et de garantir une transition efficace vers l’économie intelligente », ont-ils déclaré (5). Dans une seconde résolution (6) adoptée le même jour, les eurodéputés ont appelé à saisir les opportunités de la 5G.
« Pour éviter des retards tels que ceux engendrés pendant le déploiement de la 4G, les Etats membres doivent mieux coopérer dans le cadre de la stratégie européenne en matière de fréquences », ont-ils expliqué, en estimant que « la 5G, c’est plus qu’une révolution mobile ». Le petit Etat européen de Saint-Marin, lui, prétend être « un des tout premiers pays au monde à introduire la 5G » avec Telecom Italia (dont Vivendi est le premier actionnaire). Le nombre d’emplois directs et indirects concernés dans l’UE par le déploiement de la 5G est estimé à 2,3 millions.

Première norme 5G en septembre 2018
Mais pour l’heure, aucune norme n’a été définie au sein du 3GPP (7). La release 15,
à savoir la première norme 5G du 3GPP, est en cours de rédaction : les spécifications de la nouvelle architecture ont commencé en décembre 2016. Et depuis mars dernier, est censée être étudiée une nouvelle interface radio appelée NR pour New Radio. Une première version du standard devrait être validée en septembre 2018, tandis qu’une deuxième (3GPP release 16) devrait être publiée en mars 2020. La 5G promet un débit utilisateur et un débit maximal respectivement 10 et 20 fois supérieur aux capacités actuellement. Le temps de latence devrait être divisée par au moins 10 : la latence point à point cible est de 1 ms, contre 30 à 40 ms à ce jour : l’Internet mobile a de beaux jours devant lui. @

Charles de Laubier

Pokémon Go devrait atteindre 1 milliard de dollars cumulés de chiffre d’affaires dès cet automne !

L’engouement fulgurant et planétaire pour l’application mobile Pokémon Go, créée par l’Américain John Hanke, fondateur et dirigeant de la start-up Niantic, est sans précédent. Il pourrait lui faire gagner beaucoup d’argent, ainsi qu’à ses actionnaires : The Pokemon Company, Alphabet (Google) et Nintendo.

Lancée mondialement en juillet sur App Store et sur Google Play, l’application de jeu sur mobile Pokémon Go – éditée par
la start-up américaine Niantic – a généré en deux mois (juillet et août) plus de 310 millions de dollars de chiffre d’affaires cumulé. C’est ce qu’a indiqué à Edition Multimédi@ Randy Nelson, spécialiste mobile de la société de développement Sensor Tower, qui a révélé les premières estimations.
Pokémon Go a ainsi surpassé les autres jeux mobile du moment : Clash Royale lancé par Supercell en mars, Candy Crunsh Soda Saga édité par King Digital, et Angry Birds 2 de Rovio. A observer la courbe de progression exponentielle des revenus de ce jeu-phénomène de réalité augmentée, il y a fort à parier que le cumule atteigne dès cet automne 1 milliard de dollars de recettes ! « C’est possible », nous répond Randy Nelson. La société d’analyse App Annie prévoit, elle, que ce seuil sera atteint d’ici la fin de l’année. Le démarrage sur les chapeaux de roues du jeu de Niantic est du jamais vu pour un jeu sur mobile, selon le Guinness des Records qui a certifié le record de 130 millions de téléchargement effectués en un mois de par le monde depuis le lancement initial de Pokémon Go le 6 juillet dernier – et le 24 juillet en France – et de 100 millions de dollars collectés en tout juste vingt jours (1). En quelques jours, il est devenu un jeu de référence planétaire et déjà mythique.

Devant WhatsApp, Instagram, Snapchat et Facebook
La société SocialBakers, spécialisée dans le marketing sur réseaux sociaux, constate que l’appli ludique de Niantic s’est rapidement retrouvée plus utilisée que WhatsApp, Instagram, Snapchat ou même Facebook Messenger. Se promener et chasser, plutôt que de s’exhiber et chatter… Les joueurs utilisent la technologie satellitaire GPS pour traquer et capturer Pikachu, Dracolosse, Ronflex, Bulbizare, Carapuce, Rinoferos et autres monstres virtuels situés sur la cartographie fidèle aux lieux, bien réels eux, arpentés par les Pokémonmaniaques. Les créatures imaginaires y sont représentées en réalité augmentée, technologie permettant de faire apparaître des éléments virtuels dans le monde réel.
En se déplacement physiquement, dans la plupart des pays cartographiés pour Google Maps, le mobinaute se déplace dans le jeu à la recherche de Pokémon, de Pokéstops et d’arènes (2).

Du free-to-play au app-to-store
Et cette Pokémonmania, qui fait sortir les gamers et leurs avatars de chez eux, va rapporter gros non seulement à la start-up californienne Niantic – fondée en 2010 au sein de Google par le créateur du jeu, John Hanke (photo de Une), avant de devenir une entreprise indépendante en octobre 2015 – mais aussi à ses trois principaux actionnaires : Alphabet (Google), The Pokémon Company et Nintendo. Le jeu est
free-to-play, mais la gratuité a vocation à générer du chiffre d’affaires selon un modèle économique imparable. Si la plupart des joueurs se contentent de jouer sans rien
payer, une proportion non négligeable consentent à acheter des outils virtuels qui
leur permettent de progresser plus vite dans les niveaux de jeu.
D’après la société d’analyses AppsFlyer, environ 5 % des utilisateurs de ces jeux
free-to-play font des achats dans l’appli (in-app) pour une dépense de près de 10 dollars par mois en moyenne (3). Ainsi, il est par exemple possible d’acheter 100 PokéCoins pour 0,99 dollar, 1.200 PokéCoins pour 9,99 dollars, jusqu’à 14.500 PokéCoins pour 99,99 dollars.
Bien que les petits ruisseaux fassent les grandes rivières, ces petites dépenses in-app ne suffiront pas seules à Niantic pour franchir la barre du 1 milliard de dollars de recettes. Pour y parvenir, l’entreprise de John Hanke table en outre sur les lieux sponsorisés que des annonceurs et/ou des commerçants proposeront aux chasseurs de Pokémon avec l’espoir que ces derniers deviennent clients. Le potentiel de recettes issues du app-to-store, le pendant du web-to-store destiné à faire venir les mobinautes dans les magasins pour les inciter à dépenser, est sans limite. Au Japon, par exemple, Pokémon Go a noué un partenariat avec la chaîne de fast-food américaine McDonald’s. « Puisque l’on peut attirer les personnes dans des lieux physiques, nous pouvons faire quelque chose que ne peuvent pas faire beaucoup d’autres formes de publicité », s’est félicité John Hanke lors d’une conférence organisée par Venture Beats. Des Pokéstops à ce que nous pourrions appeler des « Pokéshops », il n’y aurait que quelques pas !
De ces lieux sponsorisés, Niantic en attend beaucoup après avoir éprouvé le modèle économique dans son autre jeu, Ingress, à partir duquel Pokémon Go a été développé. « Dans un premier temps, on peut aisément imaginer les marques développer des partenariats drive-to-store avec Pokémon Go afin d’attirer les joueurs vers des points de vente de marque », explique Marie Dollé, directrice des contenus et stratège numérique chez Kantar Media. Par ailleurs professeure en stratégie marketing digital à l’Ecole supérieure de publicité (ESP), elle voit dans ce jeu de gaming mobile de réelles opportunités publicitaires : « Dans une ère du tout connecté, les marques recherchent avant tout à générer de l’engagement avec leurs publics. Ainsi pour les parents gamers qui se plongent dans leurs écrans de 17 à 20 heures, 90 % en font une activité familiale avec les enfants. De quoi offrir de belles perspectives aux annonceurs notamment dans le domaine de la publicité ». Et de citer des marques qui ont déjà investi le créneau de la réalité augmentée, voire virtuelle : Nescafé du groupe Nestlé, les hôtels Marriott ou encore l’équipementier sportif North Face. « Avec la réalité virtuelle, on entre vraiment dans un dispositif virtuel complètement coupé du monde. On est dans une expérience immersive. (…) Dans ce contexte, on comprend aisément que Pokémon Go est bien plus qu’un jeu. Il peut s’envisager comme un puissant outil au service du storytelling des marques », ajoute Marie Dollé.

Ce jeu semble couronner vingt ans de succès d’une franchise créée par le Japonais Satoshi Tajiri avec la sortie en 1996 des tout premiers jeux vidéo Pocket Monsters – dont la contraction Pokémon est devenu mondialement célèbre – sur les Game Boy du fabricant nippon Nintendo. Ce dernier détient aujourd’hui 32 % des droits de vote de The Pokemon Compagny, société créée en 1998 pour gérer la franchise, aux côtés
de Creatures et Game Freak. Nintendo perçoit à ce titre des droits de licence et une rémunération pour sa participation au développement et à la gestion de Pokémon Go, mais la firme a précisé cet été que les ventes auraient un impact limité sur ses résultats. Cela n’a pas empêché la firme japonaise de voir son cours de Bourse plus que doubler à Tokyo depuis la sortie du jeu, jusqu’à l’annonce le 28 juillet dernier de
ses résultats financiers trimestriels jugés décevants.

Pokémon Go Plus en septembre
Nintendo, qui a néanmoins maintenu son objectif de doubler son bénéfice net annuel à 35 milliards de yens (plus de 300 millions d’euros) à fin mars 2017 pour un chiffre d’affaires global de 500 milliards de yens (plus de 4,3 milliards d’euros), va lancer courant septembre un petit bracelet baptisé Pokémon Go Plus (à 40 euros pièce) afin d’attraper plus facilement des Pokémon sans avoir à ouvrir l’application, et monter ainsi plus rapidement dans ce jeu de niveaux. @

Charles de Laubier

Malgré l’attentisme des joueurs, le jeu vidéo devrait atteindre 3,4 milliards d’euros cette année

Grâce aux nouvelles plateformes, à l’enrichissement des catalogues, et à l’avènement de la réalité virtuelle, le marché français du jeu vidéo – matériels et accessoires compris – devrait progresser cette année de 3 % par rapport à 2015,
à 3,4 milliards d’euros. Mais les joueurs font preuve d’attentisme.

« Le marché sera a minima en croissance de 3 % à fin 2016. Cette prévision est volontairement prudente car il est complexe d’évaluer l’engouement et les volumes de ventes que vont générer les casques et accessoires de réalité virtuelle »,a indiqué Jean-Claude Ghinozzi (photo), président du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (Sell). Résultat : le jeu vidéo en France – marché physique et dématérialisé, mais sans compter les équipements et accessoires pour ordinateurs – affichera 3,4 milliards d’euros en 2016.

En attendant la RV et l’e-sport
« Sur le matériel, les joueurs font preuve d’attentisme face à l’arrivée prochaine de nouvelles plateformes et casques de réalité virtuelle, annoncés depuis quelques mois pour certains et confirmés pour d’autres lors de l’E3 [le plus grand salon américain consacré à l’industrie du jeu vidéo, ndlr] », a ajouté celui qui est par ailleurs directeur de la division grand public de Microsoft France. L’Electronic Entertainment Expo (E3), a en effet donné le la à cette industrie mondiale du jeu vidéo, mi-juin dernier à Los Angeles. Tandis que fin juin de tenaient en France fin juin à Juanles- Pins les rencontres professionnelles « vidéoludiques », avec l’Interactive and Digital Entertainment Festival (IDEF) organisées par le Sell, en attendant pour le grand public le Paris Games Week qui se tiendra du 27 au 31 octobre prochain à Paris (Porte de Versailles). Face à l’accélération des nouveautés annoncées, aux promesses de la réalité virtuelle (RV) ou de la réalité augmentée (RA), à la montée en charge du e-sport, et aux jeux vidéo attendus en fin d’année, les adeptes des jeux vidéo sont quelque peu prudents dans leurs décision d’achat. Résultat : le marché français du jeu vidéo se retrouve avec une croissance modérée, où l’engouement se le dispute à l’attentisme. « Le jeu vidéo est plus que jamais à la croisée des chemins entre bien culturel et bien technologique », estime Jean-Claude Ghinozzi. Depuis que Facebook a racheté le fabricant de casque Oculus Rift et s’est associé avec Samsung pour produire le Gear VR, compatible avec les smartphones, depuis que Google, Microsoft, Sony ou encore HTC, veulent intégrer la réalité virtuelle dans leur strastratégie, le marché mondial du jeu vidéo est en pleine mutation technologique. Les studios de développement de jeux vidéo sont à pied d’oeuvre : de nouveaux titres sont créés pour les casques Oculus Rift, Samsung Galaxy Gear VR, Playstation VR ou encore HTC Vive. Il existe déjà quelque 70 jeux de réalité virtuelle développés pour Oculus et une trentaine d’autres seraient prévus pour être disponibles au moment où les manettes de ce casque seront lancées, c’est-à-dire en d’ici la fin de l’année. La Playstation VR de Sony, qui sera disponible mi-octobre (a priori le 13) avec la promesse d’une cinquantaine de jeux de réalité virtuelle disponibles, sera compatible avec la PlayStation 4 (PS4), laquelle est actuellement la numéro une des consoles de jeux dans le monde (40 millions d’unités vendues depuis son lancement fin 2013). Cette plateforme « ludo-virtuelle » (ex-projet « Morpheus »), du fabricant japonais et leader du marché est emblématique de la mutation technologique de l’industrie du Dixième Art. Car, comme l’a expliqué Andrew House, président de Sony Interactive Entertainment, lors de la grand-messe E3 de juin, la Playstation VR n’est plus seulement une console de jeux vidéo mais devient en plus « un vrai nouveau medium » capable de donner accès à un large catalogue de télévision et de cinéma.
La neuvième génération de consoles de jeux vidéo, laquelle devrait succéder vers 2020 à l’actuelle huitième génération (composée de la Nintendo 3DS sortie en 2011, de la PS Vita en 2012, de la Nintendo Wii U en 2012, de la Xbox One en 2013 ou encore de la PS4 en 2013), pourrait faire la part belle à la RV et/ou la RA.

Développement et alliances
Pour l’heure, la société américaine Valve, éditrice de la plateforme de vente de jeux
en ligne Steam, a par exemple orienté un tiers de ses développeurs sur de la réalité virtuelle. Le développeur de jeux vidéos suédois Starbreeze s’est, lui, associé au fabricant taïwanais Acer dans une société commune afin de commercialiser le casque de réalité virtuelle StarVR. Starbreeze avait acquis la start-up française Infinite Eye.
« Une nouvelle histoire s’écrit avec l’arrivée de la réalité virtuelle qui offre aux développeurs de nouvelles possibilités pour repousser toujours plus les limites de leur créativité », a souligné le président du Sell.
Selon un sondage Toluna réalisé pour le magazine LSA sur la réalité virtuelle, 89,8 % des Français ont entendu parler de réalité virtuelle, mais à peine plus de la moitié ont une idée précise de son contenu. Cette notoriété est encore plus marquée chez les utilisateurs de jeux vidéo (93,7 %), mais là encore sans contenu imprécis : 57,3 % d’entre eux seulement déclarent savoir ce que l’expression recouvre. Et 86,3 % des joueurs sur console ont envi d’essayer ou l’ont déjà fait. Mais cette innovation intrigue aussi les non-joueurs (console, mobile ou PC) qui sont 45,1 % à vouloir aussi la tester.

RV : 5,1 Mds$ cette année dans le monde
Cette large attraction explique que les autres loisirs/spectacles arrivent à égalité avec les jeux vidéo dans les utilisations envisagées. « Ces casques et lunettes pourraient ne pas être seulement des accessoires de jeu vidéo si le contenu est à la hauteur des attentes dans les autres loisirs et activités culturelles », relève Toluna. Parmi les nombreux dispositifs de casque et lunettes déjà sur le marché ou en cours de lancement, deux casques retiennent l’attention des consommateurs : Gear VR de Samsung (24,7 %) et Playstation VR de Sony (23,6 %). Viennent ensuite HoloLens de Microsoft (13,1 %), Zeiss VR (11,8 %) et le fameux Oculus Rift en 5e position (9 %). Mais ce sondage fait apparaître de nombreux freins à la RV : la fatigue visuelle (53,8 %), le prix (45,6 %), les maux de tête (39,5 %), lesquels peuvent aller jusqu’à provoquer des vomissements…, ainsi que la coupure avec le monde réel (28,2 %). Côté prévision, la société d’analyse TrendForce a estimé que le marché mondial de la réalité virtuelle devrait atteindre 5,1 milliards de dollars cette année puis doubler l’an prochain à 10,9 milliards. « D’ici cinq ans, on peut parier sur le fait que chaque foyer sera équipé d’au moins un dispositif de visualisation en réalité virtuelle. D’autant que les secteurs du jeu vidéo et de l’audiovisuel, de façon plus générale, s’emparent massivement de cette technologie. On est à un moment charnière », avait prédit Laurent Chrétien, directeur de Laval Virtual, le salon de la réalité virtuel en France, lequel s’est tenu à Laval en mars dernier.
Pour l’heure, le dynamisme de l’industrie des jeux vidéo est porté par l’écosystème des consoles qui représente à lui seul 60 % du chiffre d’affaires global du marché français (voir schéma ci-contre). Rien qu’au premier semestre 2016, cet écosystème « con-soles » progresse en France de 0,4% à 690 millions d’euros, d’après les derniers chiffres Sell/GfK. Quant à l’écosystème des ordinateurs (appelé « Gaming PC »), il représente 30 % du chiffre d’affaires des jeux vidéo en croissance de 11,4 % sur les même six mois de cette année à 338 millions d’euros. « Ce segment est porté par les innovations constantes sur le hardware et les accessoires, ainsi que par la tendance de l’e-sport », explique le Sell (1). L’e-sport est en effet l’autre nouvelle tendance du jeu vidéo.
Désormais reconnu par les pouvoirs publics en France, l’esport – ou sport électronique – désigne l’ensemble des pratiques compétitives ayant pour moyen de confrontation, de performance et de dépassement de soi, un support numérique, et en l’occurrence un jeu vidéo. Cette pratique vidéoludique dépasse aujourd’hui la sphère du gaming : elle entre dans les stades, se montre à la télévision et forge des cyberathlètes – véritables idoles de la génération numérique. Yahoo a lancé début mars une plateforme en ligne Esports ; YouTube Gaming avait de son côté été lancé mi-2015 sur les traces d’Amazon, lequel avait acquis Twitch en 2014 ; TF1 a pour la première fois organisé un tournoi d’e-sport, dont la finale fut diffusée en direct sur sa chaîne digitale MyTF1 Xtra (2). Le Sell a été moteur dans la reconnaissance de cette discipline sportive depuis l’an dernier, dans le cadre de la loi « Pour une République numérique ».
Le Premier ministre a même lancé en début d’année une mission parlementaire sur l’e-sport (3), laquelle a abouti en mai au Sénat à la reconnaissance officielle de l’e-sport et des joueurs professionnels. Parallèlement, l’association « France eSports » a été créée fin avril 2016 par Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat au Numérique, avec dix membres fondateurs, parmi lesquels l’on retrouve le Sell, le Syndicat national du jeu vidéo (SNJV) ou encore Webedia du groupe Fimalac (4). Entre réalité virtuelle et sport électronique, l’industrie du jeu vidéo ne sait plus où donner de la tête. @

Charles de Laubier