Ayant pivoté dans la vidéo en streaming (OTT), Netgem se démarque des « box » et de la SVOD

Permettre aux internautes de « ne pas être dépendant de la box » de leur fournisseur d’accès à Internet et d’avoir une plateforme de vidéo à la demande « sans abonnement et sans engagement ». Telle est l’ambition réaffirmée par Netgem, dont la filiale Vitis lance un service de VOD en OTT : Viva.

(Lors de la présentation de ses résultats semestriels le 30 juillet, soit après la parution de cet article dans EM@, Netgem a relevé ses objectifs financiers 2021)

Le 5 juillet dernier, le français Netgem a annoncé – via sa marque Videofutur – le lancement d’une nouvelle plateforme de vidéo à la demande (VOD) « dédiée au cinéma, sans abonnement et sans engagement », destinée à « la génération streaming qui souhaite voir en streaming ses films préférés en toute liberté, sur tous ses écrans et sans être dépendant de sa box opérateur ». Autrement dit, Netgem se positionne de plus en plus en OTT indépendamment des « box TV » des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) que sont Orange, Bouygues Telecom, SFR, Free et d’autres – dont sa propre box Videofutur.

Vers la fin des offres triple play ?
Surfant sur l’essor de la fibre optique et de la 5G, Netgem table sur son développement en OTT (Over-The-Top) sans avoir de compte à rendre aux opérateurs télécoms. « En 2020, le groupe a démontré que le pivot entamé depuis plusieurs années vers le métier de fournisseur d’accès à la vidéo en streaming (OTT) porte ses fruits », se félicite Netgem dans son rapport financier 2020, publié fin avril dernier. Grâce au très haut débit et à son modèle économique basé sur des revenus récurrents (90 % de son activité), l’entreprise cofondée par Joseph Haddad (photo) – président du conseil d’administration – a réussi malgré la crise sanitaire à générer l’an dernier un chiffre d’affaires de 30,2 millions d’euros en croissance de 20 %, pour un résultat net de 4,1 millions d’euros (contre 6,9 millions de pertes nettes l’année précédente). Cette performance est due à l’intégration-consolidation depuis début 2020 de sa filiale Vitis qui opère, en tant que fournisseur d’accès à la fibre optique, l’offre « box/VOD » Videofutur. Vitis, qui a ainsi contribué à hauteur de 54,9 % du chiffre d’affaires 2020 du groupe, est un FAI triple play sur le marché de la fibre optique en France, dans les zones géographiques couvertes par les réseaux d’initiative publique (RIP) des collectivités territoriales.
La société Vitis, toujours contrôlée par Netgem, a été fondée il y a cinq ans par Mathias Hautefort – l’actuel directeur général du groupe – avec le soutien de la Caisse des dépôts et du groupe Océinde d’origine réunionnaise. Mais plus globalement, Netgem estime qu’« au moment où les consommateurs européens basculent massivement vers la fibre, de plus en plus questionnent le bien fondé des packages 3P [comprenez le triple play des “box”, ndlr] intégrant des centaines de chaînes linéaires proposés par les opérateurs télécoms ». Le groupe français, qui est aussi présent en Grande-Bretagne, à Singapour, au Mexique ou en Australie, parie sur l’extension du phénomène cord-cutting déjà observé aux Etats-Unis (où les abonnés ne veulent plus dépendre d’un câblo-opérateur pour accéder à la télévision ou à la VOD/SVOD) en proposant « des services autonomes pour accéder à la télévision en streaming ». Son service NetgemTV est ainsi proposé directement au client final et/ou en partenariat avec des opérateurs télécoms – ces derniers s’étant résolus à proposer des offres one play ou double play (accès à la fibre et téléphonie sans télévision) à des prix plus agressifs pour amortir plus rapidement leurs lourds investissements dans leurs infrastructures très haut débit. La 5G devrait aussi accélérer le mouvement.
Aujourd’hui, le groupe encore détenu par la famille Haddad à hauteur de 24,7 % du capital et 31,5 % des droits de vote, déploie ses services NetgemTV à l’international et Videofutur (via Vitis) sur l’Hexagone. « En France, le modèle de distribution du groupe s’appuie sur la distribution direct-toconsumer de NetgemTV en bundle avec la revente d’un accès fibre sur zone locale sous la marque Videofutur et sur une distribution indirecte via des partenaires opérateurs télécoms », est-il expliqué dans le rapport financier 2020. L’ambition plus large est de se rendre indispensable dans les foyers, quitte à rayonner dans toutes les pièces de maison avec la technologie mesh (maillage) afin d’améliorer la qualité du Wifi à domicile grâce à une solution baptisée SuperStream. Netgem entend ainsi s’imposer en tant qu’« opérateur OTT pour la maison connectée », selon les propres termes de Mathias Hautefort.

330.000 abonnés francophones en Europe
C’est dans le cadre de cette stratégie de disruption qu’a été lancée en France la plateforme « Viva by Videofutur », dont le catalogue de 15.000 programmes (films, séries, documentaires, animations, …) – dont de nombreux films français (1) mais aussi américains (2) – va être référencé sur le moteur de l’offre légale de VOD du CNC (3) et intégrera le Pass Culture (4) d’ici fin juillet. En tant que plateforme VOD (à la location ou à la vente), les nouveaux films pourront y être proposés quatre mois après leur sortie en salle de cinéma. A ce jour, le groupe revendique – NetgemTV et Videofutur compris – plus de 330.000 abonnés en France et dans des pays francophones comme aux Luxembourg (Post) ou en Suisse (Net+). @

Charles de Laubier

Le magnat du câble et des médias John Malone, qui vient d’avoir 80 ans, consolide son empire « Liberty »

L’Américain multimilliardaire John Malone, « modèle » pour Patrick Drahi dont il est le « protégé », a fêté ses 80 ans le 7 mars dernier. Président de Liberty Media, de Liberty Global et de Qurate Retail (ex-Liberty Interactive), le « cow-boy du câble » poursuit sa stratégie de convergence aux Etats-Unis et en Europe.

(Une semaine après la parution de cet article dans Edition Multimédi@ n°255, AT&T a annoncé le 17 mai 2021 qu’il allait fusionner sa filiale WarnerMedia avec le groupe de télévision Discovery, lequel est détenu à 21 % par John Malone).

John Malone (photo) est devenu une légende dans les télécoms et les médias, aux Etats-Unis comme en Europe. A 80 ans tout juste, ce stratège hors pair préside toujours son empire « Liberty », composé aujourd’hui de Liberty Global dans les télécoms internationales (11 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2020), de Liberty Media dans les contenus (8 milliards), de Qurate Retail (10 milliards) dans les services Internet, et de Liberty Broadband avec sa participation dans le câbloopérateur Charter aux Etats-Unis et en Alaska. Le tycoon contrôle tous ces groupes de télécoms, de médias et du numérique en tant que principal actionnaire. Classé 316e personne la plus riche du monde, avec une fortune professionnelle estimée par Forbes à près de 8 milliards de dollars, John Malone détient ainsi 30 % de Liberty Global 47 % de Liberty Media, 40 % de Qurate Retail (ex-Liberty Interactive), 48 % de Liberty Broadband, sans oublier environ 21 % du groupe de média américain Discovery, présent aussi en Europe. Réputé libertarien – « directeur émérite » du think tank libertarien Cato Institute –, John Malone fut surnommé le « cowboy du câble », lorsque ce ne fut pas « Dark Vador » de façon plus méchante, voire « Mad Max » ! Sa succession ? En 2008, l’octogénaire a fait entrer le cadet de ses deux fils, Evan (photo suivante), au conseil d’administration de Liberty Media en tant que directeur. Il apparaît comme le successeur potentiel de l’empire « Malone ».

La nouvelle Commission européenne veut présenter en mai 2015 une stratégie numérique « équilibrée »

Andrus Ansip, vice-président de la Commission européenne en charge du Marché unique numérique, et Günther Oettinger, commissaire à l’Economie numérique et à la Société, ont six mois pour trouver un « équilibre » entre les intérêts des consommateurs et ceux des opérateurs télécoms.

Andrus Ansip

Les consommateurs européens et les opérateurs télécoms ont des intérêts divergents. Les premiers veulent garder des prix bas d’accès
aux réseaux fixe et mobile auprès d’un grand nombre d’opérateurs télécoms en concurrence, avec la garantie de la neutralité du Net.
Tandis que les seconds demandent à être moins nombreux sur un marché consolidé et à pouvoir proposer des services aux tarifs différenciés, dont certains plus élevés en fonction d’une meilleure qualité de la bande passante.

L’Europe, trop « consumériste » ?
Ce sont ces deux approches opposées qui se sont notamment retrouvées au coeur des débats de deux conférences sur le monde numérique organisées en même temps les 19 et 20 novembre derniers : le DigiWorld Summit de l’Idate à Montpellier et la TMT Conference de Morgan Stanley à Barcelone.
Ces deux événements ont permis aux opérateurs télécoms de faire passer leur message auprès de la nouvelle Commission européenne – dont Andrus Ansip (photo), son vice-président en charge du Marché unique numérique – et avant le Conseil de l’Union européenne réuni à Bruxelles le 27 novembre. Les ministres des Vingt-huit en charge des télécoms (1) ont en effet examiné ce jour-là le projet de cadre réglementaire « Continent connecté » (2).

Bien que leurs revenus se soient en moyenne stabilisés (après une baisse de 15 % depuis 2008), avec une reprise espérée l’an prochain grâce à la 4G, et que leurs marges restent encore confortables (15 % à 30 %), les opérateurs télécoms européens (Orange, Deutsche Telekom, Telefonica, Vodafone, …) se plaignent toujours de leur sort auprès de la Commission européenne dont ils jugent la politique « trop consumériste ». Selon les opérateurs historiques européens, réunis depuis vingt ans au sein de l’organisation de lobbying ETNO (3) basée à Bruxelles, il y a trop d’opérateurs télécoms (y compris en France depuis, selon eux, l’arrivée de Free Mobile en 2012), trop de baisses de prix imposés (par la concurrence elle-même, par l’Europe sur les frais d’itinérance mobile, par la régulation des coûts de terminaison d’appel, …), et trop de mesures en faveur des consommateurs (bataille des prix, principe de neutralité du Net, …). Et à l’instar de l’ETNO, la Fédération française des télécoms (FFTélécoms)
en appelle à la régulation des GAFAM – les Google, Apple, Facebook, Amazon et autres Microsoft – qui, selon son étude confiée à Arthur D. Little, capteraient « 50 %
de la valeur numérique en Europe ». A Montpellier, Michel Combes, le DG de l’équipementier télécoms franco-américain Alcatel-Lucent, s’est fait le porte-parole
des opérateurs télécoms dont bon nombre sont ses clients : il a appelé à un
« aggiornamento » des règles de concurrence en Europe pour permettre aux opérateurs fixe et mobile d’investir dans les nouvelles fréquences mobile (4) et les réseaux nouvelle génération, dont la 5G. Car, selon lui, « l’Europe est à la traîne (…), ce qui nous met en danger ». Présent physiquement à Barcelone mais virtuellement
à Montpellier, Stéphane Richard, PDG du groupe Orange, a tenu le même discours :
il faut, selon lui, passer de quatre à trois opérateurs télécoms sur un marché comme
en France, compte tenu des investissement élevés à faire dans le fixe et le mobile.
Au DigiWorld Summit, un échange entre Yves Gassot, DG de l’Idate, et Jean-Ludovic Silicani, président de l’Arcep (5), a montré – comme l’an dernier (6) – une divergence de vue entre les opérateurs télécoms et le régulateur français. Ce dernier estime au contraire que si la concurrence à quatre opérateurs mobile a permis de baisser « le prix standard de base », cela n’empêche de « monter en gamme » en termes de tarifs et de services. « Je suis plus optimiste… », a contredit Jean-Ludovic Silicani, rappelant que la quatrième licence mobile avait été attribuée à Free Mobile cinq ans après une amende record de 534 millions d’euros infligée à Orange, SFR et Bouygues Télécom pour «entente illicite » (7).

Le projet législatif examiné le 27 novembre est composé d’une communication sur le marché unique des télécoms et une recommandation sur des obligations de non discrimination (Internet ouvert) et de promotion de la concurrence – avec le souci d’encourager l’investissement dans le (très) haut débit. Il s’agit de trouver « un juste équilibre » entre la neutralité de l’Internet en faveur des consommateurs et la gestion raisonnable du trafic par les opérateurs télécoms.

Risque de hausse des tarifs
Mais tant que les définitions des expressions « services d’accès à Internet », « services spécialisés » et « niveau de qualité de service » ne seront pas clairement définis, le risque est d’aboutir à un dialogue de sourds entre pro-consommateurs et pro-opérateurs – avec une hausse des tarifs mal venue en temps de crise. @

Charles de Laubier

David Kessler devra aider le groupe Orange à clarifier sa stratégie dans les médias et les contenus

C’est l’ancien conseiller pour la culture et la communication du président de la République : David Kessler prend le 1er décembre ses fonctions à la fois de DG d’Orange Studio et surtout de « conseiller de la direction générale sur la stratégie médias et contenus » du groupe Orange. Vers un nouveau revirement stratégique ?

Stéphane Richard : quatre ans de plus face au défi OTT

En fait. Le 27 mai, Stéphane Richard a été reconduit pour quatre ans comme PDG du groupe Orange – malgré ses démêlés judiciaires dans l’affaire « CDR-Tapie ». L’un des plus grands défis que va devoir maintenant relever l’homme lige de l’Etat français sera de résister à la concurrence des Over-The-Top.