Piratage : les plateformes du Net évitent l’obligation de « surveillance généralisée » des contenus, quoique…

Elles ont eu chaud. Les plateformes YouTube, Dailymotion, Facebook et autres Yahoo ont failli perdre leur statut d’hébergeur à responsabilité limitée. La loi
« République numérique », si elle est promulguée en l’état, ne leur impose pas d’obligation de surveillance généralisée ni de filtrage automatique. Seulement une « censure préventive »…

Les députés avaient imposé aux plateformes numériques « la mise en oeuvre de dispositifs de reconnaissance automatisée » de contenus piratés tels que des musiques ou des films. C’était une obligation majeure adoptée en janvier dernier par l’Assemblée nationale en matière de « loyauté des plateformes », au grand dam des acteurs du Net tels que YouTube, Dailymotion, Facebook ou encore Yahoo (lire ci-dessous).

Mesures TV et Net : Médiamétrie se met en quatre

En fait. Le 6 mai, l’institut Médiamétrie a confirmé à Edition Multimédi@ qu’il propose aux chaînes, depuis le 19 avril dernier, la mesure dite « TV 4 écrans » (télévision, ordinateur, smartphone et tablette) et que le « GRP live 4 écrans » (performances publicitaires TV) sera évalué d’ici fin 2016.

En clair. Dans un premier temps réservés aux chaînes de télévision souscrivant à cette nouvelle mesure « TV 4 écrans », les résultats font état des audiences des programmes TV sur les quatre écrans que sont le téléviseur, l’ordinateur, le smartphone et la tablette. Ils sont exprimés en « nombre moyen de téléspectateurs par programme, par écran et par mode de consommation (live, différé ou replay) ». Et ce, pour tous les contenus TV taggués sur Internet via un outil de mesure en temps réel des flux streaming audio et vidéo – selon la technologie du watermarking – sur tous types de terminaux (solution eStat’Streaming).
« Avec le “focus émissions 4 écrans”, la France compte parmi les premiers pays dans le monde à intégrer ces pratiques dans la mesure d’audience de la télévision. Les Français utilisent de plus en plus les 3 écrans Internet pour regarder la TV en live ou en replay ; chaque jour, ils sont 3 millions à utiliser leurs ordinateurs, mobiles et tablettes pour regarder des émissions TV », explique Julien Rosanvallon, directeur du département Télévision de Médiamétrie. Sans entrer dans le détail technique d’une mesure en quatre dimension de plus en plus complexe, la méthodologie consiste à intégrer au Médiamat (1) les usages Internet – les jeunes de 15 à 24 ans sont les plus gros consommateurs de télévision en ligne – en mesurant quotidiennement, programme par programme, l’audience « télé » à partir des quatre écrans. Cela consiste à rapprocher les audiences Mediamat et des mesures Internet : panels Internet, mesure dite single-source et mesure dite « voie de retour eStat’Streaming ». Lors du Printemps des études qui s’est déroulé mi-avril, Médiamétrie a d’ailleurs reçu quatre trophées dont deux pour cette solution « TV 4 écrans » dans les catégories
« Data » et « Médias et Audience ». L’audimètre, lui, n’est plus un boîtier à boutons mais une « box » au format tablette et tactile. Il sera complété par un audimètre miniature et portable testé depuis fin 2015 par un panel de 750 individus (2).
Quant à l’évaluation de la performance publicitaire de la TV en direct sur les écrans Internet grâce à la création d’un « GRP live 4 écrans », elle sera disponible d’ici la fin de l’année. Le GRP – ou Gross Rating Point, en français « Point d’Exposition Brut (PEB) » – est un indicateur qui mesure la « pression » d’une campagne publicitaire sur une cible définie (3). @

Patrice Gélinet, membre du CSA : « Sans Radio France et France Médias Monde, la RNT ne peut réussir »

Au sein du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), dont il est membre, Patrice Gélinet préside le groupe « Radios analogiques et numériques ». Pour EM@, il fait le point sur la RNT. Un deuxième appel à candidatures est prévu début juin. Le gouvernement pourrait donner cette fois le feu vert à Radio France.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Le CSA s’apprête à lancer un appel à candidatures en vue de la diffusion de la RNT sur Lille, Lyon et Strasbourg. Le calendrier initial le prévoyait avant fin mars : pourquoi ce retard (1) et quand est-il prévu de le lancer ? Puis quand l’appel à candidatures suivant – sur Nantes, Rouen et Toulouse cette fois – se déroulera ?
Patrice Gélinet :
Les études d’impact d’éventuelles autorisations en radio numérique terrestre (RNT) et la consultation publique, qui doivent précéder les appels à candidatures à Lille, Strasbourg et Lyon, ont pris plus de temps que prévu. Ce sont quatre études d’impact
– une pour chacune de ces trois villes et une nationale – qui ont été rendues publiques le 19 avril dernier (2). Les réponses à la consultation doivent être rendues au plus tard le 13 mai, si bien que les appels pourraient être lancés le 1er juin en fonction de ces réponses. Les candidats devront remettre leur candidature dans la seconde quinzaine de juillet au plus tard ; la sélection devrait se faire au mois d’octobre. Quant aux appels suivants prévus à Nantes, Rouen et Toulouse, ils devraient pouvoir être lancés au quatrième trimestre de cette année.

Services : Internet dépasserait les télécoms en 2025

En fait. Le 18 avril, l’Idate a indiqué sur son blog que le marché mondial des services Internet et télécoms pourrait doubler d’ici 2025 – par rapport à 2015 – pour atteindre les 3.000 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Dans un des
quatre scénarios, les télécoms seront même dépassées par Internet.

En clair. A l’issue de la décennie 2015-2025, et pour la première fois dans l’histoire,
les services Internet pourraient représenter en valeur un marché supérieur à celui des services télécoms. C’est ce qui ressort de l’étude « Digital Economy 2025 » de l’Idate publiée récemment. En effet, dans l’un des quatre scénarios avancés par cet institut, Internet génèrera en 2025 un chiffre affaires supérieur (51 %) à celui des télécoms
(49 %) sur un total de près de 3.000 milliards d’euros au niveau mondial. Ce serait
une première, comparé à aujourd’hui où les télécoms pèsent encore 75 % des 1.500 milliards d’euros générés en 2015 par les services télécoms et Internet. Ce scénario, baptisé « Open », illustre le mieux l’érosion des services télécoms qui afficheront une croissance annuelle moyenne de seulement 2,4 % par rapport aux services Internet bondissant de 15 % par an. Cette nouvelle économie numérique – basée sur l’intermédiation en ligne (moteurs de recherche, publicité en ligne, commerce électronique, …) ou l’agrégation de contenus (vidéo en partage ou à la demande, boutiques d’applications, médias numériques, …) – prendra le pas sur les télécoms
où l’accès constitue la majeure partie des revenus. Ce scénario plausible, où les services Internet deviendront le premier moteur du monde digital, sera favorable notamment au RTB (Real-Time Bidding), le segment de marché hyperdynamique
de la publicité ciblée, ainsi qu’à l’Internet des objets (IoT) et aux nouveaux services
et modèles économiques. Selon cette hypothèse, « le marché Internet est tiré par l’innovation et la concurrence tandis que les télécoms se recentrent sur la connectivité, la distribution et whole-sale, en proposant des services spécialisés », explique Christoph Pennings, directeur d’études, sur le blog de l’Idate le 18 avril (1). Ce scénario « Ouvert » correspond ainsi à une économie numérique dont l’écosystème serait intéropérable, sans couture et ouvert selon trois grandes orientations open access, open innovation et open data.
Même si les trois autres scénarios de l’Idate maintiennent au contraire les services télécoms en première position, à savoir à 54 % dans l’hypothèse « Mall » (plateforme commerciale), 58 % dans « Automated » (automatisation) et 60 % dans « Trust » (confiance), tous confirment que le transfert de valeur des télécoms vers l’Internet s’accélère (2). @

Réforme audiovisuelle à l’heure du Net : la France ne peut passer à côté d’un changement de paradigme

La loi « Liberté de la communication » de 1986 – 30 ans ! – est devenue obsolète depuis la mondialisation de l’audiovisuel induite par Internet. Sa réforme reste timorée. La ligne Maginot du PAF (paysage audiovisuel français) peine à laisser place à un cadre ambitieux pour conquérir le PAM (mondial).

Par Rémy Fekete, avocat associé, cabinet Jones Day

Près d’un an après que la Commission européenne ait « jeté
les bases de l’avenir numérique de l’Europe » (1) en initiant la création d’un marché numérique européen, les parlementaires français envisagent une réforme du secteur audiovisuel. Cette révision du cadre légal intervient dans un contexte de crise des médias traditionnels : Canal+ affiche une perte de 264 millions d’euros en 2015 contre 21 millions en 2012 ; TF1 semble se diriger sous la barre des 20 % de part d’audience (2) ; M6 a refranchi à la baisse celle des 10%; les bouquets satellitaires ne parviennent que péniblement à remplir leurs canaux en raison de la diffusion des chaînes sur Internet ; les radios subissent aussi une baisse d’audience sans précédent.