La nouvelle Livebox d’Orange est compatible… VDSL2

En fait. Le 7 février, la nouvelle Livebox Play de France Télécom est enfin disponible après des mois de retard et deux shows de présentation. « Elle concentre le meilleur des technologies », a déclaré Delphine Ernotte Cunci, directrice d’Orange France. Le VDSL2 en fait partie, bien que toujours pas autorisé.

En clair. Après la présentation en grande pompe du 21 novembre dernier de la
nouvelle « box » de France Télécom, puis le show du 31 janvier, la Livebox Play déroule maintenant le tapis rouge devant la fibre optique. Sont en effet mis en avant
les débits théoriques : 200 Mbits/s en voie descendante et 50 Mbits/s en voie montante, « soit 10 fois plus vite qu’en ADSL ». Ainsi, « un film de 700 Mo est téléchargé en 28 secondes au lieu de 4 minutes 40 en ADSL ». Signalons au passage que le communiqué officiel va jusqu’à mettre en garde : ‘Le téléchargement nuit à la création artistique » (1)… ! Or il fallait lire : « Le piratage nuit à la création artistique », qui est la mention imposée depuis près de dix ans aux opérateurs Internet par la loi de 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (2).
Si la Livebox Play tend à disqualifier l’ADSL au profit de la fibre, elle n’en devient pas moins compatible avec le VDSL2. Cette technologie permettrait de « booster » la paire
de cuivre jusqu’à 40 Mbits/s en download et 7 Mbits/s en upload. C’est largement
suffisant pour la plupart des usages et surtout bien moins coûteux à déployer que les 20 à 25 milliards d’euros nécessaires pour couvrir de fibre toute la France d’ici dix ans. France Télécom procède justement depuis l’automne dernier à des « tests pour le raccordement d’équipements VDSL2 [à son] réseau d’accès » sous la direction technique d’Orange Lab. En janvier, France Télécom a même publié dans son « offre d’accès et collecte DSL » les spécifications techniques pour des « tests d’interopérabilité VDSL2 ». C’est à la fin de ces travaux, prévue début 2013, que le Comité d’experts pour les boucles locales cuivre et fibre optique rendra – avec retard (3) – son avis favorable à l’introduction du VDSL2 sur la boucle locale de cuivre.
Cet avis devait intervenir à l’issue des travaux prévue en ce début d’année. « France Télécom disposera alors d’un délai de six mois pour autoriser l’utilisation de cette nouvelle technologie par les opérateurs dégroupeurs. Le rendez-vous est donc au début de l’automne 2013 », avait précisé le président de l’Arcep, Jean-Ludovic Silicani, lors du colloque RuraliTIC du 13 septembre dernier. Cette perspective du VDSL2 contraste avec la volonté du gouvernement de procéder à l’« extinction du cuivre » (EM@67, p. 5) comme cela est envisagé dans la ville de Palaiseau. @

Fibre : l’Autorité de la concurrence contre Orange

En fait. Le 3 juillet, en marge d’un colloque sur les géants de l’Internet organisé
par l’Autorité de la concurrence, son président Bruno Lasserre a confirmé à EM@ l’envoi par ses services de « griefs » – émanant de Free – à France Télécom accusé de pratiques anti-concurrentielles dans la fibre optique.

En clair. On croyait la hache de guerre entre Free et France Télécom enterrée depuis les deux règlements de différends que l’Arcep a rendus il y a un an, respectivement les 21 et 26 juillet 2011, sur les offres d’accès et de mutualisation de leurs réseaux en fibre optique dans les zones très denses. Et bien non ! C’était sans compter sur la ténacité de l’Autorité de la concurrence qui vient de relancer d’elle-même les hostilités. Selon nos informations, confirmées par Bruno Lasserre, l’Autorité de la concurrence a adressé, en avril dernier, une cinquantaine de griefs à France Télécom, lui reprochant d’entraver la concurrence dans le déploiement du FTTH (1). Malgré les deux décisions de l’Arcep, les sages de
la rue de l’Echelle réactivent ainsi la plainte initiée à l’origine le 2 juillet 2007 par Free à l’encontre de France Télécom sur l’accès aux infrastructures de génie civil de ce dernier dans le cadre du déploiement de boucles locales en fibres optiques jusqu’aux abonnés (2). La filiale du groupe Iliad, qui avait reporté plainte en au printemps 2011 (cette fois devant l’Arcep), reproche à l’opérateur historique des pratiques « discriminatoires » et
son « refus d’accès » à cette « infrastructure essentielle » (voiries et immeubles). C’est
en juin, soit dans les deux mois impartis, que France Télécom a répondu au gendarme
de la concurrence en contestant point par point tous les griefs.
L’instruction de l’affaire ne fait donc que commencer chez les sages de la rue de l’Echelle, qui prennent le risque de ralentir encore plus le déploiement du FTTH déjà mal engagé : 220.000 abonnés seulement au premier trimestre 2012, selon l’Arcep. Il y a cinq ans, Free avait annoncé qu’il comptait investir dans le FTTH « jusqu’à 1 milliard d’euros d’ici 2012 ». On en est loin. Le nouvel entrant a opté pour une technologie dite « point-àpoint » (où l’abonné dispose de sa propre fibre tirée depuis le répartiteur NRO ou noeud de raccordement optique), qui est différente de la technologie « point à multipoint » ou GPON (3) de France Télécom. Dans ce dernier cas, une seule fibre est tirée depuis le NRO pour relier de nombreux logements (elle est ensuite divisée en plusieurs brins). L’architecture de Free prend en fait plus de place dans les fourreaux et les répartiteurs, mais garantit des débits optimaux pour chaque ligne quelle que soit l’utilisation simultanée des lignes voisines (4). @

Financement de la fibre : François Fillon enterrera-t-il la « terminaison data » ?

La « terminaison data » – projet de faire payer à la source les fournisseurs de contenus pour financer le très haut débit – n’est pas abandonnée. Mais le Centre d’analyse stratégique du Premier ministre privilégié la solution d’amener les internautes à payer des « tarifs premium ».

« Le concept de ‘’terminaison data’’ reste pour l’heure un concept à l’étude, présentant un certain nombre d’avantages, mais aussi des difficultés pratiques de mise en oeuvre. Il est difficile d’instaurer un tel système en France uniquement, sans créer une réaction d’extra-territorialisation des parties prenantes concernées. C’est aussi un système régulé (il faut fixer les terminaisons data) », indique Yves Le Mouël, DG de la Fédération française des télécoms (FFT), à Edition Multimédi@.

Neelie Kroes : « Respecter le best-effort »
Le 14 mars dernier, le président de la République, Nicolas Sarkozy, a déclaré – dans
une interview à l’hebdomadaire « Le Point » – que « les géants du Net » devaient non seulement « acquitter un impôt représentatif de leurs activités dans notre pays » mais aussi notamment payer « leur contribution au financement (…) des réseaux »… Autant dire que l’idée française de « terminaison data » n’est pas encore enterrée, depuis sa promotion en 2010 par certains opérateurs télécoms français (Orange, SFR, Colt, …)
et l’appui de l’Arcep (1) lors du débat sur la neutralité des réseaux lancé il y a deux ans. L’idée fut reprise il y a un an dans le rapport « La Raudière-Erhel » de la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale (2). La terminaison data est à nouveau explorée par les services du Premier ministre, le Centre d’analyse stratégique (CAS) l’ayant étudiée comme possibilité pour financer le très haut débit. Et ce, sur la base d’un rapport de l’Idate (3) publié le 27 mars dernier. « Ce sujet n’est pas travaillé au niveau de la Fédération, mais plutôt analysé chez les grands opérateurs européens », ajoute Yves Le Mouël. Le principe de la terminaison data consisterait en amont à instaurer des tarifs
à tous les fournisseurs de contenus en ligne – directement à Google/YouTube, Apple, Facebook, Amazon, Dailymotion, etc, ou indirectement via les opérateurs de transit ou les CDN (4) Akamai, Limelight, Amazon CloudFront, Cedexis, etc –, en fonction du volume de données acheminé sur le réseau de l’opérateur d’accès très haut débit. France Télécom
a encore poussé, en janvier dernier auprès de la Commission européenne, l’idée de
« contribution équitable » des fournisseurs de contenus et de vidéo. Edition Multimédi@
a demandé à la commissaire européenne Neelie Kroes, en charge du numérique, ce qu’elle en pensait. « Taxer les fournisseurs de contenus ne permettrait pas de promouvoir l’utilisation du haut débit. Mais les acteurs aux différents niveaux de la chaîne de valeur
de l’Internet sont libres de nouer des accords pour développer de nouveaux modèles économiques, du moment que le principe du best-effort dans l’accès à Internet soit maintenu pour tout le monde », nous a-t-elle répondu. La « terminaison data » entre acteurs du Web – comme cela se fait en téléphonie avec la terminaison d’appel – reste donc encore possible, même si elle ne semble pas intéresser d’autres régulateurs européens que l’Arcep. Mais les opérateurs de réseaux et acteurs du Net pourraient se débrouillaient entre eux. SFR songe à un « octroi numérique » qui serait une taxe payée par des fournisseurs de contenus pour avoir accès à sa base des clients connectés en France.
François Fillon en fera-t-il une nouvelle taxe pour financer le très haut débit ? Ce que les sénateurs Hervé Maurey et Philippe Marini n’ont, eux, pas envisagé dans leurs projets
de loi sur respectivement le déploiement de la fibre optique et la fiscalité numérique. Le CAS, lui, propose au Premier ministre de privilégier des « tarifs premium » payés par
les internautes demandeurs de qualité de service, plutôt que d’imposer des tarifs de
« terminaison data » à tous les fournisseurs de contenus sur le Web. La note d’analyse remise à François Fillon est on ne peut plus claire : « Ces hypothèses de nouveaux flux de revenus de gros (wholesale) provenant des acteurs en amont de la chaîne de valeur semblent finalement limitées au regard du surplus qui pourrait être dégagé par les opérateurs en introduisant une segmentation de leur clientèle qui se ferait selon : l’intensité de la consommation ; la qualité des accès utilisés (vitesse, latence) ; les fonctionnalités additionnelles du terminal (box) et les contenus couplés (bundle) avec l’abonnement ».

Tarifs premium versus terminaison data
Cet avantage donné aux tarifs premium par rapport à la terminaison data – et donc à l’augmentation de l’ARPU (5) au profit des opérateurs télécoms et fournisseurs d’accès
à Internet (FAI) – est reprise telle quelle (6) des propositions formulées initialement par l’Idate. @

Charles de Laubier

La fibre pourrait accélérer le « contournement » des opérateurs télécoms, dissuadés d’investir

Les régulateurs (CSA, Arcep, Hadopi,) et le gouvernement (DGMIC, DGCIS, CNC) voudraient décourager les opérateurs télécoms d’investir massivement dans la fibre optique qu’ils ne s’y prendraient pas autrement : une étude sur le très haut débit semble les en dissuader !

« Les opérateurs pourraient en être réduits à de simples transporteurs de contenus, contournés (ou « désintermédiés ») par les services en accès direct (ou services ‘’over-the-top’’). Cette menace peut freiner les opérateurs dans leurs déploiements des réseaux très haut débit », met en garde l’étude de Analysys Mason, commanditée par l’Arcep (1), le CSA (2), l’Hadopi (3), le CNC (4), la DGMIC (5) et la DGCIS (6), lesquels ont « décidé de rendre public l’essentiel ».

21 Mds €: cela en vaut-il la chandelle ?
Or selon nos constatations, le libellé initial de l’étude tel que paru à l’époque au BOAMP (7), en octobre 2010, était : « les nouveaux usages et services sur les réseaux très haut débit et leur impact sur le modèle économique de la fibre » (8). Bien que reformulé
« étude sur le très haut débit : nouveaux services, nouveaux usages et leur effet sur la chaîne de la valeur », le déploiement de la fibre optique à domicile – qui a été chiffré par l’Arcep à 21 milliards d’ici à 2025 pour couvrir 100 % des foyers français, selon la décision de Nicolas Sarkozy (9) – est bien au coeur de cette étude finalisée en 2011.
« Au vu des forts investissements nécessaires pour le passage au très haut débit, le financement des réseaux par les opérateurs semble complexe dans un contexte d’évolutions significatives de la chaîne de valeur », souligne-t-on encore. D’autant que les nouveaux éditeurs de services audiovisuels et les fournisseurs de contenus Web sont, est-il rappelé, « globalement réticents à être impliqués dans le financement des réseaux, y compris très haut débit ». Les opérateurs de réseaux sont ainsi, avec les fournisseurs d’accès à Internet (FAI), les premiers à être directement « menacés » par des acteurs comme Google/YouTube, Yahoo, Apple/iTunes, Microsoft, Sony, Samsung, Netflix et bien d’autres nouveaux entrants dans la chaîne de valeur de la convergence – chez les acteurs du Web comme du côté des fabricants de terminaux/téléviseurs connectés (10).
« Le développement des modèles de services en accès direct et l’arrivée massive des téléviseurs connectables dans les foyers, créent une menace sur le revenu additionnel que les opérateurs pourraient générer avec le très haut débit », prévient l’étude du groupement de commande publique. Sans oublier la Xbox 360 (Microsoft), la PlayStation 3 (Sony) ou la Wii (Nintendo), qui sont aussi connectables dans le salon ! Au peu d’entrain des opérateurs à investir dans le FTTH (voir encadré) s’ajoute l’hésitation des foyers à s’abonner au FTTH : au 31 décembre 2011, seuls 200.000 foyers ont souscrit un abonnement à la fibre malgré une hausse de 70 % sur un an (voir indicateur p. 11), les 465.000 autres abonnés au très haut débit le sont par Numericable au câble coaxial limité. Surtout que la France dispose d’un réseau ADSL de bonne qualité et utilisé par 95 % des abonnés haut débit, près de 60 % d’entre eux recevant la télévision sur cette paire de cuivre (IPTV).
Et, en plus, comme le relève l’étude CSA-Arcep-Hadopi- DGMIC-DGCIS-CNC, « les offres très haut débit (…) n’amènent pas de services supplémentaires par rapport au haut débit. (…) Il ne semble pas qu’il existe pour l’instant d’apport fonctionnel du très haut débit au niveau des offres. (…) Il est donc possible pour un abonné [haut débit]
de disposer de la même gamme de services ». Résultat : « Au vu du nombre limité de services spécifiques au très haut débit, pour lesquels les utilisateurs sont actuellement prêts à payer, il est difficile d’estimer précisément les revenus incrémentaux du très haut débit permettant d’assurer le financement [de ces] réseaux ». Pire :
« L’accroissement des revenus complémentaires sur les services audiovisuels semble menacé par le risque de désintermédiation des FAI au profit des fournisseurs de services ‘’over-the-top’’ (risque plus fort encore en FTTH qu’en haut débit) ». La fibre optique n’apporte donc pas grand-chose de plus que le fil de cuivre ! L’étude rappelle en outre le reproche que font régulièrement Orange, SFR, Free ou Bouygues Telecom : « La réglementation en vigueur cherchant à éviter les monopoles locaux ne permet pas aux opérateurs qui déploient le très haut débit de profiter d’une prime au premier entrant, car il existe une obligation de donner accès au réseau terminal FTTH à ses concurrents ». @

Charles de Laubier

FOCUS

Fibre : quelques millions au lieu de plusieurs milliards

Orange, qui avait fixé son investissement total dans la fibre à 2 milliards d’euros d’ici
2015, a dit – par la voix de son DG Stéphane Richard le 22 février – vouloir « doubler
en 2012 » les 151 millions d’euros consacrés au FTTH (11) en 2011. Free, lui, a déjà
investi 500 millions d’euros (dont 156,1 millions en 2011 et 193,7 millions en 2010). Bouygues Télécom et SFR vont mutualiser leur déploiement fibre dans les zones très denses, le second allant dans les zones moins denses. Quant au câblo-opérateur Numericable, « il ne semble pas vouloir à ce stade évoluer vers la technologie FTTH », indique l’étude. @

Le VDSL2 va être autorisé sur la boucle locale de cuivre : pour concurrencer la fibre ?

Alors qu’un rapport sénatorial sur l’aménagement numérique du territoire, daté
du 6 juillet, s’inquiète du retard dans le déploiement de la fibre optique, l’Arcep s’apprête à autoriser l’introduction du VDSL2 sur le réseau téléphonique pour permettre 50 à 100 Mbits/s.

Sur à peine plus de 1 million de foyers raccordables directement à la fibre optique, ou FTTH (1), seulement 140.000 sont abonnés au 31 mars dernier. Est-ce le présage d’un échec national malgré les 25 milliards que la France va consacrer au déploiement de
la fibre sur tout le territoire ? L’arrivée d’ici à la fin de l’année – sur les bonnes vieilles lignes de cuivre téléphoniques – de la technologie VDSL2, ne manquera pas de faire réfléchir opérateurs télécoms et consommateurs sur l’intérêt immédiat de miser sur la coûteuse fibre optique.

Le VDSL2 autorisé avant fin 2011
En effet, le Comité d’experts pour l’introduction de nouvelles technologies dans
la boucle locale – créé au sein de l’Arcep il y a près de dix ans (2) et, selon nos informations, rebaptisé Comité d’experts pour les boucles locales cuivre et fibre optique (3) – doit rendre un avis favorable au VDSL2 « d’ici la fin de l’année ». Après avoir donné son feu vert l’an dernier à l’introduction de l’ADSL2+, lequel offre des débits théoriques deux fois plus élevés que l’ancien ADSL, l’Arcep va faire de même avec
le puissant VDSL2. Positionné au niveau du sousrépartiteur, local technique le plus proche du domicile de l’abonné, ce « Very-high-bitrate Digital Subscriber Line » de deuxième génération (4), la première n’ayant pas fait long feu, promet aux internautes des débits de 50 à 100 Mbits/s, voire 150 Mbits/s. Bref, le cuivre n’aura presque rien à envier à la fibre sur le dernier kilomètre. Toujours selon nos informations, SFR est déjà prêt pour le VDSL2 à 150 Mbits/s, grâce à une gestion dynamique de la paire de cuivre dite DSM – Dynamic Spectrum Management – que lui fournit la société américaine Assia dirigée par John Cioffi (5) (*) (**). Les « box » de Free et de Bouygues Telecom seraient également prêtes, tandis qu’Orange est en discussion avec Assia. Est-ce à dire que les opérateurs télécoms jouent un double jeu vis-à-vis des pouvoirs publics qui les poussent à investir sans plus tarder des milliards d’euros dans des réseaux de fibre optique ? Le président de la République, Nicolas Sarkozy, tient à son objectif de raccorder au très haut débit 70 % de la population française en 2010, puis 100 % en 2025 (6). Mais entre être « raccordé » et être « abonné », il y a un fossé numérique.
Le sénateur Hervé Maurey (Union centriste), dans son rapport du 6 juillet sur l’aménagement numérique du territoire, vient d’interpeller le gouvernement sur le
retard de la France dans la fibre optique, retard qui « risque de s’avérer rapidement irréversible ». Mais comme dans son précédent rapport d’octobre 2010 sur le très
haut débit, le sénateur relègue le VDSL2 dans les zones « rurales » où la fibre optique n’arrivera pas et considère la montée en débit comme un simple « complément au très haut débit ». Pourtant, les deux promettent 100 Mbits/s – mais avec des coûts de déploiement qui ne se chiffrent pas en milliards d’euros pour le VDSL2. Là est toute la différence. Et au regard du déficit et de la dette publics, cela devrait être déterminant… Hervé Maurey a un parti pris pour la fibre au détriment du cuivre. Il soupçonne même France Télécom de « freiner le déploiement du réseau très haut débit afin de profiter
le plus longtemps possible de la “rente du cuivre” ». Le sénateur va jusqu’à suggérer l’impensable : « Fixer une date butoir à l’arrêt de l’utilisation du réseau cuivre et au basculement vers le réseau fibre, à l’instar de ce qui a été décidé pour le passage à
la télévision numérique sur l’ensemble du territoire » !
Il voudrait tuer dans l’œuf le VDSL2 qu’il ne s’y prendrait pas autrement…
Si le peu d’engouement du public pour la fibre devait se confirmer, le VDSL2 pourrait
être plébiscité dès 2012 par les particuliers – comme il l’est déjà par les collectivités territoriales. Ces dernières sont demandeuses de montée en débit depuis fin 2008 ! L’Arcep organise d’ailleurs un « chat » le 26 juillet prochain sur ce thème : gageons
que l’intérêt sera manifeste. Reste à savoir si, une fois le feu vert VDSL2 obtenu par
le fameux Comité d’experts, l’Arcep l’autorisera dans la foulée sur le cuivre. A moins que le régulateur et le gouvernement ne fassent patienter trois ans avant de libérer le VDSL2. L’ADSL2+ n’avait-il pas été validé par le Comité d’experts en juillet 2007 mais seulement autorisé en décembre 2010 ?

L’Arcep ne veut pas retarder la fibre
L’Arcep n’est pas neutre dans cette affaire. « [La] simple mise à niveau [de notre infrastructure numérique], par le recours à certaines des technologies que vous citez [VDSL2, montée des débits, ndlr], reviendrait à retarder un investissement nécessaire dans des réseaux FTTH », a clairement dit son président, Jean-Ludovic Silicani, dans
une interview exclusive à Edition Multimédi@ (lire n°38). Mais le cuivre n’a pas dit son dernier mot. @

Charles de Laubier