Kazuo Hirai va quitter Sony, dont il est président, au moment où la pression des GAFAN se fait plus intense

Et si Sony vendait son studio de cinéma à Apple ? C’est l’un des scénarios possibles, maintenant que la plateforme de SVOD Apple TV+ est annoncée pour l’automne. Encore faut-il que Kenichiro Yoshida, nouveau PDG depuis un an du géant japonais de l’électronique, soit vendeur… Pour l’heure, tous ses efforts se concentrent sur la future PS5.

Le président de Sony, le visionnaire Kazuo Hirai (photo), a passé il y a un an la direction exécutive du groupe à son directeur financier, Kenichiro Yoshida. « Kaz », comme on le surnomme, quittera définitivement en juin prochain la firme de Tokyo où il a passé 35 ans de sa vie. Ce départ, qui finalise la passation de pouvoirs à la tête du géant mondial japonais de l’électronique grand public, intervient au moment où son avenir devient un peu plus incertain malgré le redressement opéré ces dernières années. Kazuo Hirai laisse derrière lui un groupe en meilleur santé qu’il ne l’avait trouvé comme PDG. Les résultats de l’exercice 2018/2019, clos fin mars, ont été publiés le 26 avril dernier : le chiffre d’affaires global atteint 8.665,7 milliards de yens (69,3 milliards d’euros), en hausse sur un an de 1,4 %, et le résultat net en forte hausse affiche un nouveau record, à 916,2 milliards de yens (7,3 milliards d’euros). Kaz avait pris la tête de Sony il y a sept ans en succédant, le 1er avril 2012, à l’Américain Howard Stringer. Fort de son succès passé à la division Sony Computer Entertainment avec la console PlayStation et son écosystème de jeux en ligne, devenue la locomotive du groupe, le Japonais avait entrepris de généraliser aux autres activités la convergence entre terminaux et contenus via des services en ligne.

Vendre Sony Pictures à Netflix, Amazon ou Apple ?
Pendant son mandat, Kazuo Hirai a dû défendre la division Entertainment en assurant qu’elle n’était « pas à vendre ». En 2013, le fonds d’investissement newyorkais Third Point – actionnaire minoritaire de Sony – avait appelé le géant japonais à s’en séparer et à mettre en Bourse ses activités de contenus musicaux et cinématographiques (2). Aujourd’hui, ce même hedge fund, créé par le milliardaire Daniel Loeb, est remonté
au créneau pour interpeler le nouveau PDG et lui demander de clarifier la stratégie de Sony. Pour faire monter la pression, Third Point veut investir entre 500 millions et 1 milliard de dollars pour augmenter sa participation dans le capital du géant de la high-tech. « Nous ne faisons pas aucun commentaire sur d’éventuelles actions que nous aurions dans Sony », a répondu le fonds spéculatif à Edition Multimédi@.
PS4 et jeux vidéo : premiers revenus de Sony Il y a six ans, Daniel Loeb affirmait que sa société d’investissement était devenue le premier actionnaire de Sony – à hauteur de 6,5 % du capital. N’ayant pas réussi à l’époque à obtenir la scission de l’activité de divertissement du groupe tokyoïtes, il avait revendu l’année suivante ses actions Sony en empochant une plus-value de 20 %. Après l’échec de sa première tentative d’influence, Third Point se prépare à reprendre une participation pour essayer à nouveau de peser sur les prochaines décisions stratégiques de Sony – maintenant que le financier Kenichiro Yoshida en est le patron. C’est du moins ce qu’a révélé Reuters le 8 avril dernier (3). Selon l’agence de presse, qui cite sans les nommer des proches du dossier, le fonds – qualifié d’« activiste » – veut que Sony réfléchisse aux différents scénarios concernant l’avenir de certaines de ses activités, notamment de son studio de cinéma Sony Pictures Entertainment qui intéresserait, selon lui, Amazon et Netflix.
A l’heure où ces deux plateformes mondiales de SVOD sont engagées dans une course-poursuite dans la production originale de films et séries, à coup de milliards de dollars de financements, s’emparer d’une major du cinéma mondial pourrait être un bon parti pour les GAFAN.
Y compris pour la marque à la pomme qui va lancer à l’automne sa propre plateforme Apple TV+. En février, Daniel Ives, directeur général de la société d’études financières Wedbush Securities, avait déclaré sur la chaîne américaine CNBC que « la plus grosse erreur stratégique d’Apple depuis que Tim Cook en a pris la direction est de ne pas avoir racheté Netflix » (4) et que la firme de Cupertino « devrait acheter en 2019 un grand studio de cinéma tel que potentiellement Sony [Pictures], Lionsgate, A24 [déjà partenaire d’Apple depuis l’an dernier, ndlr], CBS ou Viacom [propriétaire de Paramount, ndlr] » (5). Sony Pictures comprend notamment les studios d’Hollywood Columbia Pictures, ceux de Screen Gems et de TriStar Pictures, ainsi que les studios Game Show Network (GSN) détenus majoritaire aux côtés de WarnerMedia (AT&T).
En outre, Third Point – qui gère un fonds de 15 milliards de dollars – veut amener
Sony à clarifier sa stratégie sur la présence au sein du groupe des activités de semiconducteurs, d’une part, et d’assurance, d’autre part. Les intentions de Daniel Loeb, non confirmées ni infirmées par le fonds alternatif, auraient pu passer inaperçues si l’information n’avait pas été suivie le lendemain par un bond de plus de 9 % de l’action Sony à la Bourse de Tokyo (6). Si l’investisseur activiste n’a pas fait parler de
lui chez Sony depuis six ans, c’est que la stratégie menée par l’ex-PDG sortant Kazuo Hirai a finalement donné des résultats positifs pour le fleuron de l’électronique grand public japonais. Audelà des réductions de coûts et du renouvellement de l’équipe de direction, Sony a profité du savoir-faire dont Kaz avait fait preuve lorsqu’il était à la tête de la division Sony Computer Entertainment – avec la console PlayStation et son écosystème de jeux vidéo en ligne. Le succès de la PS4, lancée il y a près de six ans, est à mettre à son crédit. La plateforme en ligne PS Network (PSN) et son catalogue
de jeux vidéo cartonnent ; les quelque 80 millions d’abonnés actifs en ligne par mois génèrent près de la moitié des revenus de la division Entertainment.
Depuis le lancement de la toute première PlayStation en 1994 – il y a 25 ans cette année –, Sony en a fait une console de référence vendue depuis à plus de 100 millions d’exemplaires dans le monde. Kazuo Hirai aura trouvé la consécration avec la PS4 ; son successeur Kenichiro Yoshida est attendu au tournant avec une future PS5 prévue d’ici l’an prochain. Mais le ralentissement des ventes de la PS4, arrivée en fin de cycle (de vie), place Sony devant un avenir incertain. Surtout que l’activité « Game & Network Services » (G&NS) est la première source de revenu de la multinationale nippone : 2.350 milliards de yens (18,6 milliards d’euros) prévus sur l’année échue au 31 mars 2019, soit plus d’un quart du chiffre d’affaires annuel. C’est même celle qui contribue le plus aux profits du groupe (310 milliards de yens). C’est encore mieux que la division
« Music » (230 milliards de yens), même si la major Sony Music Entertainment (7) opère un redressement grâce à la montée en charge du streaming musical par abonnement (8). Pas encore rentables, les smartphones Xperia coûtent encore beaucoup d’argent à Sony.
D’autres activités sont assez performantes telles que les capteurs d’images (Cmos)
que la firme nippone – numéro un mondial dans ce domaine – fabrique pour les smartphones et tablettes du marché mondial, ainsi que pour la voiture autonome ou les solutions de sécurité. Sony fabrique aussi des téléviseurs (Bravia, Master) ou encore des appareils photo (Cyber-shot). Pour la première fois au MipTV, qui s’est tenu à Cannes courant avril, Sony a assuré la diffusion de contenus en 8K – offrant une ultra-haute définition quatre fois plus puissante que l’actuelle 4K.

La future PS5 va coûter cher à Sony
Il y a huit mois, en août 2018, l’agence de notation financière Fitch avait relevé à
« BBB- » la note de la dette à long terme de Sony. Mais le développement de la PS5 est dévoreur de capitaux. Il y a un peu plus d’un an, en mars 2018, une autre agence notation financière, Moody’s, avait déjà relevé sa note équivalente à « Baa2 » avec une perspective jugée « stable ». Pour l’instant. @

Charles de Laubier

Technicolor perd ses couleurs et échoue à mener à bien son plan stratégique « Drive 2020 »

Le groupe français Technicolor (ex-Thomson Multimedia), spécialiste des technologies de l’image et du son pour le cinéma, la télévision, les médias numériques et la maison connectée, a échoué dans son plan stratégique « Drive 2020 » lancé il y a plus de trois ans par son directeur général, Frédéric Rose.

Thomson (1893–1966), Thomson-Brandt (1966-1968), Thomson-CSF (1968-1983), Thomson (1983-1995), Thomson Multimedia (1995–2010) et aujourd’hui Technicolor (2010- 2019 ?). En 135 ans d’existence, c’est tout un pan entier de l’histoire des technologies de l’image et du son à la française (1) qui vacille malgré l’implication – jusqu’à la nationalisation (1982-1997) – de l’Etat français, encore aujourd’hui actionnaire via Bpifrance Participations et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à hauteur de 7,96 % du capital.

Frédéric Rose, DG depuis 10 ans
Et cela fait dix ans – depuis le 1er septembre 2008 – que le Franco-américain Frédéric Rose (photo) en est le directeur général, également membre du conseil d’administration. Cet ancien d’Alcatel-Lucent arrive chez Technicolor pour redonner des couleurs à une entreprise qui, en 2008 déjà, affichait un chiffre d’affaires en baisse et un endettement en hausse atteignant à l’époque 1,5 milliard d’euros. Il s’agit aussi de redonner une stratégie à l’ex-Thomson. Frédéric Rose n’est alors pas au bout de ses peines. C’est lui qui, en 2010, va changer le nom de l’entreprise Thomson pour Technicolor, dénomination héritée de la société américaine Technicolor Motion Picture Corporation fondée en 1914 et à l’origine du célèbre procédé de films en couleurs utilisé par les studios de cinéma d’Hollywood (dont Disney).
La compagnie américain Technicolor devint bien plus tard, en 2001, filiale du français Thomson qui s’est approprié le nom pour en faire une marque unique (2). Parmi ses clients : de grands studios de cinéma (Warner Bros., Disney, Paramount, NBC Universal, Fox, Lionsgate, …) ou indépendants, des éditeurs de jeux vidéo (Activision Blizzard, Electronic Arts, Ubisoft, …), des chaînes de télévision (Canal+, …), des producteurs de musique (Universal Music, Warner Music, …), des opérateurs télécoms (America Movil, AT&T/DirecTV, Bouygues Telecom, …) ou OTT.
C’est en 2015 que Frédéric Rose présente son plan stratégique « Drive 2020 », assorti d’un plan d’intéressement en actions pluriannuel pour impliquer les salariés. Se sentant pousser des ailes, le groupe a aussitôt, l’année suivante, revu à la hausse les objectifs de son plan en visant pour 2020 un excédent brut d’exploitation (Ebitda) supérieur à 750 millions d’euros – contre 500 millions d’euros initialement prévus – et un flux de trésorerie disponible supérieur à 350 millions d’euros – au lieu de 250 millions d’euros précédemment. Mais ces performances n’ont pas été au rendez-vous, contraignant le dirigeant à revoir à la baisse ses objectifs – y compris consécutivement au cours de ces deux dernières années. L’objectif de l’Ebitda en 2020 a été ramené à 350 millions (au lieu de 750) et le free cash flow à 130 millions d’euros (et non de 350). La dette nette du groupe s’élève à 910 millions d’euros au 30 juin 2018 – « un niveau élevé », reconnaît le groupe aux quatorze couleurs. L’agence de notation financière Moody’s, qui avait en mars dernier dégradé d’un cran sa note liée à l’endettement de Technicolor (de « Ba3 » à « B1 »), pourrait à nouveau abaisser cette note dans les prochains mois. A moins que l’entreprise, au bord de la faillite, ne soit vendue ou démantelée d’ici là, comme cela est envisagé d’après l’agence Reuters le 19 novembre. « Technicolor passe en revue et évalue régulièrement les options stratégiques envisageables pour ses activités, que ce soit sous forme d’acquisitions, de rapprochements ou de cessions (…). A cet égard, Technicolor souligne que les discussions sont à un stade préliminaire. Aucune décision stratégique ou engagement n’a été pris », a dû préciser – en guise de réaction « aux rumeurs de marché » – le spécialiste de la fourniture de services vidéo pour les créateurs et les distributeurs de contenus, pour le cinéma, la télévision et les médias numériques, ainsi que pour la maison connectée. Les aînés se souviennent qu’il y a plus de vingt ans, en 1996, Alain Juppé avait voulu céder Thomson Multimédia (3) pour… 1 franc symbolique ! Aujourd’hui – autres temps, autres mœurs – Frédéric Rose discute du sort de Technicolor « à la poursuite de l’intérêt social et de celui des parties prenantes de la société ».

Vendre l’ex-Thomson à vil prix ?
A la Bourse de Paris, où la capitalisation de Technicolor est passé le 26 novembre sous la barre des 400 millions d’euros (389,8), le titre a dévissé de 86 % entre son plus haut niveau en janvier 2016 (7,48 euros) et son plus bas le 26 novembre également, à moins de 1 euro (0,96). La chute est de 65 % rien que depuis le début de l’année. La vente en mars de ses activités de « licences de brevets », à l’américain InterDigital pour 420 millions d’euros, n’a pas été d’un grand secours. Selon Reuters, Technicolor pourrait vendre son activité « Maison connectée » @

Charles de Laubier

Ce que dit l’Europe sur le rachat de Sky par Comcast

En fait. Le 22 septembre, le câblo-opérateur américain Comcast – propriétaire des studios de cinéma Universal Pictures et DreamWorks ainsi que des chaînes NBC, CNBC, Syfy ou E! – a remporté les enchères sur Sky, l’opérateur britannique de télévision. L’Europe n’y trouve rien à redire.

En clair. La Commission européenne n’a pas attendu les enchères pour autoriser,
dès le 15 juin dernier, le rachat « sans conditions » de Sky par Comcast : « Pas de problème de concurrence en Europe », a-t-elle assuré. Bruxelles rendra aussi « d’ici le 19 octobre » sa décision sur le projet de rachat des actifs de Fox aux Etats-Unis par le groupe Disney, lequel a déjà obtenu le feu vert des autorités antitrust américaines, à condition de se séparer d’une vingtaine de chaînes sportives de Fox (1). Bien qu’elle
ne participait pas à ces enchères exceptionnelles opposant à Londres Comcast à Fox pour s’emparer de Sky, la Walt Disney Compagny est la grande perdante en Europe.
Le magnat des médias Rupert Murdoch voulait lui céder – pour un total de 71 milliards de dollars – non seulement, aux Etats- Unis, ses studios de cinéma, ses chaînes de télévision axées divertissement, sa part dans Hulu, mais aussi Sky en Europe.
Ce bouquet de télévision britannique est présent au Royaume- Uni, en Irlande, en Allemagne, en Autriche et en Italie, avec 23 millions d’abonnés (2). Maintenant que Comcast a remporté Sky pour 33,4milliards d’euros, auxquels s’ajoutera le rachat des 39 % (valorisés 12,8milliards d’euros) que Fox a annoncé – le 26 septembre – vouloir céder dans Sky, il reste quand même à Disney les actifs de Fox aux Etats-Unis qu’a tenté en vain d’acquérir Comcast cet été. Rupert Murdoch, lui, cherche ainsi à recentrer son nouveau « Fox » sur l’information avec ses journaux (Wall Street Journal, New York Post, …), ses chaînes de télévision Fox News et Fox Business (3). Depuis deux ans, le magnat des médias australo-américain cherchait à s’emparer des 61 % du capital de Sky – dont Fox détenait déjà 39 %. Mais, conformément à la décision prise en avril par la commission des OPA britannique, Disney aurait eu l’obligation de faire une offre sur la totalité de Sky en Europe s’il réussissait à acquérir les actifs de Fox aux Etats-Unis. Car le projet d’acquisition de Sky par Fox était mal accueilli au Royaume-Uni (« pas dans l’intérêt du public »), la famille Murdock y étant déjà très implantée avec le groupe News Corp, lequel publie le tabloïd The Sun, le quotidien The Times ou encore The Sunday Times. En revanche, l’offre de Comcast sur Sky ne posait pas de problème aux yeux des autorités britanniques et européennes. Les actionnaires de Sky ont jusqu’au 11 octobre pour se prononcer en faveur de Comcast. @

Les réseaux de chaînes de vidéo en ligne (MCN) génèreraient 50 % de l’audience de YouTube

Fortes de leurs milliards de vidéos vues chaque mois, les Multi-Channel Networks (MCN) aux audiences massives profitent à YouTube. Mais des groupes audiovisuels historiques – tels que TF1, Mediaset, ProsiebenSat.1, RTL Group, Verizon, Disney, … – veulent aussi avoir une part du gâteau publicitaire.

Les Multi-Channel Network (MCN), ces réseaux de chaînes vidéo en ligne, généreraient maintenant la moitié de l’audience sur YouTube – si l’on extrapole une étude de
la société britannique Ampere qui estimait à 42 % en 2015 le poids sur YouTube des 100 premiers MCN mondiaux
en termes de vidéos vues. En Europe, les audiences massives de ces nouveaux networks sur Internet attisent les convoitises aussi bien des médias que des annonceurs.

Alliance TF1, Mediaset et ProsiebenSat.1
Le groupe TF1, l’italien Mediaset et l’allemand ProsiebenSat.1 illustrent cet engouement en annonçant le 9 juin dernier la création d’une régie publicitaire commune baptisée European Broadcaster Exchange (EBX) et détenues à parts égales. Objectif : créer une plateforme de commercialisation publicitaire automatisée, dite programmatique, et à dimension pan-européenne. Cette initiative vient dans le prolongement de l’alliance nouée entre les trois groupes en janvier afin de faire bloc sur le marché publicitaire en pleine croissance des MCN, très regardés par la génération millenium.
Cela s’est notamment traduit par une prise de participation du groupe TF1 à hauteur de 6,1 % au capital de Studio71, qui revendique la quatrième place mondiale des MCN et la première place en Europe. D’après les statistiques de Social Blade, Studio71 compte actuellement plus de 13.000 chaînes vidéo membres qui totalisent plus de 5,5 milliards de vidéo vues par mois grâce à plus de 17 millions d’abonnés. Ce qui place Studio71 en sixième position en termes d’audience et d’abonnés. Studio71 est une filiale de ProsiebenSat.1 Media, groupe audiovisuel allemand. L’italien Mediaset, dont Vivendi détient actuellement 29,9 % du capital, est aussi devenu actionnaire minoritaire de Studio71 à hauteur de 5,5 %.
Parallèlement à cette prise de participation, le groupe TF1 est en outre devenu l’opérateur de Studio71 sur la France et les territoires francophones, au travers de la société Finder Studios dans laquelle Studio71 prendra une participation minoritaire. Finder Studios, dont TF1 Publicité commercialise déjà les inventaires de publicité
en ligne, est un MCN français présent sur différentes thématiques (beauté, cuisine, humour, hommes et enfants). Présenté comme le « 1er MCN beauté en France avec 130 millions de vidéos vues par mois », Finder Studios a été créé par le producteur audiovisuel Makever qui en est l’actionnaire avec TF1. A terme, la nouvelle filiale Studio71 France que contrôle TF1 absorbera Finder studios (1). Le groupe luxembourgeois RTL Group (filiale de l’allemand Bertelsmann), détient, lui, depuis 2013, 51 % de BroadbandTV qui est l’un des plus gros MCN mondiaux avec plus de 236.000 chaînes vidéo membres et une audience supérieure à 18,8 milliards de vidéos vues dans le mois. BroadbandTV, fondé au Canada en 2005, compte plus de 70 millions d’abonnés. En début d’année, RTL Group a renoncé à acquérir les 49 % restants dans ce MCN pour « explorer avec les actionnaires minoritaires de BroadbandTV toutes les stratégies alternatives pour la compagnie ».
Une introduction en Bourse n’est pas à exclure, si ce n’est une ouverture du capital à des tiers, voire une cession de l’entreprise. La fondatrice de BroadbandTV, l’Iranienne Shahrzad Rafati (photo), est la deuxième actionnaire après RTL Group. Le groupe luxembourgeois avait par ailleurs acquis en 2014 le MCN StyleHaul aux Etats-Unis (participation de 22,3 % en avril 2013, augmentée à près de 100 % en novembre 2014), tandis que sa filiale française M6 développe ses « MCN M6 » dans l’humour et le lifestyle (2) au sein de M6 Web (Golden Moustache, Rose Carpet, Cover Garden, Vloggist, …). Les grandes manœuvres sur le marché naissant des MCN concernent aussi Verizon qui a pris en avril 2016 une participation de 24,5 % dans AwesomenessTV, une startup californienne contrôlée par DreamWorks Animation depuis 2013 et éditrice de plus de 8.000 chaînes vidéo sur YouTube totalisant 2,5 millions d’abonnés. Cet investissement de Verizon – propriétaire de Yahoo (3) –
s’est accompagné du lancement d’un service de vidéo pour mobile intégré à Go90.

Maker Studios, Fullscreen, Base79, 3BlackDot, …
De son côté, Disney est propriétaire depuis 2014 de Maker Studios, acquis à l’époque pour 500 à 950 millions de dollars selon des objectifs de performances. Aujourd’hui, ce géant américain des MCN (4) compte près de 10.000 chaînes vidéo, plus de 12 millions d’abonnés pour plus de 4 milliards de vidéos vues dans le mois. Autres MCN en vue : Fullscreen racheté en 2014 par Otter Media (co-entreprise AT&T-The Chemin Group), Base79 racheté aussi en 2014 par le britannique Rightster. Sans oublier le français Mixicom (Cyprien, Norman, Squeezie, …) racheté en 2015 par Webedia du groupe Fimalac, lequel vient de s’emparer de 3BlackDot. @

Charles de Laubier

Pourquoi Gaumont pense du bien de la box Videofutur

En fait. Le 1er octobre, Netgem a présenté « La Box Videofutur » en OTT (indépendante des FAI), couplant télé et ciné avec fonctions de time shifting,
pour un forfait sans engagement de 10 euros par mois (+ 2,99 euros pour les
films récents de quatre mois). Parmi les six partenaires cinéma : Gaumont.

JSEn clair. Que pense Jérôme Soulet (photo) – directeur vidéo, télévision et nouveaux médias du groupe Gaumont – de la box de Videofutur sur laquelle sont accessibles les films de son catalogue ?
Gaumont fait partie des six studios de cinéma partenaires (1)
de Netgem. « Venant d’un ancien univers des télécoms [Jérôme Soulet fut directeur des relations institutionnelles à la division contenus du groupe France Télécom jusqu’en mai 2007, après avoir lancé le service de VOD d’Orange, ndlr], je considère que c’est catastrophique la vidéo dans les box ».

Les box des FAI ne sont pas à la hauteur
« Si vous regardez tout le parc, vous avez déjà cinq, six, voire sept générations de box. Ceux qui ont les précédentes générations et en plus sont loin du DSLAM (2), ceux-là n’ont pas le droit d’en changer pour la nouvelle box ou sinon elle ne fonctionne pas bien ».
Pour le groupe Gaumont, qui exploite 900 films à son catalogue, la box de Videofutur n’a rien à voir avec une box de fournisseurs d’accès à Internet (FAI)
« Lorsque j’ai vu la box de Videofutur, j’ai trouvé que c’était un truc de dingue en terme de navigation ! La navigation de découverte est essentielle, surtout lorsqu’il y a 10.000 titres [de films français disponibles en VOD en France, ndlr] », s’est enthousiasmé Jérôme Soulet.

Pour lui, les services OTT (Over-The-Top) apportent « un élément clé » : fluidité et ergonomie de navigation, surtout dès que l’on rentre « dans la profondeur et dans la personnalisation ». « Les opérateurs télécoms sont assis sur un tas d’or [leur clientèle] mais ils ne l’ont pas encore exploité », déploret- il. Alors que « l’OTT va permettre de profiler (je n’aime pas le terme), de mieux connaître les clients et leurs usages ». Gaumont voit donc dans la box de Videofutur le moyen d’approfondir sa relation avec les cinéphiles, « parce que nous avons une meilleure connaissance de notre catalogue et eux [Videofutur] ont une connaissance très fine de leurs clients ». Pour la major du cinéma français, l’OTT est « structurant car nous allons redécouvrir en VOD la relation que l’on
a au niveau de la salle, à savoir donner envie ». Et Jérôme Soulet d’ajouter : « Les films récents doivent avoir un succès en salle et en vidéo à la demande. Mais pour qu’un succès en salle devienne un succès en VOD, il faut travailler dessus. Aussi, nous avons besoin d’éditeurs de services et non pas de ‘’plateformes de mise en ligne’’ » (3). @