Le jeune ministre de la Transition numérique et des Télécoms, Jean-Noël Barrot (40 ans), s’active

Nommé il y a un peu plus de dix mois ministre délégué de la Transition numérique et des Télécoms, Jean-Noël Barrot – 40 ans depuis le 13 mai – intensifie son action aussi bien sur la régulation d’Internet (G7 numérique au Japon et projet de loi en France) que sur le plan France Très haut débit et la French Tech.

Pas de temps à perdre pour ce jeune quadra. L’agenda bien rempli de Jean-Noël Barrot (photo), ministre délégué de la Transition numérique et des Télécommunications auprès de Bruno Le Maire (1), s’accélère. Après un périple de deux jours au Japon pour représenter la France au G7 Numérique les 29 et 30 avril, le revoici à pied d’oeuvre sur le sol français où ses dossiers s’enchaînent à Bercy. En haut de la pile : le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique. Après l’avoir présenté le 10 mai en conseil des ministres, puis transmis au Parlement, le texte du gouvernement devrait être examiné au Sénat en juin puis à l’Assemble nationale début juillet. L’une des mesures très attendues est le « filtre anti-arnaques » annoncé par le candidat Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle du printemps 2022.

Un ministre délégué à l’agenda de ministre
Sur un autre front, Jean-Noël Barrot interviendra le 16 mai à l’occasion de la publication – par la fédération professionnelle Infranum (2) – de l’Observatoire du très haut débit 2023 sur fond de polémiques sur les malfaçons dans le déploiement de la fibre optique jusqu’aux abonnés. Pour tenter de remédier à ces dysfonctionnements, une proposition de loi a été adoptée le 2 mai au Sénat et transmise à l’Assemblée nationale. Les différents acteurs de la filière télécoms se rejettent plus que jamais la responsabilité des couacs. Jean-Noël Barrot (« JNB ») oeuvre aussi en faveur de la « Startup Nation » chère à Emmanuel Macron, lequel fut ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique d’août 2014 à août 2016 (sous la présidence de François Hollande). La « French Tech » est une initiative du gouvernement français lancée il y aura dix ans en fin d’année. Passage en revue des principaux sujets d’actualité concernant JNB : Continuer la lecture

Avec Numspot et Synfonium, l’Etat français – via la CDC – veut damer le pion à Google, Microsoft et Amazon

La Caisse des dépôts (CDC), le bras armé financier de l’Etat français, rêve de faire émerger un « Google français » en Europe. Cette reconquête numérique passe par des fonds publics injectés via la Banque des Territoires et Bpifrance, notamment dans deux futurs « champions européens » : Numspot et Synfonium.

La Caisse des dépôts et consignations (CDC), que dirige depuis plus de cinq ans maintenant Eric Lombard (photo), est une vieille institution financière publique qui a eu 207 ans le 28 avril (1). Elle est devenue le bras armé de l’Etat français pour investir dans les entreprises et les territoires, y compris dans les infrastructures électroniques – de la téléphonie dès 1889 au numérique à partir de l’année 2000. La CDC finance les espaces publics numériques dans les territoires, les espaces numériques de travail dans les établissements scolaires, l’aménagement numérique des territoires pour garantir l’inclusion numérique, ou encore les services numériques de confiance via des projets de « cloud souverain ». Les premiers investissements de l’Etat français dans le cloud justement remontent au début des années 2010 et l’ont été en pure perte après les échecs cuisants de Cloudwatt d’Orange et Thalès, d’une part, et de Numergy de SFR et Bull, d’autre part. A l’époque, le gouvernement avait ignoré un nouvel entrant dans le cloud venu du Nord de la France : la société OVH créée à Roubaix par le Français d’origine polonaise Octave Klaba.

Créer des « champions européens du cloud »
Dix ans après, il en va tout autrement puisque la Banque des Territoires – créée en 2018 en tant que filiale d’investissement de la CDC – a annoncé le 11 avril dernier avec Octave Klaba un partenariat pour créer la société Synfonium dans laquelle la CDC participera à hauteur de 25 % du capital. Objectif : « la construction d’un champion européen des services basés sur le cloud ». Rien de moins. « Après avoir investi dans Qwant pour soutenir la croissance d’un moteur de recherche européen respectueux de la vie privée, la Caisse des dépôts s’associe avec un acteur majeur de la tech avec pour ambition de contribuer à l’émergence d’une plateforme européenne grand public, ouverte et sécurisée, proposant divers services collaboratifs et logiciels dans le cloud », a déclaré Antoine Troesch, directeur de l’investissement de la Banque des Territoires. L’Etat français a déjà la tête dans les nuages informatiques, avec notamment un autre projet de « champion européen du cloud » baptisé Numspot, dont la société éponyme – « 100 % française » – a été créée officiellement le 27 janvier dernier et dotée d’un capital de 50 millions d’euros avec la Banque des Territoires (26 %), Docaposte/La Poste (26 %), Dassault Systèmes (19 %) et Continuer la lecture

Radio numérique terrestre : le DAB+ reste méconnu du public faute d’une réelle volonté politique

Alors, que la radio voit son audience baisser et ses auditeurs vieillir, la radio numérique terrestre pourrait lui redonner un second souffle auprès des jeunes. Hélas, la politique de soutien envers elle – pour faire connaître le DAB+ – laisse à désirer. Alors pourquoi attendre un « livre blanc » ?

Un « livre blanc » pour préparer le basculement à terme de la FM au DAB+ ? « Les radios indépendantes souhaitent s’associer à la rédaction d’un livre blanc sur le DAB+ proposée par le président de l’Arcom pour (…) accélérer le développement attendu du DAB+ », a déclaré le Sirti, le syndicat des radios indépendantes (170 membres, 9 millions d’auditeurs) présidé par Christophe Schalk, le 25 janvier. Ce jour-là, lors d’une table-ronde au Sénat sur « L’avenir de la radio à l’heure du DAB+ », Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom (1), a proposé de travailler sur un « livre blanc » sur la radio (2). « Nous souhaitons aboutir avant la fin de l’année. Plus tôt dans la mesure du possible », indique à Edition Multimédi@ Hervé Godechot (photo), membre de l’Arcom et président du groupe de travail « radios et audio numérique ». S’agit-il d’un énième rapport sur la radio, alors qu’il y aurait plutôt urgence à accompagner dès maintenant les radios indépendantes dans le DAB+ ?

Eviter que la radio IP ne tue le DAB+
Surtout que la « RNT », qui est à la radio ce que la TNT est à la télévision, s’est lancée en France il y a près de neuf ans. Les grandes radios privées (RTL, NRJ, Europe 1 et RMC/BFM) avaient tout fait pour mettre des bâtons dans les roues de la RNT, avant de finalement l’adopter. Les radios indépendantes, elles, y ont toujours cru et ont été les pionnières à émettre en DAB+. « Les radios indépendantes sont massivement impliquées dans le déploiement du DAB+ en France ; 75 % d’entre elles sont aujourd’hui diffusées via cette norme de diffusion radio [qui] couvre à présent 50 % du territoire. (…) Pourtant, il faut franchir un pas supplémentaire très vite. Le média radio a besoin d’être accompagné dans la transition numérique de sa diffusion hertzienne », a insisté le Sirti à l’occasion de la table-ronde au Sénat. Même son de cloche pour le Syndicat national des radios libres (SNRL), présidé par Emmanuel Boutterin, qui représente des radios associatives – au nombre de 700 sur tout le territoire (1,4 million d’auditeurs). « Certains poussent, notamment les GAFA, vers le tout-IP. C’est donc pour nous tous un défi industriel. Il faut Continuer la lecture

L’affaire « FranceSoir » tourne au bras de fer avec l’Etat, autour de son statut de « service de presse en ligne »

Relancé sans succès il y a dix ans sous forme de magazine en ligne, FranceSoir – successeur du célèbre quotidien France Soir liquidé en 2012 – est depuis 2014 dirigé par un entrepreneur, Xavier Azalbert. Il se bat aujourd’hui pour garder son statut de « service de presse en ligne » que la CPPAP voudrait lui retirer.

Qu’il est loin le temps où France Soir – fleuron de la presse française durant les Trente-Glorieuses – tirait chaque à plus de 1 million d’exemplaires imprimés (1). La chute du premier quotidien national de l’époque – créé par Pierre Lazareff après avoir repris le journal clandestin et résistant Défense de la France pour le rebaptiser en 1944 France Soir – n’est plus que de l’histoire ancienne. La crise de la presse sur fond de tsunami numérique est passée par là (2). C’est le 13 décembre 2011 que France Soir imprime sa dernière édition papier, pour basculer ensuite entièrement sur le Web et les mobiles. Ainsi en avait décidé son propriétaire d’alors, le Russe Alexandre Pougatchev. Le quotidien était passé sous la barre des 70.000 exemplaires. La liquidation judiciaire de France Soir sera prononcée le 23 juillet 2012 et ses actifs seront revendus à une société de e-paiement, Cards Off, qui lancera l’année suivante le site FranceSoir.fr mais sans succès.

Un site de presse en ligne controversé
C’est en 2014 que Xavier Azalbert (photo), ancien conseiller de McKinsey devenu entrepreneur financier, entre en scène en tant que président de Mutualize Corporation (ex-Cards Off), et, à partir de 2016, président et directeur de la publication FranceSoir. Le nombre de ses journalistes est réduit et le site web gratuit publie des dépêches AFP pour assurer tant bien que mal une information en continu. Lorsqu’une grève est déclenchée par la rédaction de FranceSoir à partir de fin août 2019, il ne reste plus que quatre journalistes titulaires. Dénonçant la dégradation de leurs conditions de travail, ils seront tous licenciés par Xavier Azalbert « pour motif économique » au mois d’octobre suivant. Durant la crise sanitaire due au coronavirus, le « journal sans journalistes » prend fait et cause pour l’hydroxychloroquine du professeur Didier Raoult, donne la parole au professeur spécialiste des épidémies Christian Perronne et fustige les décisions sanitaires du gouvernement. FranceSoir.fr fait en outre la part belle au Continuer la lecture

PLF 2023 : rejet de trois amendements taxant à 1,5 % le streaming musical pour financer le CNM

L’UPFI la prône ; le Snep n’en veut pas ; des députés ont tenté de l’introduire avec trois amendements dans le projet de loi de finances 2023 : la taxe de 1,5 % sur le streaming musical en faveur du Centre national de la musique (CNM) a été rejetée le 6 octobre à l’Assemblée nationale.

Une taxe sur le streaming musical de 1,5% sur la valeur ajoutée générée par les plateformes de musique en ligne. Telle était la proposition faite par des députés situés au centre et à gauche de l’échiquier politique, dans le cadre du projet de loi de finances 2023. Mais avant même l’ouverture des débats en séance publique le 10 octobre à l’Assemblée nationale (et jusqu’au 4 novembre), la commission des finances réunie le 6 octobre, a rejeté les trois amendements – un du centre et deux de gauche, déposés respectivement les 29 et 30 septembre.

Budget 2023 du CNM : plus de 50 M€
La ministre de la Culture, Rima Abdul Malak (« RAM »), n’a-t-elle pas assuré que le budget du Centre national de la musique (CNM) pour en 2023 est « suffisamment solide » ? Le CNM sera doté l’année prochaine de plus de 50 millions d’euros, grâce à la taxe sur les spectacles de variétés qui, d’après le projet de loi de finances 2023 déposé fin septembre (1), rapportera l’an prochain 25,7 millions d’euros (contre 35 millions en 2019, soit avant la pandémie). S’y ajouteront un financement garanti par l’Etat à hauteur de 26 millions d’euros et une contribution des sociétés de gestion collective (2) de quelque 1,5 million d’euros. Pour autant, la question de son financement se posera pour 2024 et les années suivantes.
Or la pérennité du budget de cet établissement public à caractère industriel et commercial – placé sous la tutelle du ministre de la Culture – n’est pas assuré. D’où le débat qui divise la filière musicale sur le financement dans la durée du CNM, aux missions multiples depuis sa création le 1er janvier 2020 (3) – et présidé depuis par Jean-Philippe Thiellay (photo). A défaut d’avoir obtenu gain de cause avec ses trois amendements, l’opposition compte maintenant sur le sénateur Julien Bargeton (majorité relative présidentielle) qui va être missionné par la Première ministre Elisabeth Borne et RAM pour trouver d’ici le printemps 2023 un financement pérenne au CNM. L’une des vocations de ce CNM est de soutenir la filière dans sa diversité, un peu comme le fait le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) pour la production cinématographique, audiovisuelle ou multimédia. Mais avec un budget plus de dix fois moins élevé que ce dernier, le CNM dispose d’une très faible marge de manœuvre. Une partie des professionnels du secteur demandent donc depuis plus de deux et demi qu’existe le CNM de mettre les plateformes de streaming de type Spotify, Deezer, Apple Music ou encore YouTube à contribution (4). « Il est institué une taxe sur les locations en France, y compris dans les départements d’Outre-Mer, de phonogrammes et de vidéomusiques destinés à l’usage privé du public dans le cadre d’une mise à disposition à la demande sur les réseaux en ligne », prévoyaient à l’unisson les trois amendements finalement écartés. Et ce, qu’il s’agisse d’« un service offrant l’accès à titre onéreux [comme Spotify] ou gratuit [comme YouTube] ».
Les députés signataires – de Charles de Courson (centre droit) (5) à Sandrine Rousseau (écologiste) (6), en passant par Karine Lebon (Nupes) (7) – s’étaient concertés pour que la taxe sur le streaming musical soit assise sur trois sources de prélèvement : sur le prix hors taxe payé par le public, sur les recettes publicitaires, et sur les revenus générés par des services proposant des contenus crées par des utilisateurs. Tous s’accordent pour établir le taux de cette taxe à 1,5 % du total. « Il s’agit donc de permettre au CNM de fonctionner “sur ses deux jambes”, en trouvant un équilibre entre financement privé et finan-cement public, mais également entre les deux volets de la filière musicale : spectacle et musique enregistrée », justifiaient les députés centristes Charles de Courson et Michel Castellani. A gauche (Nupes en tête), les signataires indiquent s’appuyer sur les travaux de l’Union des producteurs phonographiques français indépendants (UPFI). « Le rendement de cette taxe est estimé à 21 millions d’euros », précisentils. L’UPFI est à la SPPF (société de gestion collective des producteurs indépendants de musique) ce que le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) est à la SCPP (société de gestion collective notamment des majors Universal Music, Sony Music et Warner Music).

UPFI/SPPF versus Snep/SCPP
Si l’UPFI/SPPF milite pour cette taxe de 1,5 % avec cinq autres organisations professionnelles (8), le Snep/SCPP, lui, est vent debout contre ce « nouvel impôt sur le streaming » et estime les « estimations erronées » faites à partir de « son assiette supposée de 1,4 milliard d’euros » (9). Le duo des majors défend plutôt « une contribution des services vidéo gratuits [YouTube, Facebook, …] dont les acteurs ne rémunèrent pas aujourd’hui la musique à sa juste valeur ». @

Charles de Laubier