L’incarcération d’un ancien président de la République consacre aussi un média numérique, Mediapart

C’est une condamnation historique d’un ancien président de la République française à de la prison ferme – avec incarcération – dans une affaire que Mediapart a révélée il y a treize ans. La sentence rendue à l’encontre de Nicolas Sarkozy le 25 septembre 2025 est aussi la consécration d’un média en ligne.

Depuis une trentaine d’années que les pure players de la presse en ligne existent, c’est la première fois que l’un d’eux se retrouve sous le feu des projecteurs et consacré pour son journalisme d’investigation – en l’occurrence pour avoir été à l’origine d’une affaire retentissante ayant conduit un ancien président de la République derrière les barreaux – un fait inédit et historique depuis la naissance de la République française en… 1792.
Le média numérique Mediapart, cofondé en 2008 par Edwy Plenel (photo de gauche) et présidé depuis 2024 par Carine Fouteau (photo de droite), s’est déjà fait une renommée avec de grandes enquêtes telles que les affaires Woerth-Bettencourt (2010), Cahuzac (2013), Baupin (2016), Ramadan (2017), Benalla (2019), Perdriau (2022) ou encore Azov/Courtine (2024). Mais cette fois, avec l’affaire Sarkozy-Kadhafi (2012-2025), Mediapart devient le premier nouveau média – qui plus est 100 % digital – à voir un ancien chef d’Etat – Nicolas Sarkozy, 6e président de la Ve République (2007-2012) et le 23e président de toutes les républiques françaises – être écroué (1). Et ce, treize ans après avoir révélé en avril 2012 un financement illégal de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 par des fonds provenant du régime libyen de Mouammar Kadhafi. Un scandale d’Etat.

Plus de 10,1 millions de visites par mois
Mediapart, c’est plus de 245.000 abonnés numériques et ce nombre ne cesse de grandir au fur et à mesure que les affaires révélées s’enchaînent. A fin décembre 2024, ils étaient 233.277, puis, d’après sa directrice de la publication Carine Fouteau au moment de la présentation des résultats annuels en mars 2025, les 245.000 abonnés ont été atteints. Mais le site de presse en ligne mediapart.fr, c’est aussi plus de 10,1 millions de visites par mois (2), d’après le relevé de Similarweb, dont près de 12 % provenant hors de France (3). Pour cette année 2025, le chiffre d’affaires de l’entreprise – employant plus de 150 personnes – devrait franchir la barre des 25 millions d’euros de chiffre d’affaires – pour dépasser les 27,7 millions d’euros si l’on applique la même croissance de 11,4 % constatée sur l’année précédente. « Notre modèle économique ne Continuer la lecture

Taxe streaming : 18 millions d’euros en 2025… si toutes les plateformes assujetties paient

Le Centre national de la musique (CNM), qui est à la musique ce que CNC est au cinéma, est doté d’un budget 2025 de près de 140 millions d’euros, dont 18 millions de la « taxe streaming » payée par les Spotify, Deezer et autres Apple Music. Cette dernière a rapporté moins que prévu en 2024.

Jean-Baptiste Gourdin (photo) a pris le 10 février 2025 ses fonctions de président du Centre national de la musique (CNM), après y avoir été nommé par décret du président de la République, Emmanuel Macron (1). Cet établissement public à caractère industriel et commercial, créé en 2019 et placé sous la tutelle du ministre de la Culture (2), se retrouve depuis les deux dernières années avec un budget annuel qui a quasiment triplé – à environ 140 millions d’euros – par rapport aux budgets cumulés des organismes qu’il a remplacés (CNV (3) et quatre associations (4)).

« Taxe streaming » : levée du secret fiscal
Pour financer son budget 2025 de 137,6 millions d’euros – tel qu’il a été approuvé par son conseil d’administration le 16 décembre dernier –, dont 85,6 % iront aux fonds de soutiens de la musique, la loi de de finances 2025, promulguée au Journal Officiel du 16 février (5), chiffre les deux recettes fiscales qui alimenteront en partie les caisses de cet établissement public : la taxe sur les spectacles de variétés (dite « billetterie ») pour 53,1 millions d’euros, et la « taxe streaming » (officiellement « taxe sur la diffusion en ligne d’enregistrements phonographiques musicaux ou de vidéomusiques ») pour 18 millions d’euros, soit un total d’impositions de 71,1 millions d’euros. Le reste provient de l’aide de l’Etat (dont la subvention du ministère de la Culture). La nouveauté est que cette même loi de finances 2025 prévoit que (suite)

MiCA : opportunités et défis pour les acteurs en quête d’optimisation fiscale et réglementaire

Un crypto-actif est « une représentation numérique d’une valeur ou d’un droit pouvant être transférée et stockée de manière électronique », comme sur une blockchain. Les « prestataires de services sur crypto-actifs » font face à de coûteuses obligations. Certains sont tentés par la délocalisation.

Par Arnaud Touati, avocat associé, et Mathilde Enouf, juriste, Hashtag Avocats

Entré en application le 30 décembre 2024, le règlement européen sur les marchés de crypto-actifs – surnommé « MiCA » (Markets in CryptoAssets) – a véritablement modifié le paysage réglementaire des crypto-actifs en Europe. Ce texte publié en mai 2023 au Journal Officiel de l’Union européenne (1) vise à harmoniser les pratiques dans les Etats membres pour réduire les disparités entre les Vingt-sept. Avant MiCA, les entreprises devaient naviguer dans des cadres nationaux très différents, ce qui augmentait la complexité.

La France : pionnière mais coûteuse
Avec MiCA, les « prestataires de services sur cryptoactifs » (PSCA ou en anglais CASP (2)) sont tenus d’obtenir un agrément auprès des autorités nationales compétentes, comme l’Autorité des marchés financiers (AMF) en France, ou l’ESMA (3) pour des services transfrontaliers (4). Cet agrément impose des normes élevées en matière de gouvernance et de qualification des dirigeants. Les entreprises doivent prouver leur solidité organisationnelle et leur capacité à protéger les investisseurs contre les abus de marché. En plus de l’agrément, MiCA introduit des obligations strictes de transparence et de gouvernance. Les PSCA doivent impérativement pouvoir garantir la sécurité des actifs confiés par leurs clients et disposer de garanties financières proportionnées à leurs activités. MiCA renforce également la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (5). Les PSCA doivent alors mettre en place des systèmes de contrôle interne robustes, capables de détecter et signaler les transactions suspectes.
La France a joué un rôle précurseur dans la régulation des crypto-actifs (6), bien avant l’entrée en vigueur de MiCA, à travers la loi Pacte de 2019. Ce texte a permis de mettre en place un cadre juridique pour les « prestataires de services sur actifs numériques » (PSAN). L’AMF et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), deux régulateurs français, ont développé une expertise solide et proactive. Leur rigueur est perçue comme un gage de fiabilité par les investisseurs internationaux, renforçant la réputation de la France dans le secteur. En parallèle, la France propose des avantages fiscaux comme le crédit d’impôt recherche (CIR), qui permet de réduire les coûts liés à l’innovation. Des subventions spécifiques soutiennent également les start-up technologiques, contribuant à un écosystème favorable à l’innovation, y compris dans (suite)

Projet de loi de finances 2025 : « taxes Gafam » ?

En fait. Le 12 novembre, lors du vote solennel, les députés ont rejeté (362 contre, 192 pour) la première partie du projet de loi de finances 2025, laquelle portait sur les recettes fiscales de l’année prochaine. Le Sénat remettra-t-il à son tour les taxes TSN (augmentée) et TOCE (étendue) pour les Gafam ?

En clair. L’Assemblée nationale a rejeté le volet « recettes fiscales » du projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Le Sénat, qui examinera le texte initial du gouvernement Barnier, réintroduira-t-il les « taxes Gafam » adoptés par des députés ? Il y a eu d’abord le rehaussement de la taxe sur les services numériques (TSN), appelée « taxe Gafam », pour qu’elle rapporte 500 millions d’euros de plus que les 774 millions d’euros prévus dans le PLF initial, soit 1,2 milliard d’euros. Cette initiative provenait de l’union de la gauche (NFP) mais aussi de la droite et de l’extrême droite. Au moins trois amendements avaient été adoptés le 8 novembre pour aller dans le même sens, à savoir : faire passer la taxe sur les services numériques (TSN), instaurée en 2019, de 3 % à 5 %.
« Etant donné que le rendement prévisionnel de la taxe [TSN] pour 2025 est de [près de] 800 millions d’euros, on peut estimer que le présent amendement créerait plus de 500 millions d’euros de recettes nouvelles pour le budget de l’Etat », expliquaient à l’unisson deux des trois amendements, respectivement de la gauche socialiste (1) et de la droite républicaine (2).

Les Etats généraux de l’information préconisent une « taxe sur les GAFAM » pour la presse française

Le rapport des Etats généraux de l’information – voulus par le président de la République Emmanuel Macron et lancés il y a un an (3 octobre) – préconise une « taxe GAFAM » dont les recettes iraient financer les médias français d’information. Sur le modèle de la « taxe streaming » dans la musique. 

C’est la proposition n°8 du comité de pilotage des Etats généraux de l’information (EGI), dont le rapport de 352 pages (1) a été présenté le 12 septembre 2024 et remis au président de la République Emmanuel Macron, initiateur de ces travaux : « Redistribuer une partie de la richesse captée par les fournisseurs de services numériques en faveur de l’information ». Comment ? Par l’instauration d’une « taxe sur les GAFAM, dont le produit viserait à renforcer le modèle économique des médias contribuant fortement à la production d’une information fiable et de qualité ». Elle reviendrait ainsi à redistribuer, par l’impôt, une partie de la richesse qui s’est déplacée vers les plateformes numériques.

Ce qu’en pensent la CCIA et l’Apig
Contactée par Edition Multimédi@, la Computer & Communications Industry Association (CCIA), qui représente justement les GAFAM (Google/YouTube, Meta/Facebook/ Instagram, Amazon, X/ex-Twitter, eBay et d’autres), nous a répondu à propos de cette proposition de « taxe GAFAM » pour financer les médias en France : « Malheureusement, en tant que CCIA Europe, nous ne pouvons pas commenter ce point. Il s’agit d’une des nombreuses propositions non contraignantes du rapport, qui pourrait ou non conduire à un débat plus large en France. Pour le moment, il ne s’agit pas d’une proposition concrète ni d’une proposition européenne », explique le bureau de la CCIA à Bruxelles dirigé par Daniel Friedlaender.
De son côté, l’Alliance de la presse d’information générale (Apig), laquelle réunit en France la presse quotidienne nationale et régionale, n’exclut pas la perspective d’une telle taxe : « S’agissant des GAFAM, toute bonne volonté est bienvenue. Pourquoi pas une taxe, si techniquement c’est possible ? Mais le cœur du sujet est le fonctionnement opaque et non concurrentiel du marché de la publicité en ligne », nous précise Pierre Petillault, son directeur général. Cette union syndicale des patrons de presse française évoquera d’ailleurs le rapport des EGI en général et la publicité numérique en particulier lors son événement annuel « Les rencontres de la presse d’information », qui se tiendra cette année le 9 octobre 2024 à Paris. Le président de l’Apig, Philippe Carli (groupe Ebra (2)), accompagné de ses deux vice-présidents Vincent David (groupe Sud-Ouest) et Pierre Louette (groupe Les Echos-Le Parisien), avaient été auditionnés le 14 février dernier par le groupe de travail « Avenir des médias d’information et du journalisme ». Dans sa contribution aux EGI, l’Apig rappelle que « le chiffre d’affaires issu du papier représente encore une part majoritaire des revenus des éditeurs de presse d’information […], les annonceurs achetant prioritairement de l’espace en presse papier, et la publicité en ligne donnant lieu à une captation de valeur massive par les intermédiaires détenus par les grandes plateformes numériques ». Et d’affirmer : « Cette captation s’est traduite par une chute massive des recettes publicitaires de la presse, qui ont été divisées par deux en dix ans. […] La pérennité de la presse d’information passe par […] un partage de la valeur créée avec les plateformes » (3). Mais l’Apig ne parle pas de taxer les GAFAM, sans pour autant l’exclure.