A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

Bernard Miyet, Sacem : « Les perceptions de droits sur Internet ont plus que doublé en 2011 »

Alors que se tient à Cannes le Midem, marché international du disque et de l’édition musicale, le président du directoire de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem), Bernard Miyet, dresse un premier bilan-perspective après plus de dix ans de mandat.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Après plus de dix ans à la tête de la Sacem, votre mandat s’achève d’ici l’assemblée générale du 19 juin au plus tard : quel bilan faites-vous de toute votre action, notamment face au numérique ? Que vous reste-t-il à accomplir, notamment via à vis de l’Europe : procès « Cisac », licences multiterritoriales, marché unique en ligne, … ?
Bernard Miyet :
La Sacem a rapidement pris la mesure de l’impact de la diffusion numérique pour la filière musicale, qu’il s’agisse des conséquences potentielles du piratage, de la nécessité de favoriser le développement des sites légaux ou
de l’exigence de modernisation de ses propres outils informatiques. Elle a dès le début négocié des accords avec les services de musique sur Internet, dont le nombre est aujourd’hui supérieur à 1.600, dont un contrat de licence paneuropéenne avec iTunes renouvelé jusqu’à présent depuis juin 2004. Cela ne signifie pas que le choc des cultures n’a pas été parfois frontal, dans la mesure où les acteurs du numérique connaissaient souvent très mal le droit d’auteur. Notre première tâche est toujours pédagogique pour leur faire comprendre et accepter la légitimité du droit d’auteur aussi bien que son respect. Il n’est pas surprenant que cela prenne du temps dans cet univers de diffusion bouleversé et instable. Sur le plan européen, nous attendons toujours la définition d’une politique claire et cohérente. Une directive sur la gestion collective est en gestation (1). Il faut espérer qu’elle permette de régler les difficultés résultant de la complexité induite – pour les utilisateurs comme pour les sociétés de gestion – par la fragmentation des répertoires, laquelle rend par exemple impossible pour une plateforme de musique en ligne l’obtention, auprès d’une seule société de gestion, de l’ensemble des droits mondiaux.

Arrêt de Megaupload versus dé-référencement d’Allostreaming : Etats-Unis et Europe s’opposent

Entre les actions judiciaires des ayants droits en Europe pour faire dé-référencer Allostreaming par les acteurs du Web et l’opération policière des Etats-Unis pour arrêter Megaupload et son fondateur, deux visions mondiales de la lutte contre le piratage sur Internet s’opposent.

Par Charles de Laubier

De l’autre côté de l’Atlantique : FBI, hélicoptère, menottes, saisie d’ordinateur et fermeture manu militari du site web Megauplead, mandats d’arrêt internationaux, sur fonds de deux projets législatifs américains controversés. De ce côté-ci de l’océan : ayants droits, assignation en justice et dé-référencement d’Allostreaming demandé via le juge, aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI), aux moteurs de recherche et à d’autres acteurs du Web (1).

Pourquoi le « cloud computing » est un sérieux défi pour les industries culturelles

La mission Informatique en nuage, lancée par le ministère de la Culture et de la Communication (CSPLA), doit rendre en mars son rapport sur les droits d’auteur
et leur rémunération face aux nouveaux usages en ligne et à distance. Mais le défi dépasse les frontières nationales.

Par Christiane Féral-Schuhl*, avocate associée, cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie.

Le rapprochement Arcep-CSA-ANFR se concrétise

Le 3 janvier, lors des vœux de l’Agence nationale des fréquences (ANFR), Eric Besson, ministre de l’Economie numérique, a exposé quelques avancées sur le « rapprochement » qu’il avait appelé de ses vœux il y a un an entre le CSA, l’Arcep
et l’ANFR dans le domaine de la gestion des fréquences.

Contacté par Edition Multimédi@, le directeur général de l’ANFR, Gilles Brégant, assure qu’ « il y a bien eu des progrès sur le “rapprochement” » que souhaite toujours Eric Besson, le ministre de l’Industrie en charge de l’Economie numérique. Bien que cet objectif ne soit curieusement pas évoqué dans son rapport France numérique 2020 publié le 30 novembre 2011, sa volonté politique à défaut de fusionner ces trois autorités administratives indépendantes au moins de les rapprocher. « Je vous confirme que [ce rapprochement] a progressé. Et deux annonces sont donc faites [par Eric Besson le 3 janvier] : d’une part l’installation de la “base maîtresse” des fréquences à l’ANFR, et d’autre part la création d’une capacité d’études à l’ANFR, destinée à être commune (puisqu’elle doit “éclairer le gouvernement et les autorités indépendantes”). Ce ne sont pas des orientations neutres ». L’an dernier, le 10 janvier 2011, le ministre avait été plus explicite en s’adressant à Gilles Brégant, alors nouvellement nommé à
la tête de l’ANFR : « J’attends du nouveau directeur général de l’Agence qu’il contribue activement à ce rapprochement des trois autorités. (…) Les trois autorités compétentes en matière de gestion des fréquences, le CSA, l’Arcep, ANFR, ont vocation à coopérer plus étroitement ». Beaucoup avaient alors interprété ces propos comme une « fusion » annoncée des trois autorités. « La généralisation de l’accès à Internet haut débit fixe et mobile rend la frontière entre le monde de l’audiovisuel et celui des télécommunications tous les jours plus poreuse » : « Nous devons en tirer toutes les conséquences », avait lancé le ministre.
A défaut d’en passer par la loi (d’où le CSA et l’Arcep tiennent leurs missions et leurs structures), le rapprochement CSAArcep- ANFR avance par synergies renforcées, optimisation des moyens et recrutements mutuels. Gilles Brégant est en effet l’ancien directeur technique du CSA. Son DG adjoint, Jean- Marc Salomon, vient d’être recruté également au CSA où il était aussi DG adjoint. Lui-même tout juste remplacé par Michel Combot, lequel était DG adjoint de l’Arcep. A l’heure des réductions budgétaires dans l’administration publique, une fusion serait pourtant la bienvenue. Le rapport « TV connectée » (1) va jusqu’à suggérer « la création d’une autorité unifiée » comme « [voie]
plus pérenne ». @

Neutralité : YouTube et Cogent, premières victimes ?

Le 23 décembre 2011, l’Arcep a lancé deux consultations publiques – jusqu’au
17 février – sur la neutralité des réseaux : l’une sur le suivi de la qualité du service d’accès à Internet et son information ; l’autre sur la collecte trimestrielle d’informations sur les conditions d’acheminement des données.

Les internautes ayant des difficultés à accéder à Megavideo et Megaupload via le CDN (1) américain Cogent ou les internautes trouvant leur accès à YouTube ralenti auront-ils un jour une explication ? « Oui, Christophe Muller [directeur chez YouTube, ndlr] a bien entendu que des abonnés rencontraient des difficultés d’accès. Mais nous n’avons pas
de commentaire à apporter », a répondu à Edition Multimédi@ une porte-parole de Google France. Pour l’heure, seul un litige lié à la neutralité du Net est dans les mains de l’Autorité de la concurrence qui l’a confirmé le 29 août dernier après une information de La Tribune : Cogent l’a saisie d’une plainte contre France Télécom pour abus de position dominante et discrimination dans l’acheminement de son flux. L’Arcep devrait être saisie pour avis, mais cette dernière nous a indiqué ne pas vouloir s’exprimer. « L’accès à certains contenus, services ou applications spécifiques (…) seraient susceptibles de faire l’objet de restrictions ou blocages ciblés », prévient néanmoins l’Arcep dans le premier texte soumis à consultation. Le régulateur, qui doit se doter d’outils de suivi de la qualité de service, va remettre d’ici le 23 mars prochain – soit au plus tard un an après la promulgation de la loi du 22 mars 2011 (2) – un rapport au Parlement sur ses travaux en matière de neutralité de l’Internet et des réseaux. Les contributions des deux consultations aideront donc à finaliser ce rapport sur : les instruments et les procédures de suivi de la qualité de service de l’accès à l’Internet ; la situation et les perspectives des marchés de l’interconnexion de données ; les pratiques de gestion de trafic des opérateurs télécoms. « Notre approche est essentiellement préventive, l’objectif n’étant pas de définir des exigences minimales de qualité de service », prévient le régulateur dans le premier texte soumis à consultation. « Cette approche s’inscrit dans un contexte de crainte de sous-investissement des opérateurs, lequel pourrait conduire à une pénurie artificielle de ressources », s’inquiète-t-il.
Quoi qu’il en soit, l’Arcep explique plus loin qu’il s’agit aussi d’ »évaluer l’opportunité de fixer des exigences minimales de qualité du service d’accès à l’Internet ». D’autant que le nouveau cadre réglementaire (3) lui a donné le pouvoir de fixer ces exigences minimales de qualité du service. @