Streaming illicite : l’aveu de faiblesse de l’Hadopi

En fait. Le 12 septembre, l’Hadopi a publié une délibération de son collège datée de la veille sur la lutte contre les sites de streaming et de téléchargement direct illicites. L’Hadopi approuve le rapport « MIQ » (implication des intermédiaires du Net) mais ne peut le mettre en oeuvre « à droit constant ».

En clair. La délibération de l’Hadopi datée du 11 septembre est, en creux, un aveu de faiblesse face aux sites de streaming et de direct download (DDL) pour lesquels la loi éponyme de 2009 ne l’a pas « mandatée » pour lutter contre – à la différence des sites de peer-to-peer (P2P) visés, eux, par la réponse graduée. Le collège de l’Hadopi estime en effet qu’« une partie des recommandations du rapport (1) de Mireille Imbert- Quaretta [« MIQ », ndlr] peut être mise en oeuvre à droit constant ». Autrement dit, l’autorité de la rue de Texel ne peut instruire de dossiers de contrefaçon liés au streaming et au téléchargement direct – qu’il s’agisse de particuliers ou de sites Internet. Car sa commission de protection des droits (CPD) – présidée par MIQ
elle-même – n’est pas habilitée par la loi actuellement en vigueur à le faire.
Résultat : l’Hadopi n’apparaît toujours pas comme une menace directe pour non seulement les internautes, dont certains vont sur les sites de streaming ou de DDL illicites pour notamment leurs films et séries (2), mais aussi les éditeurs de ces sites soupçonnés de violation « massive » des droits d’auteur. La délibération du 11 septembre s’en tient donc à une phase préparatoire, sans conséquence immédiate pour les sites pirates relevant du streaming ou du DDL. C’est pourquoi Eric Walter, secrétaire général de l’Hadopi, est limité à ce stade à : « mettre en place un recensement fiable [des sites pirates] », « définir des protocoles décrivant les actions pour assécher [de ces sites] », « établir une cartographie des différentes technologies de reconnaissance de contenus », « développer la coopération avec les divers services de l’Etat ».

Il ne s’agit donc pas du lancement d’une action de lutte, par l’Hadopi, contre ces
sites « massivement contrefaisants ». Le plus important réside en fait dans la
« coopération » que va apporter l’Hadopi aux « divers services de l’Etat compétents », comprenez : des juridictions compétentes et/ou spécialisées pour des actions au pénal pour contrefaçon, qui peuvent à leur tour saisir des services d’enquête spécialisés de l’Etat comme l’OCLCTIC, la gendarmerie ou encore la douane judiciaire (SNDJ). Mais, comme l’a constaté le rapport MIQ, « la répression pénale montre ses limites au regard du [faible] nombre de condamnations prononcées » et « se heurtent à la difficulté particulière de lutter contre des faits commis sur Internet ». @

Manuel Valls fut contre l’Hadopi : il est aujourd’hui pour la réponse graduée et la répression contre le piratage

Pour la seconde fois depuis qu’il est Premier Ministre, Manuel Valls a obtenu la confiance de l’Assemblée nationale. Mais s’il est un sujet sur lequel le chef du gouvernement a bien changé, c’est sur la lutte contre le piratage – à la satisfaction du monde de culture. C’est le retour en grâce de l’Hadopi.

Par Charles de Laubier

Manuel Valls DR« Nous avons sans doute sous-estimé l’impact du piratage de masse. Il est pourtant une vraie source d’appauvrissement pour l’ensemble du secteur de la création. La réponse graduée garde toute son actualité pour lutter contre les pratiques illégales sur les sites utilisant le peer-to-peer », a lancé Manuel Valls (photo), la veille de son grand oral devant l’Assemblée nationale pour obtenir la confiance de son second gouvernement en cinq mois (1). C’était devant un parterre très sélect du monde de la Culture, le 15 septembre dernier, à l’occasion de l’inauguration d’une exposition au Grand Palais et
en présence de Fleur Pellerin, nouvelle ministre de la Culture et de la Communication.

Streaming : le Premier ministre fait sien le rapport MIQ
Qu’il est loin le temps où celui qui est devenu Premier ministre tenait un tout autre discours sur la lutte contre le piratage. « Le projet de loi Hadopi est attentatoire aux libertés fondamentales et n’apportant aucune réponse aux besoins de financement
des créateurs », avait-il signé dans un appel du 17 juin 2008 paru dans Libération.
L’année suivante, il avait encore fustigé la loi Hadopi dans un discours prononcé le 29 juin 2009 au Théâtre Michel, alors que le premier volet de cette loi controversée venait tout juste d’être promulgué : « La loi Hadopi a révélé au grand jour l’incapacité du pouvoir en place [Nicolas Sarkozy et François Fillon à l’époque, ndlr], et pas seulement, à saisir les enjeux et les évolutions technologiques de notre époque » (2).
Puis, cette fois lors des primaires socialistes où il était candidat à l’investiture du PS pour la présidentielle, il déclarait le 8 octobre 2011 sur son blog de campagne Valls2012.org : « Je n’ai jamais tergiversé sur l’abrogation nécessaire de cette loi qui induit la répression, soldée par une sanction pénale, administrative et financière ». Celui qui fut député-maire d’Évry (Essonne) durant dix ans (2002 à 2012), qui se disait en plus favorable à une « contribution créative adaptée » à défaut de licence globale (3), a donc changé d’avis et renié ses convictions-là, maintenant qu’il est Premier ministre depuis le 31 mars. Aujourd’hui, il ne s’agit plus de discréditer la loi Hadopi – laquelle a certes entre temps été amputée de la coupure de l’accès à Internet, comme l’avait profit François Hollande. Bien au contraire : « Mais il faut aussi s’attaquer aux autres vecteurs de piraterie en se concentrant sur ceux qui diffusent massivement des oeuvres. Le rapport de Mireille Imbert-Quaretta a ouvert des pistes de travail intéressantes, impliquant notamment une autorégulation des opérateurs de l’Internet », a-t-il poursuivi dans son discours au Grand Palais.

Légiférer à nouveau contre le piratage
Mireille Imbert-Quaretta (« MIQ »), qui est au sein de l’Hadopi la présidente de la commission de protection des droits (CPD), à savoir la dernière courroie de transmission avant l’envoi des supposés pirates récidivistes devant la justice, a remis
le 12 mai dernier son rapport sur « les moyens de lutte contre le streaming et le téléchargement direct illicites » (4). MIQ y préconise d’impliquer les intermédiaires de l’Internet à la lutte contre les sites de streaming et de téléchargement direct illicites :
les moteurs de recherche en déréférençant les liens incriminés, les régies publicitaires en ne passant plus d’annonces sur ces sites, ou encore les fournisseurs de systèmes de paiement en empêchant tout règlement.
Manuel Valls a donc clairement dit que le rapport MIQ fera l’objet de transpositions législative : « Je ne doute pas que le Parlement – et je salue Patrick Bloche, le président de la commission des Affaires culturelles à l’Assemblée nationale – s’en saisira, et que Fleur Pellerin [ministre de la Culture et de la Communication], déjà une fine connaisseuse, ouverte au monde, moderne, qui n’est pas repliée sur elle-même (…), en fera une priorité de son action ». Ainsi, le Premier ministre compte bien sur Fleur Pellerin, qui fut ministre déléguée chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique (mai 2012 à avril 2014), pour réhabiliter l’Hadopi. Reste à savoir si elle fera sienne le projet de loi « Création », dont la première mouture avait été esquissée par Aurélie Filippetti (5) avant d’être repoussée à 2015.
Quoi qu’il en soit, le discours en faveur d’un élargicement de la lutte contre le piratage au streaming redonne du baume au coeur des industries culturelles, comme le montre l’Association des producteurs de cinéma (APC) qui « salue la volonté du Premier Ministre de lutter contre le piratage des oeuvres sur les réseaux électroniques » et « se félicite que cela soit désormais une priorité » – pour peu que, selon elle, les ministères de la Culture, de la Justice et de l’Intérieur placent « ce combat au coeur de leurs priorités ». De son côté, la SACD demande à voir : « On jugera l’arbre à ses fruits », a écrit son DG Pascal Rogard sur son blog. Cependant, Manuel Valls a dit qu’il ne s’en tiendra pas à la lutte contre le piratage. « Il faut ensuite encourager l’offre légale. Je connais ces débats ; j’y ai participé et je suis ici sous la surveillance d’avis très différents [sourire du ministre]… Les acteurs français de l’audiovisuel et du numérique doivent travailler ensemble pour offrir une alternative forte aux services des acteurs extra-européens ». Car, pour le Premier ministre, « l’offre culturelle ne peut être dans les mains exclusives de géants tels qu’Amazon ou Netflix, aussi attractifs pour les consommateurs que soient leur offre (et nous y participons tous) ». Selon lui, il y a déjà un grand déséquilibre entre d’une part les créateurs et de l’autre les diffuseurs et distributeurs de l’Internet. « Diffuser largement ne doit pas revenir à bafouer l’exception culturelle ou à piétiner les droits des auteurs et des créateurs. Or, cette menace existe ; ne nous le cachons pas. (…) Nous devons bien sûr savoir rapidement nous adapter en faisant tout d’abord mieux contribuer les acteurs de l’Internet à la création. L’enjeu est européen », a-t-il affirmé.
Au cabinet de Fleur Pellerin, une conseillère a justement été officiellement nommée par arrêté publié au J.O. du 11 septembre dernier « chargée du financement de la création, du développement de l’offre légale et du droit d’auteur ». Dans la dénomination à rallonge de sa fonction, l’ordre des trois préoccupations on ne plus sensibles n’est sans doute pas anodine. C’est en tout cas sur elle, Emilie Cariou, qui fut conseillère juridique et fiscale de Fleur Pellerin à l’Economie numérique, puis directrice adjointe en charge du budget et des financements au CNC (6), que le lobbying des ayants droit et des acteurs du Net va s’exercer au cours des prochaines semaines. « Emilie Cariou aura
un rôle très important dans l’écriture de la future loi Création », a confié à Edition Multimédi@ un juriste des indutries culturelles. Elle était par exemple présente lorsque Fleur Pellerin avait été invité le 8 octobre 2012 par la SACD, société de gestion collective des droits dans l’audiovisuel. Elle etait aussi à la soirée de lancement de Netflix en France le 15 septembre…

Emilie Cariou, une conseillère très courtisée
Si le financement de la création est en tête de ses attributions, la fiscalité du numérique n’est pas loin. En tant qu’ancienne élève de l’École nationale des impôts (7) et avec ses treize ans passés au ministère de l’Économie et des Finances, Emilie Cariou s’y intéresse aussi de près : elle fut auditionnée pour le rapport « Collin & Colin » de 2013 sur la fiscalité de l’économie numérique, ainsi que pour celui du sénateur Philippe Marini en 2012. Reste maintenant au Premier ministre à ne pas décevoir les tenants de la répression accrue contre le piratage sur Internet. @

La lutte contre le piratage sur Internet a dix ans

En fait. Le 15 juillet 2004, il y a 10 ans, se réunissaient à Bercy fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et industries culturelles en vue de signer la charte de lutte contre le piratage en ligne de la musique, de films ou de jeux vidéo. La mention « Le piratage nuit à la création artistique » a aussi 10 ans.

SarkozyEn clair. La mention « Le piratage nuit à la création artistique », que les FAI ont l’obligation d’indiquer dans leurs offres haut débit et a fortiori très haut débit, a maintenant 10 ans. Elle est imposée aux opérateurs Internet par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (1), promulguée au J.O. le 22 juin 2004.
« Lorsque les [opérateurs télécoms et FAI] invoquent, à des fins publicitaires, la possibilité qu’elles offrent de télécharger des fichiers dont elles ne sont pas les fournisseurs, elles font figurer dans cette publicité une mention facilement identifiable et lisible rappelant que le piratage nuit à la création artistique », stipule en effet l’article 7 de cette loi.

Charte anti-piratage « de l’Elysée », avant l’Hadopi
Force est de constater que les fournisseurs de (très) haut débit se plient toujours, plus ou moins, à cette obligation légale. Cette mention fut reprise parmi les engagements
de la charte anti-piratage signée il y a aussi 10 ans, le 28 juillet 2004 à L’Olympia, par Nicolas Sarkozy (photo) – à l’époque ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie – et 25 autres parties prenantes.
Cette « Charte d’engagements pour le développement de l’offre légale de musique en ligne, le respect de la propriété intellectuelle et la lutte contre la piraterie numérique » fut élaboré par Bercy le 15 juillet 2004, lors d’une réunion entre les FAI et les industries culturelles.

Les FAI s’étaient alors engagés non seulement à « adresser, à la demande (des ayants droits), un message personnalisé à tout abonné offrant ou téléchargeant illégalement des fichiers protégés », mais aussi à prévoir la « suspension de l’abonnement ».
C’est une « réponse graduée », privée celle-là, cinq ans avant la loi Hadopi. Leur était également demandé de « supprimer sur les portails (…) les liens hypertextes et les référencements vers des sites violant les droits de propriété intellectuelle ». Une autorégulation que le rapport MIQ souhaite remettre au goût du jour en impliquant cette fois moteurs de recherche (2), publicitaires et systèmes de paiement (3).
On connaît la suite. Elu président de la République le 6 mai 2007, Nicolas Sarkozy rêve d’installer des radars sur le Net (4). Il confie alors à Denis Olivennes une mission de lutte contre le piratage en ligne. Ces travaux aboutiront aux accords dits de l’Elysée signés le 27 novembre 2007. Ils sont à l’origine des deux lois Hadopi de 2009. Depuis, la coupure Internet à été supprimée. @

Piratage de livres numériques : le Syndicat national de l’édition (SNE) passe à l’action

Le SNE, qui regroupe 660 maisons d’éditions, tenait son assemblée générale le 26 juin dernier. S’il détaille bien deux solutions « mutualisées » pour déjouer la contrefaçon numérique des livres, le syndicat est en revanche très discret sur l’action au pénal depuis 2012 contre le site Team AlexandriZ.

Par Charles de Laubier

Isabelle Ramond-Bailly

Isabelle Ramond-Bailly, SNE et Editis

Le SNE reste toujours actif dans sa lutte contre le piratage, avec
le suivi de ce procès au long cours au pénal contre un site de téléchargement illicite [Team AlexandriZ, ndlr] et le déploiement
de l’offre Hologram Industries », a indiqué Isabelle Ramond-Bailly (photo), présidente de la commission Juridique du Syndicat national de l’édition (SNE) et directrice déléguée d’Editis en charge des Affaires juridiques.
Sollicitée par Edition Multimédi@ pour en savoir plus sur l’état d’avancement de l’action intentée au pénal en novembre 2012 par le SNE et six grands éditeurs français – selon nos informations, Hachette, Editis, Gallimard, Albin Michel, La Martinière et Actes Sud – contre le site web Team AlexandriZ accusé de contrefaçon numérique de livres, Isabelle Ramond-Bailly nous a opposé le secret de l’instruction pénale (1).

Procès au pénal et empreinte numérique
Bien que le site incriminé – se présentant au moment des faits comme le « n°1 sur les ebooks FR » – ait cessé de fonctionner depuis fin août 2013, la procédure judiciaire se poursuit (2). « Les responsables du site ont été mis en examen pour délit de contrefaçon et le parquet poursuit actuellement son travail d’enquête pénale. Ils risquent trois ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende (3). Les ayants droits du livre préfèrent de plus en plus, à l’instar de ceux de la musique, intenter des actions au pénal plutôt qu’au civil car cela fait plus peur aux pirates et en dissuade d’autres », nous a indiqué sous couvert d’anonymat un proche du dossier.
Team AlexandriZ, dont le nom faisait référence à la célèbre bibliothèque d’Alexandrie (détruite sous l’Antiquité), était un collectif d’internautes qui proposait en ligne depuis 2009 des livres numériques dont ils retiraient préalablement les DRM et toute empreinte numérique. Des centaines d’ebooks étaient ainsi proposés gratuitement, avec possibilité de faire un don. L’équipe de pirates à l’origine du site sont restés très discrets, comme le sont aujourd’hui les maisons d’éditions sur leur procès commun au pénal. Team AlexandriZ avait le souci de la qualité, au point de corriger des coquilles laissées par certains éditeurs (4) ! Selon nos constatations, le site Teamalexandriz.org renvoie maintenant directement à un article de notre confrère ActuaLitté, daté du 7 septembre 2013 et intitulé « Ebooks : La Team Alexandriz, terreur de l’édition, suspend ses activités ».

Depuis qu’il a confirmé fin 2012 avoir « décidé, au nom de la défense de l’intérêt collectif de ses adhérents d’agir en contrefaçon au côté de six maisons d’édition contre un site Internet », le SNE n’évoquait plus cette affaire pénale, jusqu’à ce qu’Isabelle Ramond-Bailly n’y fasse allusion lors de l’AG. C’est moins pour une question de secret de l’instruction pénale que par souci d’une communication moins « judiciaire » que le syndicat préfère détailler l’autre volet de sa lutte contre le piratage de livres sur Internet. Il s’agit des deux « solutions mutualisées » que le SNE a adoptées il y a un an maintenant (5). La première est un service d’empreinte numérique, proposée aux éditeurs membres par la société française Hologram Industries, qui « envoie automatiquement des notifications en cascade aux divers acteurs de la mise en ligne des contenus (sites de partage, sites indicateurs) et contrôle également que le retrait
a bien eu lieu » (6). Selon nos informations, ce service n’a pas encore démarré car, nous explique Julien Chouraqui, juriste au SNE, « l’une des conditions est que l’ensemble des engagements des adhérents ayant souscrits au service d’Hologram Industries atteigne au moins un total de 3.990 euros par mois (7), ce qui devrait être
le cas dans quelques semaines ». C’est en effet avec le ralliement d’Eden livres, plateforme de distribution de livres numériques (8) commune à Gallimard, La Martinière, Flammarion et Actes Sud, à cette solution d’empreinte numérique que le seuil sera franchi. Le syndicat devrait communiquer en septembre sur le démarrage effectif du dispositif de lutte contre le piratage d’ebooks. Lorsque le montant total mensuel atteindra 12.500 euros par mois, le coût au livre de cette technologie anti-piratage sera inférieur à 1 euros (84 centimes), que la Sofia (9) subventionne partiellement (pour revenir à 42 centimes par livre). Cela n’empêche pas des éditeurs de choisir d’autres solutions, comme celle de l’américain Attributor pour Hachette.

Portailprotectionlivres.com ignoré des éditeurs
En revanche, aucun éditeur n’a encore testé l’autre solution anti-piratage à l’aide du site Portailprotectionlivres. com. « Contrairement à la solution Hologram, celle du portail n’est pas automatisée mais revient moins chère (environ 250 à 5000 euros par an selon le chiffre d’affaires) aux éditeurs qui souhaiteraient l’utiliser », nous indique Julien Chouraqui. Le SNE va en faire la promotion. @

Charles de Laubier

Piratage : le risque européen du « Follow the money »

En fait. Le 1er juillet, la Commission européenne a adopté deux communications « pour un meilleur respect des droits de propriété intellectuelle dans l’Union européenne et dans les pays tiers ». Est visé le piratage « à une échelle commerciale ». Parmi l’arsenal prévu : le « Follow the money ». Un ACTA bis ?

En clair. « Nous voulons cibler les intermédiaires, les sites qui violent les droits de propriété intellectuelle, plutôt que les utilisateurs finaux », a précisé la Commission européenne à Next Inpact le 20 juin dernier. En adoptant ces « nouveaux outils (non législatifs) », elle veut ainsi attaquer le piratage au portefeuille selon le principe du
« Follow the money », à savoir « priver les contrevenants agissant à une échelle commerciale de leurs revenus ». La lutte contre la contrefaçon concerne ici aussi bien les biens physiques que numériques. Comme l’ensemble des contrevenants, les sites web reconnu coupables de violation de la propriété intellectuelle seront privés de leurs ressources financières par la coopération des régies publicitaires, des prestataires de moyens de paiement ou des autres « intermédiaires » du Net. « Le plan d’action de l’UE comprendra dix actions spécifiques prévoyant une nouvelle politique en matière d’application des outils pour s’attaquer en particulier aux activités d’atteinte aux droits de propriété intellectuelle à une échelle commerciale », a indiqué la Commission européenne. Reste à savoir ce qu’elle appelle « échelle commerciale », qui reste
une notion vague et attrape-tout déjà utilisée dans le projet d’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA). Ce texte, qui avait finalement été rejeté par les eurodéputés le
4 juillet 2012 précisément à la suite d’une vague de contestation (1), précisait que « les actes commis à une échelle commerciale comprennent au moins ceux qui sont commis à titre d’activités commerciales en vue d’un avantage économique ou commercial direct ou indirect ». Ce sont les mesures pénales dans un accord commercial que fustigeaient les opposants à ce texte, dont la Quadrature du Net (2). L’ACTA prévoyait notamment que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) puissent être obligés de « divulguer rapidement au détenteur du droit des renseignements suffisants pour lui permettre d’identifier un abonné » présumé pirate.

Les deux communications de la Commission européenne s’inspirent également de trois tentatives avortée de textes « anticontrefaçon » aux Etats-Unis : SOPA (Stop Online Piracy Act), PIPA (Protect IP Act) et CISPA (Cyber Intelligence Sharing and Protection Act). Et bientôt CISA ? En France, Mireille Imbert- Quaretta, présidente de la CPD (3) de l’Hadopi, a fait sienne le principe du « Follow the money ». @