Alors le projet de loi « France Médias », en juin ?

En fait. Le 20 mai, la ministre de la Culture Rachida Dati a été auditionnée par la commission des finances de l’Assemblée nationale, sur le budget 2024. Elle a évoqué la proposition de loi sur l’audiovisuel public qu’elle veut voir « aboutir à l’été au plus tard ». Examen du texte ? « En juin », disait-elle le 7 mai.

En clair. Rachida Dati, ministre de la Culture depuis un an et demi sous successivement les gouvernements Attal, Barnier et aujourd’hui Bayrou, n’en démord pas : elle compte bien mener à son terme la réforme de l’audiovisuel public, avec à la clé la création de la holding France Médias qui détiendra la totalité du capital de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et de l’Institut national de l’audiovisuel (Ina). Et elle l’a remartelé le 20 mai devant la commission des finances (1) de l’Assemblée nationale : « Je souhaite, à l’instar de tout ce qui se passe en Europe, que les forces de l’audiovisuel public soient non seulement regroupées, rassemblées, pour qu’il y ait une stratégie de convergence, et cohérente, y compris s’agissant des financements, sans préjudice des entités existantes que l’on ne supprime[ra] pas. Je suis très claire. Et je souhaite que cette réforme puisse aboutir à l’été au plus tard » (2).
Le 7 mai dernier sur France Inter, lors de sa première interview depuis qu’elle avait échoué en avril à faire voter le projet de réforme de l’audiovisuel public à l’Assemblée nationale (car reporté sine die), la locataire de la rue de Valois (suite)

La réforme de l’audiovisuel public tant promise par Macron depuis 2017 : Bayrou et Dati y croient

Dans sa déclaration de politique générale du 14 janvier, le Premier ministre François Bayrou en a dit deux mots – sans évoquer la future holding France Médias. La ministre de la Culture Rachida Dati a dit lors de ses vœux le 27 janvier qu’elle « mèner[a] ce projet à son terme d’ici l’été ».

« La réforme de l’audiovisuel public, bien commun des Français, devra être conduite à son terme », a lancé François Bayrou (photo), l’actuel Premier ministre, lors de sa déclaration de politique générale prononcée le 14 janvier devant l’Assemblée nationale. Mais celui qui est aussi le maire de Pau n’en a rien dit de plus. Ayant obtenu ce feu vert qu’elle attendait, la ministre de la Culture, Rachida Dati, a donné le coup d’envoi de la réforme lors de ses vœux le 27 janvier : « La gouvernance de notre audiovisuel public doit évoluer […]. Je mènerai ce projet à son terme d’ici l’été ».

« C’est le sens de l’Histoire » (Ernotte)
Il serait temps. La proposition de loi « Réforme de l’audiovisuel public et souveraineté audiovisuelle » que le Sénat avait adoptée le 13 juin 2023 – il y a vingt mois déjà – est passée depuis entre les mains de l’Assemblée nationale où elle a été déposée le… 23 juillet 2024. Mais la dissolution décidée le 9 juin précédent par le président de la République Emmanuel Macron, suivie par une absence de gouvernement durant l’été, puis à l’automne par un gouvernement Barnier qui n’a pas fait long feu, a eu raison de la réforme une nouvelle fois reportée aux calendes grecques.
Mais le feu vert donné par le nouveau Premier ministre remet sur les rails la proposition de loi. Dans son article 1er, elle prévoit d’emblée que « la société France Médias est chargée de définir les orientations stratégiques des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l’audiovisuel [Ina, ndlr], dont elle détient directement la totalité du capital, et de veiller à la cohérence et à la complémentarité de leurs offres de programmes au service des missions [de service public] ». Cela ne concerne pas Arte France ni TV5 Monde. Autant dire que le propos du Premier ministre sur la réforme de l’audiovisuel public n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd, et encore moins de celles des président(e)s des groupes audiovisuels concernés : Delphine Ernotte (France Télévisions), Sibyle Veil (Radio France), Marie-Christine Saragosse (France Médias Monde) et Laurent Vallet (Ina). La présidente de France Télévisions a réagi aux propos de François Bayrou, dans une interview publiée le 19 janvier 2025. A la question de La Tribune du Dimanche sur « le projet de holding de l’audiovisuel public », Delphine Ernotte répond sans hésiter : « J’y suis favorable depuis des années et l’ai toujours dit. C’est le sens de l’Histoire. Jusqu’à présent, ce texte est maudit, un vrai chat noir. [Rires.] D’abord repoussé en 2020 à cause du covid, puis en juin [2024] avec la dissolution, et enfin en décembre avec la motion de censure ! […] Dans ce contexte [“entre les guerres, le dérèglement climatique et ce qui se prépare aux Etats-Unis”], avoir un audiovisuel public fort et uni est plus que jamais nécessaire ». Si Delphine Ernotte appelle de ses vœux la création de France Médias, elle a tout même exprimé des réserves par le passé sur ce que le projet.
Ce fut notamment le cas (suite)

Martin Ajdari, président de l’Arcom : ça déménage

En fait. Le 20 janvier, et pour la dernière fois, Roch-Olivier Maistre fait part de ses vœux au nom de l’Arcom qu’il préside depuis janvier 2022 après avoir été président du CSA durant trois ans. Martin Ajdari, haut fonctionnaire de l’Etat aussi, lui succède le 2 février. Tandis que l’Arcom déménage.

En clair. Un haut fonctionnaire succède à un haut fonctionnaire à la présidence d’une autorité administrative indépendante. Martin Ajdari va devenir le 2 février le nouveau président de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) à la place de Roch-Olivier Maistre, lequel tient ce lundi 20 janvier sa dernière cérémonie de vœux en tant que président.
Ce passage de flambeau intervient au moment où l’Arcom quitte son siège historique de la tour Mirabeau dans le XVe arrondissement de Paris pour s’installer dans le XIIe, dans l’immeuble dit « Daum’N » (contraction stylisée de « Daumesnil », du nom de l’avenue Daumesnil sur laquelle donne le bâtiment). L’adresse de l’Arcom n’est plus rue de Javel mais rue Brahms. Le mandat de six ans de Martin Ajdari débute ainsi dans un contexte d’économie immobilière et d’objectifs environnementaux voulus par l’Etat. L’Arcom loue à Daum’N environ 7.500 m2 répartis sur quatre étages (bail de 9 ans dont 6 ans fermes), alors qu’elle occupait une partie des 17.500 m2 dont elle disposait dans la tour Mirabeau (désormais en travaux). Mais qui est au juste Martin Ajdari ? (suite)

Rodolphe Saadé, PDG de l’armateur CMA CGM, a investi 2 milliards d’euros dans les médias français

L’armateur marseillais et logisticien maritime CMA CGM, que dirige depuis 2017 le milliardaire Rodolphe Saadé (fils du fondateur), est devenu en deux ans un géant des médias français. Selon les calculs de Edition Multimédi@, le Franco-Libanais a déjà investi 2 milliards d’euros via sa filiale CMA Media.

En deux ans, Rodolphe Saadé (photo) s’est fait une place de choix dans le club très fermé des dix milliardaires qui possèdent à eux seuls la majeure partie des médias en France (1). En un peu plus de deux ans, la cinquième fortune française – avec un patrimoine familial de 32 milliards d’euros, d’après Challenges (2) – s’est emparée de plusieurs actifs médiatiques de l’Hexagone, et non des moindres : La Provence et sa filiale Corse-Matin en août 2022 (pour 81 millions d’euros), La Tribune/La Tribune Dimanche en juillet 2023 (pour un montant estimé à 35 millions d’euros), BFM et RMC en juillet 2024 (en acquérant la totalité d’Altice Media pour 1,55 milliard d’euros).
A ces emplelles dignes d’un magnat de la presse et de la télévision, le Franco-Libanais a aussi investi, en tant qu’actionnaire minoritaire cette fois, dans : M6 à partir de fin 2022 pour atteindre 10,25 % du capital en avril 2023 (valorisés à l’époque 126,4 millions d’euros (3)), le média vidéo Brut en avril 2023 pour 15 % du capital (alors valorisés 6 millions d’euros (4)), et, bien que cela ne soit pas un média à proprement parler mais une école de journalisme, l’ESJ Paris (5) en novembre 2024 pour quelques centaines de milliers d’euros (sur un tour de table d’environ 3 millions d’euros (6)). Selon les calculs de Edition Multimédi@, CMA Media (ex-Whynot Media, anciennement CMA CGM Médias) – la holding médias du géant mondial du transport maritime de conteneurs et de la logistique portuaire – a donc injecté un total de 2 milliards d’euros à ce jour.

Médias, y compris école, formation et IA
Car aux presque 1,8 milliard d’euros (7) que totalisent les différents investissements directs dans les actifs médiatiques mentionnés, il faut ajouter d’autres dépenses de la maison mère qui concernent aussi en partie ses différents médias : l’intelligence artificielle, en cofondant notamment en novembre 2023 la start-up Kyutai (100 millions d’euros injectés), et l’innovation et la formation via la création cette année de son propre centre baptisé Tangram (plusieurs millions d’euros). Ce qui, si l’on affecte aux médias concernés une quote-part de ces derniers investissements, nous amène à 2 milliards d’euros environ. (suite)

La France revoit sa stratégie numérique culturelle

En fait. Le 11 juin, le ministère de la Culture a publié le bilan complet de sa démarche de « stratégie numérique culturelle » qui a duré deux ans (consultation publique et groupes de travail). Son « service du numérique » a identifié les défis à relever et un plan d’action alliant culture et numérique.

En clair. Le ministère de la Culture, passé en janvier 2024 sous la coupe de Rachida Dati (1), cherche à mettre en œuvre une nouvelle « politique culturelle » en tenant compte de l’« explosion des pratiques numériques », de la « transformation des formes de création », du « bouleversement des circuits de distribution », de la « modification des modèles économiques » ou encore des « difficultés à assurer un partage équitable de la valeur ». Par exemple, « les débats actuels autour des NFT, des technologies immersives et de l’intelligence artificielle montrent à quel point les nouveaux usages numériques interrogent ». C’est dans cet esprit que le rapport de la rue de Valois sur la « stratégie numérique culturelle » à mettre en œuvre a été publié le 13 juin dernier.
Ce document de 32 pages (2) assorti de huit fiches (3) pour un « plan d’actions » à mener (ou à poursuivre) d’ici fin 2024 et courant 2025, voire en 2026, a été élaboré durant deux ans par le « service numérique » (SNum) du ministère de la Culture. Ce SNum a été créé par un arrêté du 31 décembre 2020 (4) et, opérationnel depuis début 2021, est dirigé par depuis lors par Romain Delassus. En tant que « chef du SNum », il a tenu à souligner que « loin de vouloir construire un jardin à la française, ou de se positionner en donneur d’ordre vis-à-vis de l’écosystème culturel, l’objectif de cette démarche est au contraire de responsabiliser et d’aider chaque équipe et chaque établissement dans la construction de sa propre stratégie numérique ».