Joël Ronez, groupe Radio France: « Devenir un média de référence sur smartphone et en radio filmée »

Le directeur des nouveaux médias et du Mouv’ à Radio France, Joël Ronez, explique à EM@ comment les sept stations du groupe public de radiodiffusion s’adaptent aux mutations numériques et à la mobilité des auditeurs. Cela passe par les smartphones, les réseaux sociaux et la radio filmée.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Joël RonezEdition Multimédi@ : Vous avez dit, aux rencontres Radio 2.0 du 15 octobre, que la radio avait une décennie d’écart dans le numérique sur la presse écrite : la radio peut-elle rattraper son retard dans les 3 révolutions digitales (écrit, vidéo et réseaux sociaux) ?
Joël Ronez :
Oui, bien sûr. Il ne s’agit pas d’un retard à proprement parler, mais d’un impact de la révolution numérique qui est plus tardif. Nous sommes aujourd’hui dans le grand mouvement de numérisation des médias broadcast, de la musique, et de l’avènement de l’Internet mobile et des smartphones. C’est pour l’écosystème de la radio un vrai défi, mais cela représente aussi de nombreuses opportunités.

RTL conteste à Europe 1 la place de n°1 du numérique

En fait. Le 7 novembre, Christopher Baldelli, président du directoire de RTL Radio depuis trois ans, était l’invité de l’Association des journalistes médias (AJM). Alors que son audience à l’antenne est menacée d’érosion, la première radio hertzienne de France entend « faire mieux » dans le numérique.

En clair. Christopher Baldelli ne supporte pas qu’Europe 1 se déclare « radio leader sur
le numérique ». Pour le président du directoire de RTL Radio en France, « Europe 1 n’est pas le leader du numérique ». « Si l’on regarde le nombre de podcasts et l’audience du site web, c’est nous qui sommes leader du numérique. (…) Nous allons communiquer pour le dire », a-t-il affirmé. S’il ne conteste pas que sa concurrente de Lagardère Active est la numéro 1 en nombre de podcasts téléchargés par mois, comme au mois d’octobre avec plus de 6,3 millions, contre 4,7 millions pour RTL (voir Indicateur p. 10), il estime que c’est en revanche loin d’être toujours le cas tous les mois pour le site europe.fr. Bien que ce dernier soit arrivé en tête des sites web de radio sur les mois de novembre (grâce à un bond de 48 % à 9,8 millions de visites (1), contre 8,3 millions pour rtl.fr qui décline de 2 %), le rapport est en effet inversé sur le mois précédent. En octobre, rtl.fr reprend la tête avec plus de 8,5 millions de visites (+ 2%), contre 6,6 millions pour europe1.fr (- 23 %), ce dernier ayant dépassé sa rivale au mois de septembre. Bref, pour Christopher Baldelli qui dirige la première radio hertzienne de France, Europe 1 – la quatrième radio hertzienne – ferait dans l’abus de langage. « Nous avons un meilleure classement, non seulement en podcast, où nous sommes passés de quatrième à second, mais aussi sur Internet », insiste le patron de RTL, qui édite aussi Fun Radio (4,9 millions de visites sur le site web en novembre) et RTL2 (1 million de visites).
Malgré cette polémique, Christopher Baldelli reconnaît que les podcasts et le streaming live (2) est « une écoute en plus ». C’est une aubaine pour les radios généralistes dont l’audience globale a perdu 1 point de part de marché sur un an, pendant que les radios musicales gagnaient 1 point. Surtout, c’est une source de rajeunissement de l’auditoire dont l’âge moyen pour une généraliste est de 57 ans. Or les 25-34 ans sont les plus nombreux à recourir à la catch-up radio. « Le podcast est un plus formidable, comme
la télévision de rattrapage que j’ai vécue avec M6 Replay (3). Mais la catch up est partie plus vite en télé ; elle progresse en radio », s’est-il félicité. Il a en outre annoncé que
M6 Publicité Digital sera la régie des sites web de RTL, RTL2 et Fun Radio dès
janvier 2013. @

Denis Olivennes, Lagardère Active : « Nous allons continuer à nous diversifier dans le e-commerce »

Président du directoire de Lagardère Active (Elle, Europe 1, Paris Match, JDD, MCM, …) depuis un an, Denis Olivennes (notre photo) veut accélérer dans le numérique qui représente moins de 85 millions d’euros sur 1 milliard de chiffre d’affaires. Ainsi, Elle va passer de la boutique à une « place de marché ».

Par Charles de Laubier

Lagardère Active a beau être le premier éditeur de presse magazine en France, numéro un de la presse féminine avec Elle, premier groupe de média sur Internet et premier groupe français en production audiovisuel, il n’en reste pas moins encore lilliputien dans le numérique.
Sur le milliard de chiffre d’affaires généré par Lagardère Active, le digital pèse en effet tout juste 8,5 %. Le problème est que ce taux n’a pas vraiment progressé depuis les 7 % constatés en 2010 puis en 2011, malgré l’objectif fixé à l’époque par Didier Quillot d’atteindre les 10 % des revenus avec le numérique (1).

Augmented Journalism

« Eh ! Viens voir ce numéro du Monde ! Et celui-ci du Financial Times ! ». Cette amie, qui me tire par la manche pour me montrer journaux et magazines, n’est pas devant un kiosque d’un autre temps. Non, ce matin nous sommes allés chiner aux puces. Et ce sont des exemplaires d’une presse papier déjà un peu jaunis qu’elle me montre avec les yeux brillants du collectionneur averti. C’est presque en la portant que je la ramène chez moi, à moitié évanouie d’émotion à la vue d’une Remington portative bien fatiguée ! Ce sont des symboles d’une aventure extraordinaire, celle de journalistes du quotidien ou enquêteurs au long cours, qui nous informèrent ou nous firent rêver, à l’aide d’une feuille, d’un stylo
ou d’un simple clavier. Cette nostalgie de la presse d’antan ne dure qu’un instant car un nouvel âge d’or du journalisme se dessine. Si, durant cette longue transition numérique, les rédactions ont perdu des dizaines de milliers de journalistes, peu à peu ce journalisme « diminué » par la crise se transforme en un journalisme « augmenté ». Ce journaliste
d’un nouveau genre est, comme ses anciens, toujours sur le terrain. Un terrain lui aussi augmenté, tout à la fois monde physique et monde numérique. Pour en arriver là, il a bien fallu que les professionnels de l’info prennent en main ces nouveaux outils qui leur firent d’abord si peur. D’autant que Monsieur Tout-le-monde remettait en cause leur statut en blogant, en tweetant, en commentant en ligne l’actualité ou en envoyant aux rédactions des photos ou des vidéos prises dans l’instant.

« Cette nostalgie de la presse d’antan ne dure qu’un
instant car un nouvel âge d’or du journalisme se
dessine, à la fois physique et numérique »

L’AFP n’exclut pas une offre de dépêches sur Internet

En fait. Le 26 juin, en marge du colloque NPA-Le Figaro sur les médias et le numérique, Edition Multimédi@ a demandé à Emmanuel Hoog, PDG de l’AFP, s’il prévoyait de diffuser les dépêches sur Internet et les mobiles pour concurrencer
les autres agences mondiales (Reuters, AP, Bloomberg, …) qui le font déjà.

En clair. « Je ne sais pas… », a répondu le patron de l’Agence France-Presse (AFP). Autant dire qu’il n’exclut toujours pas cette perspective de proposer au grand public des dépêches directement sur Internet, les mobiles et les tablettes. C’est du moins ce qu’il envisage depuis qu’il a été nommé il y a plus de deux ans (1) à la tête de la troisième agence de presse mondiale, malgré l’opposition des éditeurs de presse. « Je n’ai jamais dit que nous mettrions les dépêches AFP sur Internet », nous a-t-il cependant assuré.Pourtant, lors de la présentation le 27 janvier 2011 de ses priorités 2010-2020, il avait déclaré : « La présence de l’AFP sur Internet est une question légitime et notre marque doit se développer à l’extérieur sur les modèles de croissance comme l’iPad, l’iPhone et Internet ». Sans faire comme l’agence italienne ANSA et ses 450 dépêches en ligne par jour, il avait parlé d’ »une centaine de dépêches par jour ».
Depuis que le statut de l’AFP a été modifié par l’article 100 d’une loi datée du 22 mars 2012 – afin de lui confier des « missions d’intérêt général » (2) et justifier ainsi aux yeux de la Commission européenne le financement qu’elle reçoit en « compensation » de l’Etat (3) –, qu’est-ce qui empêche maintenant l’AFP de concurrencer ses rivaux mondiaux sur ce terrain-là ?