Gestion collective : début de la concertation «Hoog»

En fait. Le 23 février, le directeur général du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep), David El Sayegh, explique à Edition Multimédi@ les principaux griefs formulés à l’encontre du projet de gestion collective des droits.
Il en fera part au médiateur, Emmanuel Hoog, qui démarre la concertation.

En clair. Un mois après avoir été désigné par le ministre de la Culture et de la Communication sur demande du président de la République, Emmanuel Hoog
– par ailleurs PDG de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) – n’a pas vraiment encore commencé à consulter la filière musicale. Selon nos informations, la concertation qu’il doit mener cette année sur la faisabilité de la « gestion collective obligatoire » des droits sur la musique devrait démarrer courant mars. Contacté, le patron de l’INA n’a pas souhaité communiquer « pour l’instant ». Il faut dire que Nicolas Sarkozy, faisant sienne la proposition de la mission Zelnik, avait dit, lors de ses vœux à la Culture le 7 janvier dernier « fixer un délai d’un an aux producteurs [de musique] pour qu’ils négocient les droits et “libèrent” leurs fichiers musicaux sur toutes les plateformes [de téléchargement sur Internet] ». Et mettait en garde la filière : « Faute de le faire, la négociation des droits relèverait, par la loi, de la gestion collective obligatoire par l’entremise des sociétés civiles. Je sais que cette mesure ne fera pas plaisir aux producteurs, je suis prêt à les recevoir et à en parler avec eux, mais chacun doit faire un effort ». Universal Music, Sony Music, EMI ou encore Warner Music, par le biais du Snep, s’apprêtent à expliquer à Emmanuel Hoog pourquoi ils sont opposés au principe de gestion collective obligatoire pour le téléchargement de musique sur Internet et le streaming. « Le rapport Zelnik commet plusieurs erreurs manifestes de diagnostic qui conduisent à préconiser une mauvaise solution : la gestion collective obligatoire », explique David El Sayegh, le directeur général du Snep, à Edition Multimédi@. « Cette solution ne permet pas une simplification de la gestion des droits étant donné qu’il s’agit d’une solution locale à une problématique internationale. La gestion collective obligatoire ne permet en outre pas une meilleure répartition des richesses entre les acteurs du numérique », poursuit-il. Selon le Snep, la gestion collective obligatoire risque notamment de « figer les rémunérations pour un mode d’exploitation en devenir ayant vocation, à moyen terme, à cannibaliser les ventes de disques ». De son côté, l’Adami (1), entend, au contraire, vanter auprès d’Emmanuel Hoog les mérites d’une telle gestion collective. @

La France et l’Europe s’interrogent sur Google

En fait. Le 18 février, l’Autorité de la concurrence a été saisie par Christine Lagarde, ministre de l’Economie, des Finances, de l’Industrie et de l’Emploi
sur  « le fonctionnement de la concurrence dans le secteur de la publicité sur Internet » dominé par le moteur de recherche en ligne Google.

En clair. Les sages de la rue de l’Echelle rendront un avis très attendu « autour de l’été » pour savoir s’il faut taxer les revenus publicitaires de Google, tout en analysant la concurrence sur ce marché. Cette expertise avait été demandée par Nicolas Sarkozy à
la ministre Christine Lagarde « pour appréhender fiscalement les activités publicitaires des grands portails et moteurs de recherche internationaux présents en France », en vue d’instaurer une « taxe Google » préconisée par la mission Zelnik (lire EM@5 p. 1 et 2). Mais Bercy ne peut agir seul fiscalement au regard du droit européen. D’autant que la Commission européenne a par ailleurs été saisie de trois plaintes (Foundem, Ejustice et Ciao) le 24 février pour pratiques anticoncurrentielles. De leur côté, les parlementaires français auraient aimé aller plus vite. Les 15 et 16 février, le Sénat a en effet examiné les amendements sur le projet de loi de finances rectificatif pour 2010. A été retiré celui qui fut adopté le 10 février par Philippe Marini, au nom de la commission des finances, et qui devait taxer les revenus de la publicité sur Internet. Philippe Marini avait qualifié son texte d’« amendement d’appel », c’est-à-dire destiné à être retiré lors de l’examen en séance publique du projet de loi de finances rectificatif – ce qui fut fait – et à presser le gouvernement. L’amendement propose que ce prélèvement obligatoire soit à un taux de 1 %. Car, comme l’explique le sénateur Philippe Marini, « la taxe prendrait pour assiette les revenus publicitaires en ligne (achats d’espace, liens sponsorisés) des sociétés établies dans l’Union européenne, engendrés par l’utilisation de leurs sites Internet depuis la France ». Ces sociétés du Web (1) sont fiscalisées à l’étranger ; l’opération publicitaire est réalisée sur le territoire français, « provoquant ainsi une captation de marché dont l’enjeu est d’en mesurer l’importance ». Dans son rapport, la mission Zelnik avait suggéré que l’Etat français s’inspire des règles de territorialité qui s’appliquent à la taxe sur les conventions d’assurance couvrant un risque localisé en France. La Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) s’était félicitée de cet amendement (2). Quant à l’Association des services Internet communautaires, qui n’avait dit mot depuis le rapport Zelnik (EM@6 p. 5), elle a dénoncé cette taxe « unique au monde ». @

Le super-régulateur européen des télécoms est né

En fait. Le 28 janvier, les régulateurs nationaux des télécommunications des
27 Etats membres de l’Union européenne se sont réunis pour la première fois
à Bruxelles au sein du nouvel Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) créé en décembre 2009.

En clair. Le GRE est mort, vive l’ORECE ! Le Groupe des régulateurs européens
– jugé « peu structuré » – laisse place à l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques, lequel s’est réuni pour la première fois à Bruxelles.
Mais son siège reste encore à fixer. La Commission européenne se dote ainsi d’un
droit de regard et de veto sur les décisions que lui soumettront les 27 Arcep nationales. C’est l’aboutissement d’un combat (pas gagné d’avance) mené depuis près de trois ans par la commissaire européenne Viviane Reding – jusqu’alors en charge de la Société de l’information et des Médias et, depuis le 10 février, à la tête de la direction Justice, droits fondamentaux et citoyenneté. C’est le 27 juin 2006 qu’elle a surpris tout son monde en relançant l’idée d’un « régulateur européen des télécoms » supra-national. Ce que son prédécesseur, Erkki Liikanen, avait évoqué quatre ans auparavant pour
la première fois – le 29 juillet 2002 – lors de la création du Groupe des régulateurs européens (GRE). Erkki en avait rêvé ; Viviane l’a donc fait ! Au grand dam des régulateurs nationaux invoquant le « principe de subsidiarité » et mettant plutôt en avant leur Groupe des régulateurs indépendants (GRI) à eux – créé en 1997
sous l’impulsion de l’ancien président de l’Arcep (ex-ART), Jean-Michel Hubert.
La question d’un super-régulateur européen des télécoms est lancinante depuis le début de la libéralisation du téléphone. L’ancien directeur de la « DGXIII », Michel Carpentier, avait indiqué aux journées internationales de l’Idate en novembre 1997 qu’une « Agence européenne de régulation [était] envisageable ». Cette année-là,
le nom de Bruno Lasserre (actuel président de l’Autorité de la concurrence) était avancé pour présider cette éventuelle instance… Reste à savoir si l’ORECE sera bénéfique aux 500 millions d’Européens, à l’heure où les Vingt-sept doivent transposer le nouveau Paquet télécom d’ici à juin 2011. Objectif affiché : harmoniser les pratiques de régulation des réseaux (très) haut débit et de l’Internet mobile, en préservant le principe de neutralité du Net.
Cela au moment où Neelie Kroes – la nouvelle commissaire à la Stratégie numérique (1) – a comme priorité de mettre en place d’un « marché unique européen » des services en lignes et des contenus créatifs. @

Les producteurs de cinéma en appellent à Sarkozy

En fait. Le 1er février, l’Association des producteurs de cinéma (APC) a
adressé un courrier au chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, pour lui faire part
de ses observations à la suite du rapport Zelnik et de ses préoccupations
sur le financement ou l’exposition des films français.

En clair. Après avoir déjà écrit le 27 janvier au ministre de la Culture et de la Communication pour lui faire des observations sur le rapport Zelnik, et après avoir
– avec le SPI (1) – alerté le 18 janvier les pouvoirs public « sur la situation particulièrement préoccupante de la production cinématographique française (…)
pour l’année 2009 » et sur « des perspectives qui se dégradent pour l’année 2010 », l’Association des producteurs de cinéma (APC) s’adresse cette fois directement au président de la République. Selon nos informations, l’organisation professionnelle
a adressé à Nicolas Sarkozy un courrier – daté du 1er février – pour exprimer ses inquiétudes et demander une réflexion sur les obligations de financement des films français. Et ce, au moment où le ministère de la Culture finalise les décrets sur les services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) qui prévoient notamment d’élargir aux services « non linéaires » les contributions pour le Compte de soutien
à l’industrie des programmes (Cosip). Par la voix de son président, Eric Altmayer,
les 120 sociétés de production membres de l’APC ont déjà réitéré auprès de Frédéric Mitterrand (2) leur demande à ce que les fabricants de « terminaux interactifs de réception » contribuent eux-aussi à la « promotion de la diversité des contenus
et (…) des œuvres européennes ». Autrement dit : que les fabricants (ou leurs importateurs) de téléviseurs connectés aient une obligation d’investir dans le cinéma. Motif : les écrans de télévision permettent – à partir de widgets – d’accéder à des offres de vidéo à la demande (VOD). L’APC veut en outre que les SMAd soient tenus à « des obligations d’exposition des films européens et d’expression originale française ». Sont concernés : les plateformes de VOD, la TV de rattrapage, et leurs distributeurs que sont les fournisseurs d’accès à Internet (FAI), sans oublier les guides électroniques de programmes. Sur la chronologie des médias, l’APC n’est pas hostile à ce que la VOD par abonnement soit ramenée à 22 mois, voire à 10 mois, pour peu que ces services soient soumis à des obligations de financement. « Nous demandons (…) que soit entamée avec votre ministère et le CNC (3) la nécessaire réflexion quant aux modalités de perception et de redistribution de ces obligations », écrit Eric Altmayer. @

Neelie Kroes : « Un marché unique en ligne européen »

En fait. Les 14 et 19 janvier, la commissaire européenne Neelie Kroes – auparavant chargée de la concurrence – a été auditionnée à deux reprises par le Parlement européen à Bruxelles. C’est ce 10 février qu’elle prendra officiellement le portefeuille « Agenda numérique ».

En clair. Ce n’était pas gagné d’avance ! D’autant qu’une partie des eurodéputés, qui ont auditionné Neelie Kroes, n’avaient pas été pleinement convaincus la première fois. Il faut dire que l’ancienne commissaire européenne à la Concurrence hérite des dossiers épineux de Viviane Reding. Sur la neutralité de l’Internet, que le Parlement
de Strasbourg examinera cette année, elle a déclaré qu’elle « protègera » le principe.
« [Les fournisseurs d’accès à Internet] ne devraient pas être autorisés à limiter l’accès au service ou le contenu pour des motivations commerciales, mais seulement en cas de problèmes de sécurité et de spam ». Sur la mise en place en Europe d’un marché unique en ligne, elle a affirmé que « ce n’[était] pas un but en soi, mais un moyen d’apporter des changements » et qu’elle entend y parvenir d’ici la fin de son mandat. Cela suppose une « disponibilité totale du haut débit ». Sur la propriété intellectuelle, Neelie Kroes a estimé que la législation européenne dans le domaine du droit d’auteur était encore « un patchwork de règles nationales » et a rappelé l’engagement pris par les sociétés d’auteurs de mettre en place des « licences multi territoriales » (1). La Néerlandaise a en outre appâté les eurodéputés, dont Catherine Trautmann, avec les négociations internationales sur un texte « anti-contrefaçon » dit ACTA (2) qui n’irait pas au-delà de ce qui prévu dans le Paquet télécom adopté en fin novembre dernier en matière d’Internet (coupure de l’accès après un procès équitable) et de droit fondamental (voir EM@ n°1). Sur la lutte contre la cyber criminalité, la commissaire désignée a répondu sur la nécessité d’un Office de régulation du cyberespace de l’Union européenne. Elle n’y est pas très favorable et lui préfère une plus grande coopération entre les Etats membres et un rôle accru de l’actuelle agence Enisa (3). Objectif : faire du Net en Europe « l’endroit le plus sûr pour les consommateurs ».
Sur le dividende numérique (les fréquences dites en or libérées d’ici à 2012 par l’extinction de la diffusion analogique au profit de la télévision numérique),
la commissaire rappelle l’initiative du Parlement européen d’organiser un sommet sur
le spectre afin d’harmoniser les politiques et d’aboutir à un marché unique. Dans sa réponse écrite aux eurodéputés datée du 22 décembre 2009, Neelie Kroes fixe comme objectif « d’offrir à tous les Européens l’accès aux (…) haut débit (…) d’ici à 2013 ». @