Piratage de livres numériques : le Syndicat national de l’édition (SNE) passe à l’action

Le SNE, qui regroupe 660 maisons d’éditions, tenait son assemblée générale le 26 juin dernier. S’il détaille bien deux solutions « mutualisées » pour déjouer la contrefaçon numérique des livres, le syndicat est en revanche très discret sur l’action au pénal depuis 2012 contre le site Team AlexandriZ.

Par Charles de Laubier

Isabelle Ramond-Bailly

Isabelle Ramond-Bailly, SNE et Editis

Le SNE reste toujours actif dans sa lutte contre le piratage, avec
le suivi de ce procès au long cours au pénal contre un site de téléchargement illicite [Team AlexandriZ, ndlr] et le déploiement
de l’offre Hologram Industries », a indiqué Isabelle Ramond-Bailly (photo), présidente de la commission Juridique du Syndicat national de l’édition (SNE) et directrice déléguée d’Editis en charge des Affaires juridiques.
Sollicitée par Edition Multimédi@ pour en savoir plus sur l’état d’avancement de l’action intentée au pénal en novembre 2012 par le SNE et six grands éditeurs français – selon nos informations, Hachette, Editis, Gallimard, Albin Michel, La Martinière et Actes Sud – contre le site web Team AlexandriZ accusé de contrefaçon numérique de livres, Isabelle Ramond-Bailly nous a opposé le secret de l’instruction pénale (1).

Procès au pénal et empreinte numérique
Bien que le site incriminé – se présentant au moment des faits comme le « n°1 sur les ebooks FR » – ait cessé de fonctionner depuis fin août 2013, la procédure judiciaire se poursuit (2). « Les responsables du site ont été mis en examen pour délit de contrefaçon et le parquet poursuit actuellement son travail d’enquête pénale. Ils risquent trois ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende (3). Les ayants droits du livre préfèrent de plus en plus, à l’instar de ceux de la musique, intenter des actions au pénal plutôt qu’au civil car cela fait plus peur aux pirates et en dissuade d’autres », nous a indiqué sous couvert d’anonymat un proche du dossier.
Team AlexandriZ, dont le nom faisait référence à la célèbre bibliothèque d’Alexandrie (détruite sous l’Antiquité), était un collectif d’internautes qui proposait en ligne depuis 2009 des livres numériques dont ils retiraient préalablement les DRM et toute empreinte numérique. Des centaines d’ebooks étaient ainsi proposés gratuitement, avec possibilité de faire un don. L’équipe de pirates à l’origine du site sont restés très discrets, comme le sont aujourd’hui les maisons d’éditions sur leur procès commun au pénal. Team AlexandriZ avait le souci de la qualité, au point de corriger des coquilles laissées par certains éditeurs (4) ! Selon nos constatations, le site Teamalexandriz.org renvoie maintenant directement à un article de notre confrère ActuaLitté, daté du 7 septembre 2013 et intitulé « Ebooks : La Team Alexandriz, terreur de l’édition, suspend ses activités ».

Depuis qu’il a confirmé fin 2012 avoir « décidé, au nom de la défense de l’intérêt collectif de ses adhérents d’agir en contrefaçon au côté de six maisons d’édition contre un site Internet », le SNE n’évoquait plus cette affaire pénale, jusqu’à ce qu’Isabelle Ramond-Bailly n’y fasse allusion lors de l’AG. C’est moins pour une question de secret de l’instruction pénale que par souci d’une communication moins « judiciaire » que le syndicat préfère détailler l’autre volet de sa lutte contre le piratage de livres sur Internet. Il s’agit des deux « solutions mutualisées » que le SNE a adoptées il y a un an maintenant (5). La première est un service d’empreinte numérique, proposée aux éditeurs membres par la société française Hologram Industries, qui « envoie automatiquement des notifications en cascade aux divers acteurs de la mise en ligne des contenus (sites de partage, sites indicateurs) et contrôle également que le retrait
a bien eu lieu » (6). Selon nos informations, ce service n’a pas encore démarré car, nous explique Julien Chouraqui, juriste au SNE, « l’une des conditions est que l’ensemble des engagements des adhérents ayant souscrits au service d’Hologram Industries atteigne au moins un total de 3.990 euros par mois (7), ce qui devrait être
le cas dans quelques semaines ». C’est en effet avec le ralliement d’Eden livres, plateforme de distribution de livres numériques (8) commune à Gallimard, La Martinière, Flammarion et Actes Sud, à cette solution d’empreinte numérique que le seuil sera franchi. Le syndicat devrait communiquer en septembre sur le démarrage effectif du dispositif de lutte contre le piratage d’ebooks. Lorsque le montant total mensuel atteindra 12.500 euros par mois, le coût au livre de cette technologie anti-piratage sera inférieur à 1 euros (84 centimes), que la Sofia (9) subventionne partiellement (pour revenir à 42 centimes par livre). Cela n’empêche pas des éditeurs de choisir d’autres solutions, comme celle de l’américain Attributor pour Hachette.

Portailprotectionlivres.com ignoré des éditeurs
En revanche, aucun éditeur n’a encore testé l’autre solution anti-piratage à l’aide du site Portailprotectionlivres. com. « Contrairement à la solution Hologram, celle du portail n’est pas automatisée mais revient moins chère (environ 250 à 5000 euros par an selon le chiffre d’affaires) aux éditeurs qui souhaiteraient l’utiliser », nous indique Julien Chouraqui. Le SNE va en faire la promotion. @

Charles de Laubier