Le chinois TikTok séduit l’édition avec son BookTok

En fait. Le 28 novembre, les 23ès Assises du numérique, organisées à Paris par le Syndicat national de l’édition (SNE), accueilleront TikTok France, filiale du chinois ByteDance, pour parler de sa communauté BookTok. TikTok Allemagne a été partenaire de la Foire du Livre de Francfort. Bientôt au Festival du livre de Paris 2023 ?

En clair. Un peu plus d’un mois après avoir été partenaire pour la première fois du Salon du livre de Francfort, qui s’est déroulé du 19 au 23 octobre derniers, TikTok va continuer de faire la promotion de sa communauté BookTok mais cette fois à Paris aux Assises du livre numérique qui se tiennent le 28 novembre. Organisées par le Syndicat national de l’édition (SNE) avec le soutien de la Société française des intérêts des auteurs de l’écrit (Sofia) et du Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), cette journée fera intervenir une représentante de TikTok France : Elodie Ricquier Veybel, jusqu’alors responsable des partenariats contenus, promue en novembre responsable « modes de vie et formation » (1).
La filiale française du chinois ByteDance (2) veut montrer comment la communauté BookTok de lecteurs et de lectrices contribue au succès de livres et de leurs auteurs grâce à la recommandation sur sa plateforme de partage de vidéos. Rien qu’en France, où TikTok compte selon Médiamétrie un peu moins de 20 millions de visiteurs uniques par mois, plus de 375.900 vidéos totalisant 1,6 milliard de vues ont été publiées sur les neuf premiers mois de cette année par les « BookTokeurs » qui se manifestent via le hashtag #booktok pour parler littérature. Mais c’est au niveau mondial, où TikTok totalise quelque 1 milliard d’utilisateurs actifs, que BookTok tend à devenir un « phénomène » (dixit TikTok) incontournable pour la promotion de l’édition : ce bouche-à-oreille virtuel et viral incite notamment les « adolécrans » à lire de la littérature pour jeunes adultes (3).
« Créateurs, auteurs et amateurs de lecture se réunissent sur TikTok tous les jours pour partager leur passion pour les livres. Avec plus de 73 milliards de vues dans le monde, #BookTok a donné une nouvelle vie aux titres classiques et a contribué à attirer de nouveaux auteurs et livres à un public de millions de personnes », s’était félicité Tobias Henning, directeur général de TikTok Allemagne et Europe de l’Est et centrale, au début de la Foire du livre de Francfort. Au 18 novembre, le compteur de #BookTok a grimpé à 90,4 milliards de vues (4). A la suite du mot dièse local #GermanBookTok, est apparu aussi #BookTokFrance. Par exemple, l’auteur suisse Joël Dicker, du bestseller « La Vérité sur l’affaire Harry Quebert », en a profité. De même que le Français Stéphane Ribeiro, pour son « Tout sur nous ». @

Le marché mondial des métavers pourrait avoir à terme un impact économique bien réel

L’équipementier télécoms Ericsson a publié en octobre une étude voulant démontrer que « la 5G ouvre la voie au métavers ». Une étude d’Analysis Group, financée par Meta et parue en mai dernier, chiffre à 3.000 milliards de dollars l’apport des métavers au PIB Mondial d’ici 2031. Nouvel Eldorado ?

Les métavers font couler beaucoup d’encre, mais ils tardent à faire la preuve de leurs réelles perspectives économiques. Contribuerontils à hauteur de 3.000 milliards de dollars au produit intérieur brut (PIB) mondial d’ici le début de la prochaine décennie, comme le calcule Analysis Group dans son étude publiée au printemps dernier et financée par le groupe Meta (ex-Facebook) ? L’agence financière Bloomberg, elle, table sur un marché mondial du métavers de 800 milliards de dollars d’ici 2025. Entre les équipements (casques de réalité virtuelle en tête) et les dépenses dans ces mondes virtuels (dont la publicité), les perspectives sont dignes d’un « Eldorado 3.0 ».

La 5G, un catalyseur de métavers
De son côté, le suédois Ericsson a publié en octobre une étude intitulée « 5G : The Next Wave », présentée comme « la plus grande étude sur la 5G menée à ce jour auprès des consommateurs » (49.100 personnes interrogées dans 37 pays, représentatives de 430 millions d’utilisateurs de la 5G). Il en ressort que « l’adoption de la 5G ouvre la voie au métavers » et que « la transition des services immersifs vers des expériences métavers est en cours », les abonnés à la 5G faisant déjà leurs premiers pas dans ces mondes virtuels.
L’équipementier télécoms suédois, qui fournit bon nombre d’opérateurs de réseaux en infrastructure mobile (3G, 4G, 5G, …), constate que les utilisateurs de la 5G consacrent aujourd’hui en moyenne une heure de plus par semaine que les utilisateurs de la 4G à des activités liées aux métavers. Ils y pratiquent le jeu en ligne, la socialisation, le shopping, la participation à des concerts ou à des événements virtuels, ainsi que l’utilisation d’applications de réalité augmentée. « Les utilisateurs de la 5G pensent que d’ici 2025, 2 heures supplémentaires de contenu vidéo seront consommées chaque semaine sur les appareils mobiles, dont 1,5 heure sur les lunettes de réalité mixte plutôt que sur les smartphones », souligne le ConsumerLab d’Ericsson, dirigé par Jasmeet Sethi (photo de gauche), qui a réalisé ce sondage planétaire. Quant aux utilisateurs de la 4G, ils prévoient d’accroître leur « engagement », autrement dit les interactions, avec le métavers une fois qu’ils se seront abonnés à la 5G : 41 % indiquent qu’ils commenceront à utiliser ou à accroître leur utilisation de la réalité augmentée. « Globalement, six utilisateurs de smartphones sur dix pensent que la 5G est essentielle à la réalisation du métavers. La vitesse plus élevée, la fiabilité et le faible temps de latence de la 5G permettent aux utilisateurs de faire l’expérience de la XR [eXtended Reality] et d’autres activités », relève l’étude d’Ericsson. En France notamment, « 30 % des utilisateurs français déclarent qu’ils commenceront ou augmenteront l’utilisation d’applications de réalité augmentée dans le monde réel après avoir souscrit à la 5G ».
Autres enseignements de l’enquête mondiale : les utilisateurs de la 5G passent en moyenne 1 heure de plus par semaine dans les métavers que les utilisateurs de la 4G. Ces mondes virtuels existent dans les jeux en ligne et mobiles comme ceux de Roblox, Fortnite ou des jeux de réalité augmentée comme ceux de Niantic, mais aussi sur les plateformes de réalité virtuelle sociale ou les plateformes qui permettent aux utilisateurs de créer des expériences, de se socialiser, de vendre et d’acheter, de se divertir dans des environnements en 3D tels que Zepeto ou Ifland des groupes sud-coréens respectivement Naver et SK Telecom. « Les technologies telles que la VR [Virtual Reality], la AR [Augmented Reality], l’AI [Artificial Intelligence], la 5G, la blockchain, les NFT et bien d’autres sont toutes situées dans le monde des métavers et représentent une convergence et une mise à l’échelle de ces différents produits, services et visions en un seul ou plusieurs mondes en ligne interopérables », explique le ConsumerLab (1).

Les entreprises vont se « métaverser »
Les consommateurs s’attendent à ce que la 5G continue de pousser l’utilisation améliorée des vidéos au-delà du smartphone, à savoir sur les casques de réalité virtuelle et sur les lunettes connectées : en 2025, au moins 2 heures de contenu vidéo seront consommées chaque semaine sur les appareils mobiles, dont 1,5 heure sur les lunettes AR/VR (voir graphique page suivante). De son côté, le cabinet d’étude américain Gartner est lui aussi confiant en l’avenir du métavers : d’ici 2026, un quart des gens dans le monde passeront au moins 1 heure dans le métavers pour le travail, le shopping, l’éducation, l’interaction sociale et/ou le divertissement. La moitié des utilisateurs de la 5G qui utilisent déjà des services de réalité virtuelle (VR), constate Gartner, pensent que les applications de réalité augmentée (AR) passeront des smartphones aux casques XR d’ici deux ans, alors qu’un tiers seulement des utilisateurs de la 4G le pensent. « Les fournisseurs créent déjà des moyens pour les utilisateurs de reproduire leur vie dans le monde numérique. Qu’il s’agisse d’assister à des classes virtuelles, d’acheter des terrains numériques ou de construire des maisons virtuelles, ces activités se déroulent actuellement dans des environnements distincts. Ils finiront par se dérouler dans un environnement unique – le métavers – avec de multiples destinations », prévoit Marty Resnick (photo de droite), vice-président chez Gartner. Selon lui, comme aucun fournisseur unique possédera le métavers, il faut s’attendre à ce qu’il ait une économie virtuelle activée par les monnaies numériques (les cryptos) et les jetons non-fongibles (NFT). Cela sera aussi valable dans le monde des entreprises, qui pourront se réorganiser avec des espaces de travail immersifs dans des bureaux virtuels, d’autant que les deux années de confinements ou de restrictions sanitaires ont popularisé les visioconférences, les webinars ou encore les téléconsultations.

Lever les doutes persistants
Les entreprises n’auront pas besoin de créer leur propre infrastructure pour le faire parce que le métavers fournira le cadre. « D’ici 2026, 30 % des organisations dans le monde auront des produits et des services prêts pour le métavers », projette Marty Resnick (2). De quoi conforter Mark Zuckerberg, PDG cofondateur de Facebook – géant du Net devenu il y a un an Meta pour mieux embrasser la cause du métavers. Dans son étude d’une cinquantaine de pages (3) commanditée par Meta justement, le cabinet d’études américain Analysis Group évalue l’impact positif du métavers dans son ensemble à 2,8 % du PIB d’ici 2031. La région du monde qui en profitera le plus sera l’Asie-Pacifique (2,3 % du PIB), suivie des Etats-Unis (2,3 %), de l’Europe (1,7 %) et du Moyen-Orient/Afrique du Nord/Turquie (6,2 %). D’autres études tentent aussi de chiffer le futur du métavers : Grand View Research (4) prévoit près de 679 milliards de dollars en 2030 ; McKinsey (5) table sur 5.000 milliards de dollars en 2030 ; Fortune Business Insights (6) avance plus de 500 milliards de dollars en 2029.
Mais les freins aux déploiements des métavers existent, tels que leur impact carbone sur l’environnement (7). Quant aux Etats, ils ne veulent pas y perdre leur « souveraineté culturelle et technologique ». C’est du moins la volonté du gouvernement français qui a publié le 24 octobre un rapport « exploratoire » sur les métavers avec dix propositions (8), dont l’une est la création d’« un institut de recherche et coordination, sur le modèle de l’Ircam » (9).
Il y a aussi et surtout l’attentisme de la plupart des 4,5 milliards d’utilisateurs de réseaux sociaux dans le monde, notamment ceux de la jeune génération « TikTok », qui… attendent de voir. Résultat : les métavers d’aujourd’hui semblent déserts, au grand dam de « Zuck » et de son directeur du métavers, Vishal Shah (photo), lequel a envoyé le 20 septembre à ses propres équipes un memo – révélé le 7 octobre par The Verge – leur disant : « Tout le monde dans cette entreprise [Meta] devrait se donner pour mission de tomber amoureux d’Horizon Worlds [le métaversmaison, ndlr]. Vous ne pouvez pas le faire sans l’utiliser. Allez-y ! » (10). Y-a plus qu’à. @

Charles de Laubier

Grâce au digital, la musique monétise plus sa sync

En fait. Le 26 octobre, Samsung a lancé avec TikTok un nouveau format musical baptisé StemDrop, qui permet aux utilisateurs du réseau social de s’approprier de courts extraits de 60 secondes pour leurs créations. Cet accord s’inscrit dans le sillage de la croissance de la « synchronisation numérique ».

En clair. Annoncé le 19 octobre, le nouveau format international StemDrop est opérationnel depuis le 26 octobre pour tous les utilisateurs disposant d’un compte TikTok dans huit pays européens, dont la France (1), ainsi qu’aux Etats-Unis. Ce sont des centaines de millions de tiktokeurs qui pourront « s’approprier » des extraits musicaux originaux de 60 secondes disponibles sur le réseau social du chinois ByteDance.
Cette initiative sans précédent, dont l’ambition est de « révolutionner la collaboration musicale, démocratiser la production de musique et offrir à tous les créateurs une plateforme inédite pour exposer leur talent au monde entier », se fait sous la houlette de la première major mondiale Universal Music et de la société de production britannique Syco Entertainment (fondée par Simon Cowell). « StemDrop offre aux créateurs de musique [artistes en herbe, émergents ou confirmés, ndlr] une occasion incroyable de collaborer avec les meilleurs auteur-compositeur du monde, à commencer par Max Martin, lauréat de cinq Grammy Awards », expliquent Samsung et TikTok (2). Les tiktokeurs auront accès aux « stems » (3), comprenez les éléments composant la chanson : batterie, basse, chant, etc. Le mixeur musical StemDrop permet alors à chaque créateur de produire sa propre version du morceau. Pour l’analyste Mark Mulligan, cet accord international préfigure ce vers quoi l’industrie musicale doit aller pour plus monétiser ses extraits musicaux sur les réseaux sociaux comme TikTok, Snap ou Intagram. Car cela relève du droit de « synchronisation numérique », en référence à la synchronisation traditionnelle – ou « sync » – qui désigne la licence pour utiliser un morceau de musique dans un film, une émission de télévision, une publicité, un jeu vidéo, un site web ou encore une bande-annonce. En 2021, d’après l’IFPI, les revenus de la sync dans le monde ont bondi de 22 % à 549 millions de dollars.
Avec la montée en puissance des médias sociaux musicaux dont TikTok et des plateformes vidéo comme YouTube (sans parler de la SVOD), Mark Mulligan estime que « l’industrie de la musique a besoin d’un nouveau format (…), qui ouvrira idéalement la voie à la monétisation métavers également ». Selon lui, un format de musique de 15 à 30 secondes pourrait être une solution (4), « mais ce serait probablement trop statique ». De nouveaux droits musicaux restent à inventer. @

Elon Musk – devenu à 50 ans la personne la plus riche du monde – « pense [toujours] à un autre monde »

Le Sud-Africain blanc (anti-apartheid comme son père), Etats-unien depuis 20 ans, vit à 100 à l’heure. Elon Musk est devenu milliardaire il y a 10 ans et, grâce à ses investissements (Tesla, SpaceX, TBC, OpenAI, Neuralink, SolarCity, Twitter, …), pourrait devenir le premier trillionaire de l’histoire.

Sous le feu des projecteurs et sous une pluie de critiques depuis qu’il veut s’emparer de Twitter, le PDG fondateur de l’entreprise spatiale SpaceX et DG du fabricant d’automobiles électriques Tesla (1) ne cesse de défrayer la chronique, qu’il alimente lui aussi par ses tweets débridés et ses prises de parole décomplexée. Elon Musk, qui va fêter ses 51 ans le 28 juin, fascine et agace à la fois.
Considéré aussi bien comme visionnaire hors-pair que comme provocateur invétéré, le trublion multimilliardaire continue d’investir gros et à tout-va, en prenant des risques personnels et professionnels, ce qui lui réussit. S’il détient bien un quart de Tesla (actions et options d’achat cumulées), il a hypothéqué la moitié de ses actions pour obtenir des prêts financiers, notamment pour son projet de racheter Twitter 44 milliards de dollars. Né à en 1971 à Prétoria d’un père sud-africain et d’une mère canadienne, le triple nationalisé – Sud-Africain, Canadien (où il a émigré à 17 ans) et, depuis 20 ans, Américain – semble s’être installé cette année durablement sur le trône de la personne la plus riche du monde, première place qu’il avait prise brièvement au patron d’Amazon Jeff Bezos en 2021. Le Crésus de ce début du XXIe siècle détient une fortune professionnelle de 225,8 milliards de dollars (au 23-06-22), selon Forbes (2).

« L’homme qui valait 1.000 milliards », en 2025 ?
Bien que le fléchissement des places boursières et la crise économico-inflationniste lui aient fait perdre en deux mois plus de 55 milliards de dollars, l’acquisition pour 44 milliards de dollars des 90,8 % des actions de Twitter qu’il ne possède pas encore devrait le conforter – si son OPA aboutit – dans sa position de premier milliardaire mondial. N’en déplaise à Jeff Bezos, Bernard Arnault, Bill Gates ou encore à Warren Buffett (3). Elon Musk pourrait même se détacher du peloton de tête pour devenir dans le courant de la décennie le premier trillionaire toute l’histoire du capitalisme. Sur sa lancée – sa fortune ayant bondi de près de 1.000 % (817,8 % précisément au 23-06- 22) entre 2020 et 2022, le libertarien iconoclaste remplit toutes les conditions pour devenir le tout premier à être « l’homme qui valait 1.000 milliards ». Elon Musk est le seul des huit cent milliardaires (4) à être actuellement au-delà des 200 milliards. Et d’après l’étude « The Trillion Dollar Club » réalisée par la fintech-cloud californienne Tipalti Approve, publiée au début du printemps dernier (5), le patron de Tesla et de SpaceX pourrait inaugurer ce club des trillionaires dès 2024 – dans deux ans. Le nouveau « super- Rockefeller » aura alors 53 ans le 28 juin de cette année-là, avec une fortune professionnelle estimée à plus de 1,3 trilliards de dollars : 1.300 milliards !

Un serial-investor de haut-vol
Rêvant de coloniser Mars, Elon Musk a la tête dans les étoiles et « pense à un autre monde », comme disait sa mère lorsqu’il était encore enfant et au moment où des médecins croyaient qu’il était sourd (6). Pour l’heure (au 23- 06-22), la capitalisation boursière de Twitter est de 29,5 milliards de dollars et celle de Tesla de 734 milliards de dollars. Quant à SpaceX, qui est une entreprise non cotée, elle est valorisée 125 milliards de dollars depuis une levée de fonds réalisée fin mai. Elle déploie la constellation Starlink, nom aussi de l’opérateur satellitaire qui a été autorisé fin mai en France par l’Arcep (7). L’entrepreneur multirécidiviste est aussi le cofondateur PDG de Neuralink, start-up californienne créée il y a cinq ans, non cotée et valorisée quelques centaines de millions de dollars. Ayant levé plus de 360 millions de dollars au total à ce jour, elle vise à connecter le cerveau humain à l’ordinateur grâce à la neurotechnologie et aux implants (au service des handicapés entre autres). Des tests sont actuellement menés sur des singes ou des porcs.
Neuralink a son siège social à San Francisco, dans le même bâtiment où se trouve OpenAI, une autre start-up cofondée, en 2015, par Elon Musk. Celle-ci mène des recherches en intelligence artificielle et développe un modèle linguistique formé sur des milliards de mots présents sur Internet afin de répondre aux questions en langage naturel ou traduire entre les langues. Non cotée, la licorne OpenAI est valorisée au moins 1 milliard de dollars grâce à ses multiples investisseurs, dont Microsoft. Elon Musk n’en est plus administrateur depuis 2018, pour éviter tout conflit d’intérêt avec Tesla AI (voiture autonome), mais reste actionnaire. Elon Musk avait aussi cofondé en 2006 la start-up SolarCity, positionnée sur l’énergie solaire photovoltaïque, société qui fut revendue dix ans plus tard à Tesla pour environ 2,6 milliards de dollars. Le touche-à-tout du capitalisme américain veut aussi révolutionner les transports urbains dans les grandes villes embouteillées en creusant des tunnels et y déployer des systèmes électriques à grande vitesse de transport souterrain (projet « Loop ») : fin 2016, il a fondé pour cela The Boring Company (TBC) spécialisée dans la construction de tunnels à l’aide de ses propres tunneliers : une première percée a été effectuée sous les bureaux californiens de SpaceX à Hawthorne. Cette licorne TBC, déjà valorisée près de 6 milliards de dollars, teste des « boucles intra-city » à Las Vegas et à Los Angeles.
Le tycoon de l’investissement de haut-vol a été diplômé « Wharton School » en physique et en sciences économiques il y a un quart de siècle (en 1997) à l’Université de Pennsylvanie (Etats-Unis), après être entré en 1990 à l’Université Queen’s à Kingston (au Canada, où il était arrivé l’année précédente d’Afrique du Sud). A 23 ans, en 1994, le jeune Elon Musk fait deux stages estivaux dans la Silicon Valley (8). Il a tenté l’année suivante d’entrer chez à Netscape, pionnière du Web avec son navigateur, mais sans jamais obtenir de réponse. Accepté en 1995 à l’Université Stanford pour faire un doctorat en philosophie (Ph.D.) en sciences des matériaux, il la quitte au bout de deux jours pour rejoindre le boom d’Internet et lancer une start-up avec son frère Kimbal : Zip2, développent des « city guides » pour la presse en ligne. Quatre ans plus tard (en 1999), ils l’ont cédée au fabricant de micro-ordinateurs Compaq pour plus de 300 millions de dollars. Elon Musk empoche 22 millions de dollars en cédant ses actions (7 %) et cofonde une startup de finances, de paiement et de banque en ligne, X.com, qui a fusionné l’année suivante avec la banque en ligne Confinity cofondée par un autre libertarien de la Silicon Valley, Peter Thiel, et dotée de son propre service de transfert d’argent : PayPal.
Elon Musk devient alors PDG du nouvel ensemble X.com et, préférant les logiciels Microsoft à Unix, provoque la démission de Peter Thiel, lequel sera rappelé en septembre 2000 par l’entreprise – après l’éviction d’Elon Musk par le conseil d’administration. Faisant trop « porno », X.com devient PayPal (9). En 2002, eBay a acquis PayPal pour 1,5 milliard de dollars en actions, dont 175,8 millions de dollars pour Elon Musk qui en était le premier actionnaire, à 11,7 %.

Du « technoking » au cryptomaniaque
C’était il y a 20 ans. L’avenir du futur multimilliardaire commence à se jouer : le Maverick (10) des temps modernes fonde début 2002 « Space Exploration Technologies Corp. », rebaptisé en mai de la même année SpaceX, dont il deviendra PDG en 2021 et ingénieur en chef ; il investit en février 2004 dans la société Tesla (11) dans laquelle il mise 6,5 millions de dollars et en devient l’actionnaire majoritaire et président, puis en 2008 PDG et architecte produits – « Technoking » (12) en 2021. Le « roi de la tech » est aussi un crytomaniaque, ce qu’il lui vaut notamment depuis juin un procès à 258 milliards de dollars pour avoir fait la promotion du Dogecoin, y compris en envisageant d’en faire la cryptomonnaie favorite de Twitter. @

Charles de Laubier

L’oiseau bleu : Elon Musk se sent pousser des ailes

En fait. Le 25 mai, se tiendra l’assemblée générale annuelle de Twitter. Elle devrait entériner l’acquisition du réseau social aux 280 caractères par le milliardaire Elon Musk pour 44 milliards de dollars. Le patron de Tesla et de SpaceX veut redonner un second souffle à l’oiseau bleu en augmentant la part des abonnements payants.

En clair. La personne la plus riche du monde – Elon Musk, doté d’une fortune personnelle de 223 milliards de dollars (1) – est en passe de s’emparer du réseau social Twitter pour 44 milliards de dollars, dont 21 milliards sur ses fonds propres. C’est du moins la somme que le conseil d’administration a finalement acceptée le 25 avril, à l’issue d’un feuilleton rocambolesque dont le patron de Tesla et de SpaceX a le secret (2). Ce dernier va racheter les 90,8 % du capital de l’oiseau bleu qu’il ne possède pas encore, en ayant déjà acquis le 4 avril 9,2 % pour 2,64 milliards de dollars (3).
Son offre, moyennant 54,20 dollars l’action (contre 46,09 au 12- 05-22), avait été déposée le 21 avril dernier auprès du gendarme de la Bourse américain, la SEC (4). L’assemblée générale annuelle de Twitter, prévue le 25 mai prochain (5), sera décisive pour cette OPA perçue initialement comme hostile par le conseil d’administration de l’oiseau bleu, avant de devenir acceptable. A la fin du processus d’acquisition, Elon Musk a déjà fait savoir qu’il retirera le titre « TWTR » de la Bourse de New York, où l’entreprise de San Francisco est actuellement valorisée un peu plus de 35 milliards de dollars (au 12-05-22). Le volatile a perdu de son plumage après avoir pris son envol il y a plus de quinze ans : en 2021, il a perdu 221,4 millions de dollars, pour un chiffre d’affaires essentiellement publicitaire de 4,5 milliards de dollars. Elon Musk veut réduire cette dépendance à la pub en augmentant la part des abonnements payants de « Twitter Blue » – lancé en novembre dernier aux Etats-Unis (2,99 dollars par mois), au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande, en attendant l’Europe. Mais il veut aussi accroître l’ARPU en faisant payer plus les commerçants et les gouvernements.
Le DG actuel Parag Agrawal augmente, lui, l’exposition à la publicité en multipliant des accords audiovisuels pour diffuser des contenus télévisés en direct sur Twitter (Fox Sports, E! News, Condé Nast, …). Il a promu en mars Teju Adeshola dit TJ (ex-ESPN) au poste de directeur des partenariats de contenus. Libertarien, né il y a 50 ans en Afrique du Sud (à Pretoria), naturalisé canadien en 1988 puis américain en 2002, Elon Musk veut en outre redonner toute sa place à la liberté d’expression sur Twitter – quitte à y réhabiliter Donald Trump aux Etats-Unis et à rassurer Thierry Breton (6) en Europe. @