La rentrée s’annonce (très) chargée pour l’Arcep

En fait. Le 10 septembre, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) a fait le point sur les principaux dossiers
de la rentrée tels que très haut débit, 3G/4G, neutralité du Net, Paquet télécom, qualité de services, relations entre opérateurs et consommateurs, …

En clair. Mine de rien, la rentrée 2010-2011 s’annonce être l’une des plus chargées
pour l’Arcep, tant les chamboulements concurrentiels et réglementaires à venir vont
faire passer le marché des télécoms, des mobiles et de l’accès à Internet à la vitesse supérieure. Entre le déploiement de la fibre optique, d’une part, et la mise en place du très haut débit mobile, d’autre part, et en attendant l’arrivée du quatrième opérateur mobile en 2012 (Free), le paysage français des télécoms entame une profonde mutation de ses infrastructures et de leurs contenus. C’est dans le mobile, avec la quatrième génération de mobile (4G), que le rythme va s’accélérer : l’Arcep a reçu jusqu’au 13 septembre dernier les ultimes commentaires des acteurs intéressés et s’apprête à transmettre au gouvernement « au début de l’automne » ses propositions pour que soient publiés « courant décembre » le cadre de l’appel à candidature pour l’attribution des fréquences 2,6 Ghz et 800 Mhz, puis que soient lancées « d’ici fin
2010 » les procédures d’appel à candidatures (1). Les fréquences de 2,6 Ghz seront attribuées « en premier fin mars » et celles de 800 Mhz du dividende numérique « en juillet », selon les indications de Jean-Ludovic Silicani, président de l’Arcep. A ce rythme, la 4G pourrait être disponible « avant la fibre optique dans certains territoires ». Car la fibre est peut-être rapide en débit mais… plutôt lente en déploiement.
« A l’automne », l’Arcep va lancer une consultation publique sur « un modèle technico-économique » du déploiement de la fibre optique sur tout l’Hexagone avec financement public-privé, dont elle évaluera le coût global « d’ici à la fin de l’année » (2). Ces nouvelles infrastructures soulèvent en outre avec plus d’acuité la question de la neutralité du Net. L’Arcep publiera ses propositions « fin septembre » pour compléter
le rapport du gouvernement au Parlement (lire EM@19, p .4), lequel aura
à transposer à l’automne le Paquet télécom européen. « Il faut sortir d’une double hypocrisie » (des tenants d’un Internet sans but lucratif devant rester neutre versus
des marchands de l’Internet commercial rejetant tout intervention). La transparence, l’information et la non discrimination du consommateur seront au coeur de la future loi. C’est justement « fin novembre » que l’Arcep émettra des recommandations en faveur
du consommateur. @

Gestion collective : 1ère réunion le 16 septembre

En fait. Le 28 juillet, Emmanuel Hoog, médiateur chargé de trouver un consensus autour d’un accord pour instaurer une « gestion collective obligatoire » des droits sur la musique pour Internet, indique à Edition Multimédi@ qu’il a convié les professionnels auditionnés à trois tables rondes thématiques.

En clair. Les trois « réunions communes » pour trouver un consensus autour de la gestion collective des droits musicaux se tiendront au ministère de la Culture et de la Communication les jeudis 16 septembre, 30 septembre et 28 octobre prochains. Selon nos informations, la première portera sur la délivrance des autorisations pour les services à la demande, le streaming, le webcasting et le simulcasting. La seconde concernera la perception des droits et la rémunération des titulaires de droits. La troisième aura trait à la répartition des droits perçus entre les ayants droits. Alors que
la Sacem (1) ou l’Adami (2) y sont plutôt favorables, il n’en va pas de même pour le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) qui est y hostile (3). En janvier dernier, Nicolas Sarkozy a donné un an aux producteurs de musique pour qu’ils
« libèrent » leurs fichiers musicaux sur toutes les plateformes de téléchargement.
« Faute de le faire, a-t-il prévenu, la négociation des droits relèverait par la loi de la gestion collective obligatoire » (EM@ 8 p. 5). Emmanuel Hoog (par ailleurs PDG de l’AFP) a donc convoqué pour ces trois réunions la trentaine de personnes déjà auditionnées, dont les responsables des sites web musicaux comme Deezer (rallié
à Orange), iTunes (Apple), Starzik ou encore Jiwa. Coup de froid : ce dernier a annoncé début août sa mise en liquidation judiciaire depuis le 29 juillet.
Pour le cofondateur de Jiwa, Jean-Marc Plueger, les raisons de cette faillite réside
dans le « minimum garanti » à payer d’office : « En 2009, nous avons enregistré un
chiffre d’affaires de l’ordre de 300.000 euros. Dans le même temps, nous devions verser 1 million d’euros aux maisons de disques », a-t-il expliqué à l’AFP. Sur BFM, la secrétaire d’Etat à l’Economie numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet, s’en est émue : « Il y a un très gros problème (…). Ce sont les gros qui détiennent les catalogues [de musique] et la négociation est très difficile avec les petits diffuseurs que sont par exemple les web- radios ». Après un entretien avec le PDG de Jiwa le 6 août, elle
a même dénoncé une « entrave au développement d’une offre légale attractive » :
« J’appelle tous les acteurs de la filière à se mettre autour de la table, avec Emmanuel Hoog ». @

Le marché de la télévision de rattrapage s’organise

En fait. Le 5 juillet, France Télévisions a lancé Pluzz, son service gratuit de télévision de rattrapage commun à l’ensemble des chaînes publiques. Il s’agit
d’un « player » unique. Selon TV-Replay, 64 % des programmes des principales chaînes françaises sont déjà proposés en catch up TV.

En clair. Les télévisions se déchaînent et les téléspectateurs s’affranchissent de la grille. La catch up TV, qui permet de (re)voir une émission, un « JT », un épisode d’une série, un documentaire ou encore un film après qu’ils aient été diffusés à l’antenne, s’impose aux chaînes. Pluzz rejoint ainsi M6 Replay, Canal+ à la demande, Arte+7 et TF1 Player/MyTF1/WatTV sur le marché prometteur de la télévision de rattrapage. D’autant qu’au-delà de quelques jours après l’antenne, sept pour Pluzz, le visionnage devient payant. Sans compter les recettes publicitaires des spots placés en début et milieu de vidéo, dont les tarifs sont jusqu’à dix fois plus chers que de simples bannières. France Télévisions passe ainsi à la vitesse supérieure après avoir fait ses premiers pas avec Orange, dans le cadre d’un accord exclusif de deux ans. Contesté jusque devant l’Autorité de la concurrence (1) (*) (**) et par le rapport Hagelsteen remis au Premier ministre en janvier dernier (EM@5 p. 3), cet accord décrié avait finalement été toléré mais limité dans le temps. L’exclusivité France Télévisions- France Télécom autour d’un service baptisé « 24/24 TV » (ex- Rewind TV) s’est en effet terminée le 21 avril. Mais cela n’empêche pas Xavier Couture, le patron des contenus d’Orange, de continuer à négocier le groupe audiovisuel public, pour proposer Pluzz aux 3 millions d’abonnés télévision via l’ADSL.
« Nous négocions avec France Télévision un accord [non exclusif cette fois, ndlr] de catch up TV, qui pourrait porter sur trois ans », avait-il répondu mi-juin à Edition Multimédi@, lors d’un déjeuner de l’Association des journalistes médias (AJM). Maintenant que Pluzz permet de centraliser les différés des chaînes France 2, France 3, France 4, France 5 et RFO, France Télévisions est mieux à même de nouer des partenariats tous azimuts. Au-delà des fournisseurs d’accès à Internet, comme Free qui proposera Pluzz dès septembre, des accords peuvent être noués avec des « guides »
de télévision de rattrapage comme TV-Replay (ex- TVàrevoir). Créé en 2007 sur le site web Totalvod, TV-Replay a fait l’objet le 18 juin d’un jugement favorable à la suite d’une plainte de M6 l’accusant de concurrence déloyale et de « parasitisme ». La concurrence rend fébrile. Il y a un an, M6 avait négocié avec TF1 et Canal+ la création d’une plateforme commune de catch up TV pour parer à l’arrivée prochaine en Europe de l’américain Hulu, pionnier en la matière. Les chaînes historiques craignent cette nouvelle concurrence. @

Marché des jeux et paris en ligne : une ouverture se voulant « maîtrisée »

Validée par le Conseil constitutionnel le 12 mai et promulguée le 13, la loi sur l’ouverture à la concurrence du marché des jeux d’argent et de hasard en ligne pourra entrer en vigueur à temps pour le coup d’envoi de la Coupe du monde
de football prévu le 11 juin.

Par Hervé Castelnau (photo), avocat associé, et Thibaut Kazémi, avocat à la Cour, Norton Rose LLP

Les jeux d’argent en ligne étaient, jusqu’à présent, soumis
en France au cadre général très strict, assorti de lourdes sanctions pénales, prévu par la législation applicable aux
jeux de hasard au sens large. Le principe est celui de l’interdiction avec des dérogations accordées à la Française
des Jeux pour les loteries, au Pari Mutuel Urbain (PMU)
pour les paris hippiques et pour les jeux dits de casino
dûment autorisés par le ministère de l’Intérieur situés dans une station balnéaire, thermale ou climatique ou dans une ville de plus de 500.000 habitants.

Jeux d’argent en ligne : fin du monopole de l’Etat

En fait. Le 6 avril, le Parlement français a adopté définitivement le projet de loi sur l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, qui avait été déposé pour la première fois à l’Assemblée nationale il y a à peine plus d’un an (le 25 mars 2009).

En clair. C’était presque un baptème du feu pour le nouveau ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l’État, François Baroin, qui va mettre un terme
à plus d’un siècle de monopole d’Etat sur les jeux d’argent. Internet et les mobiles contraignent le gouvernement à ouvrir ce marché à la concurrence, tandis que le lobbying des professionnels a été pressant… A ce contexte s’ajoute une date : le 11 juin 2010, début de la Coupe du monde de football avec son lot de paris en ligne. L’intérêt financier de l’Etat français, qui perçoit des recettes fiscales sur les enjeux – soit 7,5 % des mises pour les paris sportifs et hippiques, et à 2 % des mises pour le poker, avec un plafond fixé à 1 euro par donne – est également de mise. Le calendrier d’ouverture est « évidemment tendu, mais il est tenable » (dixit le ministre). Déjà 5 % des Français s’adonneraient aux jeux en ligne en pariant « clandestinement » entre 3 et 4 milliards d’euros par an sur jusqu’à 40.000 sites web de jeux !
Sur l’Hexagone, les casinos sous contrôle des pouvoirs publics, le PMU pour les paris hippiques et la Française des Jeux (FDJ) pour la loterie nationale – qui ont attiré
36,7 milliards d’euros de mises rien qu’en 2008 – vont devoir faire une place à de nouveaux entrants (1). Mais la France a choisi une ouverture restreinte aux paris sportifs, hippiques et surtout au poker en ligne, lequel attire les trois-quart des sommes misées sur Internet. Les machines à sous restent, quant à elles, interdites et restent sous monopole des casinos. Motif : « Risques d’addiction » et « lutte contre le blanchiment d’argent ».
Pas de limitation du nombre d’acteurs (numerus clausus) mais un agrément de cinq
ans renouvelable délivré par l’Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) créée pour l’occasion et présidée par Jean- François Vilotte. Pour les sites illégaux dépourvus de licence, interdiction de faire de la publicité et blocage sur injonction du juge (lire Juridique page 8 et 9). Quant au taux de retour au joueurs (TRJ), c’est-à-dire la part de l’argent misée reversée aux joueurs, il est plafonné pour éviter les abus et la dépendance. La FDJ, par exemple, pratique un TRJ moyen de 60 %, 29 % des enjeux étant reversés à l’Etat et 11 % revenant au fonctionnement de l’opérateur. L’opposition parlementaire devrait saisir le Conseil constitutionnel. @