Droits de diffusion du sport : le public paie le prix fort pour voir les retransmissions

Le rapport parlementaire sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives sera présenté le 15 décembre. Il devrait proposer des évolutions pour favoriser la retransmission des matches et compétitions auprès d’un plus large public, voire gratuitement.

Six mois après la constitution de la mission d’information sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives et trois mois après le psychodrame « Mediapro » autour de la diffusion des rencontres de la Ligue 1 de football, la mission d’information sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives est dans sa dernière ligne droite. Le député Cédric Roussel (photo) présentera son rapport le 15 décembre. Ses conclusions sont très attendues sur la question de l’accès gratuit ou payant du public aux retransmissions des matches et des rencontres sportives.

Téléfoot : le groupe sino-espagnol Mediapro espère signer aussi avec Canal+, Facebook et YouTube

En 2018, le groupe audiovisuel Mediapro remportait plus de 80 % des droits de diffusion 2020-2024 des championnats français de football de Ligue 1, moyennant 800 millions d’euros par an, ainsi que la Ligue 2. Sa chaîne Téléfoot vise 3,5 millions d’abonnés payants pour rentabiliser ses investissements.

Téléfoot, nom de la chaîne que le groupe espagnol à capitaux chinois Mediapro emprunte sous licence à TF1 (1), n’est pas encore diffusée par Canal+. « Les discussions restent au point mort », selon le directeur de la chaîne, Julien Bergeaud, cité le 9 septembre par l’AFP. En revanche, ce jour-là, un accord était annoncé avec Orange qui revendique à fin 2019 plus de 21,7 millions d’abonnés mobile et plus 11,6 abonnés haut débit fixe (2). Les quatre fournisseurs d’accès à Internet (FAI) français ont donc chacun signé.

Tous azimuts : FAI et OTT
En quelques semaines, le groupe catalan fondé par Jaume Roures (photo) a su trouver un terrain d’entente avec Orange (accord annoncé le 9 septembre), SFR (le 27 juillet), Bouygues Telecom (le 14 août) et Free (le 26 août). Téléfoot, chaîne éditée par la société Mediapro Sport France, basée à Boulogne-Billancourt, sera aussi distribuée par Netflix qui a aussi signé (le 30 juillet). Mediapro négocie en outre – même si « cela n’aboutira peut-être pas tout de suite » – avec le réseau social Facebook, avec lequel devaient être résolus « des problèmes techniques », et avec la plateforme vidéo YouTube. Jaume Roures (70 ans, francophone) doit encore convaincre Canal+. La chaîne cryptée française, filiale du groupe Vivendi (lui-même détenu par Bolloré), rechignant à payer trop cher pour diffuser ce nouvel entrant qui lui a « subtilisé » les droits de la Ligue 1 sur 2020-2024 pour 800 millions d’euros par an (sur un total de 1,15 milliard d’euros par an tous diffuseurs confondus), le tout payé à la Ligue de football professionnel (LFP), détentrice de tous ces droits (3). Alors que les deux diffuseurs historiques du foot étaient Canal+ et le qatari BeIn Sports. Et alors même que le groupe sino-espagnol ne possédait pas de chaîne de télévision en France !
Outre la Ligue 1 (80 % des matchs, dont les dix plus grandes affiches du Championnat de France de football et le match du dimanche soir), Mediapro détient aussi des droits sur la Ligue 2 (huit rencontres par journée), ainsi que certaines rencontres de la prochaine Ligue des Champions (saison 2020-2021, codiffusée avec SFR) et de la Ligue Europa. Il s’agit maintenant pour la chaîne Téléfoot de rentabiliser ces droits records. Le second diffuseur est BeIn Sports. Tandis que le groupe Iliad, maison mère de Free, avait, lui, obtenu un lot correspondant aux droits de diffusion d’extraits de la Ligue 1 en quasi-direct sur tous les matches et les droits magazines en VOD pour près de 50 millions d’euros par saison (4). Pour monétiser cette nouvelle chaîne du foot auprès d’abonnés, à raison de 25,90 euros par mois avec engagement de 12 mois ou 29,90 euros sans engagement (voire 14,90 euros par mois sans engagement sur mobile seulement), Mediapro se doit de diffuser ses programmes footballistiques le plus largement possible – non seulement auprès des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) mais aussi auprès des Over-the-Top (OTT). Pas d’exclusivité. La nouvelle chaîne du foot est par ailleurs accessible sur Internet via le site web telefootlachaine.fr, sur les smartphones via App Store pour iOS ou Google Play pour Android, sur les téléviseurs connectés Samsung (versions 2018 et postérieures) et sur les boîtiers Apple TV.
Mediapro avait annoncé le 18 août un accord avec la marque à la pomme, et promis qu’il en irait de même avec Android – l’écosystème de Google. Téléfoot est en outre accessible sur le site web rmcsport.tv, voire sur d’autres équipements audiovisuels offrant les applications Téléfoot ou RMC Sport, notamment sur smartphone ou tablette. « L’accès aux chaînes Téléfoot via l’application RMC Sport est disponible sur beaucoup plus de supports que n’en propose Téléfoot : ordinateurs, smartphones, tablettes, Smart TV Samsung mais aussi Philips, Sony, LG, HiSense, box Android (Nvidia Shield, Mi box), consoles XBox One et PS4 », fait remarquer le courtier en télécoms Ariase.
Créée ex nihilo, la chaîne Téléfoot a pu ainsi se lancer dès le 17 août avec un minimum de visibilité, soit quatre jours avant le redémarrage du Championnat de France de football – avec le match Bordeaux-Nantes. Elle doit cependant faire oublier l’écran noir apparu le 30 août en plein matches de Ligue 1 à cause d’une panne mondiale chez l’opérateur de réseaux américain CenturyLink…

Le covid menace le business plan
Mediapro a indiqué mi-août avoir déjà versé près de 175 millions d’euros à la LFP. Mais Téléfoot se lance au plus mauvais moment, dans un contexte de restrictions liées au covid-19 et en l’absence de public pour les matches joués à huis clos, lorsque les stades ne sont pas limités à une jauge limitée à 5.000 téléspectateurs. La chaîne compense l’absence totale ou partielle des supporteurs par des préenregistrées sonores d’ambiances de stades. @

Charles de Laubier

Netflix déclare sa flamme au cinéma français, tout en espérant beaucoup de la future loi sur l’audiovisuel

« On aime profondément le cinéma ; on veut travailler avec vous ! », a lancé Marie-Laure Daridan, directrice des relations institutionnelles de Netflix France, lors des 29es Rencontres cinématographiques de Dijon. La première plateforme mondiale de SVOD, aux 6 millions d’abonnés en France, fait « une lecture très positive » de la future loi audiovisuelle.

Il y a cinq ans, tout juste après le lancement de Netflix en France, intervenait Janneke Slöetjes aux 28es Rencontres cinéma-tographiques de Dijon (RCD). Mais la directrice des affaires publiques de Netflix Europe avait à l’époque botté en touche sur les intentions du géant mondial de la SVOD envers le cinéma français. Cette fois, lors des 29es RCD qui se sont déroulées du 6 au 8 novembre, c’est Marie-Laure Daridan (photo), directrice des relations institutionnelles de Netflix France depuis dix mois, qui a fait le déplacement à Dijon à l’invitation de L’ARP, société civile d’auteurs, de réalisateurs et de producteurs (1), organisatrice de cet événement annuel. Pour la première fois, la firme de Reed Hastings – disposant à nouveau de bureau en France depuis un an (2) – s’est déclarée prête à coopérer avec le cinéma français dans la perspective de la future loi sur l’audiovisuel. « Nous faisons une lecture très positive de la loi (audiovisuelle) française, car elle va parfaitement dans le sens de nos objectifs et de la réalité de Netflix en France. La France occupe une place particulière pour Netflix, de par la diversité et la richesse de ses talents, de par sa créativité et son exception culturelle », a assuré Marie-Laure Daridan devant les professionnels du 7e Art français.

Surenchère des droits de diffusion sportive – foot en tête : quid du Net, des smartphones et des extraits ?

L’obtention d’exclusivités de diffusion sportive se paie au prix fort pour les chaînes de télé, comme l’illustre la surenchère des droits 2020-2024 de retransmission de la Ligue 1 pour un montant record de 1,15 milliard d’euros par saison. Mais les GAFAT et les OTT n’ont pas dit leur dernier mot.

Sur les cinq lots attribués à l’issue de l’appel à candidatures qu’a organisé la Ligue de football professionnel (LFP), présidée par Nathalie Boy de
la Tour (photo) et dirigée par Didier Quillot, un lot qualifié de « digital » portait sur « les droits de diffusion d’extraits en quasi-direct sur tous les matches et les droits magazines en vidéo à la demande ». C’est le groupe Iliad, maison-mère de Free, qui l’a remporté, signant ainsi son entrée pour la première fois dans le football français. Tous les autres lots portent sur la diffusion audiovisuelle et ont été attribués à l’espagnol Mediapro (1) (lots 1,2, 4) et au qatari BeIn Sports (lot 3).

Aux Etats-Unis, les grandes manœuvres dans l’œil du cyclone « Internet » s’accélèrent

Méga-fusions, spéculations, surenchères, … Le marché américain est secoué par une vague d’acquisitions entre géants traditionnels de la télévision et du cinéma, tous remis en question par les plateformes de streaming vidéo des GAFAN et des Over-the-Top (OTT). Les répercutions se font sentir jusqu’en Europe.

Le monde des médias et du divertissement est en plein boom, sous l’impulsion des GAFAN – à savoir les Google/YouTube, Apple, Facebook, Amazon Netflix et autres OTT. Aux Etats-Unis, c’est un peu « Big Media » contre « Big Tech », avec en toile de fond la délinéarisation de la télévision et le cord-cutting (1) (*) (**). C’est aussi la bataille pour la survie de la télévision payante (Pay TV) face à la montée en puissance de la vidéo à la demande par abonnement (SVOD). Les grands manoeuvres entre titans des médias se font à coup d’offres et de contre-offres de plusieurs dizaines de dollars, sous les yeux parfois hostiles des autorités de concurrence, de part et d’autre de l’Atlantique.
Car la concentration dans les contenus et la convergence avec les réseaux vont de pair et s’intensifient. Pour l’instant, les forces en présence sont Twenty-First Century Fox (Fox), Walt Disney Company (Disney), Sky, Comcast et AT&T, sans parle du tandem CBS-Viacom. Mais rien n’est encore joué aux Etats-Unis, et les répercutions en Europe commencent à se faire sentir.