Arte fête ses 30 ans et va se « déchaîner » encore plus avec sa plateforme européenne prévue à l’automne 2020

1989-2019 : il y a trois décennies, la « chaîne culturelle franco-allemande » était portée sur les fonts baptismaux par François Mitterrand et Helmut Kohl. L’utopie politique devint réalité avec le « traité interétatique » créant Arte. Grâce au numérique, elle rayonne en Europe et va lancer à l’automne 2020 sa plateforme paneuropéenne.

La décision politique de lancer « une chaîne culturelle franco-allemande » – qui s’est ensuite concrétisée par la création de l’ »Association relative à la télévision européenne », plus connue sous son acronyme Arte – a été prise il y a 30 ans, presque jour pour jour. En effet, le 31 octobre 1989, le ministre de la Culture d’alors, Jack Lang, et la ministre déléguée à la Communication, Catherine Tasca, recevaient à Paris l’Allemande Lothar Späth, à l’époque ministre-président d’un Land (1) et ministre plénipotentiaire chargé des relations culturelles avec la France.
Ce jour-là, une déclaration commune était faite « sur le principe d’une chaîne culturelle franco-allemande dont le siège serait à Strasbourg ». Sans le soutien du président français François Mitterrand et du chancelier allemand Helmut Kohl, qui ont déclaré leur soutien à ce projet audiovisuel dès 1988 à Bonn où se tenaient les 52èmes consultations franco-allemandes, Arte n’aurait sans doute jamais vu le jour. C’est ensuite le 2 octobre 1990, à la veille de la réunification allemande, que les ministres-présidents des Länder et le ministre français Jack Lang signent à Berlin le « traité interétatique » fondateur de « la chaîne culturelle européenne ». A cheval sur deux pays, Arte est une chaîne unique au monde fondée sur un principe d’indépendance, aussi bien statutaire, financière qu’éditoriale.

Producteur, Pierre-Antoine Capton mise sur les GAFAN

En fait. Le 16 septembre, le président fondateur de 3ème OEil Productions et président du directoire de Mediawan, Pierre-Antoine Capton, était l’invité d’honneur du dîner-débat du Club audiovisuel de Paris (CAVP). Producteur français, il considère les Netflix, Amazon Apple ou Facebook comme une chance.

En clair. « Contrairement au théâtre, au cinéma ou à la littérature, la télévision n’arrivait pas à exporter. Parce que nous étions très tournés vers un monde local (qu’est la télévision). Tout d’un coup, avec les plateformes (numériques), on se rend compte que nos contenus peuvent être intéressants et vus dans le monde entier », s’est enthousiasmé Pierre- Antoine Capton, fondateur il y a près de vingt ans de 3ème OEil Productions et cofondateur de Mediawan (1).
Invité le 16 septembre du Club audiovisuel de Paris (CAVP), il a cité « Dix pour cent » – produite par Mon Voisin Productions, société détenue à 60 % par Mediawan – comme étant la série française « la plus exportée et consommée dans le monde, notamment sur Netflix ». Et le documentaire « Emmanuel Macron, les coulisses d’une victoire », produit par 3ème OEil Productions, a été le plus vu aux Etats-Unis. « Avec des contenus de qualité, on arrive à trouver un intérêt à l’international. Mediawan est le plus gros producteur en primetime en Italie avec “Le nom de la rose” [produit par Palomar, racheté en début d’année par Mediawan, ndlr]. Et on compte faire la même chose dans les prochains mois en Espagne et en Allemagne. Notre ambition est de faire de Mediawan un groupe mondial depuis Paris », a affirmé PAC. Et d’ici la fin de l’année « le premier producteur de cinéma français »… Mediawan investit cette année 15 millions d’euros dans le développement de programmes destinés à être vendus à l’international. « Plusieurs nouvelles séries françaises vont être vendues prochainement à Apple, Facebook, Netflix et Amazon, a-t-il indiqué. On est en train de vivre avec la télévision ce que la musique a vécu avec le streaming. Cela change tout. On ne peut plus attendre deux ou trois ans pour produire une série ; Netflix ou Amazon nous la demande le plus rapidement possible. Cela nécessite d’industrialiser le modèle pour produire plus vite, avec les scénaristes et les auteurs. Il y a le côté hyper-attrayant de travailler pour les plateformes ». D’autant qu’avec la directive européenne SMA, les plateformes vidéo vont devoir financer la production. Et concernant la chronologie des médias (2) : «Un film vu par 50.000 spectateurs en salle n’aurait-il pas plus de succès sur une plateforme s’il est bien présenté, avance le producteur français. Une série diffusée sur une plateforme n’aurait-elle pas vocation à être au cinéma ». @

Xilam Animation fête ses 20 ans en se propulsant sur les plateformes de streaming telles que YouTube ou Netflix

Fondée par Marc du Pontavice en juillet 1999, la société Xilam Animation – aux succès comme « Oggy et les cafards » et « Zig & Sharko » – s’est hissée en tête de la production de dessins animés en France. Son catalogue est diffusé dans le monde sur des chaînes de télévision et des plateformes vidéo, YouTube dépassant les 10 % de son chiffre d’affaires.

Pour l’année de ses vingt ans, Xilam Animation s’offre une diffusion mondiale sur Netflix avec « J’ai perdu mon corps », son premier film d’animation pour un public adulte, et sur Disney+ en produisant pour la major « Chip’n’Dale », une série reprenant ses personnages Tic et Tac. Ces deux plateformes de SVOD américaines vont ainsi renforcer la visibilité outre-Atlantique du premier producteur français de dessins animés et donner une nouvelle impulsion à sa stratégie de diffusion numérique. Riche d’un catalogue de plus de 2.000 épisodes et de quatre longs métrages, la société de Marc du Pontavice (photo), dont il est le PDG et premier actionnaire (avec 36,4 % du capital et 53,8 % des droits de vote), diffuse partout dans le monde sur des chaînes de télévision et sur des plateformes de streaming. Ces dernières ont généré en 2018 environ 40 % des ventes du catalogue. Mais c’est sur YouTube que Xilam Animation est pour l’instant le plus exposé, cumulant par mois plus de 600 millions de vidéos vues. Rien qu’en 2018, son audience sur la plateforme vidéo de Google a totalisé plus de 4 milliards de vues. Ce qui a contribué à franchir la barre des 10 milliards de vues sur YouTube au bout de cinq ans de présence. Xilam y édite aujourd’hui une trentaine de chaînes vidéo pour toute la famille, comme « Zig & Sharko » qui compte plus de 5,7 millions d’abonnés ou « Oggy » plus de 5 millions d’abonnés – sur un total dépassant aujourd’hui les 15 millions d’abonnés (1).

Bienvenue Monsieur Dominique Boutonnat au CNC !

En fait. Le 25 juillet, est paru au Journal Officiel le décret de nomination de Dominique Boutonnat à la présidence du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). L’accueil qui lui a été réservé a été plutôt glacial de la part du 7e Art français qui va pourtant devoir se moderniser sans tarder.

En clair. C’est la fin de « l’exception culturelle française » qui était souvent prétexte à ne rien changer dans le petit monde du cinéma français, trop souvent arc-bouté sur des règles de financement des films devenues obsolètes et de chronologie des médias trop figée. La nomination d’un professionnel – producteur et spécialiste du financement de la création cinématographique et audiovisuelle – et non d’un haut fonctionnaire de l’Etat comme ses prédécesseurs est sans doute une chance pour le CNC et le 7e Art français. Et ce, n’en déplaise aux nombreux cinéastes et techniciens du cinéma qui ont été à l’origine de pas moins de trois tribunes assassines publiées courant juillet (notamment dans Le Monde et dans Le Film Français), dont une lettre ouverte au président de la République. Emmanuel Macron avait finalement arbitré en faveur Dominique Boutonnat au lieu de reconduire une Frédérique Bredin pourtant désireuse de faire un troisième mandat (1). Le nouveau président du CNC est sans doute la bonne personne au bon moment – à une période charnière pour toute la filière. Diversifier les sources de financement des films apparaît indispensable face aux « interrogations sur la capacité d’investissement des diffuseurs [les chaînes de télévision en général et le grand pourvoyeur de fonds Canal+ en particulier, ndlr] au moment même de la montée en puissance fulgurante des plateformes numériques [Netflix, Amazon Prime Video et autres services vidéo en OTT, ndlr], qui annonce un tournant majeur pour la production et la distribution de contenus ». C’est ce que soulignait d’emblée Dominique Boutonnat dans son « rapport sur le financement privé de la production et de la distribution cinématographiques et audiovisuelles » (2), daté de décembre 2018 mais rendu public en mai dernier – juste avant le Festival de Cannes. Un pavé dans la marre. Les plateformes de SVOD bousculent le monde des films de cinéma à grand renfort de séries exclusives, deux types de contenus que le CNC devra concilier. « Cette exclusivité est absolue, c’est-à-dire qu’elle déroge aux principes habituels de la chronologie des médias qui veut qu’un film de cinéma connaisse sa première exploitation en salles », souligne Dominique Boutonnat. La transposition de la directive SMA (3) impliquant les plateformes vidéo dans le financement des oeuvres et la future loi audiovisuelle promettent d’être disruptives. @

Netflix se défend d’introduire de la publicité entre épisodes, seulement de la recommandation de séries

Et si le numéro un mondial de la SVOD se mettait à vendre des espaces de publicité entre les épisodes pour diversifier ses revenus ? C’est ce que craignent certains de ses 130 millions d’abonnés, surpris de voir apparaître en août de l’auto-promotion de séries entre des épisodes. Netflix confirme le test.

Reed Hastings (photo), PDG fondateur de Netflix, a toujours vanté les mérites de son modèle économique sans publicité. C’est même un des fondamentaux de l’entreprise de Los Gatos (Californie) et surtout un confort appréciable pour ses 130 millions d’abonnés dans le monde, lesquels échappent ainsi
– le temps d’un épisode ou de plusieurs d’affilé (1) – à l’intrusion de messages publicitaires qui saucissonnent de plus en plus les films à la télévision.