Comment la TV connectée s’ouvrira aux éditeurs

En fait. Le 19 octobre, le rapporteur de la mission sur la TV connectée, Mohammed Adnène Trojette, a indiqué à EM@ que le rapport demandé à Marc Tessier, Philippe Levrier, Takis Candilis, Martin Rogard et Jérémie Manigne « ne sera pas rendu avant mi-novembre ». Le grand défi est de lever les obstacles.

En clair. Lancée il y a maintenant six mois, la mission confiée par Frédéric Mitterrand
et Eric Besson devait rendre ses « recommandations » le 1er octobre. Or, selon nos informations, le rapport ne sera rendu que vers la mi-novembre. Des « auditions
électives » ont été nécessaires, suite à l’appel à contribution ouvert jusqu’au 15 septembre par les DGMIC (1) et DGCIS (2). Car la TV connectée fait entrer dans la chaîne de valeur du PAF (3) des acteurs aux intérêts parfois radicalement divergents (chaînes de télévision, fabricants de téléviseurs, sites web, plateformes de VOD,
éditeurs de services, FAI, opérateurs télécoms, fabricants de consoles de jeux, etc).
Les recommandations des « cinq » – Marc Tessier (Vidéo Futur), Philippe Levrier (CNC), Takis Candilis (Lagardère Active), Martin Rogard (Dailymotion) et Jérémie Manigne
(SFR) – vont tenter de ménager les chaînes et les nouveaux entrants. La contribution du Groupement des éditeurs de services en ligne (Geste) exprime bien les préoccupations.
Les éditeurs estiment en effet qu’ils « se heurte[nt] à la réalité d’un marché fragmenté
où chaque constructeur déploie une norme propriétaire propre, contraignant ainsi potentiellement les éditeurs à décliner leurs offres en développant autant de services connectés que de téléviseurs disponibles sur le marché ou que de set-top-boxes proposées par les opérateurs en IPTV ». La fragmentation technique des terminaux constitue « frein » et « barrière à l’entrée », en faisant « exploser les coûts de développement ». Il y a bien le HbbTV. « Mais, déplore le Geste, ce standard concerne essentiellement les perspectives d’enrichissement des flux vidéos des chaînes de télévision par des services connectés et ignore le cas des applications, tierces aux chaînes de télévision, référencées dans les portails constructeurs ou opérateurs ».
Serait donc salutaire une normalisation de la TV connectée au sein du W3C (4), lequel
y travaille. Et la neutralité du Net ? Le Geste craint « un risque majeur pour l’utilisateur
de voir sa liberté d’accès aux contenus et services de son choix fortement restreinte au profit des seuls services maîtrisés (portails) ou gérés (TV sur IP) par les opérateurs et constructeurs de terminaux ». Sans parler des risques de « cloisonnement vertical » (exclusivités) ou de « modèles fermés à l’instar d’Apple ». @

Les FAI et le cinéma français en chiens de faïence

En fait. Le 25 octobre dernier, le président de la République a reçu des représentants du cinéma (Bloc, ARP, UPF, SACD, …) et le CNC à propos du
budget de ce dernier adopté par les députés dans le projet de loi de finances 2012. Les opérateurs télécoms, eux, contestent la taxe télévision (TST).

En clair. Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) – au premier rang desquels Free
qui a sorti en décembre 2010 la distribution des chaînes de télévision de son offre
triple play pour réduire sa taxe au Compte de soutien à l’industrie de programmes (Cosip)  – se rebiffent une nouvelle fois (1). La FFT a en effet réagi vertement contre l’amendement TST (taxe sur les services de télévision) adopté le 21 octobre à l’Assemblée nationale. Non seulement il empêche les FAI d’échapper à la taxe Cosip mais il autorise en plus l’Etat à détourner une partie des recettes « plafonnées » perçues par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), lequel gardera 229 millions d’euros sur les 300 millions que pourrait rapporter – selon l’Arcep – la TST en 2012. En 2010, ce prélèvement avait été de 190 millions d’euros. Ainsi, les membres de la FTT – qui s’attendaient à payer la même somme l’an prochain – « contestent fortement l’idée d’une TST dont l’excédent, au delà de la part nécessaire pour le financement des actions du CNC, servirait à abonder le budget de l’Etat, ce qui reviendrait à ajouter un nouveau prélèvement sur l’accès à Internet fixe
et mobile » (2). Près de 100 millions d’euros de surplus pourraient ainsi être réaffectés
au futur Centre national de la musique (CNM), lequel sera à la filière musicale ce qu’est
le CNC au cinéma français (3).
Comme l’an dernier, une partie des recettes du CNC vont être détournés par l’Etat. Comme l’an dernier, une plainte pourrait être déposée auprès la Commission européenne par Free et/ou la Fédération française des télécoms. A moins que les opérateurs télécoms n’obtiennent gain de cause au Sénat… En réalité, les FAI se retrouvent entre le marteau, à savoir les sociétés de gestions des droits – via Sorecop et Copie France – qui veulent augmenter la rémunération de la copie privée (taxation des box, des smartphones, …), et l’enclume, que sont les producteurs audiovisuels et cinématographiques qui préfèrent les prélèvements à la source pour subventionner leurs investissements (via le CNC, bientôt le CNM, …). Le Conseil d’Etat, avec sa décision du 27 juin dernier, leur avait passé du baume au cœur en annulant la décision nº 11 de la Commission copie privée prévoyant de taxer les smartphones. Mais ce qu’ils récupèreraient d’un côté, ils le perdraient de l’autre. @

Nicolas Seydoux, président du Forum d’Avignon : « Chacun doit protéger la culture »

Le président des Rencontres internationales de la culture, de l’économie et des médias – organisées à Avignon du 17 au 19 novembre – explique à EM@ les enjeux de cet événement. Le patron de Gaumont, président de l’Alpa, en appelle aussi aux FAI pour lutter contre le piratage sur Internet et financer la création.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Le Forum d’Avignon, que vous présidez, a pour thème cette année « Investir la culture ». Pourquoi ? Nicolas Seydoux : L’ambition du Forum d’Avignon est non seulement d’apporter des messages, des idées ou des opinions au monde de la culture, mais aussi à l’ensemble de la collectivité des décideurs, économiques ou politiques. Le monde est à la recherche de repères. La culture, quelle qu’en soit la définition ou l’absence
de définition, représente fondamentalement des valeurs éthiques
et esthétiques, qui plongent leurs racines dans le temps. Dans le monde moderne, tout doit être réglé dans l’instant, alors qu’il faut savoir donner du temps au temps, pour reprendre l’expression de François Mitterrand. La crise ne peut se régler qu’en rappelant les éléments fondamentaux de chacune de nos sociétés, à commencer par la culture. Le Forum d’Avignon veut avant tout éviter de recréer un ghetto culturel culturel français. Il est international – 40 nationalités représentées – et trans-sectoriel avec plus de 50 activités différentes, des journalistes aux artistes et personnalités politiques, en passant par des entrepreneurs de groupes de médias ou d’entreprises de la nouvelle économie. Certains, comme Vivendi (France) ou Reliance (Inde), sont présents à la fois dans le contenu et dans le contenant. Ces mondes, qui trop souvent sont coupés les uns des autres, doivent regarder ensemble les problèmes de notre temps. « Investir la culture », c’est s’investir au sens humain (réfléchir) et investir
au sens financier.

EM@ : Ces valeurs sont-elles menacées par Internet ?
N. S. :
La culture, « c’est ce qui reste lorsque l’on a tout oublié ». Ce sont les éléments essentiels qui forgent nos consciences, et donc nos âmes. Ce sont des valeurs immatérielles fondées sur la propriété intellectuelle qui sont l’avenir des sociétés post-industrielles. Un jour, j’ai sorti cet appareil à Los Angeles, où les studios américains s’inquiétaient de la piraterie. « Designed in California, Manufactured in China » [lit-il au dos de son iPhone, ndlr] : c’est de la propriété intellectuelle. Tout comme Google. La question posée par Google, un peu moins avec Apple qui a été le premier à reconnaître la propriété intellectuelle des autres, est que son logiciel a permis de déposséder les créateurs des œuvres, les auteurs de musiques, les producteurs de cinéma et peut-être demain des éditeurs de livres. Voulons-nous, sociétés modernes, que la propriété intellectuelle soit pillée – je dis bien « pillée » et non pas piratée ? L’homme doit être capable de trouver le moyen que ces nouvelles technologies rentrent dans le cadre des grandes libertés. On ne peut pas expliquer que d’un côté Apple ou Google puissent se protéger face à quiconque à travers leurs brevets et logiciels, et que Walt Disney ou Universal ne puissent pas défendre leurs créations originales.

EM@ : Qu’attendez-vous de Michel Barnier, commissaire européen du Marché intérieur, qui va réviser début 2012 la directive Propriété intellectuelle pour l’adapter à Internet ?
N. S. :
Le Forum d’Avignon prouve son utilité, puisque le même jour et dans le même lieu se tient un Sommet culturel consacré à la propriété intellectuelle. Le ministre de la Culture et de la Communication réunit ses homologues dans le cadre d’un G8 élargi. Pour la première fois de l’histoire du G8, au mois de mai dernier, le chef de l’Etat a pu inscrire la propriété intellectuelle comme thème de réflexion du G8. Que la Russie et les Etats-Unis s’associent sur un texte sur la propriété intellectuelle est une révolution, particulièrement, au moment où, depuis sa naissance, Internet – pour l’essentiel – fait fi du respect de la propriété intellectuelle. Parce que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ont été exceptionnellement efficaces, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, de nouveaux diffuseurs ne sont pas responsables de ce qu’ils éditent. Cette idée que les
FAI ne sont que des hébergeurs, entérinée en Asie, aux Etats-Unis et en Europe, est
pour la propriété intellectuelle un désastre. Des hommes politiques se sont émus que la pédophilie, le racisme et l’antisémitisme circulent librement. Un frein a été heureusement mis à cette dérive. Mais si les réseaux peuvent s’en prémunir, ils peuvent également le faire contre le pillage des œuvres de l’esprit. Ils ne l’ont pas voulu et la musique d’abord,
le cinéma ensuite ont été spoliés.

EM@ : Etes-vous favorable aux licences paneuropéennes pour faciliter la mise en ligne des œuvres ?
N. S. :
Qui a les droits d’un film pour l’ensemble des pays européens ? A l’exception des Américains, pas grand monde. Aucune société de production française, et ce sont les plus dynamiques en Europe, n’est installée sur l’ensemble de l’Europe et chacune cède ses droits par zone linguistique, alors que les grands studios américains disposent des droits pour l’ensemble des pays européens. J’ai rappelé à Michel Barnier, deux éléments-clés pour le cinéma : la chronologie des médias et les droits cédés selon les zones linguistiques. La chronologie des médias, la pierre angulaire du cinéma, existe dans tous les pays. Or comme le film ne sort pas le même jour dans toutes les salles européennes, une licence paneuropéenne ne pourrait pas respecter la chronologie des médias. Une licence paneuropéenne m’apparaît comme une fausse-bonne idée qui ne soit
qu’au bénéfice des grandes productions américaines.

EM@ : Etes-vous pour la gestion collective des droits sur le Net ?
N. S. :
La gestion collective est la constatation de la faillite de la gestion privée. C’est,
me semble-t-il, un très mauvais système. Qu’il y ait, de temps à autre, un producteur
qui ne rende pas de compte et que cela nécessite de trouver une formule adaptée,
je le conçois très volontiers. Mais la règle doit être la gestion privée. Le cinéma est
une économie fondée sur des investissements considérables, comparables à ceux de l’industrie, avec, hélas, quelques succès et beaucoup d’échecs. Ce rapport de confiance entre le producteur et l’auteur, qui existe dans le cinéma français depuis un peu plus de 110 ans, doit perdurer. Pour le cinéma, je suis absolument contre les systèmes collectifs de gestion des droits.

EM@ : Le piratage préoccupe les industries culturelles. Le Forum d’Avignon ou le Sommet culturel doivent-ils prendre position en faveur du traité ACTA en cours de signature jusqu’au 1er mai 2013, alors que l’Union européenne hésite à le signer ? N. S. : Le Forum d’Avignon est là pour que des propositions émergent et que la pluridisciplinarité des points de vue soit affirmée. Je laisse donc les intervenants et les participants en débattre ensemble. J’ai aussi un point de vue. Dans ce traité, il est question de sanctions [notamment pénales en cas d’infraction au droit d’auteur, ndlr]. Celles-ci relèvent du domaine judiciaire et donc de la responsabilité des Etats. L’Europe n’a pas d’attribution en la matière et ne peut donc pas le signer. Par ailleurs, la France défend, à juste titre, que les biens et services culturels ne sont pas du domaine de l’OMC. C’est l’exception ou la diversité culturelle. Ne rattachons pas la culture à l’OMC. En revanche il faut édicter des normes internationales. Comme la convention de Berne [protégeant des œuvres littéraires et artistiques, ndlr], il faut une convention internationale pour protéger la propriété intellectuelle. Je ne suis pas choqué que le Conseil constitutionnel dise que l’accès à Internet est une liberté publique fondamentale. Mais,
en face, il y a aussi la liberté des auteurs et des créateurs des œuvres qui doit être respectée. Internet peut être et doit être un outil formidable, mais qui doit être neutre et protéger la liberté de création et la liberté d’accès à la création grâce à une règlementation internationale.

EM@: Faut-il une Hadopi internationale ou européenne ?
N. S. :
A chaque pays, une formule selon sa culture. Des pays aussi différents que la Corée du Sud, la Nouvelle-Zélande, l’Espagne, l’Angleterre et les Etats-Unis ont adopté
ou vont adopter des législations destinées à éviter le pillage des œuvres de l’esprit sur Internet.

EM@ : L’Hadopi estime la taille des catalogues des sites de VOD trop « restreinte » et les prix des films en ligne « onéreux »…
N. S. :
Il y a trois ans, on se demandait comment télécharger un film légalement. Aujourd’hui, plus de 8.000 titres différents sont disponibles sur les offres légales. Les films de catalogue sont à 2 euros ; les films nouveaux autour de 4 euros : tous les films importants des catalogues des studios français sont disponibles sur les platesformes légales. Certains films plus confidentiels ne sont pas disponibles, comme ils ne le sont pas en vidéo, mais ils le seront une fois numérisés. La plateforme iTunes d’Apple dispose, à elle seule, d’un grand nombre de titres et de tous les films français récents ayant eu une certaine audience. Elle est redoutable pour les ayants-droits car elle prend une part trop importante des recettes. Mais iTunes est d’une qualité technique exceptionnelle et d’une facilité d’accès remarquable. Les autres plateformes sont plus complexes.

EM@ : Est-ce sain que qu’Apple détienne en France avec iTunes plus de la moitié des parts de marché de la musique en ligne et peut-être à l’avenir du cinéma à la demande ?
N. S. :
La réponse est non. Ce n’est pas sain. Je suis désolé de voir que seul Apple a une plateforme conviviale et de qualité. Il est plus facile de télécharger sur iTunes qu’ailleurs ! C’est aux offres légales de se mettre à niveau. De plus, Apple protège les contenus.

EM@ : L’Hadopi suggère en outre « une évolution de la chronologie des médias pour renforcer l’attractivité » de l’offre légale de VOD. Etes-vous d’accord ?
N. S. :
Je suis convaincu qu’il faut un délai entre la sortie dans les salles et les autres modes d’exploitation. Nos amis américains envisagent de réduire le délai. Les studios américains, avec leur force, se disent que s’ils se trompent, ils pourront toujours revenir en arrière. La production en Europe est beaucoup plus atomisée, et les producteurs de cinéma sont de toutes petites sociétés face aux groupes de télévision et encore plus face aux Google, Amazon et autres géants de l’Internet. En France, le premier financier du cinéma est Canal+. Or tuer la chronologie des médias, ce serait tuer Canal+. Ce serait une faute. Film par film, on pourrait peut-être faire du sur-mesure, cependant, il ne faut pas tromper le téléspectateur. D’où l’avantage de délais rigides. De plus, seul le film dans la salle permet de partager une émotion collective que l’on ne retrouve pas chez soi.

EM@ : François Hollande, le candidat PS à la présidentielle de 2012, veut
« dépénaliser le téléchargement », tout en écartant la licence globale. Qu’en
pensez-vous ?
N. S. :
J’espère que, si François Hollande devient président de la République en mai prochain, sa première décision ne sera pas d’abroger les textes qui ont permis la création de la Hadopi. Quand il rencontre les auteurs-réalisateurs, il leur dit qu’il ne touchera pas
à la loi. Puis, sous la pression de conseillers en communication lui disant qu’il risque de perdre l’électorat des jeunes, il dit le contraire. Le financement de la création, ne passe pas par des licences globales contraignantes, où les sommes récoltées se perdront dans des méandres administratifs. Les milieux de la création, qui n’ont pas la réputation de voter particulièrement à droite, ont essayé d’expliquer à François Hollande que la loi Hadopi avait quelques vertus. La Hadopi comme haute autorité n’existe que depuis
10 mois. Il faudrait lui laisser encore un peu de temps. François Hollande veut
« dépénaliser ». Or, à ce jour, pas un seul abonné à Internet n’a été traduit devant la justice. La commission des droits de la Hadopi est constituée de magistrats. C’est donc sous le contrôle des juges qu’un dossier peut être déféré au parquet. Je ne peux donc
pas imaginer que François Hollande, face à des cas de pillage avéré, ne fasse pas confiance à la justice.

EM@ : Vous présidez depuis près de 10 ans l’Alpa, l’Association de lutte contre
la piraterie audiovisuelle, qui a recours à l’Hadopi. Est-elle satisfaite des premiers résultats ?
N. S. :
Depuis le début de l’année, 20 millions de procès verbaux ont été envoyés à la Hadopi, qui a adressé 1 million d’e-mails à des abonnés et 40.000 lettres recommandées. La Hadopi estime que les Français ont l’air de comprendre son action. Après un très long processus, parce que les FAI ont refusé de faire la police chez eux, une loi a été votée, une haute autorité mise en place et nous avons le sentiment que le bon cap commence
à être pris – lentement, peut-être un peu trop lentement – mais il est pris.

EM@ : Trois responsables de sites de streaming ont déjà été condamnés par la justice…
N. S. :
Effectivement, trois administrateurs de sites de streaming ont été cette année condamnés pour contrefaçon, à des peines de prison avec sursis et à de fortes amendes. Ils gagnaient de l’argent sur le dos des auteurs et créateurs de musiques ou de films.
Cela doit rappeler chacun à la raison. Pour la première fois, à la mi-septembre, Google a accepté de dé-référencer un site de streaming [Allostreaming, ndlr]. C’est une très grande avancée de leur part car l’offre légale ne peut se développer que si l’offre illicite se tarit. Les FAI, eux, lorsqu’on parle en tête-à-tête avec leurs responsables, disent qu’ils veulent lutter contre le piratage, qui utilise abusivement leur bande passante, à condition que chacun de leur concurrent le fasse en même temps…

EM@ : Faut-il adapter la loi Hadopi au streaming ? Le recours au blocage et/ou filtrage de sites de streaming devra-t-il être ordonné par le couple Hadopi-justice ? N. S. : Les textes de loi autorisent d’envisager des systèmes de filtrage. Ce sera à la Hadopi de les mettre en place, dans le cadre de protection des libertés individuelles. Gaumont, par exemple, pose sur son film une sorte de marque ADN [empreinte numérique, ndlr] et le système de filtrage repèrerait un ADN qui ne pourrait pas passer.
Il n’y aurait aucune intrusion dans l’ordinateur de qui que ce soit. Il faut que l’ensemble
des systèmes qui permettent le pillage des œuvres de l’esprit cesse.

EM@ : Le 19 octobre, la Commission européenne a proposé 9,2 milliards pour le très haut débit entre 2014 et 2020. Faut-il que les opérateurs de réseau très haut débit financent plus la création ?
N. S. :
Le très haut débit ne doit pas être un accélérateur du pillage systématique des œuvres sur Internet. Au niveau européen, on s’intéresse plus au contenant qu’au contenu – les œuvres. Or l’Europe a un rôle à jouer dans la création. Il n’y a pas de logique culturelle pour que les opérateurs télécoms et FAI qui diffusent les œuvres ne contribuent pas au financement de leur création. Je ne suis pas pour l’addition de taxes mais pour une égalité de traitement des opérateurs en Europe, notamment sur le plan fiscal et pour une juste rémunération des œuvres et de leurs auteurs. @

Newsroom

28 octobre
• Samsung Electronics devient le numéro un mondial des smartphones en dépassant Apple, d’après Strategy Analytics.
• YouTube retransmet dans 36 pays le gala du Bolchoï rénové.

27 octobre
• Warner Music se dit favori pour le rachat de EMI, selon « Bloomberg », après le retrait d’Universal Music (Vivendi).
• Huit organisations (Simavelec, FFT, SFIB, Secimavi, SNSII, Alliance TiCS, Gitep TiCS, Fevad) dénoncent le projet de loi sur la rémunération de la copie privée.
• TDF rachète la société suédoise Qbrick, spécialisée dans la diffusion de vidéos en ligne.
• TDF nomme Julien Seligmann directeur de la division « services média », qui regroupe les sociétés SmartJog, Cognacq-Jay Image, BeBanjo, Mediamobile et Qbrick.
• Sony annonce la prise de contrôle de Sony Ericsson.
• Nintendo prévient qu’il affichera, à la fin de son exercice le 31 mars 2012, la première perte annuelle de son histoire.

26 octobre
• France Télécom relève son objectif de trésorerie opérationnelle à 9 milliards d’euros pour 2011.
• YouTubeva annoncer des accords avec des groupe de médias, dont RTL Group, pour des « chaînes thématiques », selon le «WSJ ».
• Le Conseil des ministres approuve le projet de loi sur la copie privée : les fichiers piratés ne seront plus comptabilisés et les taxes seront indiquées sur les supports de stockages.
• Gilles Babinet, président du Conseil national du numérique (CNN) se dit « atterré que le numérique ne soit qu’un sujet secondaire pour les partis politiques ».
• ComScore indique que les smartphones et les tablettes génèrent près de 5 % du trafic numérique en Europe.
• Sandvine publie une étude : 55 % du streaming va vers les consoles de jeu, décodeurs TV, smarphones ou tablettes.
• L’Idate indique que le marché mondial du jeu vidéo s’élèvera à 52,1 milliards d’euros cette année, contre 51,9 milliards en 2010.
• Nokia dévoile ses premiers smartphones sous Windows Mobile.

25 octobre
• Le CNC, créé par la loi du 25 octobre 1946, fête ses 65 ans.
• L’Hadopi ouvre cinq nouveaux chantiers « stratégiques », dont « Economie des dispositifs de lutte contre le téléchargement illégal »
• Pew Institute et The Economist publient une étude sur les tablettes : seuls 14 % des utilisateurs paient de l’information.
• L’ITU Telecom World, 40e édition, ouvre à Genève : 6 milliards d’abonnés mobiles et 2,3 milliards d’internautes fin 2011.
• MySkreen annonce le lancement de son application VOD sur Facebook (15.000 programmes).
• Valérie Pécresse recommande de «maintenir » la fiscalité actuelle sur les jeux en ligne.

24 octobre
• Netflix annonce avoir perdu 810.000 abonnés pour arriver à 23,79 millions au 30 septembre, en raison de la hausse de ses tarifs.
• Samsung Electronics dépasse des 1.000 applis TV connectée.
• La Cnil clôture la procédure de mise en demeure de TMG mais poursuit l’instruction contre Sacem/SDRM, SCPP SPPF et Alpa.
• Google étudie le rachat de Yahoo avec deux fonds (EM@44, p. 5).
• Vivendi et Canal+ renotifient le rachat de TPS (EM@43, p. 4).

22 octobre
• L’ARP (cinéma) demande l’expérimentation de films en VOD « peu après leur sortie en salle » et la création d’un secrétariat d’Etat à l’Economie numérique de la Culture.

21 octobre
• Rupert Murdoch admet que MySpace, cédé en juin par News Corp à Specific Media, avait été « très mal géré ».
• Sony dévoile au Paris Games Week sa future console Vita.

20 octobre
• NRJ affirme être le « 1er groupe radio en nombre de webradios » avec 110 au total.
• Samsung Electronics et Google présentent le Galaxy Nexus.

19 octobre
• La Commission européen annonce 9,2 milliards d’euros pour le très haut débit, dont 2,2 dans les services numériques.
• L’Hadopi estime dans une étude que la taille des catalogues des sites de VOD trop « restreinte » et les prix « onéreux ».
• Le SEVN réagit à l’étude VOD de l’Hadopi : « La visibilité de l’offre légale en comparaison de l’offre illégale présente sur les moteurs de recherche reste un problème majeur ».
• Nicolas Sarkozy se réjouit de la validation par le Conseil d’Etat du dispositif de l’Hadopi.
• Deezer (1,4 million d’abonnés grâce à Orange, son actionnaire à 11 %) prévoit d’être rentable à la fin de 2011.
• Flumotion, qui a assuré la webradio des rencontres Radio 2.0 (EM@44, p. 4), remporte un prix du « Streaming Media Award ».
• NRJ déploie quatre radios par satellite avec Solaris Mobile (en DVB-SH) : NRJ, Nostalgie, Chérie FM et Rire & Chansons.
• Alcatel-Lucent publie un livre blanc intitulé « Territoires et routes du très haut débit » et destiné aux collectivités locales.
• Motorola Mobility relance Razr sous Android.

18 octobre
• NPA Conseil estime à plus de 1.300 apps en Europe la présence de la presse sur les tablettes, dont 120 en France.
• Free annonce YouTube sur la TV de la Freebox Révolution.

17 octobre
• Vdio, site de télés et films en ligne, est lancé en Grande-Bretagne en version bêta par Janus Friis (confondateur de Skype, KaZaa et de Joost), selon « Gigaom ».

14 octobre
• Des syndicats de la presse (SPQN, SPQR, SPM et SPMO) annoncent refuser de commercialiser leurs titres sur le kiosque numérique NewsStand d’Apple.
• Google indique, devant le 63e congrès mondial des journaux, travailler avec 50.000 partenaires médias, auxquels ont été reversés à ce jour « plus de 4 milliards d’euros »..

Les opérateurs télécoms prônent la TV sur fibre

En fait. Le 3 octobre, lors du colloque organisé par l’association des opérateurs télécoms historiques (Etno) et le Financial Times, la commissaire européenne Neelie Kroes a lancé l’idée de réduire les revenus des réseaux de cuivre d’un opérateur historique s’il n’investit pas dans la fibre optique.

 En clair. Les opérateurs historiques n’apprécient guère la menace de Neelie Kroes.
Par la voix de leur association de lobbying basés à Bruxelles, Etno (1), ils estiment
que baisser les prix de leur boucle locale freinerait leur investissement dans la fibre.
Les France Télécom, Deutsche Telekom et autres Telecom Italia en appellent plutôt à
la Commission européenne pour « encourager la demande » pour les réseaux très haut débit et notamment pour « encourager la migration de la télévision de plateformes [de diffusion] terrestres vers les réseaux haut débit dont la fibre, ou vers les réseaux mobile/satellites lorsque la fibre n’est pas disponible ».
Pour le président de l’Etno, Luigi Gambardella, « la TV-over-fiber sera la killer application pour encourager la demande pour les réseaux de fibre ». Basculer la télévision sur fibre permettrait en plus, selon les opérateurs historiques, de libérer des fréquences pour les réseaux mobile ou sans fil. Le problème est que la demande en fibre reste poussive :
4,1 millions d’abonnés dans les Vingt-sept, sur les 23,4 millions de raccordement déployés, selon une étude de l’Idate pour le FTTH Council Europe (EM@43, p. 5).

30 Mbits/s au moins par Européen d’ici 2020
L’objectif communautaire – que tous les Européens aient au moins 30 Mbits/s d’ici 2020, dont la moitié à 100 Mbits/s – semble hors d’atteinte. Mais la Commission européenne ne désarme pas. La commissaire européenne en charge du numérique propose donc de faire d’une pierre deux coups : baisser les prix « trop élevés » du dégroupage des opérateurs historiques, sauf « dérogation » faite aux opérateurs historiques qui investiraient suffisamment dans un réseau de fibre optique et dans
un temps raisonnable. Pour les opérateurs historiques récalcitrants, l’exécutif européen envisage de réduire le prix de location de la paire de cuivre.
Neelie Kroes, dont l’objectif est d’inciter à terme au remplacer (switch-off) le cuivre
par la fibre (2), constate en outre que les régulateurs nationaux divergent lorsqu’il s’agit de définir les « tarifs orientés vers les coûts » d’accès à la boucle locale de cuivre des opérateurs historiques. Le dégroupage du réseau téléphonique – c’est-à-dire sa location par les opérateurs concurrents ou fournisseurs d’accès à Internet (FAI) – varie en effet de 5,21 euros à 12,41 euros par mois, selon les Etats membres. Bruxelles lance une consultation publique jusqu’au 28 novembre. @