Révolution du jeu vidéo : l’IA le crée en temps réel

En fait. Le 4 avril, Microsoft a mis en ligne une version du jeu vidéo « Quake 2 », dont le contenu est généré en temps réel par son modèle d’intelligence artificielle Muse, en fonction de l’évolution du joueur. Ce n’est pas le premier à s’engager dans cette révolution de la production « IA » de jeux vidéo.

En clair. Attention, chamboulement en vue dans le développement des jeux vidéo. L’IA générative de jeux vidéo en temps réel va déferler dans cette industrie du 10e Art. C’est notamment ce que promettent chacun de leur côté Microsoft, avec une version évolutive de « Quark 2 », et la start-up californienne Decart, avec son jeu « Oasis » aussi généré dynamiquement. Leur point commun réside dans le fait que c’est le modèle d’intelligence artificielle utilisé qui crée le contenu du jeu, en temps réel, en fonction des actions et des avancées du joueur dans le gameplay. L’utilisateur influence directement la création par l’IA des environnements vidéoludiques du jeu, lequel évolue en fonction de ses choix, offrant ainsi au gamer une expérience immersive et personnalisée hors du commun.
Dans une longue interview très remarquée et enregistrée le 19 février dernier (1), le PDG de Microsoft, Satya Nadella, a annoncé que sa console de jeux vidéo Xbox « all[ait] bientôt avoir un catalogue de jeu qui utiliseront ces modèles [d’IA comme Muse, ndlr] ». Le coup d’envoi a été donné le 7 avril par la firme de Redmond (Californie) avec la mise en ligne pour PC d’une version « IA » du jeu vidéo de tir à la première personne (FPS), lequel avait été développé (suite)

Valve et son écosystème Steam (plateforme, console et catalogue) révolutionnent le jeu vidéo avec Linux

Cofondée il y a près de 30 ans et présidée par Gabe Newell (ex-Microsoft), la société Valve – éditeur de « Half-Life », son premier jeu vidéo, suivi de « Counter-Strike » – mise depuis plus de 10 ans sur le système d’exploitation open source Linux pour ses consoles Steam – bientôt dans le salon ?

Gabe Newell (photo), le cofondateur de Valve en 1996 et actuel président de l’éditeur et distributeur de jeux vidéo, avait quitté Microsoft après treize années passés à développer Windows. L’autre cofondateur de Valve, Mike Harrington (qui n’est plus dans l’entreprise depuis 2000), était aussi développeur Windows chez Microsoft. Gabe Newell avait reproché au système d’exploitation de Bill Gates d’être un écosystème fermé, similaire à l’iOS d’Apple. Ce diplômé d’Harvard s’était alors tourné vers le système d’exploitation open source Linux, plus flexible que les « OS » propriétaires, en faisant le pari d’y faire tourner sa plateforme de distribution de jeux vidéo Steam.

24.249 jeux fonctionnent sous Linux
Aujourd’hui, Steam s’est imposé comme un « canal de distribution de contenu numérique » où peuvent jouer en ligne – sous Windows et de plus en plus sous Linux – de très nombreux joueurs, les « steam players », qui peuvent être simultanément plus de 30 millions. Valve distribue ainsi en streaming ses propres jeux vidéo, de l’historique « Half-Life » (sorti en 1998) au légendaire « Counter-Strike » (sorti en 2004 sous Windows, puis en 2013 sous Linux), en passant par « Deadlock » (sorti en 2024 sous Windows et jouable sous Linux via le logiciel Proton), « Dota 2 » (sorti en 2013 sous Windows et Linux), ou encore « Portal » (sorti en 2007 sous Windows et 2013 sous Linux). Mais Valve distribue aussi les jeux vidéo d’autres éditeurs, comme ce fut récemment le cas du nouvel opus du français Ubisoft sorti le 20 mars dernier, « Assassin’s Creed Shadows », qui fonctionne sous Windows et, via le logiciel Proton, Linux. Il se dit même que Steam aurait (suite)

Le marché mondial du jeu vidéo devrait franchir en 2027 la barre des 200 milliards de dollars

Pour un marché en crise, le jeu vidéo ne s’en sort pas si mal malgré les licenciements et les baisses de régime. D’ici deux ans, son chiffre d’affaires mondial devrait enfin franchir pour la première fois les 200 milliards de dollars – certes, avec un peu de retard sur les précédentes prévisions.

Alors que la sinistrose s’est emparé du salon international du jeu vidéo Gamescom, qui s’est tenu à Cologne en Allemagne du lundi 19 août (avec la conférence des développeurs) jusqu’au samedi 24 août (la soirée de lancement du Gamescom proprement dit ayant eu lieu le soir du 20 août), les prévisions pour l’industrie du 10e Art restent finalement pas si catastrophiques. Bien que les suppressions d’emplois se sont accélérées depuis deux ans, scrutées à la loupe par Game Industry Layoffs (1), sur fond de fermetures de studios (2), on est très loin du game over.

Bien au contraire. 10e Art, vers un nouveau record historique
La croissance de cette industrie culturelle, dépassant largement celle du cinéma, demeure malgré la crise qui la frappe. Pour la première fois, le chiffre d’affaires mondial du jeu vidéo devrait dépasser les 200 milliards de dollars – pour s’établir à 213,3 milliards de dollars, selon les prévisions, revues le 13 août, du cabinet d’études néerlandais Newzoo, qui table sur une hausse moyenne annuelle de + 3,1 % sur la période 2002-2027 (voir graphique ci-dessous). « Alors que le marché connaît une croissance soutenue en 2024 [+ 2,1 %, à 187,7 milliards de dollars, ndlr], la question demeure : cette croissance va-t-elle durer ? La réponse courte est oui », prédit Michiel Buijsman (photo), analyste principal, basé, lui, à Chicago aux Etats-Unis. Mais selon les constatations de Edition Multimédi@, Newzoo a sérieusement décalé dans le temps le franchissement de ce seuil des 200 milliards de dollars qui devait initialement être atteint en… 2022. C’est du moins ce sur quoi tablaient ses anciennes prévisions datées du 5 mai 2022. Cela devait être « un nouveau record » (3).
Mais la crise de croissance s’est accélérée et a amené un an après Newzoo à repousser à 2025 le franchissement de la fameuse barre des 200 milliards de dollars (4). Le ralentissement de la croissance s’éternisant, le cabinet d’étude d’Amsterdam a dû le 13 août dernier (5) repousser une nouvelle fois ce record symbolique à 2027. Rien ne dit qu’un troisième recul sera nécessaire en raison de l’évolution constante de ce marché vidéoludique. Contacté, Michiel Buijsman nous répond

L’industrie du jeu vidéo s’inquiète d’être sous pression réglementaire grandissante en Europe

Le jeu vidéo fait face à des contraintes accrues en Europe : contrôle parental dans les teminaux, réduction de l’empreinte carbone de la filière vidéoludique, règlementation plus stricte sur les achats in-game, édition de jeux plus responsables, … Le lobbying de l’ISFE s’intensifie à Bruxelles. La Fédération européenne des logiciels interactifs – Interactive Software Federation of Europe (ISFE) – existe depuis 25 ans, mais elle n’a jamais été aussi mobilisée à Bruxelles, où elle est établie, pour défendre les intérêts de l’industrie du jeu vidéo et de tout l’écosystème du 10e Art. Ses membres se comptent parmi les principaux éditeurs de jeux vidéo ou de studios de création, e-sport compris, et les associations professionnelles nationales de différents pays d’Europe. Contrôle parental, climat, dépenses in-game, … L’ISFE, dirigée par Simon Little depuis 2009, représente ainsi auprès des instances européennes une vingtaine d’entreprises dont Activision Blizzard, Electronic Arts, Epic Games, Bandai Namco, Microsoft, Riot Games ou encore Ubisoft (1), ainsi qu’une douzaine d’organismes nationaux comme le Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (Sell) en France. Celui-ci vient d’élire, lors de son assemblée générale qui s’est tenue le 28 mars, son nouveau président en la personne de James Rebours (photo), directeur général de Plaion France, éditeur et distributeur de jeux vidéo. « Le Sell informe en permanence l’ISFE des évolutions de la législation nationale qui pourrait avoir un impact direct sur l’industrie ou déboucher sur une initiative législative européenne plus large », explique-t-il à Edition Multimédi@. Et les dossiers au niveau européen s’accumulent. Le dernier en date porte sur le projet de décret français « visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d’accès à Internet » qui vient d’être examiné par la Commission européenne (2). Dans leur contribution, le Sell et l’ISFE critiquent notamment l’article 3 du projet de décret prévoyant pour les fabricants ou les importateurs « l’intégration du dispositif de contrôle parental obligatoire dans les “équipements terminaux” », s’ils veulent que ces derniers soient mis sur le marché français. Ce serait selon les deux organisations « [in]justifiée » et « [dis]proportionnée » (3). Autre dossier sur la table de l’ISFE : la réduction de l’empreinte carbone de l’industrie des jeux. La fédération fait partie depuis 2021 de la Playing for the Planet Alliance, laquelle a publié le 9 mars son rapport d’impact annuel sur l’environnement (4), lors d’un événement organisé à Bruxelles par le Parlement européen. L’alliance soutenue par les Nations Unies (5) prévoit de fournir en 2023 de nouvelles orientations à l’industrie du jeu vidéo, afin que celle-ci puisse réduire ses émissions de gaz à effet de serre. « Il reste encore beaucoup à faire », reconnaît l’ISFE. Autre préoccupation : l’adoption le 18 janvier 2023 par le Parlement européen (6) de la résolution sur « la protection des consommateurs en matière de jeux vidéo en ligne » (7), notamment mineurs. Le rapport (8) de l’eurodéputée Adriana Maldonado López, membre l’Imco, commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, en est à l’origine. La balle est dans le camp de la Commission européenne et du Conseil de l’UE. L’ISFE et la Fédération européenne des développeurs de jeux vidéo (EGDF) s’en inquiètent : « Nous sommes préoccupés par les appels à une réglementation plus stricte de tous les achats dans le jeu [in-game ou in-app, ndlr], ce qui aura une incidence sur la capacité de toutes les entreprises de jeux vidéo – petites et grandes – à financer leurs créations au profit des joueurs européens, et cela peut empêcher de nombreux jeux européens d’être disponibles gratuitement » (9). Et il y a de quoi : aux Etats-Unis, la FTC a confirmé le 13 mars (10) la lourde amende infligée à Epic Games, éditeur de « Fortnite », qui doit payer 520 millions de dollars pour avoir incité abusivement les gamers(les mineurs étant friands de loot boxes entre autres) à dépenser in-appavec la monnaie virtuelle V-Buck (11). En Europe, la résolution « Maldonado López » exige un gameplay plus responsable et « des informations plus claires sur le contenu, les politiques d’achat et la tranche d’âge ciblée par les jeux », en prenant modèle sur le système européen d’évaluation Pegi (Pan European Game Information) créé il y a 20 ans par l’ISFE – Simon Little étant aussi PDG de la société bruxelloise Pegi SA – et déjà utilisé dans 38 pays, dont la France. Gaming et e-sport : soft power de l’UE Autre front pour le lobby de l’industrie du jeu vidéo : l’esport, à la suite d’une autre résolution du Parlement européen sur « le sport électronique [e-sport] et les jeux vidéo » (12) adoptée le 10 novembre 2022 sur la base du rapport (13) porté cette fois de l’eurodéputée Laurence Farreng (commission de la culture et de l’éducation). Elle appelle à « promouvoir le fair-play, la non-discrimination, […] l’antiracisme, l’inclusion sociale et l’égalité entre les hommes et les femmes ». L’industrie vidéoludique a du pain sur la planche. @

Charles de Laubier

Game over Stadia, place au Cloud Gaming de Netflix

En fait. Le 18 janvier, Google fermera son service de jeux en streaming Stadia faute d’avoir séduit suffisamment d’utilisateurs. Mais la « plateforme technologique sous-jacente » pourrait servir à YouTube, Google Play ou à la réalité augmentée, voire à un « partenaire industriel ». Pourquoi pas Netflix ? En clair. Stadia est mort, vive Netflix Cloud Gaming ? Stadia ne pouvait sérieusement pas devenir le « Netflix » du jeu vidéo, en raison d’un catalogue de titres insuffisant. Mais aussi parce que Netflix lui-même a commencé à se diversifier en proposant des jeux vidéo pour mobiles et surtout à étudier – comme l’a annoncé en octobre dernier à TechCrunch (1) Mike Verdu, le Monsieur « jeux vidéo » de la plateforme de SVOD – le lancement d’une offre de Cloud Gaming. Edition Multimédi@ se demande donc si Google ne va pas apporter à Netflix sa plateforme technique jusqu’alors utilisée par Stadia. « La plateforme technologique sous-jacente qui alimente Stadia a fait ses preuves à grande échelle et transcende le jeu », avait expliqué en septembre dernier Phil Harrison, vice-président chez Google et directeur général de Stadia. Et en précisant ceci : « Nous voyons des occasions évidentes d’appliquer cette technologie à d’autres parties de Google, comme YouTube, Google Play et à nos efforts de réalité augmentée (RA), ainsi que de la mettre à la disposition de nos partenaires de l’industrie ». Netflix sera-t-il un partenaire industriel ? La firme de Los Gatos pourrait réussir là où la firme de Mountain View a échoué, surtout si la seconde devait prêter main forte à la première. Cela relève de la spéculation, mais ce partenariat ferait sens. Une chose est sûre : Google jette l’éponge au moment où Netflix se prépare à lancer son « Stadia », tout en investissant dans la production de jeux vidéo. Coïncidence ? Contacté, Mike Verdu chez Netflix ne nous a pas répondu. Face à des géants bien installés dans le Cloud Gaming comme Sony, Microsoft et Nintendo, il sera difficile – comme l’a montré Stadia – de s’imposer. Comme annoncé le 29 septembre 2022 par Phil Harrison, Stadia sera donc inaccessible à partir du 18 janvier. C’est sur un constat d’échec que la firme de Mountain View s’est résolue à fermer le service qu’elle avait lancé en grande pompe le 19 novembre 2019, il y a un peu plus de trois ans (2). « Stadia n’a pas gagné l’adhésion des utilisateurs autant que nous l’espérions », avait justifié le patron de la plateforme à l’automne dernier (3). Les joueurs seront remboursés de la plupart de leurs achats (4). Si le catalogue de Stadia s’est étoffé avec plusieurs centaines de jeux, il n’a jamais été satisfaisant pour les gamers qui lui reprochaient une offre très réduite de blockbusters de type « AAA ». @