L’Hadopi va pouvoir lancer la « riposte graduée »

En fait. Le dimanche 7 mars est paru au « Journal Officiel » un décret daté du
5 mars de la loi Hadopi sur le traitement automatisé de données à caractère personnel, lequel est baptisé « Système de gestion des mesures pour la protection des oeuvre sur Internet ». La Cnil ne rendra pas public son avis du
14 janvier.

En clair. La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) va pouvoir commencer à établir la liste des internautes suspectés de piratage en ligne. Un autre décret, qui doit préciser la procédure de sanction à suivre par l’Hadopi vis-à-vis notamment de l’autorité judiciaire (jusqu’à coupure de l’abonnement par décision du juge), donnera le coup de la « riposte graduée ». La commission de protection des droits, composée au sein de l’Hadopi de six membres (1), va pouvoir collecter auprès des organismes représentant des ayants droit et du Centre national du cinéma (CNC) les pseudonyme et adresse IP – y compris le protocole peer-to-peer utilisé – de chaque abonné incriminé et du fournisseur d’accès
à Internet (FAI) correspondant. Quant aux nom de famille et prénom du pirate présumé, ils seront fournis par des « agents assermentés et agréés » qu’auront désignés le CNC ou des organismes de défense professionnelle comme le Snep (musique), la Sacem (musique), l’ARP (cinéma) ou encore l’Alpa (audiovisuel). Les FAI devront eux aussi coopérer en déclinant nom de famille, prénom, adresse postale et e-mail de son abonné en question. La commission de protection des droits de l’Hadopi intègre toutes ces données personnelles dans le nouveau système de gestion des mesures, dans lequel elle met également les avertissements électroniques et les lettres recommandées envoyées « sous son timbre et pour son compte » par l’intermédiaire
du FAI. Le décret prévoit en outre le croisement des fichiers des ayants droit et des opérateurs télécoms, selon une « convention » d’interconnexion, « ou à défaut » par
un arrêté. Et en matière de conservation de toutes ces informations, il est prévu de les supprimer : après deux mois s’il n’y a pas eu d’avertissement d’envoyé par e-mail à l’abonné ; après quatorze mois si un second avertissement par e-mail – « assorti » d’une lettre recommandée par la poste – n’a pas suivi le premier (en cas de récidive dans les six mois) ; après vingt mois en cas d’envoi du second e-mail avec sa lettre recommandée. Quant à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), elle indique à Edition Multimédi@ qu’elle et le gouvernement ne prévoient pas de publier l’avis rendu le 14 janvier sur ce décret, ni d’indiquer s’il est favorable avec ou sans réserves… @

Fonds de soutien du CNC : les FAI y contribuent pour près de 10 % cette année

Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) contribuent depuis 2008 au compte de soutien du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et aide ainsi
le cinéma et l’audiovisuel français. Selon nos informations, leur part est d’environ
50 millions d’euros pour 2010.

Le CNC, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre de la Culture et de la Communication (1) et rebaptisé en juillet dernier Centre national
du cinéma et de l’image animée, est doté pour cette année 2010 d’un budget brut prévisionnel en croissance de 6,5 % à 575 millions d’euros. Ce montant constitue
ce que l’on appelle le « fonds de soutien du CNC », dont profitent le cinéma et l’audiovisuel en France, et dans lequel on retrouve le fameux Cosip, le Compte de soutien à l’industrie des programmes, qui apporte automatiquement une aide financière à la production audiovisuelle.

Allociné : « La convergence Internet-téléviseurs nous ouvre des horizons intéressants »

Claude Esclatine et Grégoire Lassalle, respectivement PDG et cofondateur d’Allociné, expliquent à Edition Multimédi@ comment leur site web est devenu le numéro 2 mondial de l’information et de la vidéo sur le cinéma. Ils lèvent le voile sur leur projet de chaîne de télévision.

Edition Multimédi@ : Le site Allociné est crédité de 7,6 millions de visites uniques en décembre 2009 pour 30 millions de vidéos diffusées. Que recherchent vos internautes ?
Claude Esclatine (photo) et Grégoire Lassalle :
Au cœur de ce record établi pendant deux mois consécutifs fin 2009 et qui traduit un bond de 25 % de notre audience, la vidéo occupe une place croissante. Les utilisateurs réguliers d’AlloCiné – plus d’un internaute sur cinq en France – attendent beaucoup d’informations et de services, mais aussi beaucoup
d’images. AlloCiné ne diffuse aucune oeuvre dans son intégralité. C’est avant tout un media, dont la mission est de faire la promotion du Septième Art. Les quelque 100 millions de vidéos diffusées au cours du quatrième trimestre de l’an dernier concernent, toutes, des bandes annonces, y compris celles diffusées en post-roll [clip publicitaire après une vidéo, ndlr], des extraits de films, des making off [film sur le film], des interviews. En outre, les émissions en propre d’AlloCiné pèsent dorénavant plus de
10 % de ce volume, pourcentage lui-même en forte hausse. Par contre, les téléchargements en vidéo à la demande (VOD) – gérés depuis octobre 2009 via la plate-forme de CanalPlay – ne sont pas pris en compte dans ces chiffres, pas plus que les spots vidéo publicitaires. Quant au nouveau player video d’AlloCiné, mis en ligne
– y compris via les players « exportés » vers nos partenaires – à l’occasion de la nouvelle version du site en octobre dernier, il est accessible en haute qualité.

Hulu, Pandora, HBO GO… Le Web restreint

En fait. Le 18 février, la chaîne de télévision payante américaine HBO – filiale du groupe Time Warner – a lancé un site en ligne de vidéo à la demande (VOD) en streaming baptisé HBO GO. Le service, gratuit pour les abonnés de la chaîne et ceux de l’opérateur Verizon, propose des films et des séries.

En clair. « Nous sommes désolés, mais vous ne pouvez accéder à ce site. HBG GO
est accessible uniquement au sein des Etats-Unis », précise aux internautes du reste
du monde le site de VOD de la chaîne payante du groupe américain Time Warner. Car,
à l’instar de Hulu, un autre site de vidéo et de catch up TV américain (1), il s’agit d’un nouveau site qui met des frontières virtuelles à l’Internet. Pourtant le réseau des réseaux en est dépourvu. La raison de ce blocage géographique du Web réside dans les droits d’auteur et les restrictions de licences conclus localement avec les ayants droit. Le site américain Pandora d’écoute de radio et de musique en ligne illustre lui aussi ce saucissonnage du Net. « Nous sommes profondément désolés de vous dire que, pour des restrictions de licences, nous ne pouvons plus donner accès à Pandora aux auditeurs situés en dehors des Etats-Unis. (…) Il n’y a pas d’alternative », explique son fondateur Tim Westergren. Comme Hulu, Pandora promet de résoudre le problème rapidement avec les industries culturelles pour « avoir une vision vraiment globale de Pandora ». Comme pour Hulu, Pandora ou encore Spotify, l’internaute arrivant sur le nouveau site HBOGO.com est immédiatement identifié par son adresse IP correspondant à son pays d’implantation. Le langage utilisé par le navigateur du visiteur ou les caractéristiques techniques de son ordinateur peuvent être également vérifiés pour démasquer l’intrus ou accueillir l’invité : c’est selon. Les éditeurs de ces sites vidéos, musicaux ou culturels interrogent par exemple des bases de données de type GeoIP de Maxmind et associent l’adresse à un pays. Résultat : les internautes ne sont plus égaux devant le Net, à part peut-être ceux qui sauront techniquement contourner l’obstacle en utilisant un outil proxy (comme FoxyProxy) ou un réseau privé virtuel (comme Thefreevpn) permettant de masquer leur pays d’origine. Les 600 heures de télévision et de films de HBO GO ne sont donc pas visionnables en Europe. HBO a testé durant deux ans son service en ligne auprès de ses 30 millions d’abonnés à sa chaîne à péage. Désormais, les abonnés à FiOS TV de Verizon y ont accès, tout comme ceux du câblo-opérateur Comcast via Fancast.com. La filiale de Time Warner prépare en outre une version pour smartphone, les réseaux mobiles étant réputés plus restrictifs que l’Internet fixe… @

Pourquoi Christine Albanel va chez Orange

En fait. Le 25 février, lors de la présentation de ses résultats annuels, France Télécom a officialisé la nomination de l’ancienne ministre de la Culture, Christine Albanel. Elle dirigera à compter du 1er avril la communication et le mécénat d’Orange, tout en étant chargée de la stratégie dans les contenus.

En clair. La présence de Christine Albanel chez France Télécom va permettre au groupe de rassurer ses partenaires présents et futurs dans l’audiovisuel et le cinéma, voire dans la musique ou l’édition de livres. « Orange a gagné une véritable légitimité dans les contenus. Désormais, nous sommes un acteur avec lequel il faut compter !
En 2010 nous poursuivrons notre politique de partenariats », a indiqué à Edition Multimédi@ Xavier Couture, le directeur des Contenus du groupe France Télécom
(voir interview exclusive dans EM@4 p. 1 et 2). Orange veut ainsi être le leader dans
la réconciliation entre les « tuyaux » et les contenus culturels. Et l’ancienne ministre de la Culture et de la Communication pourra apparaître comme étant la meilleure garante, aux yeux des ayants-droit notamment. Ce qui intéresse Stéphane Richard, qui prend ses fonctions de directeur général ce 1er mars, c’est notamment le carnet d’adresses de Christine Albanel. Comme directrice exécutive en charge de la communication, du mécénat et de la stratégie dans les contenus, elle fera officiellement son entrée chez l’opérateur historique des télécoms le 1er avril – le jour même où elle doit rendre son rapport sur le livre numérique pour « prévenir les dommages observés pour l’industrie musicale et le cinéma avec le développement du téléchargement illégal » (lire EM@3 p. 4). Celle qui fut l’artisan de la loi Création et Internet et qui avait présenté au Parlement la loi Hadopi 1 adoptée non sans remous le 12 juin 2009 (1) rejoint Orange, fournisseur d’accès à Internet favorable à cette loi instituant la riposte graduée. Le fait qu’elle n’ait finalement pas choisi de prendre la tête de la Bibliothèque nationale de France (BNF), en pleine renégociation avec Google, est une bonne nouvelle pour l’opérateur. D’autant que le futur numéro 1 de France Télécom (2) prépare la remise à plat de la stratégie d’Orange dans les contenus – audiovisuels et cinématographiques d’abord. Entre les 80 millions d’euros « minimum sur trois ans » qu’Orange Cinéma Séries s’est engagé à investir jusqu’en décembre 2013 dans le préachat de films européens et français (lire EM@1 p. 3) et les coproductions de films français via l’autre filiale du groupe, Studio 37, et les partenariat avec les médias comme France Televisions, dont l’accord de catch up TV doit être renégocié en milieu d’année, Christine Albanel aura du pain sur la planche. @