L’arrêt de Megaupload en janvier 2012 a contrarié deux plaintes importantes instruites en France

Qui a-t-il de commun entre la plainte du 9 mai 2011 de la société Cogent contre Orange devant l’Autorité de la concurrence et l’assignation du 30 novembre 2011 des syndicats APC-FNDF-SEVN devant le tribunal de grande instance de Paris ? Pas grand-chose à part… feu Megaupload.

Par Charles de Laubier

En attendant de renaître de ses cendres sous le nom de Megabox (1), l’arrêt manu militari de Megaupload le 19 janvier 2012 a contrarié deux procédures juridictionnelles qui étaient enclenchées depuis la fin de l’an dernier en France. D’une part, il s’agit de
la plainte du 9 mai 2011 de la société Cogent contre Orange devant l’Autorité de la concurrence pour abus de position dominante dans l’interconnexion de flux Internet.

Europe : consultation IPRED et vote ACTA en juin

En fait. Le 15 mai, la porte-parole du commissaire européen Michel Barnier
indiquait à EM@ que le projet de révision de la directive sur « le respect des droits de propriété intellectuelle » sera présenté « en juin ». Au moment même
où le traité anti-contrefaçon ACTA est examiné au Parlement européen…

En clair. Selon nos informations, c’est « avant l’été » que le commissaire européen en charge du Marché intérieur et des Services, Michel Barnier, présentera ses propositions pour adapter à Internet la directive « Respect des droits de propriété intellectuelle », dite IPRED (1), datant de 2004. Mais, contre toute attente, ces propositions feront l’objet d’une consultation publique auprès des parties prenantes. Et ce, en plus d’une étude de mesure d’impact. Cette consultation, qui retarde d’autant la transmission d’un projet législatif de la Commission européenne au Parlement européen, montre bien le caractère sensible de cette réforme annoncée depuis plus de deux ans. Elle vise notamment à mettre à contribution des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) dans la lutte contre le piratage sur Internet. Or ces derniers ne veulent pas devenir les cyber policiers du Web. Michel Barnier l’a encore rappelé le 10 mai dernier à Bruxelles, à l’occasion du rassemblement des industries créatives « LetsGoConnected » organisé par Bertelsmann, NBC Universal et Vivendi : « Les titulaires de droits doivent pouvoir efficacement les faire respecter, sans en abuser. La discussion est en cours avec l’ensemble des parties prenantes, mais nous travaillons déjà sur quelques pistes comme l’identification des circuits financiers liés à la contrefaçon et au piratage et
un accès facilité à la justice pour les détenteurs de droits ».
La crainte des opposants au projet de Michel Barnier est que les FAI soient appelé
à coopérer sans l’intervention d’un juge. Dans une interview à Edition Multimédi@ en juin 2011, Michel Barnier déclarait : « Je suis convaincu qu’une participation plus active des intermédiaires dans la lutte contre la contrefaçon et le piratage est indispensable » (2).
La consultation publique, que va lancer en juin la Commission européenne sur le renforcement de la directive IPRED, interviendra au moment même où l’accord anti-contrefaçon ACTA (3) sera dans sa dernière ligne droite avant sa ratification – ou son rejet – par le Parlement européen. Ce traité commercial prévoit lui aussi la coopération des FAI dans la lutte contre le piratage en ligne et l’identification des internautes contrevenants. Le vote en session plénière est en effet prévu le 3 juillet, précédé le
21 juin par un vote de la commission Commerce international (INTA) du Parlement européen. @

Présidentielle : ce que François Hollande promet sur l’économie numérique et Internet

Depuis que Nicolas Sarkozy s’est déclaré, le 15 février dernier, candidat à la présidentielle de 2012, le duel entre les deux favoris bat son plein. A deux mois
des deux tours de cette élection quinquennale, Edition Multimédi@ fait le point
sur les positions de François Hollande sur l’économie numérique.

Dernière prise de position en date pour le premier challenger
de l’actuel président de la République : un appel au « refus de la ratification par le Parlement européen » de l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) (1), lequel est contesté en Europe malgré la signature de plusieurs pays intervenue le 26 janvier (2). Par les voix de Fleur Pellerin (3), sa chargée de l’économie numérique, et de la députée socialiste Aurélie Filippetti, en charge de la culture, de l’audiovisuel et des médias, François Hollande a en effet dénoncé clairement ce texte international sur lequel le Parlement européen doit se prononcer d’ici juin prochain. « Originellement destiné à combattre la contrefaçon commerciale, ce texte a été progressivement détourné de son objectif, dans la plus grande discrétion et en dehors de tout processus démocratique », ont expliqué le 10 février dernier ses deux porte-parole sur le site web du candidat socialiste à l’élection présidentielle, lequel se dit « scandalisé par le manque de transparence qui caractérise les négociations, auxquelles les sociétés civiles n’ont nullement été associées ». Quant à la Commission européenne, elle a annoncé le 22 février son intention de saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

Traité ACTA : entre principes généraux et interprétations

Les négociations internationales autour du traité ACTA, accord commercial anti-contrefaçon (y compris numérique), devraient se poursuivent jusqu’à la fin de l’année. La coupure de l’accès à Internet est notamment envisagée, mais de nombreuses questions demeurent.

Par Christiane Féral-Schuhl (photo), avocate associée, cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie

Anti-piratage : l’ACTA n’est pas si « mystérieux »

En fait. Le 25 février, la direction Commerce de la Commission européenne a annoncé qu’elle organisera le 22 mars prochain une réunion pour informer et consulter les parties intéressées par la négociation sur un accord commercial
« plurilatéral » anti-contrefaçon (ACTA) pour protéger la propriété intellectuelle.

En clair. Les négociations que mènent plusieurs pays dans le monde en vue d’aboutir
en 2010 à l’Accord commercial anticontrefaçon (ACAC) – plus connu sous le sigle ACTA (1) – ne sont pas aussi obscures qu’il n’y paraît. L’objectif est clairement d’instaurer une « coopération internationale » et de mettre en oeuvre des moyens pour « combattre les violations » de droits de la propriété intellectuelle, y compris sur Internet avec – selon un des documents de travail – des remèdes demandés aux fournisseurs d’accès à Internet ». L’Association européenne de ces derniers, l’EuroISPA (2), s’en
est inquiétée le 24 février dernier, de même que l’ETNO (3) le 25 janvier pour les opérateurs télécoms historiques. Dans moins d’un mois – du 12 au 16 avril 2010 en Nouvelle Zélande – se tiendra le huitième « round » de ces discussions entre pas moins de 37 pays, si l’on compte les Vingt-sept européens. La dernière des sept réunions précédentes s’est tenue fin janvier au Mexique avec des représentants de l’Union européenne. Les participants se sont engagés à « parvenir à un accord d’ici
la fin de l’année ». Le 24 février, la secrétaire d’Etat à l’Economie numérique Nathalie Kosciusko-Morizet a pourtant qualifié de « mystérieux » ce projet de traité multilatéral.
« On a posé à ce sujet la question à Neelie Kroes. Mais la Commission européenne est mal à l’aise, car il y a des points de vue variés entre les pays », a-t-elle juste dit. Le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) a aussi dénoncé, dès le
22 février, le « manque de transparence ». Alors que la France présidait l’Union européenne, Paris a déjà accueilli une réunion de l’ACTA ! C’était du 15 au 18 décembre 2008 avec la participation de sa collègue Anne-Marie Idrac, secrétaire
d’Etat chargée du Commerce extérieur. Et ce, en plein débat sur le projet de loi Hadopi…  Il s’agit de « créer un cadre réglementaire moderne et fort, qui prenne en compte le vol de la propriété intellectuelle dans l’économie globale, y compris l’augmentation des médias de stockage numérique qui facilitent la copie ». Le Japon et
les Etats-Unis ont lancé cette idée dès 2006. D’autres pays les ont rapidement rejoint :
le Canada, la Suisse et… l’Union européenne. Puis, les négociations proprement dites ont débuté en juin 2008 avec un cercle élargi à l’Australie, au Mexico, au Maroc, à la Nouvelle Zélande, à la Corée du Sud et à Singapour. @