En prenant X en grippe, Thierry Breton crée un malaise au sein de la Commission européenne

Dix mois après sa première lettre du 10 octobre 2023 à Elon Musk pour lui rappeler les obligations de X (ex-Twitter) au regard du Digital Services Act (DSA), Thierry Breton lui a envoyé une seconde lettre le 12 août 2024. A force d’insister, le commissaire européen créé un malaise à Bruxelles.

Thierry Breton (photo) outrepasse-t-il ses fonctions de commissaire européen en charge du Marché intérieur ? C’est à se demander, tant le Français – que le président de la République française Emmanuel Macron souhaite voir reconduit dans ses fonctions pour le prochain mandat de la Commission européenne – se distingue en prenant parfois des initiatives sans se concerter avec ses collègues à Bruxelles. Il en va ainsi avec le second courrier en dix mois adressé le 12 août 2024 à Elon Musk pour rappeler à ce dernier les obligations du réseau social X (ex- Twitter) en Europe.

Thierry Breton désavoué face à Elon Musk
« Le timing et la formulation de la lettre n’ont été ni coordonnés ni convenus avec la présidente [Ursula von der Leyen] ou le collège [des commissaires européens] », a déclaré Arianna Podestà, porte-parole en cheffe-adjointe de la Commission européenne, selon sa déclaration faite au journal Le Monde. Et d’assurer : « La lettre [de Thierry Breton] ne voulait en aucun cas interférer avec les élections américaines. L’UE n’interfère pas dans des élections » (1). Pourtant, le courrier à Elon Musk daté du 12 août et signé par le commissaire européen au Marché intérieur fait explicitement référence à « la diffusion prévue sur votre plateforme X [en s’adressant à Elon Musk, ndlr] d’une conversation en direct entre un candidat à la présidence américaine et vous-même, qui sera également accessible aux utilisateurs de l’UE ».
Et Thierry Breton d’enfoncer le clou en mettant en garde le propriétaire de la plateforme X : « Nous surveillons les risques potentiels dans l’UE associés à la diffusion de contenu pouvant inciter à la violence, à la haine et au racisme en lien avec un événement politique – ou sociétal – majeur à travers le monde, y compris des débats et des interviews dans le contexte d’élections [en l’occurrence ici des élections américaines, ndlr] ». Dans cette lettre que la présidente de la Commission européenne ne cautionne pas, il est fait ainsi clairement référence à l’interview, prévu le lendemain, que Elon Musk fera lui-même de Donald Trump, candidat Républicain à l’élection présidentielle. L’« interférence » du commissaire européen Thierry Breton aurait pu être considérée comme de l’ingérence de la Commission européenne dans les affaires intérieures des Etats-Unis s’il n’y avait pas eu la mise au point de la porte-parole en cheffe-adjointe de l’exécutif européen. Désavoué par les services de la présidente Ursula von der Leyen, laquelle a été réélue le 18 juillet dernier par les eurodéputés pour un nouveau mandat, Thierry Breton a aussi reçu une réplique cinglante de la part du propriétaire de X.

La concurrence mondiale des constellations de satellites pour l’accès à Internet s’intensifie

Les opérateurs télécoms traditionnels font comme si les opérateurs de satellites pour l’accès à Internet n’étaient pas une menace à terme pour leurs offres fixes et mobiles. Or les constellations Starlink (SpaceX), Kuiper (Amazon) et OneWeb (Eutelsat) pourraient un jour les court-circuiter.

Les constellations de satellites pour des accès haut débit à Internet montent en puissance dans l’Hexagone. Starlink, créée et exploitée par la société SpaceX, est opérationnelle en France depuis mai 2021 et a fait l’objet jusqu’à ce jour de dixhuit décisions de l’Arcep (1). OneWeb, du groupe indobritannique intégré au français Eutelsat, a été officiellement lancée en France en février 2023 et compte cinq décisions de l’Arcep (2). Quant à Kuiper du groupe Amazon, elle a obtenu le 20 juin de la part de l’Arcep six décisions autorisant Amazon Kuiper France à opérer sur l’Hexagone (3).

Orbite basse et haut débit
Ce dernier nouvel entrant satellitaire en date en France, Kuiper, fourbit ses armes avant de tester à grande échelle son service au quatrième trimestre 2024, puis de commercialiser les accès à Internet par satellites en 2025. « Nous prévoyons d’expédier cet été nos premiers satellites de production terminés, et nous visons notre première mission Kuiper à grande échelle pour le “Q4” à bord d’une fusée Atlas V de l’ULA [United Launch Alliance, ndlr]. Nous continuerons d’augmenter nos taux de production et de déploiement de satellites d’ici 2025, et nous demeurons sur la bonne voie pour commencer à offrir des services aux clients l’année prochaine », a indiqué le 27 juin sa maison mère Amazon. L’objectif de la firme de Jeff Bezos : « Connecter des dizaines de millions de clients à travers le monde » (4).

L’Apple Vision Pro avance à l’aveugle sur le marché

En fait. Depuis le 12 juillet, le casque de réalité mixte d’Apple, le Vision Pro, est disponible en France après des précommandes qui avaient débuté le 28 juin. En Europe, l’Allemagne et le Royaume-Uni sont aussi concernés. « Engouement extraordinaire » (dixit le PDG Tim Cook). Or les ventes sont décevantes.

En clair. « L’Apple Vision Pro suscite un engouement extraordinaire », avait affirmé le 10 juin dernier Tim Cook, le PDG de la firme de Cupertino, lors de l’annonce du calendrier des précommandes et des disponibilités du casque de réalité mixe à la pomme dans de nouveaux pays dans le monde (1), dont la France, l’Allemagne ou encore le Royaume-Unis. Le patron d’Apple a-t-il menti par excès d’enthousiasme ? Apparemment oui, puisque les ventes de son casque d’« informatique spatiale » sont à la peine. Les chiffres et les prévisions que le cabinet d’études IDC a livrés à l’agence de presse Bloomberg le 11 juillet ont fait le tour du monde : « Les ventes du Vision Pro d’Apple ne dépasseront pas 500.000 unités cette année », alors que « les ventes aux Etats-Unis de ce coûteux casque [3.499 dollars, ndlr] devraient chuter » (2).

L’encrage à l’extrême droite du Parlementeuropéen hypothèque la réforme des télécoms

Les dernières élections européennes, donnant la part belle aux nationalistes, rendent incertaine la prochaine déréglementation des télécoms dans les Vingt-sept, alors que la Commission européenne doit réviser le code européen des communications électroniques d’ici décembre 2025.

Au plus tard le 21 décembre 2025, et tous les cinq ans par la suite, la Commission européenne est tenue de réexamine le fonctionnement de la directive de 2018 établissant le code des communications électroniques européen (CCEE). De même, d’ici cette même échéance, et tous les cinq ans là aussi, elle doit aussi réexaminer la portée du service universel, en vue de proposer la modification ou la redéfinition du champ d’application.

Déréglementer le marché des télécoms ?
A cela s’ajoute le projet de règlement télécoms, le Digital Networks Act (DNA) que pousse l’actuel commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton (photo), pour la prochaine mandature. Autant dire que la prochaine Commission européenne, qui prendra ses fonctions fin 2024 en tenant compte de l’extrême-droitisation du Parlement européen depuis juin, pourrait faire de la réforme des télécoms l’un de ses priorités. Rappelons que le code des communications électroniques européen, adopté en 2018 (1), a modifié et regroupé quatre directives préexistantes adoptées en 2002 et modifiées en 2009, à savoir les directives « cadre », « autorisation », « accès » et « service universel ». Cette directive du code des télécoms est censée avoir été transposée par chacun des Vingt-sept au plus tard le 21 décembre 2020.
Or, selon les constatations de Edition Multimédi@, il y a encore à mi-2024 des trous dans la « raquette » européenne des télécoms : l’Italie, le Luxembourg, la Grèce et la Bulgarie sont les quatre Etats membres qui n’ont quasiment pas transposé la directive du code des communications électroniques européen, avec respectivement seulement deux, deux, deux et une mesure(s) prise(s) en compte au niveau national (2). En plus de ces mauvais élèves européens, force est aussi de constater que bon nombre d’autres Etats membres n’ont que partiellement transposé la directive du code des télécoms. Dès le 4 février 2021, la Commission européenne avait engagé une procédure d’infraction contre 24 Etats membres, dont la France pour défaut de transposition du code des communications électroniques (3), suivie le 23 septembre 2021 d’un avis motivé adressé à 18 d’entre eux (4). Puis, le 6 avril 2022, la Commission européenne a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’un recours contre dix Etats membres pour défaut de transposition complète dans le droit national du code des communications électroniques (5).

Les tablettes n’ont pas réussi à s’imposer face aux smartphones et leur usage est resté secondaire

Les tablettes sont-elles vouées à disparaître ? La question peut paraître osée, mais pas tant que cela. L’usage écrasant des smartphones depuis des années a relégué les ardoises au second plan. La presse mondiale en espérait beaucoup, mais ce fut la déception. Leurs ventes sont souvent en baisse.

Apple, Samsung, Huawei, Lenovo et Xiaomi constituent le « Top 5 » mondial des fabricants de tablettes. Mais leurs ventes sur ce segment de marché font pâle figure par rapport aux ventes de leurs smartphones. Prenons le numéro un mondial des ardoises tactiles, Apple avec son iPad – qui est entré depuis le 3 avril dernier dans sa quinzième année depuis sa première génération. La marque à la pomme en a vendu au cours de son dernier exercice annuel (clos le 30 septembre 2023) pour 28,3 milliards de dollars, en baisse de – 3 % sur un an. Alors que les iPhone, eux, lui ont rapporté sur la même période 200,5 milliards de dollars.

Apple pourrait passer en second
Les tablettes de la firme de Cupertino ne pèsent que 7,3 % de son chiffre d’affaires global annuel. Sur les six premiers mois de l’exercice en cours (c’est-à-dire au 30 mars 2024), les iPad (5,5 milliards de dollars contre 45,9 milliards de dollars pour les iPhone) ne représentent là encore que 6,1 % du chiffre d’affaires total sur ce premier semestre. Le recul des ventes de des tablettes de la Pomme sur ces six premiers mois de l’année fiscale en cours est de – 17 %.
Reste à savoir pour le PDG d’Apple, Tim Cook, si sa keynote du 7 mai dernier consacrée aux nouveautés iPad (1), relancera les ventes de ses ardoises. Si les annonces du successeur de Steve Jobs se sont faites sans accros de l’Apple Park circulaire, il n’en a pas été de même pour la publicité pour l’iPad Pro diffusée le jour même (2). Montrant une énorme presse hydraulique broyant lentement guitare, métronome, sculpture, livre, tourne disque, trompette, appareil photo, mannequin en bois d’artiste, sur fond de tubes de couleurs explosant au fur et à mesure comme du sang qui gicle, pour laisser apparaître la fine tablette, cette publicité a suscité une vague d’indignation à travers le monde. Certains y ont vu une dystopie froide portant atteinte à la création humaine ; d’autres se sont offusqués de cette uniformisation du monde réduite à l’écran. « Nous avons raté la cible avec cette vidéo, et nous sommes désolés », s’est excusé Apple le 9 mai par la voix de son vice-président marketing communication, Tor Myhren, dans une déclaration à l’hebdomadaire américain Ad Age (3). L’avenir dira si cette publicité ratée accentuera le déclin des iPad, malgré les nouveaux modèles dont certains plus grands, plus puissants, mieux éclairés, mieux sonorisés, etc. (4).