Radios associatives : l’appel au Parlement européen

En fait. Les 11 et 12 juin, le Syndicat national des radios libres (SNRL) a organisé à Strasbourg son premier Carrefour européen des radios libres, soit cinq ans après la résolution du Parlement européen, le 25 septembre 2008, appelant les Etats membres à soutenir plus activement les médias associatifs.

En clair. Les 309 membres du SNRL vont être représentés à Strasbourg où se réunissent les radios associatives et communautaires venues de toute l’Europe.
Le SNRL y retrouve la branche européenne de l’Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires (Amarc), laquelle fête cette année ses 30 ans d’existence (1). Devant
les députées européennes Catherine Trautmann et Bernadette Vergnaud, en présence
de Emmanuel Gabla, membre du CSA, le SNRL va plaider pour le respect des normes internationales sur la liberté d’expression et le pluralisme. « Nous sollicitons les parlementaires européens pour qu’ils se ressaisissent des questions ayant trait à la radiodiffusion en Europe et notamment à la radiodiffusion associative et ses spécificités », explique Pierre Montel, délégué général du SNRL. Et ce, près de cinq ans après la résolution du Parlement européen qui avait appelé le 25 septembre 2008 les Etats membres à soutenir plus activement les médias associatifs afin d’assurer le pluralisme. Cet appel aux eurodéputés intervient aussi alors que se sont achevées le 14 juin deux consultations publiques lancées par Neelie Kroes en mars dernier sur « la liberté et le pluralisme des médias et sur l’indépendance des organismes de régulation des médias audiovisuels ». Pour la commissaire européenne chargée de l’Agenda numérique, il s’agit notamment de savoir si « une révision de l’article 30 de la directive sur les services de médias audiovisuels (SMA) pourrait permettre de mieux assurer l’indépendance des organismes de régulation ».
Les radios associatives en ont profité pour rappeler que seule la radio numérique terrestre (RNT) – c’est-à-dire un réseau hertzien dédié – est à même de préserver le modèle gratuit et anonyme de la radio, grâce à des fréquences attribuées gratuitement (par le CSA en France par exemple). « La négligence et/ou les intérêts partisans des gouvernements
ont permis l’appropriation des nouvelles technologies par des intérêts commerciaux,
en augmentant la concentration des médias et limitant la présence des médias à but non lucratif. D’autre part, la “surréglementation” provoque la fermeture de nombreuses radios communautaires et associatives en Europe », avait déjà dénoncé l’Amarc lors de sa 3e Conférence paneuropéenne le 18 mai dernier en France, à Montpellier. @

TVR,VOD,TVC : recommandation contre programmation

En fait. Le 14 juin, la commission TV connectée du Groupement des éditeurs de contenus et de services en ligne (Geste) s’est réunie sous la présidence d’Eric Scherer, directeur de la prospective, de la stratégie et des relations internationales de France Télévisions. Vers la fin de la programmation ?

En clair. La télévision de rattrapage (TVR), la vidéo à la demande (VOD) et la télévision connectée (TVC) sont en train de bousculer les grilles de programmation des chaînes. Les télénautes, de plus ne plus nombreux, prennent le contrôle de « leur » télévision sur
le mode « Atawad » (1) pour une consommation en mobilité. « Il y a de moins en moins de vrais directs. Nous sommes au début d’un point d’inflexion. La VOD devient une chaîne. Le public se moque du tuyau, peu importe que cela soit de la télévision, de l’Internet ou
de la vidéo », constate Eric Scherer. Les fonctions de replay, de time-sharing, de reprise de programme en cours depuis le début (2), la navigation en avance et retour rapide ou
la mise en pause sont autant de ruptures dans l’usage que des utilisateurs se font de la télévision. Et l’on est qu’au début de cette dé-linéarisation qui prendra une autre dimension avec le cloud et l’enregistrement vidéo numérique, ou DVR (Digital Video Recorder).
Alors que l’innovation pour le second écran relègue au second plan le téléviseur, les moteurs et les algorithmes deviennent de vrais programmateurs de chaînes personnalisées. Face à cette fragmentation des programmes et de l’audience, les chaînes sont en train de perdre leur pouvoir de contrôle audiovisuel. C’est là que tout se joue :
la recommandation prend le pas sur la programmation. Netflix n’a-t-il pas plus de 900 développeurs pour améliorer sans cesse la pertinence de ses recommandations et en y consacrant un budget de 350 millions de dollars par an ? Des sociétés se sont spécialisé dans la recommandation « content centric » comme le français Spideo, l’israélien Jinni ou l’américain Fanhattan. Fondée en 2010 et en cours de levée de fonds, la start-up Spideo
a déjà apporté son savoir-faire en moteurs de recommandations à CanalPlus Infinity, le service de SVOD de Canal+. « Avec le “content centric”, nous offrons une pertinence à 100 % des recommandations là où les recommandations par statistiques n’obtiennent
que 90 % », affirme Gabriel Mandelbaum, fondateur de Spideo. Mais son ambition est de s’imposer sur toutes les plates-formes avec sa propre application Spideo, s’appuyant sur les catalogues iTunes et Netflix aux Etats-Unis, seulement iTunes en France et bientôt Lovefilm. Apple l’apprécie beaucoup. Au point de le racheter à terme ? « C’est envisageable ! », répond sans rire Gabriel Mandelbaum. @

Crowdfunding en Europe : 1 milliard d’euros en 2013

En fait. Le 18 juin, le député Jacques Cresta a soumis à Fleur Pellerin, ministre de l’Economie, une question pour « un cadre juridique du crowdfunding ». En Europe, où le financement participatif va franchir 1 milliard d’euros cette année, Michel Barnier a dit le 3 juin réfléchir à un cadre européen.

En clair. Si le crowdfunding est de plus en plus pris au sérieux en Europe, c’est que ce mode de financement participatif sur Internet commence à brasser de l’argent. Selon le commissaire européen Michel Barnier, en charge du Marché intérieur et des Services,
les plates-formes de crowdfunding ont collecté en Europe 446 millions d’euros en 2011
et 735 millions en 2012. Ce qui a permis de financer 470.000 projets, aussi bien dans les domaines de la création artistique (musiques, films, programmes audiovisuels, jeux vidéo, livre, …) que dans le soutien à de jeunes entreprises ou des projets originaux.
A l’heure où les industries culturelles ne jurent que par le financement de la création, le crowdfunding arrive à point. Ces chiffres rejoignent ceux du Crowdfunding Industry Report de la société américaine Massolution et de l’association Crowdsourcing. Et avec une croissance à deux chiffres chaque année, comme les 65 % entre 2011 et 2012, le financement participatif va dépasser allègrement la barre du 1 milliard d’euros cette année sur le Vieux Continent. Au niveau mondial, le seuil des 2 milliards d’euros a déjà été franchi dès l’an dernier. Ces plates-formes de cofinancements collectifs par Internet
sont au nombre de plus de 400 dans le monde, telles que Kickstarter, KissKissBankBank, Ulule, Babeldoor, MyMajorCompany, Touscoprod, Babyloan, Friendsclear, Wiseed ou encore Anaxago. Les contreparties au financement participatif prennent des formes multiples : dons, avantages en nature (CD, places de spectacle,…), mention du nom
du donateur au générique d’un film, pré-ventes, reconnaissance de dettes ou de parts
de société.
Face à l’ampleur du phénomène, la Commission européenne réfléchit à « un cadre
adapté » – avec des « obligations allégées » en deçà d’un certain seuil de collecte –
pour favoriser le crowdfunding chez les Vingt-Sept au regard non seulement de la réglementation bancaire et financière, mais aussi fiscale et concurrentielle. « Certains Etats membres, comme la France (1), la Belgique et l’Allemagne ont publié des guides visant à clarifier la manière dont le crowdfunding pourrait être régulé. D’autres, comme l’Italie, ont pris le parti d’un cadre spécifique au soutien des entreprises innovantes », constate Michel Barnier. En France, le rapport Lescure appelle le gouvernement à
« clarifier le cadre juridique et fiscal et d’en améliorer la visibilité ». @

Lescure : les producteurs contre la gestion collective

En fait. Le 12 juin, Pierre Lescure, président de la mission « Acte II de l’exception culturelle », et Jean- Baptiste Gourdin, rapporteur général, ont été auditionnés par la commission des Affaires culturelles de l’Assemblée nationale. Ils ont à nouveau insisté sur la gestion collective à l’ère du numérique.

En clair. « La gestion collective, loin d’être un archaïsme, est LE mode de gestion adapté à l’exploitation numérique des oeuvres, laquelle se caractérise par des nano paiements
et une multitude de micro transactions. La gestion collective est le système, même en termes économiques, le plus adapté à cette exploitation. (…) C’est ce système que nous voulons généraliser », a insisté Jean-Baptiste Gourdin, rapporteur général de la mission
« Acte II de l’exception culturelle » (1). Ce plaidoyer pour la gestion collective agace les producteurs, aussi bien de musiques que de films, très attachés à la gestion individuelle des auteurs. « Cette collectivisation à marche forcée, nous y sommes opposés. (…) La gestion collective est portée auprès du ministère de la Culture par l’Adami (2) », a fustigé Guillaume Leblanc, directeur général du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) le 31 mai dernier. Il compte bien « rectifier et corriger » les propositions du rapport Lescure dès ce mois de juin lors des réunions de travail avec le ministère de la Culture et de la Communication. « En quoi un système de gestion collective crée de la valeur et en quoi il est meilleur que le système actuel ? (…) Nous ne voulons pas de gestion collective obligatoire [en cas de refus de négocier, ndlr] », a ajouté Stéphane Le Tavernier, président du Snep, en indiquant avoir confié avec l’UPFI (3) au cabinet Ernst & Young la réalisation pour « fin juin – début juillet » d’un audit pour comparer les modèles économiques. Quant aux producteurs de cinéma, ils défendent aussi leurs droits exclusifs sur les films.
Mais la mission Lescure n’en démord pas devant les députés : il faut des négociations interprofessionnelles entre les syndicats des industries culturelles et, pour la mise en oeuvre, les sociétés de gestion collective afin de garantir la rémunération des auteurs et des artistes à l’heure d’Internet. « Ce n’est pas une solution irréaliste car elle fonctionne déjà dans certains secteurs : par exemple, dans le domaine de la VOD, les auteurs sont rémunérés par la SACD (4) qui collecte directement les rémunérations auprès des plates-formes vidéo de type iTunes [mais aussi Dailymotion, YouTube, CanalPlay Infinity, Filmo TV et depuis juin Videofutur, ndlr]. Et ce, en vertu d’un accord avec les producteurs ».
Ces derniers n’ont en tout cas pas dit leur dernier mot… @

Vers une 2e recapitalisation de Bouygues Telecom ?

En fait. Le 11 juin était la date butoir pour déposer un recours devant le Conseil d’Etat contre la décision de l’Arcep prise en avril d’autoriser Bouygues Telecom
à utiliser des fréquences de la 2G pour faire de la 4G. C’est ce qu’ont fait Orange
et Free. La filiale télécoms de Bouygues joue son avenir.

En clair. Bouygues Telecom est de tous les opérateurs français celui qui inquiète le plus les analystes. « Beaucoup s’interrogent sur une nouvelle recapitalisation », a constaté fin mai Yves Gassot, directeur général de l’Idate. La filiale télécoms du groupe Bouygues souffre le plus de l’arrivée fracassante de Free Mobile au début 2012 et des lourds investissements à consentir dans la 4G et le très haut débit fixe. Une seconde recapitalisation n’est donc pas à exclure. La première augmentation de capital remonte
à novembre 2012 pour 700 millions d’euros, dont 678 millions financés par la maison mère (1). « Cette opération visait à donner à Bouygues Telecom les moyens de relever les défis auxquels cette société est confrontée (concurrence accrue, déploiement de la 4G, développement du fixe, etc.) », précise le document de référence 2012. Il s’agissait surtout de compenser l’achat des fréquences 4G (800 MHz et 2,6 Ghz).
Dans la partie « Facteurs de risques », l’actionnaire est prévenu : « L’arrivée de Free a (…) créé (…) une évolution généralisée des prix vers le bas ». Avec un chiffre d’affaires 2012 en chute de 9 % à 5,2 milliards d’euros, malgré 11,3 millions d’abonnés mobile
et 1,8 million d’abonnés (très) haut débit, Bouygues Telecom a accusé une perte de
16 millions d’euros (effectif de 9.659 employés). Son endettement s’élève à 650 millions d’euros (2). L’an dernier, l’opérateur a lancé un plan de restructuration pour réaliser 300 millions d’économies, lesquelles devraient même dépasser les 400 millions. Mais rien ne dit que réductions de coûts et cessions d’actifs seront suffisantes. Le 30 mai, la direction de l’opérateur a été resserrée autour d’Olivier Roussat, nommé PDG, pour traverser cette passe bien difficile.
Dans son rapport d’activité (3), le groupe a prévenu : « Afin de maintenir sa compétitivité face aux concurrents, Bouygues Telecom a sollicité des pouvoirs publics l’autorisation de déployer la 4G [à compter du 1er octobre 2013] sur la bande de fréquence 1.800 Mhz utilisée aujourd’hui pour la 2G ». Mais, selon BFM Business, il conteste devant le Conseil d’Etat le prix de 60 millions d’euros par an à payer à l’Etat pour ces 1.800 Mhz. Autant dire que si l’autorisation de l’Arcep parue au J.O. le 10 avril devait être annulée par le Conseil d’Etat, c’est tout l’avenir de Bouygues Telecom qui serait remis en question. @