L’encrage à l’extrême droite du Parlementeuropéen hypothèque la réforme des télécoms

Les dernières élections européennes, donnant la part belle aux nationalistes, rendent incertaine la prochaine déréglementation des télécoms dans les Vingt-sept, alors que la Commission européenne doit réviser le code européen des communications électroniques d’ici décembre 2025.

Au plus tard le 21 décembre 2025, et tous les cinq ans par la suite, la Commission européenne est tenue de réexamine le fonctionnement de la directive de 2018 établissant le code des communications électroniques européen (CCEE). De même, d’ici cette même échéance, et tous les cinq ans là aussi, elle doit aussi réexaminer la portée du service universel, en vue de proposer la modification ou la redéfinition du champ d’application.

Déréglementer le marché des télécoms ?
A cela s’ajoute le projet de règlement télécoms, le Digital Networks Act (DNA) que pousse l’actuel commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton (photo), pour la prochaine mandature. Autant dire que la prochaine Commission européenne, qui prendra ses fonctions fin 2024 en tenant compte de l’extrême-droitisation du Parlement européen depuis juin, pourrait faire de la réforme des télécoms l’un de ses priorités. Rappelons que le code des communications électroniques européen, adopté en 2018 (1), a modifié et regroupé quatre directives préexistantes adoptées en 2002 et modifiées en 2009, à savoir les directives « cadre », « autorisation », « accès » et « service universel ». Cette directive du code des télécoms est censée avoir été transposée par chacun des Vingt-sept au plus tard le 21 décembre 2020.
Or, selon les constatations de Edition Multimédi@, il y a encore à mi-2024 des trous dans la « raquette » européenne des télécoms : l’Italie, le Luxembourg, la Grèce et la Bulgarie sont les quatre Etats membres qui n’ont quasiment pas transposé la directive du code des communications électroniques européen, avec respectivement seulement deux, deux, deux et une mesure(s) prise(s) en compte au niveau national (2). En plus de ces mauvais élèves européens, force est aussi de constater que bon nombre d’autres Etats membres n’ont que partiellement transposé la directive du code des télécoms. Dès le 4 février 2021, la Commission européenne avait engagé une procédure d’infraction contre 24 Etats membres, dont la France pour défaut de transposition du code des communications électroniques (3), suivie le 23 septembre 2021 d’un avis motivé adressé à 18 d’entre eux (4). Puis, le 6 avril 2022, la Commission européenne a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’un recours contre dix Etats membres pour défaut de transposition complète dans le droit national du code des communications électroniques (5).

Alors même qu’avaient été publiées – après avis de l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (Orece) qui réunit toutes les « Arcep » – les lignes directrices sur « l’analyse du marché et l’évaluation de la puissance sur le marché » (6). Le code des communications électroniques européen (CCEE) – ou en anglais European Electronic Communications Code (EECC) – continue encore aujourd’hui de réguler les télécoms en Europe en imposant aux opérateurs télécoms en « position dominante » des obligations dit ex ante, c’est-à-dire a priori, « afin de garantir le développement d’un marché concurrentiel, dont les conditions favorisent le déploiement et la pénétration des réseaux et services à très haute capacité, et la maximisation des retombées positives pour l’utilisateur final » (7).
Plus précisément, « une entreprise est considérée comme puissante sur le marché si, individuellement ou conjointement avec d’autres, elle se trouve dans une position équivalente à une position dominante, à savoir une position de puissance économique lui permettant de se comporter, dans une mesure appréciable, de manière indépendante de ses concurrents, de ses clients et, en fin de compte, des consommateurs » (8).
Il revient aux « Arcep » nationales de déterminer quels sont les opérateurs télécoms ayant une telle puissance sur le marché afin de justifier des obligations pour encourager la concurrence, tout en étant conforme aux principes du droit de la concurrence. Les opérateurs télécoms désignés comme puissants ont aussi une obligation de service universel sur lequel les Etats membres doivent veiller pour assurer la connectivité Internet pour aider les ménages à faible revenu et éviter la fracture numérique.

Du Gigabit Infrastructure Act (GIA)…
Face aux opérateurs télécoms en position dominante sur les marchés nationaux, tels qu’Orange en France, les concurrents peuvent continuer à prospérer et les consommateurs à bénéficier de tarifs compétitifs – tirés en général vers le bas grâce à la bataille tarifaire. Le code des télécoms de 2018 tend aussi à favoriser les investissements des opérateurs télécoms dans les réseaux fixe et mobile à très haut débit (5G et FTTH). Or un règlement européen sur les infrastructures dites « gigabit », appelé Gigabit Infrastructure Act (GIA), vient bousculer ce cadre européen des télécoms. Publié au Journal Officiel de l’Union européenne (JOUE) le 8 mai 2024, ce texte (9) vise à faciliter le déploiement des réseaux très haut débit et préfigure ce que pourrait être le futur cadre européen des télécoms que devra mettre en place la prochaine Commission européenne. Autant le code des communications électroniques européen se focalise sur les opérateurs télécoms en fonction de leur puissance sur le marché pour laisser respirer les opérateurs alternatifs, autant le GIA réglemente tous les acteurs télécoms indépendamment de leur puissance sur le marché.

… au Digital Networks Act (DNA)
De là à ce que tous les opérateurs télécoms soient traités à la même enseigne, il n’y a pas loin. Le GIA est entré en vigueur « le troisième jour suivant celui de sa publication au JOUE », à savoir le 11 mai dernier et il sera applicable à partir du 12 novembre 2025. Son objectif est de « mettre en place des mesures destinées à accélérer et à simplifier le déploiement de réseaux fixes et sans fil à très haute capacité dans l’ensemble de l’Union [européenne], et à réduire les coûts de ce déploiement» (10). Il part du constat que le coût des travaux de génie civil représente une part importante et vise donc à favoriser le partage des infrastructures physiques, ce qui limiterait la nécessité de travaux de génie civil coûteux et rendrait plus efficace le déploiement avancé du haut débit (11). « Il peut être nettement plus efficace pour les opérateurs [télécoms], en particulier pour les nouveaux entrants, de réutiliser les infrastructures physiques existantes, y compris celles d’autres services d’utilité publique, pour déployer des réseaux à très haute capacité ou des ressources associées », justifie le GIA (12). La Commission européenne, à l’origine de ce Gigabit Infrastructure Act, avait prévenu en juillet 2023 que « le montant total des investissements nécessaires pour atteindre les objectifs de la décennie numérique actuelle [d’ici 2030, ndlr] s’élève à[…] au moins 174 milliards d’euros, y compris les fonds publics qui peuvent être nécessaires, mais il est plus probable qu’il dépasse 200 milliards d’euros en fonction des options envisagées » (13).
Mais ce « grand bond en avant » que propose de faire le GIA inquiète non seulement les consommateurs représentés par le Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc), dont font partie en France UFC-Que choisir et l’association CLCV parmi plus d’une quarantaine d’autres organisations de consommateurs dans les Vingtsept, mais préoccupe aussi l’Ecta – association des opérateurs télécoms alternatifs (14) – où l’on retrouve Bouygues Telecom, Iliad (Free), Colt, Transatel, Fastweb ou encore Eurofiber. Dès que le « Paquet connectivité » – dont fait partie le fameux GIA (15) – a été présenté le 23 février 2023 par la Commission européenne (16), l’Ecta avait aussitôt mis en garde : « Un Gigabit Infrastructure Act est inutile si la recommandation Gigabit est le clou final dans le cercueil de la concurrence. Les investissements en souffriront et les prix de détail augmenteront et alimenteront l’inflation. De nombreux citoyens de l’UE seront exclus et ne pourront pas se permettre la connectivité Gigabit » (17). L’association européenne des opérateurs télécoms alternatifs a ensuite, le 9 novembre 2023, fait part de ses « préoccupations » sur, cette fois, le futur Digital Networks Act (DNA) porté par l’actuel commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton. Dans leur déclaration commune (18), l’Ecta et le Beuc se sont inquiétés de la perspective « du réexamen et de la mise à jour du paradigme de la réglementation et de la politique de la concurrence » dans les télécoms souhaités le Conseil de l’Union européenne (UE) et la Commission européenne. « Combiné aux appels lancés par d’anciens monopoles des télécoms [via leurs lobbys Etno et GSMA basés à Bruxelles, ndlr] pour réduire la concurrence et aux suggestions de créer quelques “champions européens”, [c’est] un signal d’alarme pour le marché européen des télécoms », ont mis en garde l’Ecta et le Beuc dans leur joint statement (19).
Après le livre blanc « Infrastructures numériques » (20) publié le 21 février 2024 par la Commission européenne, pointant la fragmentation du marché unique des télécoms, le rapport « Avenir du marché unique » a été remis le 18 avril au Conseil de l’UE par son auteur Enrico Letta (ex-président du conseil italien et pressenti pour succéder à Charles Michel à la présidence du Conseil européen). Ce rapport « Letta » va dans le sens de la consolidation des opérateurs télécoms en Europe (21). Ira-t-on vers la défragmentation du marché unique numérique au détriment des consommateurs ?

Le rapport de Mario Draghi en vue
Un autre rapport, attendu avant l’été et suscitant l’inquiétude, pourrait enfoncer le clou en faveur de plus de « compétitivité » dans le numérique au risque de se faire au détriment de la concurrence les télécoms. Son auteur : Mario Draghi (photo ci-dessus), ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) et candidat à la tête d’une institution européenne. Le président français Emmanuel Macron soutient la candidature de l’ancien Premier ministre italien (76 ans) à un « top job » de l’UE (22) : président de la Commission européenne ou président du Conseil européen ? Or l’Allemande Ursula von der Leyen, Démocrate-chrétienne, est candidate à sa propre succession à la tête de Commission européenne, et les eurodéputés d’extrême droite pourrait contribuer à l’y maintenir. @

Charles de Laubier

Fracture numérique en France : le financement des 4.000 conseillers numériques en question

Selon les informations de Edition Multimédi@, les 4.000 conseillers numériques financés depuis 2021 par le plan France Relance le sont désormais par le plan France très haut débit. Mais les subventions ont baissé. Insuffisant pour lutter contre l’illectronisme qui touche en France 13 millions de personnes.

Les 4.000 conseillers numériques financés depuis 2021 par le plan France Relance, sous la responsabilité du ministère de la Transformation et de la Fonction publiques (Stanislas Guerini), relèvent désormais du plan France très haut débit, au sein du ministère de l’Economie, des Finances, de la Souveraineté industrielle et numérique (Bruno Le Maire). Cette force vives a été lancée en pleine pandémie du covid pour venir en aide aux Français confrontés à la fracture numérique en général et à l’illectronisme en particulier.

Baisse des subventions de l’Etat
Selon les données de l’Insee, cela touche quelque 13 millions de personnes (1). Avec un conseiller numérique pour 3.252 habitants en détresse numérique, ce bataillon dépêché par l’Etat dans les régions françaises n’est pas suffisant pour faire face. Et ce dispositif d’inclusion numérique mis en place en 2021 dans le cadre du plan France Relance, puis prolongé en 2022 par Stanislas Guerini (photo), ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, souffre d’une baisse des subventions. Contacté par Edition Multimédi@ pour savoir ce qu’il advenait du financement des conseillers numériques depuis qu’ils sont passés sous la coupe du plan France très haut débit, Bercy ne nous a pas répondu.
Alors que l’Etat français est frappé d’un déficit chronique, la question de la pérennité des conseillers numériques se pose. Certes, le budget alloué à ce programme d’assistance numérique par l’Etat totalise sur plus de deux ans près de 200 millions d’euros (198,4 au 26-04-24). Mais après ? A l’automne dernier, La Gazette des Communes avait constaté que « si le dispositif a bien été reconduit début 2023, les financements de l’Etat ont été revus à la baisse ». Au cours des deux premières années, la subvention de l’Etat s’élevait à 25.000 euros par an et par poste de conseiller numérique. Elle n’était plus en 2023 que de 17.500 euros pour les structures publiques et de 20.000 euros pour les entités privées (dont les associations). Certaines collectivités territoriales n’ont pu renouveler les contrats de leurs conseillers numériques, comme à Verdun ou à Echirolles.

D’après les dernières statistiques publiées par l’Etat (2), les conseillers numériques ont dépassé les 4.000 : ils sont en fait, au 26 avril 2024, 4.095. Ces aidants du digital sont là pour « accompagner les usagers dans leurs démarches administratives du quotidien » : allocations familiales, impôts, assurance maladie, emploi, retraite, poste, justice, chèque énergie, rénovation énergétique, perte d’autonomie. Les TPE/PME et les associations peuvent également solliciter l’aide de ces agents de la dématérialisation des démarches administratives. Leur moyenne d’âge est de 37 ans et ils officient notamment dans les espaces « France services » du territoire – situés « à 30 minutes maximum en voiture » du domicile des intéressés –, ainsi que dans établissements publics et des associations. Ils cumulent à ce jour plus de 3,6 millions d’accompagnements.
Le réseau France services, lui, a été lancé en 2019, avant la crise sanitaire, et compte aujourd’hui 2.700 lieux d’accueil et d’accompagnement (3). C’est un label octroyé par l’Etat (4). Des bus et des camping-cars sillonnent aussi des territoires ruraux et des quartiers prioritaires pour à la fois tenter de résorber la fracture numérique et la fracture territoriale. Le groupe La Poste est mis à contribution à travers 413 bureaux de poste labellisés « France services » où se rendent disponibles 95 conseillers numériques, auxquels s’ajoutent des « facteurs-guichetiers itinérants » en cours d’expérimentation (une dizaine). « Au total, en 2023, La Poste a détecté, accompagné, formé et équipé 646.000 personnes en situation de fragilité numérique », précise le groupe postal dans son rapport annuel publié le 4 avril dernier. Et Nathalie Collin, directrice générale de la branche grand public et numérique du groupe La Poste, a annoncé le 18 avril dans Ouest-France (5) que seront lancés à partir de fin avril cinq « camions-bureaux de poste itinérants » qui parcourront les campagnes françaises, à commencer – à titre expérimentale durant un an – par l’Orne, la Haute-Marne, la Creuse, le Gers et le Jura. Mais le test est limité à 40 communes pour un total de 13.000 habitants.

La Poste expérimente des camions jaunes
Ces camions jaunes, sur lesquels est écrit en gros « La Poste vient à votre rencontre », sont cofinancés par la Banque des territoires, filiale de la Caisse des Dépôts. Budget total : 1 million d’euros. « Ce seront aussi des avantpostes de France Services », a précisé Nathalie Collin. Dans le cadre de sa mission d’aménagement du territoire et de contrat de présence postale territoriale 2023-2025 (France services en bureaux de poste compris), La Poste perçoit de l’Etat jusqu’à 177 millions d’euros par an. @

Charles de Laubier

Marina Ferrari, nouvelle secrétaire d’Etat chargée du Numérique : entre souveraineté numérique et Gafam

Secrétaire d’Etat chargée du Numérique depuis le 12 février, Marina Ferrari doit défendre la « souveraineté numérique » que porte son ministre de tutelle Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. Mais, « en même temps », la France ne peut se passer des Gafam.

(Le 26 février 2024, date de la publication de cet article dans le n°316 de EM@, la licorne française Mistral AI annonçait son « partenariat » avec… Microsoft

Jean-Noël Barrot, qui aura été ministre délégué chargé du Numérique à peine plus d’un an et demi (y compris jusqu’au 20 juillet 2023 en tant que ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications), est depuis le 8 février dernier ministre délégué chargé de l’Europe. Sa successeure Marina Ferrari (photo), secrétaire d’Etat chargée du Numérique depuis le 12 février, a saisi l’occasion – lors de leur passation de pouvoirs – pour notamment insister sur la « souveraineté numérique » : « Ce passage de relai nous permettra d’agir main dans la main, en confiance et de jouer collectif dans l’intérêt de la souveraineté numérique française et européenne. […] J’entends conduire mon action autour de deux piliers : résilience et souveraineté. […] Je m’engagerai pour accompagner la naissance d’une vraie souveraineté numérique européenne en veillant à l’application rigoureuse du DMA et du DSA. », a-t-elle déclaré ce jour-là (1). Lors de son discours de prise de fonction à Bercy, celle qui reste aussi députée (Modem) depuis juin 2022 (après avoir été conseillère départementale de la Savoie d’où elle est originaire), a enfoncé le clou sur la « souveraineté numérique » : « Notre pays doit réussir le virage des deeptech et des greentech : c’est tout à la fois une question de souveraineté […]. Je m’impliquerai personnellement pour […] renforcer notre souveraineté et notre indépendance ».

Tapis rouge français pour l’IA américaine
Bref, la « souveraine numérique » est plus que jamais le mot d’ordre au ministère de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, dénommé ainsi depuis mai 2022, Bruno Le Maire étant locataire de Bercy depuis mai 2017 (2). Artisant de la « Start-up Nation », le président de la République Emmanuel Macron impulse cette « volonté de construire la souveraineté de la France et de l’Europe dans le domaine numérique », que cela soit lors de ses prises de parole au salon Viva Tech à Paris ou à la Commission européenne à Bruxelles. Pour autant, trois jours après la passation de pouvoirs de Jean-Noël Barrot à Marina Ferrari, il n’a plus été question de « souveraineté numérique ». La secrétaire d’Etat chargée du Numérique accompagnait son ministre de tutelle rue d’Amsterdam à Paris pour inaugurer le 15 février le hub de Google dédié à l’intelligence artificielle (IA), « qui va être, s’est réjoui Bruno Le Maire, une chance pour notre pays, et nous permettre d’attirer des talents, des savoirs, de mélanger ces talents et ces savoirs et faire le meilleur en matière d’IA ».

La « souveraineté numérique » sacrifiée ?
Le nouveau labo parisien de Google – deuxième après le centre de recherche et développement inauguré en 2011 – accueillera quelque 300 chercheurs et ingénieurs de Google, provenant de DeepMind, Google Research, Chrome et YouTube. Lors son discours, le patron de Bercy n’a pas prononcé les mots « souveraineté numérique » en présence de Sundar Pichai, PDG d’Alphabet et de son vaisseau-amiral Google. Comme si, cette fois, ce n’était pas le moment face à un des géants du Net américains qui est déjà en position dominante en France et dans toute l’Europe avec son moteur de recherche – pour ne pas dire en quasi-situation de monopole, l’initiative franco-allemande Qwant pouvant en témoigner (3) – et avec son écosystème Android/Google Play, en quasi-duopole avec iOS/App Store d’Apple. Et de l’aveu même de Bruno Le Maire, « les Etats-Unis ont un temps d’avance ». Alors dérouler le tapis rouge français voire européen au rouleau compresseur de l’IA américaine ne reviendrait-il pas à sacrifier la « souveraineté numérique » du pays voire de l’Union européenne ?
La réponse est sans doute dans le « en même temps » macronien : « Nous pensons qu’avoir un hub ici à Paris, pouvoir travailler avec Google est une chance pour réussir nous-mêmes. Pour donner à la France [surtout à Google en fait, ndlr] la possibilité d’exercer son leadership sur l’intelligence artificielle en Europe. Nous voulons être les premiers en matière d’intelligence artificielle en Europe et nous nous battrons pour ça », a expliqué Bruno Le Maire à Sundar Pichai. Tout en prévenant quand même l’IndoAméricain, à défaut de lui parler explicitement de « souveraineté numérique » : « Et j’aime la compétition, cher Sundar, et nous aimons la compétition » (4).
En fait, cet « hub IA » aux allures de campus – implanté sur 6.000 mètres carrés dans le 9e arrondissement de Paris – avait déjà été annoncé en 2018 par Sundar Pichai lors de sa précédente visite à Paris le 22 janvier 2018 pour rencontrer Emmanuel Macron à Versailles, où le chef de l’Etat recevait 140 dirigeants de grands groupes étrangers pour un sommet baptisé « Choose France » (5). Six ans après, rebelote (si l’on peut dire), le même Emmanuel Macron a reçu le 15 février dernier Sundar Pichai, cette fois à l’Elysée. Mais de « souveraineté numérique » de la France, il n’en a pas été question non plus. Google n’est pas le premier Gafam à installer son laboratoire de recherche et développement en IA à Paris, grâce notamment au crédit d’impôt recherche (CIR) offert par la France. En 2015, sous la présidence de François Hollande, le groupe Facebook – rebaptisé Meta Platforms – a choisi la capitale française pour y mettre son deuxième laboratoire d’IA baptisé « Fair » (Facebook Artificial Intelligence Research), créé et dirigé par un Français basé chez Meta à New-York, Yann Le Cun, pionnier des réseaux de neurones artificiels, embauché par Mark Zuckerberg il y a un peu plus de dix ans (6).
Ironie de l’histoire, le jour même de la consécration du labo IA parisien de Google par Bercy et l’Elysée, le ministère de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique annonçait que la France venait de signer avec les Etats Unis, l’Autriche, l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni la prorogation jusqu’au 31 juin 2024 de la taxe « Gafam » (7). Paris avait été le premier à instaurer, en 2019, une telle taxe sur les grandes plateformes numériques. Cette « taxe sur les services numériques » (TSN) de 3 % sur leur chiffre d’affaires vise non seulement Google, mais aussi les autres géants du Net dont les revenus mondiaux dépassent les 750 millions d’euros, dont plus de 25 millions d’euros « au titre des services fournis en France » (8). Mais il est convenu au niveau international – dans le cadre de l’accord historique de l’OCDE le 8 octobre 2021, notamment de son « pilier 1 » (9), que ces taxes nationales « Gafam » devront être supprimées au profit d’une taxe de 25 % de leur bénéfice taxable (au-delà d’un seuil des 10 % de profits). Mais cette réaffectation de l’impôt collecté auprès des géants mondiaux du numérique nécessite pour chacun des 138 pays favorables de signer une « convention multilatérale » (10). D’ici l’été prochain ?

Pas d’« IA souveraine » ni de « cloud souverain »
Google voit dans la France un formidable potentiel avec « ses 500.000 chercheurs et des institutions de premier plan tels que le CNRS, Inria, Paris Saclay, l’Institut Curie, ou encore l’Université PSL » qui pourront utiliser ses interfaces de programmation (API). La firme de Mountain View prévoit de former 100.000 professionnels français aux outils de l’IA d’ici la fin de l’année 2025.
L’IA n’est pas le seul domaine où la « souveraineté numérique » sonne creux. Dans le cloud, par exemple, la désignation de « cloud souverain » a laissé place à « cloud de confiance » (11), en partenariat avec les hyperscalers américains Amazon Web Services (AWS), Microsoft Azure et Google Cloud. @

Charles de Laubier

Huawei fête ses 20 ans en France, où le chinois bénéficie d’une indulgence qu’il n’a pas ailleurs

La filiale française du numéro un mondial des réseaux télécoms, Huawei Technologies France, a été créée le 1er décembre 2003. En deux décennies, le chinois a pris goût à l’Hexagone qui le lui rend bien. L’Etat français lui déroule le tapis rouge, contrairement aux Etats-Unis qui l’ostracisent.

Officiellement directeur général (président) de Huawei Technologies France depuis le 17 novembre dernier, le Chinois Enshuo Liu – alias Léo Liu (photo) – a succédé à son compatriote Weiliang Shi qui occupait ce poste depuis six ans. Le nouveau PDG de la filiale française du numéro un mondial des télécoms a été intronisé à l’occasion de la troisième édition de son plus grand événement européen, Huawei Connect Europe, qui s’est tenu les 15 et 16 novembre à Paris Porte de Versailles. De plus, le dirigeant fraîchement nommé a l’honneur de fêter ce 1er décembre les 20 ans de Huawei France.

A Strasbourg, n’en déplaise à Bruxelles
Cet anniversaire de deux décennies de présence de la firme de Shenzhen dans l’Hexagone a une valeur d’autant symbolique qu’il correspond aussi au coup d’envoi de la construction de la grande usine de production de Huawei dans la région Grand-Est, à Brumath dans le Bas-Rhin, à proximité de Strasbourg. Léo Liu a confirmé, lors de l’annonce de sa nomination le 30 octobre dernier, que ce projet industriel en Alsace ouvrait « un nouveau chapitre passionnant pour Huawei en France » (1).
Déjà le 22 juin, à l’occasion des journées « 360 Grand Est » à Strasbourg, le directeur général adjoint de Huawei France, Minggang Zhang, avait assuré sur place que le géant chinois maintenait son projet d’usine à Brumath (2). Et ce, malgré l’appel du commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, qui avait – sept jours plus tôt de Bruxelles – demandé aux Vingt-sept de « bannir les fournisseurs à haut risque » au regard de la sécurité de la 5G : « Les décisions prises par certains Etats membres de restreindre ou d’exclure complètement Huawei et ZTE de leurs réseaux 5G sont justifiées », avait-il lancé en ciblant nommément les deux chinois (3).

Depuis le lancement officiel du projet de l’usine alsacienne en février 2021, Huawei ne s’est pas laissé intimidé par cette défiance à son égard au nom (ou sous prétexte, c’est selon) de « la sécurité collective de l’Union européenne ». La commune de Brumath accueillera bien la première usine hors de Chine de fabrication d’équipements télécoms du groupe Huawei, notamment pour les réseaux 5G. La firme de Shenzhen prévoit d’y produire l’équivalent de 1 milliard d’euros par an d’équipements télécoms à destination des marchés européens, avec la création « à terme » de 500 emplois directs (4). En février dernier, soit deux ans après le lancement du projet et à l’occasion du Mobile World Congress à Barcelone, l’ancien directeur général de Huawei France, Weiliang Shi, formé à Reims et à Shanghai, avait réaffirmé les engagements pris. Il est notamment question d’investir 200 millions d’euros dans cette nouvelle usine. Il avait même ajouté : « La France a pris une décision équilibrée » (5), en faisant référence à la loi française « antiHuawei » du 1er août 2019 prise – au sujet de « l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles » – sous le premier quinquennat d’Emmanuel Macron au nom des « intérêts de la défense et de la sécurité nationale » (6). Les restrictions françaises envers le chinois – soupçonné sans preuves de cyber espionnage au profit de Pékin – sont en effet moins strictes que celles prises par les Etats-Unis sous Trump (7) et maintenues sous Biden (8).
L’anniversaire des 20 ans de Huawei France sera d’autant plus festif que l’industriel chinois a de nouveau obtenu cette année 2023 de nouvelles preuves de bienveillance de la part du gouvernement français : après une rencontre entre Emmanuel Macron et le président chinois Xi Jinping en avril, et le déplacement en juillet à de son ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Bruno Le Maire (tous deux venus à Pékin), le gouvernement français a assoupli les restrictions à l’encontre de Huawei. N’en déplaise à Thierry Breton. Comment ? En autorisant SFR (Altice) et Bouygues Telecom à garder certaines de leurs antennes mobiles 5G Huawei au-delà de 2028, selon L’Informé (9). Orange et Free, eux, n’en disposent pas. Ces autorisations de pouvoir continuer à les utiliser trois ans de plus, soit jusqu’en 2031, ont été signées (conformément à la loi de 2019) par la Première Ministre, Elisabeth Borne sur proposition de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) qui lui est rattachée.

« La Chine apprécie la décision de la France »
La décision en France est « secret défense » mais cela n’a pas empêché la Chine d’exprimer haut et fort sa satisfaction, par la voix de son vice-Premier ministre en charge des finances, He Lifeng, devant Bruno Le Maire présent à Pékin le 29 juillet 2023 pour le 9eDialogue économique et financier de haut niveau Chine-France : « La Chine apprécie la décision de la France d’étendre la licence 5G de Huawei dans certaines villes françaises. […] Et nous souhaitons que la Chine réfléchisse à de nouveaux investissements industriels majeurs en France » (10). La confiance règne à Paris mais pas à Bruxelles. @

Charles de Laubier

Médias sociaux : l’Unesco tiendra sa première Conférence mondiale des régulateurs en juin 2024

L’agence de l’ONU pour l’éducation, la science et la culture organisera mi-2024 sa toute première Conférence mondiale des régulateurs. Au moment où les plateformes numériques en Europe font la chasse aux « contenus illicites », l’Unesco veut des garde-fous pour la liberté d’expression.

Audrey Azoulay (photo), directrice générale de l’Unesco, l’a annoncé le 6 novembre dernier : l’agence des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture organisera mi-2024 – en juin, selon les informations de Edition Multimédi@ – sa toute première Conférence mondiale des régulateurs, en vue de mettre en œuvre les mesures préconisées pour « mettre fin à ce fléau » qu’est « l’intensification de la désinformation et des discours de haine en ligne » sur les médias sociaux. Ce prochain rendez-vous concernera non seulement les gouvernements et les autorités de régulation, mais aussi la société civile et les plateformes numériques.

Préserver la liberté d’expression
« Il y a une exigence cardinale qui a guidé nos travaux : celle de préserver toujours la liberté d’expression et tous les autres droits humains. Contraindre ou brider la parole serait une terrible solution. Des médias et des outils d’information libres, de qualité et indépendants, constituent la meilleure réponse sur le long terme à la désinformation », a mis en garde Audrey Azoulay.
L’Unesco, qui revendique son rôle « pour la promotion et la protection de la liberté d’expression et de l’accès à l’information », a présenté à Paris – où est basé son siège social – les « Principes pour la gouvernance des plateformes numériques », détaillés dans un document d’une soixantaine de pages (1). Ils sont le fruit d’une consultation multipartite engagée en septembre 2022 et au cours de trois consultations ouvertes qui ont eu lieu respectivement entre décembre 2022 et janvier 2023, entre février et mars 2023 et entre avril et juin 2023, soit au total 1.540 contributions provenant de 134 pays et ayant généré plus de 10.000 commentaires. « Préserver la liberté d’expression et le droit d’accès à l’information, tout en luttant contre la désinformation, les discours de haine et les théories du complot, nécessite une approche multipartite », justifie l’Unesco, qui a aussi tenu compte des conclusions de sa conférence mondiale de février 2023 consacrée à la régulation des plateformes numériques (2). La protection de la liberté d’expression dans le monde est la première préoccupation de l’Unesco, alors que dans les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne (UE) les très grandes plateformes en ligne et très grands moteurs de recherche en ligne – au nombre de dix-neuf (3) – doivent se conformer depuis le 25 août au règlement sur les services numériques qui leur impose de lutter contre les « contenus illicites » (fausses informations, discours haineux, messages à caractère terroriste, …). Selon certaines organisations, ce Digital Services Act (DSA) – applicable à toutes les plateformes numériques à partir du 17 février 2024 – présentent une menace pour la liberté d’expression des Européens (4) – notamment en cas de censure abusive, voire d’interprétation contestée de la part du commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton (5).

Si l’Unesco ne mentionne pas dans son document les avancées de l’UE dans ce domaine, elle n’en met pas moins en garde les Etats du monde entier contre les atteintes à la liberté d’expression et aux droits humains. « Les Principes [pour la gouvernance des plateformes numériques] commencent par décrire l’environnement propice nécessaire pour sauvegarder la liberté d’expression, l’accès à l’information et d’autres droits humains, tout en garantissant un environnement ouvert, sûr et sécurisé pour les utilisateurs et les non-utilisateurs des plateformes numériques », explique l’Unesco dans son document. Sont ainsi définies les responsabilités des différentes parties prenantes, et ce n’est pas un hasard si celles-ci commencent par « les devoirs des Etats de respecter, protéger et appliquer les droits humains » :
Les Etats doivent respecter et promouvoir les droits humains, y compris le droit à la liberté d’expression et le droit d’accès à l’information. Les restrictions à la liberté d’expression ne sont admissibles que dans les conditions prévues aux articles 19 et 20 du PIDCP [Pacte international relatif aux droits civils et politiques (6), adopté par les Nations Unies en 1966 et entré en vigueur en 1976, ndlr].

Les Etats ne doivent ni censurer…
Les Etats ont des obligations positives de protéger les droits humains contre les ingérences injustifiées des acteurs privés, y compris les plateformes numériques, car ils ont la responsabilité de créer un environnement réglementaire qui facilite le respect des droits humains par les plateformes numériques et de donner des orientations aux plateformes numériques sur leurs responsabilités.
Les Etats sont tenus d’être pleinement transparents et responsables quant aux exigences qu’ils imposent aux plateformes numériques pour assurer la sécurité et la prévisibilité juridiques, qui sont des conditions préalables essentielles à l’Etat de droit. Plus précisément, les Etats doivent notamment : garantir les droits des utilisateurs des plateformes numériques à la liberté d’expression, à l’accès à l’information, à l’égalité et à la non-discrimination, et protéger les droits à la vie privée, à la protection des données, d’association et de participation publique des utilisateurs ; veiller à ce que toute restriction imposée aux plateformes respecte systématiquement le seuil élevé fixé pour les restrictions à la liberté d’expression, sur la base de l’application des Articles 19 et 20 du PIDCP.

…ni couper le réseau Internet
Les Etats doivent s’abstenir, notamment
: d’imposer des mesures qui empêchent ou perturbent l’accès général à la diffusion de l’information, en ligne et hors ligne, y compris les coupures d’Internet ; d’imposer une obligation générale de surveillance ou, pour les plateformes numériques, l’obligation générale de prendre des mesures proactives en relation avec les contenus considérés comme illégaux dans une juridiction spécifique ou avec les contenus qui peuvent être restreints de manière admissible en vertu des normes et de la législation internationales en matière de droits humains.
L’année 2024, au cours de laquelle se tiendra la première Conférence mondiale des régulateurs organisée par l’Unesco, sera d’autant plus décisive pour la régulation des plateformes numérique que 2 milliards de personnes sur la planète seront appelées à voter lors d’une cinquantaine d’élections dans plusieurs pays. Or, selon une étude réalisée l’été dernier par l’institut Ipsos pour l’agence « éducation, science et culture » de l’ONU, 87 % des personnes interrogées (sur un total de 8.000 dans 16 pays où se dérouleront une élection en 2024) craignent que la propagation de fausses informations en ligne ait un impact majeur sur les élections dans leur pays, et autant (87 % également) en appelle à une meilleure régulation des médias sociaux.
Les Facebook, YouTube, TikTok et autres Snapchat sont devenus dans de nombreux pays « la première source d’information des citoyens, en même temps que le principal vecteur de désinformation et de manipulation », relève la directrice générale de l’Unesco. La prochaine année électorale débutera avec les élections parlementaires au Bengladesh en janvier 2024, suivies par l’élection présidentielle au Sénégal en février 2024 et bien d’autres rendez-vous électoraux dans d’autres pays (El Salvador, Indonésie, Inde, Afrique du Sud, République dominicaine, Belgique, Mexique, Croatie, Autriche, Roumanie, Ghana), et se terminera avec l’élection présidentielle en Algérie en décembre 2024, précédée de l’élection présidentielle aux Etats-Unis en novembre 2024. « La régulation des réseaux sociaux constitue d’abord un enjeu démocratique. Bien sûr, la libération de la parole et de la participation démocratique par le numérique a représenté d’immenses progrès à certains égards, a expliqué Audrey Azoulay. Mais ces réseaux sociaux ont aussi accéléré et amplifié, parfois délibérément et à une échelle quasi-industrielle, la diffusion de fausses informations, voire de discours de haine et de théories complotistes – et ceux-ci tendent à se renforcer mutuellement ». Tout en appelant à la « modération » des contenus illicites sur Internet, elle appelle aussi à la « modération » de la régulation pour préserver la liberté d’expression. « Je voudrais souligner une exigence essentielle, qui a servi de boussole pour nous : la préservation de la liberté d’expression et de tous les autres droits de l’homme. Limiter ou restreindre la parole serait une fausse solution – une solution terrible, en fait – pour un problème très réel », a prévenu la directrice générale de l’Unesco, dont le second mandat s’achèvera en novembre 2025.
Les gouvernements et les autorités de régulation auront-ils la main lourde dans la chasse aux fake news ? C’est à craindre, alors que les pouvoirs publics (gouvernements et régulateurs justement) sont considérés – par le plus grand nombre de personnes interrogées dans le monde par Ipsos pour l’Unesco (29 %) – « comme les principaux responsables de l’identification et de la lutte contre la désinformation en ligne ». Et ce, devant les internautes eux-mêmes (23 %), les nouveaux médias (20 %), les médias sociaux (19 %), les organisations internationales (5 %) et les politiciens (4 %). En outre, à l’affirmation selon laquelle « les organisations internationales comme les Nations unies ou l’Unesco ont un rôle majeur à jouer dans la lutte contre la désinformation et les “fake news” », 75 % des sondés disent « Oui » (7).

La recommandation sur l’IA a deux ans
L’Unesco, dont le mandat confié par l’ONU est aussi de défendre et de promouvoir la liberté d’expression, l’indépendance et le pluralisme des médias (régulation globale des médias comme la radio ou la télévision), s’affirme de plus en plus dans la régulation d’Internet et l’éthique des nouvelles technologies. Elle a ainsi émis une recommandation sur l’éthique de l’intelligence artificielle, adoptée en novembre 2021 par les 193 Etats membres, pour fixer un cadre humaniste aux développements de cette innovation qui a depuis explosée avec les IA génératives (8). Tandis que la Convention de l’Unesco de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles (9) intègre de plus en plus de directives opérationnelles élargies au numérique. @

Charles de Laubier