Fortune faite en vingt-cinq ans d’Iliad, Xavier Niel poursuit son odyssée à la conquête du monde

Alors que le groupe Iliad a tenu son assemblée générale le 20 mai, Xavier Niel – premier actionnaire à hauteur de 55 % du capital – s’enrichit encore un peu plus grâce aux performances de son groupe et à ses récentes acquisitions internationales. Le milliardaire autodidacte est aussi copropriétaire du Monde
et de L’Obs. Et après ?

Xavier NielIl y a près de vingt-cinq ans, Xavier Niel (photo) rachetait la société Fermic Multimédia, un éditeur de services de Minitel rose créé dans les années 1980, et la rebaptisait Iliad. Il y a quinze ans, il développait un accès à Internet gratuit : Free. Et c’est en novembre 2002 qu’il introduisait en France le concept de triple play – où le téléphonie, l’Internet et la télévision devenaient accessibles à partir d’un boîtier unique, la « box ». La Freebox était née.
Puis, il y a dix ans, Free se mettait à proposer – en partenariat avec Canal+ – la première offre de vidéo à la demande (VOD) en France. Free Mobile, lancé il y a plus de trois ans et atteignant aujourd’hui 15 % de parts de marché, est venu compléter les actifs de Xavier Niel, qui est resté depuis le début de l’odyssée d’Iliad l’actionnaire majoritaire – 54,7 % du capital et 69,19 % des droits de vote.

Le réseau de cuivre fait de la résistance face aux prétentions de la fibre optique

Le gouvernement voulait enterrer un peu vite le réseau téléphonique de cuivre d’ici à 2022. Le rapport final sur son « extinction », que leur a remis le 19 février dernier Paul Champsaur, tend à démontrer que l’objectif est trop ambitieux. L’ADSL et le VDSL2 n’ont pas dit leur dernier mot.

Le rapport final de la « mission sur la transition vers les réseaux à très haut débit et l’extinction du réseau de cuivre », présidée par Paul Champsaur (photo), est daté de décembre dernier mais il a été remis le 19 février dernier à Emmanuel Macron, ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique, et à Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat au Numérique. Il en ressort que non seulement l’échéance de 2022 – pour atteindre 100 % de très haut débit sur
tout l’Hexagone – ne sera pas tenue, mais en plus que l’extinction de l’ADSL au profit du FTTH (Fiber-To- The-Home) n’est pas envisageable.

Numericable SFR et multi play : risques concurrentiels

En fait. Le 28 novembre, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et l’Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep) ont publié leur avis respectif transmis à l’Autorité de la concurrence, laquelle a donné le 30 octobre son feu vert à la vente par Vivendi de SFR à Numericable.

En clair. La naissance officielle du groupe Numericable SFR, qui se hisse à la seconde place des opérateurs télécoms en France derrière Orange, est un pas de plus vers l’oligopole. C’est en creux ce que l’on peut lire dans les avis du CSA et de l’Arcep sur ce mouvement majeur de concentration. « L’opération est susceptible d’augmenter
la pression concurrentielle sur Orange, le premier acteur du marché des offres multiservices, et sur le groupe Canal+, le premier acteur du marché de la télévision payante. (…) L’opération pourrait marginaliser certains opérateurs », estime le CSA.
De son côté, l’Arcep ne dit pas autre chose : « Sur le marché des offres convergentes fixes-mobiles (offres multiple play (1)), l’opération notifiée permet aux opérateurs SFR et Numericable de devenir très compétitifs et, grâce à la structure de coûts du nouvel ensemble Numericable/SFR, de bénéficier au moins transitoirement d’une position plus favorable que leurs concurrents dans l’ensemble des zones câblées ».

Les chaînes payantes veulent faire du replay leur SVOD

En fait. Le 27 octobre, Gérald-Brice Viret, directeur délégué des chaînes de télévision France et international de Lagardère Active et président de l’AcceS (Association des chaînes conventionnées éditrices de services) était l’invité
du Club audiovisuel de Paris. Et le 21 octobre du colloque NPA-Le Figaro.

En clair. « Nous souhaitons pour les chaînes de télévision désireuses de développer des services payants de catch up TV – l’équivalent d’un service de SVOD dans le prolongement de leurs programmes diffusés à l’antenne – qu’elles aient la détention des droits au-delà des sept jours, sur six mois ou un an par exemple », a expliqué Gérald-Brice Viret, président de l’AcceS, à Edition Multimédi@, en marge du dîner-débat du CAVP (1) le 27 octobre.

En disant « non » à Netflix, Free protège Canal+

En fait. Le 21 octobre, s’est tenu le 20e colloque NPA-Le Figaro : « Horizon
2020 ». Parmi les intervenants : Bertrand Meheut, président du groupe Canal+, dont Free est le premier distributeur. C’est ce qu’a indiqué Rodolphe Belmer,
DG de Canal+, le 17 octobre aux Rencontres cinématographiques de Dijon.

En clair. 2004-2014. En dix ans, Free s’est imposé comme le premier distributeur de Canal+ grâce à une alliance objective entre la filiale d’Iliad et celle de Vivendi. C’est
la raison pour laquelle Free a refusé de distribuer Netflix. « La résistance nationale [à Netflix] est tombée assez vite. (…) Malheureusement, nos trois concurrents [Bouygues Telecom, SFR et Orange] ont rendu les armes en l’espace de quelques semaines. On avait pourtant les capacités collectivement de résister. Comme Canal+, on a intérêt économiquement à préserver notre modèle. On gagne de l’argent lorsque l’on distribue Canal+ mais beaucoup moins si l’on signe avec ces OTT », a justifié Maxime Lombardini, DG du groupe Iliad, le 17 octobre aux Rencontres cinématographiques. Free a ainsi engrangé une bonne partie des 6,1 millions d’abonnés individuels (1) que compte aujourd’hui la chaîne cryptée (520.000 abonnés à CanalPlay inclus). Et ce,
en multipliant les offres promotionnelles à Canal+ ou à CanalSat : notamment celle à
1 euro par mois pendant un an, lorsque ce n’est pas à 19,90 euros mensuels sur un
an au lieu des 39,90 euros habituels. Free a ainsi fait de Canal+ un produit d’appel
pour recruter rapidement ses propres clients et atteindre aujourd’hui 5,6 millions d’abonnés haut débit (2). « Nous avons établi des liens très proches avec les FAI.
Nous souhaitons garantir la qualité à nos clients. C’est la raison pour laquelle nous avons depuis 2004 des relations très étroites avec Orange, SFR, Free et Bouygues Telecom », a expliqué Bertrand Meheut, président du directoire du groupe Canal+,
lors du colloque de NPA Conseil.
A Dijon, Rodolphe Belmer, son DG, a été plus dissert : « Nous reversons à nos chers opérateurs de téléphonie plus de 150 millions d’euros par an de redevances. (…) Free est le plus grand vendeur de Canal+ en France… Il faut le remercier mille fois, même
si cela nous coûte très cher ! ».
Ce que Maxime Lombardin a confirmé : « Il y a une spécificité française, c’est que l’on
a des box que les opérateurs (comme nous) contrôlent. Cela leur permet, dans une quinzaine de foyers français qui reçoivent la télévision par ces box, de tenir la “tête de gondole” (c’est un peu trivial) : ce sont les FAI qui décident ce qu’il vont pousser ; c’est comme ça que l’on est – comme le dit Rodolphe – le premier distributeur de Canal+
(en dehors d’eux-mêmes). C’est pas par hasard ». @