Universal Music confirme être actionnaire de Spotify

En fait. Le 26 juin, en marge de l’Assemblée général de la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP) dont il est le président, Pascal Nègre
a confirmé à Edition Multimédi@ que la major Universal Music Group (filiale
de Vivendi) détient bien « un petit pourcentage » du capital de Spotify.

En clair. C’est la première fois qu’un dirigeant du numéro un mondial de la musique enregistrée – en l’occurrence le PDG de la filiale française de Universal Music, Pascal Nègre – confirme que son groupe détient bien « un petit pourcentage » du capital de Spotify, la première plateforme européenne de musique en ligne (plus de 10 millions d’utilisateurs actifs, dont 3 millions d’abonnés). Il n’en dira pas plus, ni sur le niveau
de ce lien capitalistique, ni sur son objectif, écartant l’idée d’un quelconque « droit de regard » sur la société suédoise. Or, selon le magazine informatique Computer Sweden à Stockholm, les quatre majors mondiales de la musique – Universal Music, Sony Music, Warner Music et EMI – détiennent chacune « entre 2 % et 6 % » du capital
de Spotify. Secret de polichinelle depuis des mois, cette participation ne fut jamais démentie ni confirmée. C’est désormais chose faite. Du moins par la plus grande
major. Valorisé jusqu’à 4 milliards de dollars, Spotify représenterait pour l’actionnaire minoritaire Universal Music un actif d’une valeur pouvant atteindre 240 millions de dollars. Depuis mai dernier, selon le New York Times, Spotify a confié le soin à Goldman Sachs le soin de lever jusqu’à 220 millions de dollars. Et si la Commission européenne donnait son feu vert à la fusion entre la filiale musicale de Vivendi (1) et l’autre major EMI, le nouvel ensemble en position dominante renforcée sur le marché mondial pourrait détenir environ 10 % de Spotify… Au-delà de ce bon placement, Universal Music a réussi à imposer à Spotify de limiter – depuis le 1er mai 2011 –
le nombre d’écoutes gratuites au profit des abonnements payants. Et Vivendi a fait d’une pierre deux coups en lançant l’an dernier Carré Spotify chez SFR (2).
Selon le quotidien économique suédois « Dagens Industri », le chiffre d’affaires de Spotify pourrait dépasser cette année les 6 milliards de couronnes suédoises (680 millions d’euros). Mais les pertes nettes, elles, seraient d’environ 50 millions d’euros. Reste à savoir si les majors du disque détiennent aussi des actions stratégiques chez le concurrent français, Deezer, édité par la société BlogMusik détenue à 11 % par France Télécom et en quête de capitaux. A l’automne dernier, Deezer a tenu tête à Universal Music (3) avec qui il a conclu un accord jusqu’à fin 2012 en vue de développer aussi les abonnements. Et après ? @

Jacques Toubon souhaite continuer sa mission eTVA

En fait. Le 25 juin, en marge de la remise des insignes d’Officier de l’ordre national du mérite à Eric Walter (secrétaire général de l’Hadopi), Jacques Toubon a indiqué à Edition Multimédi@ qu’il est prêt à poursuivre sa mission sur la modernisation de la fiscalité culturelle « si François Hollande le souhaitait ».

En clair. Nommé le 9 décembre 2011 par Nicolas Sarkozy, alors président de la République, Jacques Toubon nous a indiqué qu’il serait prêt à poursuivre sa mission sur
« les défis de la révolution numérique aux règles fiscales européennes » si le nouveau chef de l’Etat François Hollande le souhaitait. « Je suis partant pour continuer en vue de convaincre l’Europe d’adopter un taux réduit de TVA aux biens culturels, quel que soit le support, et d’aboutir ainsi à une harmonisation en matière de fiscalité numérique », a-t-il confié à Edition Multimédi@. « Il est urgent de le faire si l’on ne veut pas que les géants d’Internet continuent à être avantagés fiscalement, et sans attendre l’échéance de 2015- 2019 pour la mise en place du principe du pays de consommation », a-t-il ajouté.
La ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, va justement rencontrer le 9 juillet le commissaire européen Taxe et Anti-fraude, pour faire avancer la fiscalité numérique (1) et répondre à la lettre de mise en demeure de Bruxelles à propos du taux réduit de TVA (7 %) pour les livres numériques appliqué par la France depuis le 1er janvier 2012. Le Luxembourg est lui aussi dans le collimateur avec son taux super réduit de 3%! Mais il n’en va pas de même pour la musique, la vidéo et les services en ligne, y compris la presse en ligne, qui sont soumis au taux normal de 19,6 %. Malgré l’alternance présidentielle, Jacques Toubou espère pouvoir continuer sa mission. « C’est ce que David Kessler [conseiller Culture et Médias du président de la République, ndlr]
est en train de suggérer à François Hollande », nous a précisé Jacques Toubon.
Ancien ministre de la Culture (1993-1995), puis de la Justice (1995-1997), ex-eurodéputé (2004-2009), actuellement membre du collège de l’Hadopi et coauteur du rapport
« Création & Internet » remis il y a deux ans et demi maintenant à Nicolas Sarkozy, Jacques Toubon espère convaincre aussi le Conseil de l’Union européenne passé le
1er juillet, et pour six mois, sous la présidence de Chypre. « Nous avons le soutien de Neelie Kroes [commissaire européenne en charge de l’Agenda numérique, ndlr]», s’est félicité Jacques Toubon. Mais un obstacle de taille demeure : l’obtention de l’unanimité
des Vingt-sept pour adopter un taux réduit sur les biens et services culturels. @

Fibre : l’Autorité de la concurrence contre Orange

En fait. Le 3 juillet, en marge d’un colloque sur les géants de l’Internet organisé
par l’Autorité de la concurrence, son président Bruno Lasserre a confirmé à EM@ l’envoi par ses services de « griefs » – émanant de Free – à France Télécom accusé de pratiques anti-concurrentielles dans la fibre optique.

En clair. On croyait la hache de guerre entre Free et France Télécom enterrée depuis les deux règlements de différends que l’Arcep a rendus il y a un an, respectivement les 21 et 26 juillet 2011, sur les offres d’accès et de mutualisation de leurs réseaux en fibre optique dans les zones très denses. Et bien non ! C’était sans compter sur la ténacité de l’Autorité de la concurrence qui vient de relancer d’elle-même les hostilités. Selon nos informations, confirmées par Bruno Lasserre, l’Autorité de la concurrence a adressé, en avril dernier, une cinquantaine de griefs à France Télécom, lui reprochant d’entraver la concurrence dans le déploiement du FTTH (1). Malgré les deux décisions de l’Arcep, les sages de
la rue de l’Echelle réactivent ainsi la plainte initiée à l’origine le 2 juillet 2007 par Free à l’encontre de France Télécom sur l’accès aux infrastructures de génie civil de ce dernier dans le cadre du déploiement de boucles locales en fibres optiques jusqu’aux abonnés (2). La filiale du groupe Iliad, qui avait reporté plainte en au printemps 2011 (cette fois devant l’Arcep), reproche à l’opérateur historique des pratiques « discriminatoires » et
son « refus d’accès » à cette « infrastructure essentielle » (voiries et immeubles). C’est
en juin, soit dans les deux mois impartis, que France Télécom a répondu au gendarme
de la concurrence en contestant point par point tous les griefs.
L’instruction de l’affaire ne fait donc que commencer chez les sages de la rue de l’Echelle, qui prennent le risque de ralentir encore plus le déploiement du FTTH déjà mal engagé : 220.000 abonnés seulement au premier trimestre 2012, selon l’Arcep. Il y a cinq ans, Free avait annoncé qu’il comptait investir dans le FTTH « jusqu’à 1 milliard d’euros d’ici 2012 ». On en est loin. Le nouvel entrant a opté pour une technologie dite « point-àpoint » (où l’abonné dispose de sa propre fibre tirée depuis le répartiteur NRO ou noeud de raccordement optique), qui est différente de la technologie « point à multipoint » ou GPON (3) de France Télécom. Dans ce dernier cas, une seule fibre est tirée depuis le NRO pour relier de nombreux logements (elle est ensuite divisée en plusieurs brins). L’architecture de Free prend en fait plus de place dans les fourreaux et les répartiteurs, mais garantit des débits optimaux pour chaque ligne quelle que soit l’utilisation simultanée des lignes voisines (4). @

Les opérateurs télécoms veulent prendre le contrôle de l’Internet et de la diffusion de contenus

A défaut d’avoir été des Internet natives, le monde sous IP leur ayant été imposé par l’industrie informatique dans les années 90, les opérateurs télécoms veulent aujourd’hui reprendre la main sur le réseau des réseaux et devenir diffuseurs de contenus (vidéo en tête).

Par Charles de laubier

C’est un tournant historique qui est en train de s’opérer dans le monde de l’Internet, quarante ans après la création du réseau des réseaux. Les opérateurs télécoms, qui ont dû devenir à partir des années 1990 fournisseurs d’accès à Internet (FAI) dans un univers ouvert, veulent rajouter une corde à leur arc : la diffusion de contenus sur Internet.

Les ebooks en ligne dépassent ceux sur support

En fait. Le 28 juin s’est tenue l’AG du Syndicat national de l’édition (SNE), qui a élu un nouveau président : Vincent Montagne remplace Antoine Gallimard. En tête de ses priorités : le livre numérique. « Avec les auteurs et les libraires, l’éditeur doit s’adapter à cette nouvelle donne et ne pas la subir ».

En clair. Ne générant pourtant qu’une part encore infime des recettes de l’industrie du livre en France, le numérique devient la priorité du SNE qui représente 600 membres. Les ventes de livres numériques ont généré 56,8 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2011, dont 34,8 millions de ventes d’ebooks en ligne, ce qui représente respectivement 2 % et 1,2 % des revenus globaux de l’édition française. Cette part très embryonnaire du digital, sur le total des 4,27 milliards d’euros réalisés l’an dernier, est d’autant plus paradoxale que le livre revendique sa position de « premier bien culturel en poids économique » dans l’Hexagone devant – selon les chiffres de GfK – le jeu vidéo (1,8 milliard d’euros de revenus), la vidéo (1,4 milliard) et la musique (0,8 milliard). Comme l’a souligné Antoine Gallimard, « l’édition numérique (…) ne progressent dans l’ensemble “que” de + 7,2 % ». Une tendance se confirme en 2011 : la substitution du numérique sur support physique par le numérique en ligne s’accélère. En effet, en 2011, les ebooks sur support physique sont en recul à 21,5 millions d’euros : une chute de -38,5 % sur un an. Ils sont dépassés pour la première fois par les ebooks en ligne, lesquels doublent leurs ventes à 34,8 millions d’euros (1) : un bond de + 98 % en un an, pour représenter (on l’a vu) 1,2 % du chiffre d’affaires global de l’édition l’an dernier. Les autres industries culturelles, elles, sont engagées depuis plusieurs années dans la dématérialisation numérique de leurs œuvres. Le livre fait donc pâle figure en affichant un retard structurel et culturel dans la numérisation. Faute d’avoir anticipé et de ne pas avoir retenu des enseignements de la musique qui, elle, a essuyé les plâtres bien avant, les maisons d’éditions françaises ont été contraintes de sortir de leur attentisme par un Google déterminé. Résultat : le livre a perdu six ans à ferrailler devant les tribunaux, jusqu’à l’accord conclu le 11 juin avec le géant du Net (2), au lieu de faire évoluer rapidement son modèle économique et développer une offre légale. Reste que le rapport d’activité annuel du SNE publié à l’occasion de son AG ne dit mot – contrairement au précédent (lire EM@39, p. 3) – sur le piratage d’ebooks.
En novembre dernier, sa déléguée générale Christine de Mazières nous avait indiqué (lire EM@46, p. 3) que l’Hadopi n’était plus une priorité. @