La loi Création devrait inclure YouTube et Dailymotion

En fait. Le 23 décembre, le CSA a publié le rapport – remis au gouvernement le
12 novembre – sur l’application du décret de 2010 concernant les services de médias audiovisuels à la demande (SMAd). Proposition : étendre les obligations
de la VOD et de la TV de rattrapage à YouTube et Dailymotion notamment.

En clair. En prévision du projet de loi Création, dont l’adoption en conseil des ministres
a été promise pour février 2014, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) suggère au gouvernement et, partant, au législateur d’étendre son pouvoir sur Internet en faisant entrer dans la définition des SMAd « des grandes plates-formes de partage de vidéos qui s’imposent de plus en plus dans les usages, comme un moyen d’accès privilégié à toute sorte de contenus audiovisuels, à des extraits de programmes diffusés à l’antenne ou encore à des vidéo-musiques ». La filiale de Google, YouTube, et celle d’Orange, Dailymotion, sont les premières visées par ce rapport, qui, curieusement, n’a pas fait réagir l’Association des services Internet communautaires (Asic) dont sont membres
les deux plates-formes vidéo.

Next Gen Regulation

Ce mois-ci, la décision vient de tomber dans les rédactions : les régulateurs états-unien et européen se sont mis d’accord pour que soit étudiée la disparition à terme des coûts du roaming entre les nations de ces deux continents. Ce précédent ouvre la voie, pour le reste de la planète, à la fin de la surtaxe des appels passés de son portable depuis l’étranger. A l’heure de l’universalité des services mobiles,
il s’agissait de l’un des symboles fort de la matérialisation d’un marché enfin unique des télécoms souhaité par les Européens. Réalisé avant 2020, la fin du roaming à l’échelle de l’Union européenne n’a cependant pas été obtenue sans d’âpres négociations. C’est la parfaite illustration de l’équilibre complexe auquel les régulateurs en charge des industries de communication doivent parvenir : obtenir le maximum d’avantages pour les consommateurs, tout en préservant de grands objectifs collectifs à long terme comme la capacité à investir dans les technologies du futur. Mais comme la gouvernance du monde est un vieux rêve de l’humanité, avant d’être une belle utopie en construction se heurtant aux mille-feuilles des nations, la règlementation de l’économie numérique est un chantier permanent et sujet à toutes les controverses. Le commun des mortels, lui, a du mal à s’intéresser aux subtilités byzantines d’autorités administratives dont les prérogatives sont souvent mal connues.

« Les régulateurs se retrouvèrent
à la remorque d’une industrie numérique
soumise à une accélération sans précédent. »

Eric Walter, Hadopi : « Je ne crois pas à une régulation d’Internet, à la fois illusoire, inutile et dangereuse »

C’est la première interview que le secrétaire général de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) accorde depuis la rentrée. Il espère que le CSA saura tirer parti de trois ans d’expérience de l’institution et que le gouvernement donnera suite à plusieurs de ses propositions.

Propos recueillis par Charles de Laubier

EW-HEdition Multimédi@ : Alors qu’Aurélie Filippetti présentera
sa « grande loi sur la création » lors d’un Conseil des ministres en février 2014, craignez-vous le transfert de l’Hadopi vers le CSA ? La régulation de l’audiovisuel est-elle compatible avec une régulation du Net si tant est qu’elle soit souhaitable ?
La séparation du collège et de l’instruction suffira-t-elle ?
Eric Walter :
L’existence d’une institution n’est pas une fin en soi. C’est un outil au service de missions décidées par le législateur.
Ce qui importe, et Marie-Françoise Marais comme Mireille Imbert-Quaretta l’ont toujours exprimé très clairement, c’est l’acquis de l’expérience et les missions dont est investie à ce jour l’Hadopi.
Au delà des controverses, leur objectif est clair : préserver et renforcer la diversité et
la dynamique de tout ce qui contribue aujourd’hui au financement de la création, dans
le nouveau contexte que crée Internet. Personne ne peut vouloir prendre le risque d’assécher ces moyens grâce auxquels notre pays dispose d’une formidable variété
de création.

Qualité de service : l’Arcep va informer les internautes

En fait. Le 20 novembre, Jean-Ludovic Silicani, président de l’Arcep, a présisé à EM@ que les premiers résultats de la qualité de l’accès à Internet – à partir d’un ordinateur – seront publiés « avant la fin du premier trimestre 2014 ». Ensuite, l’Arcep envisage des outils plus interactifs avec les internautes.

En clair. L’Arcep y travaille depuis début 2012 et a pris une décision-cadre début 2013. Mais cette fois, la mesure de la qualité d’accès à Internet à partir d’un ordinateur (Internet fixe) est sur le point de voir le jour en France. C’est l’une des principales composantes de la neutralité d’Internet. « Nous aurons – avant la fin du premier trimestre 2014 – les premiers résultats de la qualité de l’accès à Internet sur quatre ou cinq caractéristiques
(le temps de latence, les débits, etc). Nous les rendrons publics et nous les améliorerons pour avoir des données réccurentes pour voir si la qualité d’accès à Internet évolue et si ce niveau est correct », nous a expliqué Jean-Ludovic Silicani,
le président de l’Arcep, en marge de son intervention au DigiWorld Summit de l’Idate
à Montpellier.
Il prévient que si le régulateur constatait la baisse globale du niveau de qualité de service, en-dessous d’un certain seuil, il se réserverait alors le droit, comme le prévoit la directive « Service universel et droits des utilisateurs » (1) et sa transposition en France (lire EM@41, p. 4), la possiblité de définir un standard minimal de qualité d’accès aux haut débit et très haut débit. En outre, l’Arcep étudie la façon de fournir aussi aux internautes des outils de mesure de la qualité de leur accès à l’Internet fixe
et mobile. Objectif : que les abonnés puissent – avec une « appli » ou un site web de monitoring – contrôler par eux-mêmes les éventuels blocages ou ralentissements de leur ligne et vérifier ainsi que leur FAI et opérateur mobile respectent la neutralité du Net.

Giuseppe de Martino, Asic : « Les services de vidéos en ligne ne sont pas concernés par le conventionnement »

Le président de l’Association des services Internet communautaires (Asic), dont sont membres Google/YouTube, Facebook, Dailymotion, Yahoo, AOL, Spotify ou encore Deezer, tient à mettre les points sur les “i” pour dire que la régulation de l’audiovisuel n’est pas transposable à Internet.

Propos recueillis par Charles de Laubier

GdeMEdition Multimédi@ : La consultation Communication audiovisuelle et services culturels numériques de la DGMIC s’est achevée le 30 octobre. Sans attendre les résultats, la loi sur l’audiovisuel public qui va être promulguée prévoit aux articles 24 et 25 que tous les services de vidéo en ligne sur Internet (SMAd) devront être déclarés auprès du CSA : est-ce justifié et craignez-vous le conventionnement de ces services assorti d’obligations ?
Giuseppe de Martino :
Vous ne pouvez pas dire cela ! Les services de vidéo en ligne ne sont pas en soi des services de médias audiovisuels à la demande (SMAd). Des plates-formes comme YouTube et Dailymotion sont expressément exclues de la définition des SMAd, et ceci tant par la directive européenne « Services de médias audiovisuels » (1) et notamment son attendu n°16 que par la loi française elle-même. Relisez le texte !
Donc nous ne craignons rien, si ce n’est – pour les SMAd que nous ne représentons
pas – un formalisme inutile et freinant leur développement balbutiant.
On souhaiterait annihiler l’écosystème français et sa capacité à se développer que l’on
ne s’y prendrait pas autrement. Qui se souvient que la culture française est l’un de nos premiers secteurs d’exportation? En empêchant des acteurs français de se développer
et de pouvoir se battre à armes égales en Europe, on va tout simplement insérer des clous supplémentaires dans leur cercueil.