Les Indés Radios et Radioplayer France se développent parallèlement sans fusionner

Le GIE Les Indépendants préside à la fois aux destinées des Indés Radios (129 radios indépendantes) et de Radioplayer France (240 radios privées ou publiques). Ces agrégateurs, édités par deux entités séparées, affichent une audience cumulée reflétant l’ensemble du paysage radiophonique français.

Le groupement d’intérêt économique Les Indépendants (GIE Les Indépendants), qui édite l’agrégateur Les Indés Radios, et la société Cosmos, qui édite l’agrégateur Radioplayer France, sont étroitement liés et basés tous les deux rue Lübeck à Paris. Les deux entités – la première créée en novembre 1992 et la second en juillet 2020 – sont présidées chacune depuis le début par Jean-Eric Valli (photo). « Les deux agrégateurs sont édités par deux structures et des partenaires distincts ; ils ont donc vocation à se développer parallèlement sans fusionner », indique-t-il à Edition Multimédi@.

Deux structures distinctes, quoique
Avec ses 129 radios indépendantes, Les Indés Radios caracole en tête des audiences de la radio en France avec un cumul de 13,4 % de la population en moyenne par jour, bien devant France Inter (12,6 %) et RTL (10,1 %) d’après le dernier relevé de Médiamétrie (1). Cet agrégateur intègre toutes les radios, webradios et podcasts des radios adhérentes au GIE Les Indépendants. De son côté, Radioplayer France n’est pas mesuré en tant qu’agrégateur de radios par Médiamétrie – « Ce n’est pas prévu », nous indique-t-on – mais a revendiqué pour son deuxième anniversaire en avril 900.000 téléchargements de son application, laquelle est en revanche mesurée par Médiamétrie : 217.000 visiteurs uniques en avril 2023, selon nos informations. Cet agrégateur encore en phase de décollage, et édité par la société Cosmos, a vocation à intégrer toutes les radios de France (240 à ce jour, publiques et privées) avec leurs webradios (700) et podcasts (250.000). Comme nous l’a précisé Jean-Eric Valli, Les Indés Radios (2) et Radioplayer France (3) continueront d’évoluer séparément, sans perspective de fusion.
Pourtant les deux agrégats radios sont liés à au moins deux niveaux, outre le fait que les deux entités soient domiciliées dans les mêmes locaux parisiens : d’une part, la présidence de la société Cosmos a été confiée aux Indés Radios (le GIE Les Indépendants), et, d’autre part, ce même GIE détient en tant que cofondateur de Cosmos une participation dans cette société d’un montant égale à celle des cinq autres associés : Altice Média, Lagardère News (Europe 1, Europe 2 et RFM), Groupe M6 (RTL, RTL2 et Fun Radio), NRJ Group (NRJ, Chérie FM, Nostalgie et Rire & Chansons) ainsi que Radio France (France Inter, France Info, France Bleu, Fip, …). A part le fait que Jean-Eric Valli, qui est en outre président du groupe radiophonique 1981 (Oüi FM, Voltage, Forum, Latina, Blackbox, Vibration, …), soit président des deux structures, leurs gouvernances sont distinctes. Le GIE Les Indépendant est piloté par un conseil d’administration composé de douze membres, à la présidence duquel Jean-Eric Valli a été réélu le 9 février dernier pour un mandat de trois ans jusqu’en janvier 2026. Tout comme Bertrand de Villiers (président d’Alouette) en tant que premier vice-président du GIE des Indés Radios.
Radioplayer France en est encore à ses débuts en comparaison des Indés Radios qui, avec plus de 30 ans au compteur, affiche un chiffre d’affaires publicitaire national de 167,2 millions d’euros en 2022, en progression de 0,5 % sur un an, TF1 assurant la régie. Radioplayer France fait partie de l’organisation à but non lucratif Radioplayer Worldwide (ex-UK Radioplayer Ltd) fondée en GrandeBretagne en mars 2011 par Michael Hill, un transfuge de la BBC. Celui-ci vient de céder en mai dernier sa place de directeur général à Yann Legarson, lequel était jusqu’alors directeur général de Radioplayer France.
Le successeur de Yann Legarson en France a été annoncé le 7 juin dernier en la personne de Régis Verbiguié (ancien éditeur numérique du Figaro, puis de Libération, de Elle et de Marianne). « Radioplayer Worldwide est une société à but non lucratif. Il n’y a pas de projet d’introduction en bourse », a répondu Yann Legarson à Edition Multimédi@. Cette « maison mère » n’a pas véritablement d’actionnaires mais plutôt des « membres », comme nous l’avait expliqué Michael Hill en novembre 2020 (4) : la BBC (partenaire à 50 %), Global Radio (28 %), Bauer Media (11 %) et Radiocentre (11 %). Le réseau international de Radioplayer Worldwide (5) compte actuellement « 19 pays unis par le biais d’une plateforme technique et d’une marque commune pour renforcer la place de la radio dans l’univers digital ».

Conquêtes : voitures, enceintes et TV
« Radioplayer va lancer une nouvelle application dans quelques mois, qui valorisera encore plus l’offre de podcasts et d’écoute de la radio en replay », indique-t-on en France. A l’international, la plateforme – intégrable via une interface de programmation (API) – étend sa zone de diffusion aux voitures connectés (partenariat avec Volkswagen/Audi, BMW, Renault, …, y compris dans Apple CarPlay et Android Auto), aux enceintes connectées (Google Assistant, Alexa d’Amazon, …), et aux Smart TV (Samsung, LG, Apple TV, …). Il y en aura pour toutes les oreilles. @

Charles de Laubier

A bientôt 35 ans, la radio Skyrock fondée par Pierre Bellanger veut devenir l’ « écosystème » des jeunes

Première radio des moins de 25 ans et deuxième radio musicale en France, Skyrock surfe plus que jamais sur la « musique urbaine » (rap, hip-hop, R’n’B, …) qui domine le marché français de la musique. Son fondateur Pierre Bellanger poursuit sa diversification pour en faire un écosystème numérique.

Skyrock aura 35 ans en mars prochain. L’ancienne radio libre fondée par Pierre Bellanger (photo) est devenue un groupe qui se présente aujourd’hui comme « un écosystème média et numérique », selon sa propre expression. Première radio des moins de 25 ans, deuxième radio musicale et quatrième radio privée en France, Skyrock affiche 6 % d’audience cumulée, soit plus de 3,2 millions d’auditeurs chaque jour, d’après la dernière mesure en date de Médiamétrie (1). Ses émissions-vedettes « Planète Rap » de Fred et « La Radio Libre » de Difool la propulsent même en soirée en tête des radios musicales au niveau national, en plus d’être la première radio musicale en Ile-de-France. Skyrock ne se limite cependant pas à la diffusion par voie hertzienne. La radio-phare de Pierre Bellanger se décline aussi en une quinzaine de webradios, des « mobiradios » comme il dit, qui s’écoutent dans l’application « Skyrock » (sur terminaux Android, iOS et Xbox One). Parmi les plus écoutés : « Skyrock 100 % français », « Skyrock Klassiks », « Skyrock PLM » (pour les militaires) ou encore « Skyrock Urban music non-stop ». Ensemble, en y intégrant les mobiradios d’Alger, d’Abidjan, de Casablanca et de Tunis, elles occupent la huitième place des radios digitales et webradios en France, avec plus de 8,9 millions d’écoutes actives par mois, dont 1,2 million provenant d’auditeurs situés en dehors de l’Hexagone, d’après les derniers chiffres de l’ex-OJD (2).

Skyrock Klassiks devient radio nationale en DAB+
L’une de ces mobiradios, Skyrock Klassiks – une sorte de « Nostalgie » du rap – va devenir cette année une radio hertzienne, étant la vingt-cinquième radio à avoir été autorisée le 20 janvier par le CSA pour être diffusée numériquement sur potentiellement tout le territoire national. « Skyrock Klassiks est une seconde radio nationale de notre groupe qui démarre en DAB+ à la mi-juillet sur l’axe Paris-Lyon-Marseille », indique Pierre Bellanger, PDG de Skyrock, à Edition Multimédi@. Skyrock Klassiks sera diffusée à terme sur tout l’Hexagone et les grands axes routiers aux côtés de la radio historique du groupe et des vingt-trois autres radios autorisées en DAB+ au niveau national telles que des musicales comme NRJ ou Fip et des généralistes comme RTL ou RMC (3).

Skred Visio en vue en 2021
Comme elles, la nouvelle « station » Skyrock Klassiks bénéficiera de la qualité de son numérique sans parasites et d’une grande fluidité d’écoute en mobilité comme en voiture. C’est ce qui caractérise la norme européenne Digital Audio Broadcasting. Pour l’instant, Skyrock est présent partout sur la FM en France mais seulement en DAB+ sur quelques villes seulement : Lyon, Marseille ou Nice pour l’instant. La « TNT » de la radio (4) s’est, depuis 2014, déployée progressivement en France, principalement dans des villes et en régions.
Skyrock Klassiks dépend de la SARL Palmyra et non de la SA Vortex comme Skyrock, laquelle a vu son chiffre d’affaire progresser l’an dernier par rapport aux 23,9 millions d’euros de 2019. Ces deux sociétés sont placées sous le contrôle de Pierre Bellanger via la holding Nakama. « Nakama est détenue à 77,4 % par Sammas et 22,6 % par RMF Holding [fonds de placement du Crédit Agricole via Delfinances, ndlr]. Sammas est détenue à 34,9 % par moi-même, 16,1 % par Solidus, 49 % par RMF Holding. Je suis majoritaire dans Solidus », nous détaillet- il. Ardian (ex-Axa Private Equity), qui était encore il y a dix ans majoritaire au capital de Skyrock (via Nakama et feu Orbus), a cédé à Samma le solde de ses parts en 2018 (5). Pionnier des radios libres, Pierre Bellanger l’est aussi dans les services en ligne. En 1985, il a créé Vortex (avec Filipacchi Médias comme actionnaire jusqu’en 1999) pour lancer le 21 mars 1986 – il y a 35 ans – Skyrock à la place de sa toute première radio La Voix du Lézard (ex- Radio Cité Future). La même année, il fonde Telefun pour éditer d’abord des services Minitel. Ce fut l’époque de la messagerie rose « 3615 Géraldine » (une passion partagée avec le fondateur de Free Xavier Niel), mais aussi des services téléphoniques sur le kiosque téléphonique surtaxé Audiotel, puis sur SMS+. Pierre Bellanger édite aussi des services Internet avec France Télécom.
A la fin des années 1990, il lance via Telefun les sites web Skyrock.com et Tasante.com. Et c’est en décembre 2002 qu’il devient un pionnier des réseaux sociaux avec le lancement de Skyblog.com qui sera une plateforme de blogs très active, avec réseau d’« amis » – deux ans avant Facebook ! –, chats en mode Internet Relay Chat (IRC) et messageries instantanées. Cependant, il y a quinze ans, le groupe audiovisuel britannique BSkyB l’oblige à abandonner la marque Skyblog. La plateforme de blogs intègre alors le site web Skyrock.com, devenant ainsi un réseau social, tandis que le site de la radio devient Skyrock.fm. A la fin des années 2000, il se revendique comme « le 7e réseau social mondial ». Telefun est aujourd’hui détenue à 100 % par Pierre Bellanger via la holding Cascadia et est en cours de sortie d’une procédure de sauvegarde (6). Skyrock s’est aussi lancé dans la vidéo, avec notamment son émission mythique « Planète Rap » qui totalise sur sa chaîne YouTube 24 millions de vues depuis sa mise en ligne en 2015. « Skyrock est la première chaîne média de YouTube », affirme le groupe de la rue de Greneta (Paris). La holding de Telefun, Cascadia, contrôle la filiale « France en ligne », qui exploite Shred, la régie publicitaire Springbird et Advestor.
C’est que Pierre Bellanger (62 ans), passionné de numérique, rêve depuis longtemps de se faire une petite place entre les GAFAM. En 2017, il lance l’application sur mobile Skred, présentée comme « la première messagerie mondiale sécurisée d’origine européenne », qui revendique aujourd’hui 9 millions d’utilisateurs. Gratuite et « sans aucune trace », ils peuvent échanger par messages, voix et vidéo sans s’inquiéter pour leur vie privée. Pierre Bellanger a même vanté – sur France Info le 16 janvier – les mérites de Skred face aux inquiétudes et rumeurs qui ont impacté en début d’année WhatsApp (filiale de Facebook). D’autant que Skred fonctionne en mode peer-to-peer et non de façon centralisée. « Nous n’avons pas de serveur intermédiaire et, donc, nous ne récupérons pas et nous n’utilisons pas les données des utilisateurs », a-t-il assuré (7). « Skred a un nouvel utilisateur toutes les six secondes depuis plus d’un an, comment savoir si cette polémique y contribue ? Probablement très marginalement », nous confie-t-il. Dans la même veine du « zéro data », le fondateur de Skyrock prépare le lancement d’un service de visioconférence fonctionnant aussi en pair-à-pair pour offrir une alternative aux Zoom, Teams (Microsoft) et autres Meet (Google). « Skred Visio prendra son envol courant 2021 avec notre écosystème “French Tech” habituel », nous précise-t-il.

Des oreilles au portefeuille
Pour parfaire son écosystème des jeunes, Pierre Bellanger a lancé le 14 décembre dernier un service de paiement sécurisé et d’achats groupés baptisé Yax. Opéré par la fintech française Lyf Pay, ce service gratuit est intégré aux applications mobiles de Skyrock, sous iOS et Android. Yax permet d’envoyer et de demander de l’argent à un contact, de créer une cagnotte et de participer à des achats groupés (contre des réductions de prix). « C’est un succès au-dessus de nos attentes ; le modèle fonctionne. Nous avons vendu, par exemple, 200 PS5 en moins de 40 secondes », se félicite Pierre Bellanger. Les auditeurs en ont aussi pour leur argent. @

Charles de Laubier

Fip, « meilleure radio du monde », fête ses 50 ans et s’internationalise grâce à ses webradios et applis mobiles

La radio locale « France Inter Paris », d’où son nom, fut lancée le 5 janvier 1971. Au fil de cinq décennies, Fip est devenue culte auprès d’un public grandissant et fidèle malgré sa diffusion FM incomplète – à laquelle le DAB+ va remédier. Ses déclinaisons sur Internet (fip.fr, webradios, podcasts) lui ont ouvert une audience internationale.

Née radio locale à Paris il y a 50 ans, en ondes moyennes, Fip s’est progressivement développée sur la bande FM, où elle dispose aujourd’hui de dix fréquences hertziennes sur l’Hexagone (1), avant d’étendre son audience au monde entier via Internet : non seulement sur fip.fr mais aussi sur les smartphones avec ses deux applications mobiles (l’une sous Android, l’autre sous iOS). L’ex-France Inter Paris s’est faite un nom en trois lettres en étant l’unique radio dans le monde à proposer une programmation éclectique de tous les genres musicaux et de tous les pays. Se succèdent à l’antenne ou en ligne rock, jazz, blues, classique, groove, électro, reggae ou encore rap, ainsi que les musiques de tous les horizons (occidentales, africaines, sud-américaines, orientales, asiatiques, …). Sa programmation musicale sans frontières, interrompue sans excès et en douceur par des animatrices (les « fipettes » aux voix suaves) faisant part de rendez-vous culturels ou de coups de cœurs musicaux, séduit de plus en plus à l’international. « Cela tient à la richesse et à la diversité de la programmation de Fip et à l’univers musical qu’elle a su créer en développant ses webradios qui aujourd’hui représentant 30 % de son audience. L’écoute des huit webradios a progressé, à elle seule, de 43 % en un an », explique à Edition Multimédi@ Bérénice Ravache (photo), directrice de Fip depuis août 2017.

Un quart de son audience digitale vient de l’étranger
Car au-delà de ses 680.000 auditeurs qui l’écoutent aujourd’hui sur la FM en France, soit une part d’audience de 1,2 % tout à fait honorable au regard de sa diffusion hertzienne partielle auprès de la population hexagonale, Fip rayonne de plus en plus à l’international. Son site web, créé en 2004 à l’adresse fipradio.fr puis modernisé en 2014 sur fip.fr, draine un public d’internautes grandissant : près de 2,9 millions de visites par mois au total (2), dont 23 % venues hors de France, selon le dernier relevé de l’Alliance pour les chiffres de la presse et des médias (ACPM). Fip étend aussi son audience sur l’Hexagone et par-delà les frontières grâce à ses deux applications mobiles pour tous les smartphones et tablettes, l’une disponible sur Play Store et l’autre sur App Store (sous iOS) : plus de 1,9 million de visites par mois au total (4), dont plus de 29 % venues là aussi hors de France (5). Ainsi, environ un quart de l’audience de Fip en streaming – site web, webradios et applis mobiles confondus – provient de l’étranger, et comme en témoigne la vidéo postée le 5 janvier : https://lc.cx/50ansFip. Et ce, grâce non seulement à la diffusion numérique en ligne dans le monde du flux audio repris simultanément du flux hertzien (simulcast), mais aussi à ses 8 webradios : Fip Rock, Fip Jazz ; Fip Groove, Fip Electro, Fip Monde, Fip Reggae, Fip Nouveautés et, la toute dernière lancée en juin dernier, Fip Pop.

Nouvelles webradios et nouveaux podcasts en vue
Cette part internationale va continuer à progresser car d’autres déclinaisons thématiques vont être lancées. « Il reste encore beaucoup d’autre genres à explorer et des projets de nouvelles webradios sont en effet à l’étude », nous confie Bérénice Ravache. Le flux audio a l’avantage d’être accessible en ligne de n’importe quel type de terminal numérique : ordinateur, smartphone, tablette, télévision connectée, « box », récepteur radio numérique, autoradio connecté ou encore agrégateurs de flux. « Fip et ses webradios rencontrent des succès sans précédent sur l’ensemble des supports d’écoute », se félicite sa directrice. La production de podcasts n’est pas en reste : « Club jazzafip », « Certains l’aiment Fip » ou encore le tout nouveau « Les années Fip ». « Nous proposons également depuis l’année dernière nos “Fip 360” de concerts électro en son immersif et en podcast avec son 3D : premier podcast de ce genre dans le monde. Et cette année, nous allons mettre en ligne deux séries de podcasts: “Sound of Joy”(6 épisodes) et “Pink Note” (8 épisodes) », dévoile la directrice de Fip. Lorsque le patron de Twitter, Jack Dorsey, a tweeté le 12 septembre 2017 « la meilleure radio du monde » (6) à propos de Fip, le milliardaire du Net a rappelé implicitement que la radio n’avait plus de frontières à l’ère du streaming. « Pourquoi ne venez-vous pas visiter l’équipe @fipradio à Paris ? Ils ne vous diront pas leurs secrets, mais ce sont des gens formidables », lui avait répondu Laurent Frisch, directeur du numérique de Radio France. Jack Dorsey tweeta alors : « Je le ferai la prochaine fois que je serai à Paris » (7). C’est ce que le PDG cofondateur du site de microblogging fit le 7 juin 2019. L’Américain, icône du Net, a même pris le micro de Fip (voir photo ci-contre) et a concocté « sa playlist Fip » diffusée à l’antenne et toujours sur Spotify (8). « @jack » est d’autant plus fan de « @fipradio » qu’il a déclaré ce jourlà sa passion pour Fip en tweetant cette fois une photo de son poignet avec comme « nouveau tatouage » le logo de sa radio préférée, photo (9) et vidéo (10) à l’appui ! Le rayonnement international de Fip, dont la programmation « universelle » porte sur la diffusion de 42.000 titres différents par an, en fait une radio culte atypique. L’ACPM a classé Fip en cinquième position des radios digitales françaises. Avec 13,2 millions d’écoutes actives dans le monde – dont plus de 3,6 millions hors de France – durant le mois de novembre 2020, dernier relevé en date (11), Fip arrive juste derrière France Inter, France Info, RMC et NRJ. Et que cela soit dans ce « Top 5 » de la radio digitale ou dans le « Top 20 », elle est la mieux-disante en termes de durée d’écoute moyenne (12) avec plus de 58 minutes (contre 35 mn pour France Inter ou 34 mn pour NRJ). Cet attachement de ses auditeurs en fait une « radio fétiche » (dixit Fip). Cette fidélité se retrouve d’ailleurs sur la FM où sa durée d’écoute par auditeur (DEA) se situe autour de 2 heures dans le mois selon par Médiamétrie (13). Aucune radio musicale hertzienne en France n’atteint et ne dépasse cette performance, et même de toutes les catégories de radios si l’on excepte RTL (2h19), France Inter (2h10) et à égalité avec France Bleu (1h55). « La radio s’écoute encore majoritairement en FM. Fip y a gagné 100.000 auditeurs en un an », relève Bérénice Ravache, alors que Médiamétrie mesure la station quinquagénaire depuis seulement septembre 2019. Et d’ajouter : « L’audience de Fip a progressé de 250 % en 15 ans, passant de 260.000 en 2006 à près de 680.000 auditeurs en 2020. Peu de radios peuvent en dire autant, en particulier les radios musicales ». Surtout avec seulement dix fréquences FM. En 2015, en pleine grève qui fut la plus longue de l’histoire de Radio France, la Cour des comptes publie son rapport sur le groupe public de radios où, par soucis d’économie, il suggère que Fip « fragilisée par la concurrence » quitte le hertzien pour le seul numérique (avec la petite radio Le Mouv’). Mais après la révocation début 2018 du président de la Maison- Ronde, Mathieu Gallet, auquel a succédé Sibyle Veil, l’idée sera abandonnée. « Fip fait bel et bien partie du paysage radiophonique dans 10 villes et il n’est pas question d’y renoncer. Le déploiement du DAB+ [la diffusion numérique terrestre, ndlr] va permettre à Fip d’être diffusée demain [d’ici à 2028, ndlr] sur 85 % du territoire contre 6% aujourd’hui », nous explique Bérénice Ravache. Sur fond de baisse de dotation de l’Etat, bien que compensée par les aides d’Etat liées à crise sanitaire, des économies restent encore à faire pour Radio France (60 millions d’euros d’ici 2022). Sur 4.400 employés, 340 départs volontaires sont prévus, des recrutements – dans le numérique notamment – aussi.

14 postes supprimés (dont 11 «fipettes»), mais 5 de créés
Fip contribue à son niveau au plan d’économies du groupe. « L’animation locale de Fip à Bordeaux, Nantes et Strasbourg a pris fin le 18 décembre. C’était les trois dernières villes, les précédentes ayant cessé fin 2000. En conséquence,14 postes sont supprimés, dont 11 animatrices, mais 5 postes de déléguées musicales sont créés à Bordeaux, Nantes, Strasbourg et Lyon », nous détaille Bérénice Ravache. Quant aux habituels flashs d’actualités à 50 de chaque heure, ils ont aussi été sacrifiés. Avec sa soixantaine de collaborateurs (salariés, 14 animatrices, cachetiers, …), Fip fait moins radio locale mais plus nationale et globale. @

Charles de Laubier

La radio numérique par les ondes tient tête à l’audio

En fait. Les 5 et 6 novembre, à Toulouse et Montauban, d’une part, et à Bordeaux et Arcachon, d’autre part, a été lancée la diffusion numérique hertzienne de dizaines de radios nationales et locales. Le DAB+ couvre maintenant 28,8 % de la population française. Un pied de nez aux podcasts, aux webradios et à l’audio du Net.

En clair. « Le DAB+ est aujourd’hui un investissement stratégique de toute première nécessité pour les radios, car il leur permet de préserver l’indépendance de leur mode de distribution historique – la radiodiffusion par les ondes – vis-àvis des fournisseurs d’accès à Internet fixes et mobiles », explique Nicolas Curien, président du groupe de travail radios et audio numérique du CSA, à Edition Multimédi@. Et de poursuivre : « En effet, il n’est pas nécessaire d’être connecté à Internet ni de payer un quelconque abonnement pour écouter la radio en DAB+ : le son passe par les ondes, l’écoute est gratuite et anonyme, exactement comme pour la FM, dont le DAB+ n’est autre que le successeur numérique ».
A l’heure où les podcasts explosent de partout, où les plateformes de musique en ligne (YouTube, Spotify, Deezer, …) s’adonnent au streaming jusque dans les enceintes connectées (les GAFA y donnent de la voix), à l’heure où encore les webradios et l’audio digital consacrent la radio sur IP (via Internet), la radio par voie hertzienne, elle, s’est modernisée avec le DAB+ pour ne pas être disqualifiée. A l’instar de la télévision numérique terrestre (TNT), la radio numérique terrestre (RNT), elle, permet aux éditeurs de stations de garder une part d’indépendance vis-à-vis des plateformes du Net, où dominent les GAFA. L’anonymat offert par le DAB+, comme la FM, est un atout majeur au moment où l’exploitation des données personnelles des internautes se fait dans des conditions parfois illégales. Sans être pisté, du moins tant que les récepteurs ne seront pas connectés à Internet, l’auditeur « DAB+ » peut écouter – avec une qualité de son inédite – des certaines radios en mobilité, sans se soucier des fréquences, tout en obtenant en plus le titre de la chanson, de l’info trafic, etc.
Le code européen des communications électroniques prévoit qu’à partir de décembre 2020 tous les autoradios devront intégrer obligatoirement une puce « DAB+ ». La France fait déjà mieux puisque « cette obligation, indique Nicolas Curien, est en vigueur depuis juillet dernier pour tous les récepteurs y compris les autoradios, et même depuis 2019 pour les récepteurs fixes » (1). Depuis le lancement du DAB+ sur la France en 2014, 564 autorisations d’émettre ont été délivrées par le CSA à des éditeurs, privés ou publics, pour un total de 246 radios différentes. @

L’audio digital a trouvé son public et ses marques

En fait. Le 24 janvier, au Salon de la Radio et de l’Audio digital, Marianne Le Vavasseur, directrice de la régie publicitaire de Deezer, a présenté le « Livre blanc de l’Audio digital 2020 » – publié par le Groupement des éditeurs et de services en ligne (Geste) et l’IAB France. C’est la troisième édition.

En clair. Huit ans après la toute première édition, quatre ans après la seconde, le Groupement des éditeurs et de services en ligne (Geste) et l’Interactive Advertising Bureau France (IAB France) publient la troisième édition du « Livre blanc de l’Audio digital ». Alors que le marché des podcasts replay (1) et natifs (2) explose depuis quatre ans et que les enceintes connectées avec leur assistant vocal mettent les radios, les plateformes de streaming et les agrégateurs à portée de voix, sans oublier le livre audio, un nouvel état des lieux de l’écosystème de l’audio digital est le bienvenu. « L’offre étant protéiforme et en pleine construction, il nous a semblé nécessaire de préciser les usages, les audiences, les acteurs, les évolutions technologiques et les opportunités pour les marques », justifient le Geste et l’IAB France.
Selon la mesure d’audience « Internet global Radio et Musique », publiée par ailleurs par Médiamétrie et le Geste, la barre des 40 millions d’internautes ayant visité au moins un site web ou une application de radio/musique a été franchie en septembre 2019 – soit un bond de 5 millions d’internautes de plus en un an. « Le développement de nouveaux formats et de nouveaux modes d’accès aux contenus audio laisse présager d’une poursuite de cette croissance dans les mois à venir », prévoit Marianne Le Vavasseur, coprésidente de la commission Audio digital du Geste (3). Parmi ces auditeurs de contenus, 84,1 % s’y connectent via un smartphone. Et un tiers en écoute chaque jour. En outre, 40,3 % d’entre eux ont écouté dans le mois la radio sur Internet ou webradios, 37,5 % de la musique en ligne, 22,8 % des podcasts et 5,2 % un livre audio. Le marché publicitaire, lui, s’organise : « Les achats se font majoritairement au CPM [coût pour mille impressions, ndlr]. L’achat au forfait ou le sponsoring d’un contenu permet également aux annonceurs de parrainer une série, une ou plusieurs thématiques (…). Ce sponsoring peut prendre la forme d’un format dit “host-read” sur certains podcasts natifs. C’est une annonce lue par la personne animant le podcast avant le lancement du contenu éditorial à proprement parlé », explique l’ouvrage de référence (4). Pour autant, « l’essor économique de ce marché ne pourra se faire sans une mesure d’audience fiable et partagée par tous. Ce chantier sera, sans aucun doute, celui de cette nouvelle décennie ». @