Plan anti-piratage : ayants droit et Hadopi contents

En fait. Le 23 mars prochain, la charte de lutte contre le piratage des œuvres sur tous les types de sites web sera signée par les professionnels de la publicité sur Internet et les représentants des ayants droits. Une autre charte, avec cette fois les acteurs du paiement en ligne, sera signée en juin.

En clair. L’« assèchement » des sources de financement des sites web « pirates » va se mettre en place entre fin mars et juin. Cette autorégulation des professionnels – de la publicité sur Internet et des acteurs du paiement en ligne (1) – est le premier volet du nouveau plan anti-piratage que Fleur Pellerin (2) a présenté en conseil des ministres le 11 mars. Tous les types de sites web – streaming, téléchargement ou référencement – sont visés. Le second volet est judiciaire, avec le recours en référé pour contrefaçon, avec suivi des mesures de blocage prononcées par un juge à l’encontre des intermédiaires techniques, et la saisine de « magistrats référents » qui seront nommés d’ici fin juin.
Que pense l’Hadopi de ce nouveau dispositif anti-piratage ? « L’Hadopi applaudit ce plan qui vient renforcer l’arsenal existant pour défendre la création sur Internet. La ministre a pris la mesure de l’urgence et a agi en un temps record. C’est une vraie bonne nouvelle pour la création. L’Hadopi se félicite également de constater que les travaux prospectifs qu’elle conduit sur ce sujet depuis 2011 (rapports Imbert-Quaretta) ne sont pas restés lettre morte et ont pu inspirer les décisions annoncées.
Il y avait une forte attente des créateurs ; le gouvernement a su y répondre », nous
a répondu Eric Walter, son secrétaire général. Contactée également, Mireille Imbert-Quaretta, président de la CPD (3) de l’Hadopi, nous indique que la Haute autorité
« est susceptible de contribuer au dispositif en mettant en partage son expertise et
ses compétences ».
De leur côté, les organisations des ayants droits de la musique et du cinéma se disent aussi satisfaites de ce plan anti-piratage qui fait écho au discours que Premier ministre Manuel Valls a prononcé le 15 septembre dernier (4). L’Association des producteurs de cinéma (APC), par la voix de son délégué général Frédéric Goldsmith, soutient ce plan « impliquant tous les acteurs concernés (…) sans une nouvelle intervention législa-
tive ». Le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) salue, lui, « les bonnes initiatives du gouvernement » perçues comme « un signal encourageant pour les producteurs de musique », mais demande « l’instauration d’une injonction de retrait prolongée des contenus illicites à six mois ». La SACD, elle, demande au gouvernement de réformer le statut d’intermédiaires techniques et leur responsabilité. @

TF1 a perdu son procès contre l’« hébergeur » YouTube

En fait. Le 14 novembre, le groupe TF1 a déclaré que lui et YouTube mettaient
« fin au contentieux judiciaire qui les oppose depuis [2007] ». En 2008, la chaîne de Bouygues portait plainte contre la plateforme vidéo de Google pour contrefaçon (piratage). Cet accord cache une défaite judiciaire pour TF1.

En clair. La Cour d’appel de Paris n’aura pas à rendre un arrêt, lequel était attendu dans les prochains jours. Selon nos informations, le groupe TF1 devrait perdre son procès contre YouTube – à qui il réclamait 150 millions d’euros de dommages et intérêts depuis 2008. L’arrêt aurait confirmé en appel le jugement prononcé le 29 mai 2012 par le tribunal de grande instance (TGI) de Paris, qui a confirmé le statut d’hébergeur de la plateforme de partage vidéo de Google. TF1 avait fait appel (1).
« La société défenderesse [YouTube] qui a le statut d’hébergeur n’est (…) pas responsable a priori du contenu des vidéos proposées sur son site ; seuls les internautes le sont ; elle n’a aucune obligation de contrôle préalable du contenu des vidéos mises en ligne et elle remplit sa mission d’information auprès des internautes (…) », avait justifié il y a plus de deux ans le TGI de Paris pour disculper la filiale de Google. La loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (loi dite LCEN) prévoit en effet – depuis dix ans maintenant – une responsabilité limitée des hébergeurs techniques, lesquels ne sont tenus responsables de piratage en ligne que
si les contenus contrefaits leurs sont signalés par notification (2). Dans ce cas, ils sont tenus les retirer promptement. Or, le juge du TGI avait constaté que YouTube avait
« systématiquement et avec diligence traité les notifications » qui lui ont été adressées par TF1.

Canal+ fête ses 30 ans sur fond d’attrition d’abonnés

En fait. Le 4 novembre, Canal+ a fêté ses 30 ans et compte aujourd’hui 9,4 millions d’abonnés en France, dont 6 millions d’abonnés individuels et 520.000 abonnés à CanalPlay, les 2,88 millions restants étant des abonnements collectifs. Mais Netflix et BeIn vont lui faire perdre encore plus d’abonnés.

En clair. Canal+ à 39,90 euros par mois pourrait perdre jusqu’à 400.000 abonnés dès l’an prochain, en raison de la concurrence des 7,99 euros à 11,99 euros de Netflix, d’une part, et des 12 euros pour BeIN Sports, d’autre part. C’est l’hypothèse la plus pessimiste qu’avance Arthur Kanengieser, chercheur à l’école des Mines ParisTech, dans son étude intitulée « Après Netflix » publiée en septembre (1).
Selon lui, c’est CanalSat – le bouquet de télévision par satellite et ADSL de Canal+ – qui est le premier impacté. « Le nombre d’abonnements à Canal+ est resté stable,
au prix d’un coût de grille en hausse (+ 9,2 % entre 2008 et 2012), alors que CanalSat perd 300.000 abonnements entre 2012 et 2013. Les causes sont multiples (arrivée des chaînes TNT, concurrence des bouquets proposés par les FAI, …), mais l’une d’elles est révélatrice d’un nouveau jeu concurrentiel : la concurrence de BeIN Sports [du groupe de médias qatari Al-Jazeera] sur l’offre football de CanalSat, Sport+ », explique-t-il. Et depuis le lancement de Netflix le 15 septembre, CanalSat a un sérieux rival pour son offre Ciné+. Globalement la filiale de télévision du groupe Vivendi est victime d’attrition, c’est-à-dire de la perte d’abonnés : selon nos constatations, le taux de résiliation (churn) de la chaîne cryptée en France augmente sérieusement à environ
15 % cette année, contre tout juste 11 % en 2010. Pour contreattaquer, Canal+ veut lancer une offre directement sur Internet, en OTT (2), et son président Bertrand Meheut se verrait bien fédérer des partenaires de la SVOD française – dont Orange – autour
de CanalPlay pour contrer Netflix.

4 ans d’Hadopi : moins de 150 pirates devant la justice

En fait. Le 14 octobre, Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, était auditionnée par la commission des Affaires culturelles
et de l’Education de l’Assemblée nationale. La veille au soir, le 13 octobre,
elle s’est entretenue avec la présidente de l’Hadopi, Marie-Françoise Marais.

En clair. Octobre 2010- octobre 2014 : quatre ans de lutte contre piratage aboutissent finalement à moins de 150 dossiers de « pirates récidivistes sur Internet » transmis à
la justice – le procureur de la République – par la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi). Pourtant, sur les signalements des ayants droits de la musique et du cinéma, la réponse graduée fonctionne à plein régime et, selon les calculs de Edition Multimédi@, l’Hadopi devrait franchir à la fin de cette année les 4 millions d’e-mails de premier avertissement (1) cumulés envoyés depuis le démarrage de la réponse graduée en octobre 2010. Tandis que le nombre
de lettres recommandées – expédiées en cas de récidive dans les six mois suivant l’e-mail – dépassera, lui, les 400.000 cumulées depuis quatre ans. Lors de son audition
à l’Assemblée nationale, Fleur Pellerin a laissé entendre que le maintien du budget
de l’Hadopi à 6 millions d’euros dans le projet de loi de Finances 2015 (au lieu de
8,5 millions) pourrait être revu à la hausse. D’autant que la ministre a déclaré que
« l’établissement et la publication d’une liste noire [de sites web pirates, ndlr] me paraissent rentrer parfaitement dans le cadre des compétences de l’Hadopi ».
Tous les intermédiaires du Net (2) seront alors obligés, selon elle, de prendre leurs responsabilités… @

La copie privée n’est pas du piratage mais un droit

En fait. Le 17 septembre, l’Hadopi a publié un avis après avoir été saisie deux fois – en mai 2013 et en février 2014 – contre les restrictions techniques imposées par les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ou par satellite empêchant les plaignants d’exercer leur droit de copie privée de programmes télé.

En clair. L’Hadopi « invite donc les opérateurs de télévision par ADSL ou satellite
à proposer aux téléspectateurs, dans un délai raisonnable, une faculté de copie privée des programmes télévisés qui leur permette de réaliser des copies durablement conservables et disposant d’une interopérabilité suffisante pour l’usage privé du
copiste ». Cet avis (1) est un sérieux avertissement lancé aux fournisseurs de box que sont Orange, SFR, Bouygues Telecom, Free ou encore Numericable. D’autant que les
« box à disque dur ou à mémoire de stockage multimédia » sont taxées jusqu’à plus de 20 euros en fonction de leurs capacités de stockage.