Pierre Lescure : « 40 ou 50 films par an à 2 mois et demi après la salle »

En fait. Le 14 janvier, Pierre Lescure (68 ans), ancien PDG de Canal+, a été élu futur président du Festival de Cannes par le conseil d’administration de l’Association Française du Festival International du Film, où siège deux représentants de l’Etat, pour succéder à Gilles Jacob le 1er juillet prochain.

Pierre LescureEn clair. Pierre Lescure (photo) savait, depuis près de deux mois, qu’il pouvait être nommé président du Festival de Cannes. « C’est vrai qu’on m’en a parlé. (…) Cela serait à la fois intéressé et gratifié si cela devait être moi », avait-il confié à propos de sa candidature à la succession de Gilles Jacob.
C’était le 28 novembre dernier, lors d’un dîner-débat du Club audiovisuel de Paris, où il était l’invité d’honneur. Si le monde du Septième Art français se réjouit de sa nomination, il doit aussi se préparer à une réforme de la chronologie des médias. Mais l’ancien PDG de Canal+ connaît les susceptibilités de la filière cinématographique.

Vincent Grimond et Brahim Chioua, Wild Bunch : « La croissance de la VOD/SVOD pâtit clairement du piratage »

Cofondateurs de Wild Bunch, respectivement président et directeur général, Vincent Grimond et Brahim Chioua expliquent à EM@ comment évoluent leurs métiers de distribution et de co-production de films sur fond de révolution numérique du cinéma : VOD, piratage, chronologie des médias, TV connectée, « cloud », …

Propos recueillis par Charles de Laubier

VGEdition Multimédi@ : Anciens de StudioCanal, vous avez co-fondé Wild Bunch il a plus de dix ans : quel est le chiffre d’affaires du groupe en 2012, pour quelle croissance ? Comment se répartissent ces revenus entre les différents marchés : salles, vidéo à la demande (VOD), international
et télévision ? Vincent Grimond (photo) et Brahim Chioua :
Effectivement, la société Wild Bunch a été créée en 2002… Depuis cette date, le taux de croissance annuel moyen de
notre chiffre d’affaires a été de 24 % ce qui nous a permis
de constituer un joli catalogue d’environ 1.800 films tels que « La Vie d’Adèle », « The Immigrant », « Le Petit Nicolas », …
Et le chiffre d’affaires des ventes internationales est devenu inférieur à celui de la distribution directe (salle de cinéma, vidéo en DVD, Blu-ray et vidéo à la demande et télévision), secteur d’activité où nous sommes présents en Allemagne, Italie, en Espagne, et bien sûr en France, laquelle demeure notre premier marché.

Chronologie des médias : la VOD avant la salle !

En fait. Depuis le 10 juillet, le film « Magnifica Presenza » est disponible en France en VOD avant sa sortie en salle prévue le 31 juillet. Cette chronologie des médias
« inversée » est une petite révolution où des négociations interprofessionnelles doivent reprendre pour modifier les fenêtres de diffusion.

En clair. Au lieu de privilégier la salle de cinéma en lui donnant l’exclusivité de diffusion d’un film, la société civile des Auteurs Réalisateurs Producteurs (ARP) expérimente l’inverse ! A savoir : proposer un film d’abord en VOD, puis en salle quelques jours après. Ce n’est pas la première fois que l’ARP défie la sacro-sainte chronologie des médias. En avril dernier, le documentaire « Viramundo : un voyage musical avec Gilberto Gil » avait été disponible en VOD sur Orange et iTunes dès le 17 avril, avant sa diffusion en salle à partir du 8 mai. Cette fois, c’est au tour du film « Magnifica Presenza » : le 10 juillet en VOD, toujours sur Orange et iTunes, puis en salle à partir du 31 juillet.
Illégal en France ? « Non », nous répond Florence Gastaud, déléguée générale de l’ARP : « L’arrêté sur la chronologie est clair. Si la sortie simultanée salle-VOD (day-and-date)
est interdite en France, rien n’est prévu avant la sortie en salle », nous explique-t-elle.
En effet, l’arrêté du 9 juillet 2009 (publié au J.O. du 2 juillet 2009) stipule dans son point
1.1 que « Le point de départ de la chronologie des médias est la date de sortie nationale en salles de spectacles cinématographiques ». Ainsi, selon l’ARP, la sortie simultanée
est illégale en France mais pas la sortir en VOD avant la salle ! Alors que ce n’est pas le cas en Autriche, en Grande-Bretagne et en Irlande où « Magnifica Presenza » sortira en revanche simultanément en salle et en VOD (1).
En France, cette chronologie des médias « inversée » ne déclenche pas de levée de boucliers au sein du cinéma français. Et pour cause : l’expérience est bien encadrée
et circonscrite par la Commission européenne qui finance trois projets de sorties simultanées ou quasi-simultanée de films (VOD/salle) à hauteur de 2 millions d’euros (2). Les trois projets ont été sélectionnés en octobre dernier, dans le cadre du programme MEDIA, et concernent environ 20 films de cinéma d’art et d’essai dans neuf pays européens, dont la France. Il s’agit de Speed Bunch (500.000 euros d’aide) du distributeur-coproducteur français Wild Bunch, de Edad (695.000 euros) du distributeur britannique Artificial Eye avec notamment le producteur français Rezo Films, et de Tide (800.000 euros) de l’ARP. Selon nos informations, Wild Bunch prévoit, lui, la sortie simultanée de son premier film à l’automne. @

Joseph Haddad, président de Netgem et de Videofutur : « La box des FAI ne doit plus être un bundle forcé Internet-TV »

Président fondateur de Netgem, Joseph Haddad nous explique pourquoi son entreprise a lancé sur Videofutur – dont il est aussi président du conseil d’administration – une OPA qui s’est achevée le 23 avril. En outre, pour lui,
l’offre liée Internet-TV des box n’est plus tenable à l’heure de la TV connectée.

Propos recueillis par charles de laubier

JH

Chronologie des médias : nouvelle réunion pour rien

En fait. Le 21 février, au lieu du 25 janvier, s’est tenue au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) la réunion semestrielle interprofessionnelle sur la chronologie des médias. Mais lors du 11 juillet 2012, le CNC s’en remet aux conclusions de la mission Lescure attendues « d’ici le 31 mars ».

En clair. La vidéo à la demande (VOD) n’en finit pas d’attendre une (r)évolution de
la chronologie des médias qui régente la disponibilité des films à partir de leur sortie.
Le précédent accord remonte au 6 juillet 2009, date d’alignement de la VOD et du DVD
à quatre mois (au lieu de six) après la sortie d’un film. La salle garde en exclusivité la primeur héritée d’avant l’ère numérique. Mais depuis, plus rien ! Même la SVOD (par abonnement) reste reléguée à trente-six mois, malgré un projet d’avenant, resté sans suite, qui prévoit une dérogation à vingtdeux mois pour des films sortis dans moins de
30 salles… Le Syndicat de l’édition vidéo numérique (SEVN), la Société civile des Auteurs-Réalisateurs-Producteurs (ARP) ou encore la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) n’ont pourtant eu de cesse de dénoncer cet immobilisme (1) et d’en appeler à des expérimentations. Mais en face, le Bureau de
liaison des organisations du cinéma (Bloc) – soit une quinzaine d’organisations du
cinéma et majoritairement des producteurs (APC, SPI, SRF, …) – s’y oppose. Certains, comme l’Association des producteurs de cinéma (APC), se disent favorables à des expérimentations – mais dans le cadre d’un nouvel accord interprofessionnel… Quant
au Bureau de liaison des industries cinématographiques (Blic), lequel regroupe les salles de cinéma (FNCF), les distributeurs de films (FNDF), des producteurs de cinéma (API), parmi lesquels Pathé, Gaumont, UGC ou encore MK2, ainsi que les industries techniques (Ficam) et les éditeurs de vidéo (SEVN), il n’était pas contre des assouplissements sur les films d’art et d’essai mais il s’est finalement rangé derrière
le Bloc (2). Résultat : tout repose maintenant sur les épaules de Pierre Lescure. « Une refonte radicale de la chronologie des médias constituerait peut-être la meilleure réponse aux attentes des internautes en matière de VOD », avait osé dire la mission Culture Acte-2 dans son bilan d’étape du 6 décembre dernier. Mais en se déjugeant aussitôt : « Plutôt qu’une remise
à plat qui fragiliserait le système de financement du cinéma, le réalisme commande d’envisager des assouplissements et des expérimentations de nature à enclencher
une dynamique favorable au développement de l’offre légale ». La simultanéité ou semi-simultanétité salle-VOD que veut encourager la Commission européenne (3)
n’est pas pour demain en France. @