La grande réforme de l’audiovisuel est morte, vive la réforme de l’audiovisuel à la découpe !

La réforme de l’audiovisuel et la transposition de la directive SMA sont dans un bateau : la réforme de l’audiovisuel tombe à l’eau : qu’est-ce qui reste ? La crise sanitaire aura eu raison de la grande réforme voulue par Emmanuel Macron. Edition Multimédi@ fait le point sur ce revirement.

Emmanuel Macron (photo) en a rêvée en tant que candidat à la présidence de la République ; devenu chef de l’Etat il y a trois ans, il ne la fera finalement pas ! Il faudra « simplifier la réglementation audiovisuelle en matière de publicité, de financement et de diffusion, pour lever les freins à la croissance de la production et de la diffusion audiovisuelles et préparer le basculement numérique, tout en préservant la diversité culturelle », avait promis début 2017 celui qui était encore quelques mois plus tôt ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique (2014-2016).

L’éclatement possible de la bulle des start-up pourrait être salvateur pour l’innovation

La crise historique pourrait provoquer l’éclatement de la bulle des start-up. Beaucoup d’entre elles brûlent du cash sans encore générer de chiffre d’affaires. Sans argent frais ni débouché, c’est asphyxie. La spéculation sur l’hypercroissance de l’innovation a ses limites, surtout lorsque les fonds sont publics.

L’année 2020 sera-t-elle celle de l’éclatement de la « bulle start-up » comme l’année 2000 fut celle de l’éclatement de la « bulle Internet » ? La question mérite d’être posée, tant la crise sanitaire sans précédent que nous traversons crée une récession économique et financière qui pourrait être fatale à bon nombre start-up biberonnées à l’argent frais et au crédit d’impôt. La Grande-Bretagne, jusqu’alors paradis – s’il en est – des start-up des technologies et des sciences de la vie, a lancé le 20 avril dernier un plan d’aide à ses jeunes pousses d’un montant de près de 1,5 milliard d’euros (1).

Les offres payantes de l’audiovisuel public posent toujours questions au regard de la redevance

Alors que la nouvelle plateforme payante Madelen de l’Ina dépasse les 55.000 abonnés (dont 15.000 hérités de l’Ina Premium), se pose à nouveau la question de faire payer une offre lorsque celle-ci est censée être déjà financée par la redevance audiovisuelle.

Au regard de la redevance audiovisuelle que paient la quasi-totalité des 28 millions de foyers fiscaux en France (138 euros en 2020), n’est-il pas contradictoire que des entreprises de l’audiovisuel public fassent payer en plus les Français pour des services censés être déjà financés justement par cette contribution à l’audiovisuel public (CAP) ? C’est la question que Edition Multimédi@ a posée au président de l’Institut national de l’audiovisuel (Ina), Laurent Vallet (photo de gauche), lors du lancement de Madelen.

La neutralité de l’Internet se retrouve prise en étau entre le coronavirus et le gouvernement

C’est la double peine pour les Français : non seulement ils doivent s’en tenir à un confinement de plus en plus stricte chez eux, mais en plus le gouvernement, les opérateurs télécoms et – priées d’obtempérer – les acteurs du Net réduisent la bande passante de leurs plateformes de divertissement.

L’exception culturelle française a encore frappée ! Disney+, la plateforme de SVOD de la Walt Disney Company, a bien été lancée le 24 mars dernier dans sept pays supplémentaires, tous en Europe : Royaume- Uni, Irlande, Allemagne, Espagne, Italie, Autriche et Suisse. La France devait en être, mais le gouvernement français – faisant sienne une suggestion que lui a faite Stéphane Richard, le PDG d’Orange – a exigé de Disney qu’il reporte de quinze jours, au 7 avril, le lancement sur l’Hexagone de son nouveau service. C’est le seul pays européen à avoir imposé ce décalage.

La CSNP, 30 ans cette année, voit son rôle croître

En fait. Le 4 mars, la Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) a auditionné la Fédération française des télécoms (FFTélécoms). Le 27 février, Anne-Marie Jean, secrétaire générale de la CSNP, est intervenue aux 2es Assises de la Cohésion numérique et territoriale. La CSNP (ex-CSSPPT) a 30 ans cette année. Quel rôle ?

En clair. « La méfiance envers le numérique commence à s’installer, comme l’a montré le 10e baromètre de l’Acsel (1), présenté le 25 février à Bercy (2). Il y a pour la première fois une érosion de la confiance des Français dans le numérique. On le voit aussi en Suisse qui est l’un des premiers pays à implanter la 5G, laquelle soulève des inquiétudes sur les conséquences sur la santé », a mis en garde Anne-Marie Jean, secrétaire générale de la Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP). Cette instance parlementaire mixte fête ses 30 ans cette année : elle fut créée par une loi du 2 juillet 1990 sous le nom de Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications (CSSPPT). En 2004, elle a été rebaptisée CSSPPCE (pour être étendue aux communications électroniques). C’est ensuite la loi « Pour une République numérique » du 7 octobre 2016 qui lui a donné son sigle d’aujourd’hui. Bicamérale et transpartisane, la CSNP est composée de sept députés et sept sénateurs ainsi que de trois personnalités qualifiées (3). « Entre la foi en l’avenir technologique et l’impatience des territoires sur la couverture numérique qui avance trop lentement à leurs yeux, il faut garantir la cohésion territoriale. Il en va de la compétitivité de nos petites entreprises et des services apportés à nos concitoyens jusque dans les territoires ruraux », a rappelé Anne-Marie Jean. Et celle qui est depuis plus d’un an secrétaire générale de la CSNP sait de quoi elle parle pour avoir passé plus de 20 ans à La Poste, notamment comme directrice déléguée à l’économie sociale et solidaire et aux dynamiques de territoires. Anne-Marie Jean s’est en outre référée à la feuille de route digitale que la Commission européenne a présentée le 19 février (https://lc.cx/AvenirNumUE) : « L’Europe a appelé à une gouvernance plus maîtrisée. Nous devons rester maîtres de la société que nous construisons et œuvrer pour un numérique choisi, respectueux de l’humain et qui n’exclut personne. Cela relève d’un projet commun, républicain, auquel les parlementaires de la CSNP et son président Yvon Collin sont tout particulièrement attachés. Il s’agit de construire un projet de société où le numérique est au service de l’humain et du développement harmonieux des territoires ». La balle est aussi dans le camp de la Fédération française des télécoms (FFTélécoms), qu’elle a auditionnée le 4 mars. @