L’échec des négociations sur la chronologie des médias démontre l’inertie du cinéma français

La énième évolution de la chronologie des médias – que le CNC a proposée le
28 avril lors d’une réunion de la dernière chance – a suscité plus de méfiance
des parties prenantes que d’adhésion. Le cinéma en France reste figé sur les règles obsolètes de 2009 toujours en vigueur.

Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), présidé par Frédérique Bredin (photo), n’a pas réussi à mettre toute la filière du 7e Art français d’accord sur une nouvelle chronologie des médias, malgré sa énième proposition datée
du 24 avril – que Edition Multimédi@ s’est procurée (1) – et débattue lors de la dernière réunion de négociations le 28 avril. L’espoir d’annoncer de nouvelles fenêtres de diffusion des nouveaux films durant le 70e Festival de Cannes, qui se tient
du 17 au 28 mai, s’est évanoui en raison des dissensions professionnelles persistantes et irréconciliables.

Festival de Cannes : Netflix divise le cinéma français

En fait. Le 24 avril, Edition Multimédi@ a rencontré Xavier Rigault et Frédéric Goldsmith, respectivement coprésident et délégué général de l’Union des producteurs de cinéma (UPC). A quelques jours du 70e Festival de Cannes,
ils réaffirment leur souhait pour une évolution de la chronologie des médias.

En clair. Le Bureau de liaison des organisations du cinéma (Bloc) – dont est membre l’Union des producteurs de cinéma (UPC) coprésidée par Xavier Rigault (2.4.7. Films)
– n’est pas encore intervenu dans la polémique déclenchée à l’annonce le 13 avril de
la sélection officielle de deux films de Netflix (1) pour le Festival de Cannes, parmi les longs métrages en lice pour la Palme d’or. Pourtant, une partie du cinéma français a exprimé sa crainte de voir le numéro un mondial de la SVOD faire – pour ses deux films – l’impasse sur les salles de cinéma au profit d’Internet (e-cinéma), voire enfreindre la chronologie des médias en les diffusant simultanément en VOD et en salles. Or, pour
le coprésident de l’UPC et son délégué général, « on ne peut pas reprocher au Festival international du film de Cannes de sélectionner des longs métrages étrangers financés selon des règles d’autres pays ». Le Marché du film, où se rencontrent acheteurs et vendeurs de films du monde entier, n’a pas vocation à être au service du seul cinéma français. « Netflix fait partir du paysage mondial du cinéma et des nouveaux usages dans la consommation des films », ajoutent Xavier Rigault et Frédéric Goldsmith qui estiment que « les exploitants de salles de cinéma et les distributeurs de films n’ont
pas à dicter la programmation du Festival de Cannes ». L’UPC, qui s’étonne donc
des levées de boucliers de la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) et
du Bureau de liaisons des industries du cinéma (Blic) à l’encontre de Netflix, pose néanmoins une question : « Est-ce que Netflix entend jouer un rôle dans le financement du cinéma français et respecter la chronologie des médias en France ? ». Le 26 avril, Netflix a indiqué qu’il envisageait une sortie en salle « pour une durée limitée, en même temps [qu’une] sortie sur [son] service ».
La FNCF, qui représente les exploitants de salles de cinéma, a en effet dénoncé le
14 avril le risque de voir « des films du Festival de Cannes » ne pas sortir en salles.
Le 21 avril, c’était au tour du Blic – où l’on retrouve la FNCF aux côtés de la Fédération nationale des distributeurs de film (FNDF) – de demander au président du Festival de Cannes, Pierre Lescure, « une rapide clarification » (2) sur Netflix et la chronologie des médias. La dernière réunion sur les nouvelles propositions du CNC d’évolution des fenêtres de diffusion (3) s’est d’ailleurs tenue le 28 avril, avec… Netflix au centre des discussions. @

Le groupe Canal+ s’affirme plus que jamais comme le régulateur du cinéma français

Après avoir présenté le 18 octobre aux professionnels du cinéma français ses propositions de réforme de la chronologie des médias, Maxime Saada – DG de Canal+ – les a détaillées dans une interview au Film Français. Contacté par EM@, le CNC se défend d’être hors jeu et poursuit ses « contacts bilatéraux ».

Ce n’est pas le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) qui orchestre les négociations sur la chronologie des médias mais, plus que jamais, Canal+ en tant que premier pourvoyeur de fonds du cinéma français (près de 200 millions d’euros par an). Directeur du groupe Canal+ depuis un peu plus d’un an, Maxime Saada (photo) a présenté en deux temps ses propositions sur l’évolution de la chronologie des médias – laquelle régente la sortie des nouveaux films selon différentes
« fenêtres de diffusion ». Actuellement, les salles de cinéma bénéficient d’une exclusivité de quatre mois. Ce monopole est suivi par la VOD et les DVD, puis par les chaînes payantes, avant les chaînes gratuites et ensuite la SVOD
qui arrivent bien après.
Le patron de Canal+ a d’abord exposé oralement sa position lors d’une réunion avec professionnels du cinéma français qui s’est tenue le 18 octobre en présence du Bureau de liaison des industries cinématographiques (Blic) (1), du Bureau de liaison des organisations du cinéma (Bloc) (2) et de la société civile des Auteurs- Réalisateurs-Producteurs (ARP). Le CNC, lui, n’était pas présent à cette réunion, pourtant déterminante pour l’avenir du cinéma français. Dans la foulée, Maxime Saada a détaillé plus avant et par écrit ses mesures dans une interview exclusive accordée à l’hebdomadaire Le Film Français.

Amazon s’apprête à lancer en France « Prime Video » et « Video Direct » à l’assaut de Netflix et YouTube

Dernière ligne droite avant le lancement – probablement cet été en France et
dans d’autres pays – d’Amazon Prime Video, le service de SVOD du géant du
e-commerce. Objectif : détrôner Netflix. Quand à la plateforme de partage Amazon Video Direct, également attendue en 2016, elle vise YouTube.

Amazon Prime Video, le service de SVOD du géant du e-commerce, ne cesse de s’enrichir de séries et de films français. Ses deux dernières acquisitions ont été faites auprès de StudioCanal, la filiale de production et de distribution de films
du groupe Canal+. Il s’agit du thriller « Le Bureau des Légendes » (« The Bureau ») et de la comédie dramatique « Baron noir »,
deux séries actuellement diffusées en France par Canal+ qui
les a financées. Ce n’est pas la première fois que StudioCanal
et Amazon s’associent.

Relations entre Cannes et Canal : vers la fin de l’exception culturelle du cinéma français

Comme pour compenser la baisse du préfinancement de films, Canal+ met
tout son numérique à disposition du 69e Festival de Cannes du 11 au 22 mai.
La chaîne cryptée du cinéma y sera pour la 24e année. Mais ses relations consanguines avec le Septième Art français s’appauvrissent.

Le principal bailleur de fonds du cinéma français, passé sous
la coupe de Vincent Bolloré en 2015, promet à l’Association française du festival international du film (AFFIF) – présidée par Pierre Lescure et organisatrice du Festival de Cannes (1) – que son groupe Vivendi va mettre les bouchées doubles pour faire rayonner la 69e édition de la grand-messe du Septième Art.
Pour la 24e fois sur la Croisette, Canal+ va faire la promotion du cinéma dans le cadre d’un partenariat qui vient d’être renouvelé pour cinq ans avec notamment la production et la diffusion en exclusivité des cérémonies d’ouverture et de clôture du Festival de Cannes. Mais le budget consacré par la chaîne cryptée du cinéma à l’événement est en baisse par rapport aux 6 millions d’euros estimés de l’an dernier.