Quand Donald Tang, président exécutif du chinois Shein, rêvait de réussir dans le cinéma et la télévision

Chinois et Américain, président exécutif du géant mondial de la vente en ligne de vêtements Shein depuis trois ans, Donald Tang a eu plusieurs vies, à commencer par banquier d’affaires. Il a investi dans le cinéma et l’audiovisuel via sa holding Tang Media Partners créée il y a dix ans – mais sans succès.

Cela fait quatre ans presque jour pour jour que Donald Tang (photo) a été recruté par le groupe chinois Shein. Après avoir été conseiller du PDG fondateur Chris Xu, l’ex-banquier d’affaire sino-américain est monté en grade pour devenir en août 2023 président exécutif du géant mondial du e-commerce de vêtement et d’accessoires de mode. Si son patron sino-singapourien, dénommé aussi Sky Xu, se fait très discret, Donald Tang, lui, fait office de porte-parole de l’enseigne Shein en tant que représentant mondial, avec des casquettes aussi différentes que président exécutif, responsable des affaires publiques, directeur de la stratégie ou encore chargé du développement international. Fondé en 2008 à Nankin (Chine), le groupe vestimentaire chinois – dont le siège social avait déménagé en 2022 à Singapour pour tenter, en vain, d’être plus présentable en vue de son introduction en Bourse, à New-York ou à Londres – a renoncé à se faire coter en Occident faute notamment d’un feu vert de la China Securities Regulatory Commission (CSRC). Shein se prépare donc à déménager sa maison mère en Chine, afin d’envisager une cotation à probablement Hong Kong (1). L’Occident est hostile à l’entreprise, médias et concurrents l’accusant d’« ultra-fast fashion », de « concurrence déloyale », et, de « travail indigne » ou de « faire travailler des enfants » en Chine où sont produits ses vêtements – ce que Donald Tang réfute.

Donald Tang, en première ligne en France
« Nous ne sommes pas de la fast fashion », avait lancé le président exécutif de Shein, lors de son intervention sur scène à Paris le 13 juin dernier au salon-conférence Viva Technology. « Nous sommes une entreprise de fashion-on-demand », assurait-il, alors que trois jours auparavant la France venait d’adopter au Sénat une proposition de loi pour « réduire l’impact environnemental de l’industrie textile » – texte notifié par le gouvernement à la Commission européenne avant son passage à l’Assemblée nationale (2). Donald Tang avait tourné en dérision les attaques dont Shein est la cible : « Il y a vingt ans, le diable avait l’habitude de porter du Prada, mais maintenant, il commence à porter du Shein », plaisanta-t-il alors (3). Mais l’ouverture controversée le 5 novembre du premier magasin permanent de Shein – à Paris au sein du BHV avec son portrait en devanture (4), et sur fond d’accusation de vente en ligne de poupées pédopornographiques et d’armes (5) – l’a remis en France sous le feu des projecteurs.

Son rêve hollywoodien sino-américain
A 62 ans, Donald Tang – né Tang Xiangqian à Shanghai de parents chinois universitaires – a fait du chemin depuis Continuer la lecture

L’Agence France-Presse (AFP) se retrouve en proie à de sérieuses difficultés financières en 2025 et 2026

Parmi les trois grandes agences de presse mondiales, l’AFP entre dans une zone de turbulences, décidée à faire jusqu’à 14 millions d’euros d’économies entre 2025 et 2026 (dont 70 postes à supprimer d’ici le printemps prochain), tout en essayant de continuer à se désendetter. Les aides de l’Etat ne suffisent plus.

« Rayonnement international de la France » et « rempart contre la désinformation », l’Agence France-Presse (AFP) poursuit sa trajectoire de désendettement et de réduction de ses dépenses, telle que prévue dans son contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028, signé avec l’Etat français il y a plus d’un an.
Alors que le projet de loi de finances 2026 a été présenté in extremis le 14 octobre par le gouvernement « Lecornu 2 », l’agence de presse française a la confirmation des aides d’Etat qui lui seront versées : 147,2 millions d’euros l’an prochain, soit 3 % d’augmentation. En plein déficits publics chroniques de la France, en quête désespérée de réductions budgétaires et surtout de recettes fiscales, l’AFP – que dirige Fabrice Fries (photo) – n’a pas à se plaindre. Cette manne de l’Etat – 124 millions d’euros pour assurer ses missions d’intérêt général et 23,2 millions d’euros d’abonnements payés par l’administration – a augmenté chaque année depuis le début de l’actuel COM en 2024. Et il va continuer comme prévu sa hausse jusqu’à la fin de ce contrat quinquennal, à 149 millions d’euros en 2028. Parmi les engagements pris auprès de l’Etat, l’AFP doit générer 9 millions d’euros d’économies sur ces cinq ans, tout en ramenant sa dette à zéro d’ici la fin 2028 – dans près de trois ans – contre 20,4 millions d’euros à fin 2024 (son endettement était supérieur à 50 millions d’euros en 2017).

Recettes en berne et suite de l’arrêt « Facebook »
Alors que l’Agence France-Presse peut se targuer d’avoir enchaîné depuis six années consécutives un résultat net positif (même de seulement 200.000 euros en 2024), les dépenses, elles, augmentent sérieusement car il lui faut assurer la couverture des guerres Russie-Ukraine et Israël-Gaza. Rien qu’en 2024, les « charge d’exploitation » se sont élevées à 303,5 millions d’euros, en augmentation de 2,5 % sur un an. Mais 2025 s’avère plus difficile que prévue. Les conflits armés n’expliquent pas tout : d’une part, les médias clients de l’AFP sont de plus en plus à la peine dans le monde entier en raison notamment du tsunami IA, et, d’autre part, un gros contrat que l’AFP avait signé avec Facebook s’est arrêté en début d’année. Sans parler du démantèlement de la radio publique Voice of America (VOA), engagé par l’administration Trump, provoquant en mars 2025 l’arrêt brutal du contrat avec l’AFP. Les recettes commerciales l’agence de presse de la place de la Bourse (son siège social à Paris) représentent (suite)

« Guerre informationnelle » et lutte contre la « désinformation étrangère » agitent l’Etat français

Face à la désinformation, l’Etat français s’érige de plus en plus en régulateur des contenus. Le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) joue un rôle central avec son « service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères » (Viginum).

Cela fait maintenant quatre ans jour pour jour – au 15 octobre 2025 – qu’un « comité éthique et scientifique », institué auprès du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), lequel dépend directement du Premier ministre, est chargé de suivre l’activité du « service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères », plus connu sous le nom de Viginum, créé en 2021. Son comité est présidé depuis près deux ans par Jean-Luc Sauron (photo), conseiller d’Etat, et est composé de sept « personnalités qualifiées ».

Désinformation : le conseil de défense attendra
C’est le SGDSN, installé dans le 7e arrondissement de Paris et à proximité immédiate des Invalides et du ministère des Armées, qui est censé coordonner la tenue de ce que des médias ont appelé le « conseil de défense sur la guerre informationnelle » (1). Convoqué par le président de la République, Emmanuel Macron, ce conseil de défense (2) devrait se tenir initialement le 10 septembre 2025, dans le but de faire le point sur la stratégie et les capacités françaises en matière d’influence, de lutte contre les manipulations de l’information et les tentatives de déstabilisation venues de l’étranger. Mais il a été reporté et devait être « reprogrammé au mois d’octobre », d’après La Lettre (3). Cependant, les démissions successives de deux Premier ministre – François Bayrou le 9 septembre et Sébastien Lecornu le 6 octobre, ce dernier ayant été le plus éphémère locataire de Matignon de toute la Ve République (27 jours), avec un gouvernement « Lecornu 1 » mort-né en seulement 14h30 – ne permettront pas de réunir d’ici la fin du mois d’octobre ce conseil de défense sur la guerre informationnelle. Même avec « Lecornu 2 ». Les raisons du report initial du conseil de défense sur la guerre informationnelle ne sont pas (suite)

Gouvernance des autorités pour l’AI Act : multiplier les régulateurs pourrait être contreproductif

La France va se doter – si une loi était adoptée en 2026 – d’une gouvernance sectorielle pour l’IA, pilotée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Mais la multiplicité des régulateurs pourrait compliquer la tâche des entreprises.

Par Antoine Gravereaux, avocat associé*, FTPA Avocats

La Direction générale des entreprises (DGE), qui dépend du ministère de l’Economie et des Finances, a publié le 9 septembre 2025 un projet de désignation des autorités nationales chargées de la mise en œuvre en France du règlement européen sur l’intelligence artificielle (AI Act). Sous la coordination de la DGE et de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), ce projet instaure un schéma décentralisé et sectoriel de gouvernance s’appuyant sur les régulateurs existants en France.

La DGCCRF centralise la coordination
Ce modèle s’inscrit dans le cadre de l’AI Act (1) et des dispositions de son article 70 qui impose la désignation d’autorités nationales de notification et de surveillance du marché dans chaque Etat membre. Cette proposition de gouvernance sectorielle et décentralisée doit être présentée au Parlement sous la forme d’un projet de loi. Il ne sera donc définitif qu’après un vote législatif, très probablement dans le courant du premier semestre 2026. Le schéma retenu par le gouvernement prévoit que la mise en œuvre effective de ce règlement européen sur l’IA sera supervisée par plusieurs autorités compétentes, conformément aux orientations proposées par cet AI Act. Dès lors, les administrations, agences et autorités spécialisées – selon leur secteur d’intervention – auront la charge de contrôler les systèmes d’intelligence artificielle, une fois mis sur le marché ou en service.
La DGCCRF centralisera la coordination opérationnelle entre diverses autorités sectorielles impliquées dans le contrôle des systèmes d’IA. Elle sera ainsi l’interlocuteur principal pour les autorités européennes et facilitera l’échange d’informations et la coopération entre les différents régulateurs nationaux. Elle agira comme un point de contact unique, pour la France auprès des instances européennes, sur les questions liées à la surveillance du marché de l’IA. Ce rôle de coordination s’inscrit dans une organisation bicéphale où la DGCCRF assurera la supervision pratique sur le terrain, tandis que la DGE apportera son soutien à la mise en œuvre de l’AI Act. A ce titre, la DGE jouera un rôle-clé dans l’organisation de la gouvernance nationale de ce règlement européen, notamment en (suite)

L’incarcération d’un ancien président de la République consacre aussi un média numérique, Mediapart

C’est une condamnation historique d’un ancien président de la République française à de la prison ferme – avec incarcération – dans une affaire que Mediapart a révélée il y a treize ans. La sentence rendue à l’encontre de Nicolas Sarkozy le 25 septembre 2025 est aussi la consécration d’un média en ligne.

Depuis une trentaine d’années que les pure players de la presse en ligne existent, c’est la première fois que l’un d’eux se retrouve sous le feu des projecteurs et consacré pour son journalisme d’investigation – en l’occurrence pour avoir été à l’origine d’une affaire retentissante ayant conduit un ancien président de la République derrière les barreaux – un fait inédit et historique depuis la naissance de la République française en… 1792.
Le média numérique Mediapart, cofondé en 2008 par Edwy Plenel (photo de gauche) et présidé depuis 2024 par Carine Fouteau (photo de droite), s’est déjà fait une renommée avec de grandes enquêtes telles que les affaires Woerth-Bettencourt (2010), Cahuzac (2013), Baupin (2016), Ramadan (2017), Benalla (2019), Perdriau (2022) ou encore Azov/Courtine (2024). Mais cette fois, avec l’affaire Sarkozy-Kadhafi (2012-2025), Mediapart devient le premier nouveau média – qui plus est 100 % digital – à voir un ancien chef d’Etat – Nicolas Sarkozy, 6e président de la Ve République (2007-2012) et le 23e président de toutes les républiques françaises – être écroué (1). Et ce, treize ans après avoir révélé en avril 2012 un financement illégal de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 par des fonds provenant du régime libyen de Mouammar Kadhafi. Un scandale d’Etat.

Plus de 10,1 millions de visites par mois
Mediapart, c’est plus de 245.000 abonnés numériques et ce nombre ne cesse de grandir au fur et à mesure que les affaires révélées s’enchaînent. A fin décembre 2024, ils étaient 233.277, puis, d’après sa directrice de la publication Carine Fouteau au moment de la présentation des résultats annuels en mars 2025, les 245.000 abonnés ont été atteints. Mais le site de presse en ligne mediapart.fr, c’est aussi plus de 10,1 millions de visites par mois (2), d’après le relevé de Similarweb, dont près de 12 % provenant hors de France (3). Pour cette année 2025, le chiffre d’affaires de l’entreprise – employant plus de 150 personnes – devrait franchir la barre des 25 millions d’euros de chiffre d’affaires – pour dépasser les 27,7 millions d’euros si l’on applique la même croissance de 11,4 % constatée sur l’année précédente. « Notre modèle économique ne (suite)