2025 aura été une annus horribilis pour Patrick Drahi et le groupe Altice, tant en France qu’à l’international

Le groupe de Patrick Drahi a traversé une année 2025 sous une pression extrême, à cause d’Altice France – maison mère du deuxième opérateur télécoms de l’Hexagone SFR – qui a dû se désendetter drastiquement, mais aussi d’Altice International et d’Altice USA en froid avec leurs créanciers.

Patrick Drahi (photo), président du groupe Altice, est « sous contrainte », comme on dit dans le monde impitoyable de la finance. Que cela soit pour Altice France (maison mère de SFR et de XpFibre), pour Altice International (Altice Portugal, Hot Telecommunication en Israël, Altice Dominicana en République Dominicaine) ou pour Altice USA (Cablevision/Optimum et Suddenlink/Optimum), l’empire télécoms du Franco-Israélien milliardaire n’est pas encore sorti d’affaire. Certes, le surendettement de ses trois sociétés a diminué grâce à des restructurations de dettes, des ventes d’actifs et des refinancements effectués en 2024 et 2025.
Mais la situation reste périlleuse pour l’homme d’affaires aux multiples nationalités (né en 1963 au Maroc, le Français et Israélien est aussi Portugais). Même sa chaîne de télévision israélienne i24News, qu’il a créée en 2013 et dont la propriété a été transférée il y a un an d’Altice USA à sa holding personnelle Next Alt, est fragilisée par un déficit structurel – malgré une audience internationale (diffusée en hébreu, en arabe, en anglais et en français) qui a pu être boostée par la guerre à Gaza depuis octobre 2023. C’est le seul média qu’il lui reste, après avoir cédé en juillet 2024 Altice Média (BFMTV, RMC, …) à l’armateur français CMA CGM, détenu par la famille de Rodolphe Saadé, et à Merit France, la holding du couple Saadé, pour 1,55 milliard d’euros (1).

La fortune de Patrick Drahi a chuté via Next Alt
Domicilié fiscalement depuis un an en Israël, à Tel Aviv, boulevard Rothschild, via sa holding personnelle Next Alt (2) et non plus en Suisse – où il affirmait résider à Zermatt depuis 2019 mais où il fait l’objet depuis six ans d’un redressement fiscal colossal d’environ 7,5 milliards d’euros sur la période 2009-2016 (procédure judiciaire toujours en cours) –, Patrick Drahi est personnellement impacté financièrement par les déconvenues de son empire. Entre Continuer la lecture

Verizon et AT&T se délestent chacun de leurs médias

En fait. Le 16 mai, l’agence Bloomberg a révélé qu’AT&T discute de la fusion de sa filiale WarnerMedia avec Discovery pour créer un nouveau géant des médias. Ce qui a été confirmé le lendemain. Le 3 mai, c’était Verizon qui annonçait la vente de ses médias Yahoo et AOL à une société d’investissement.

En clair. Deux géants américains des télécoms – Verizon le 3 mai et AT&T le 17 mai – ont annoncé se délester de leurs activités médias respectives, le premier pour les céder à un fonds d’investissement, Apollo Global Management, contre 5 milliards de dollars, le second pour fusionner sa filiale WarnerMedia avec le groupe de télévision payante Discovery. Verizon cède ainsi notamment Yahoo et AOL, qui formeront un nouveau groupe baptisé Yahoo. AT&T procède à une scission (spin off) de ses activités de contenus Warner Bros, CNN ou encore HBO pour former un nouvel ensemble – dont le nom n’est pas encore précisé – avec les entités TLC, HGTV ou encore Eurosport de Discovery. Alors que Verizon cède le contrôle de l’ex-Verizon Media pour ne garder que 10 % du futur nouveau Yahoo, AT&T s’empare au contraire de 71 % du capital du futur «WarnerMedia-Discovery ».
Ces grandes manœuvres semblent sonner le glas de la convergence des télécoms, laquelle avait motivé le rachat de Time Warner en 2018 par AT&T moyennant 85 milliards de dollars. Cette méga-fusion fut validée en février 2019 par la justice américaine (1). De son côté, Verizon avait fait les acquisitions d’AOL et de Yahoo respectivement en mai 2015 pour 4,4 milliards de dollars et en juillet 2016 pour 4,8 milliards de dollars. Est-ce la fin de la convergence télécoms-médias, chère encore au pionnier du genre et principal actionnaire de la galaxie « Liberty », John Malone (2), lequel détient à ce jour 21 % du capital de Discovery, et à son « disciple » Patrick Drahi, le patron fondateur d’Altice (Europe et USA) ? Un troisième géant des télécoms aux Etats-Unis, le câblo-opérateur Comcast, suivra-t-il le mouvement de la « désintégration verticale » avec sa filiale NBC Universal ? Ce groupe avait été acquis entre juillet 2010 (51 % du capital) et février 2013 (100 %) pour un total de 12,3 milliards de dollars. Une chose est sûre : la convergence « cable TV », initiée par John Malone avec TCI dans les années 1980-1990, a perduré à coup de mégafusions dans les années 2000.
Mais c’était sans compter le cord-cutting : les Américains sont de plus en plus nombreux à dissocier leurs abonnements pour profiter de l’audiovisuel sur Internet – Netflix, Amazon Prime Video, Disney+, HBO Max, Hulu, Peacock, Pluto TV, Discovery+, … Le 18 mai, The Information a révélé qu’Amazon négocie le rachat des studios MGM (3) pour 9 milliards de dollars. @

Le magnat du câble et des médias John Malone, qui vient d’avoir 80 ans, consolide son empire « Liberty »

L’Américain multimilliardaire John Malone, « modèle » pour Patrick Drahi dont il est le « protégé », a fêté ses 80 ans le 7 mars dernier. Président de Liberty Media, de Liberty Global et de Qurate Retail (ex-Liberty Interactive), le « cow-boy du câble » poursuit sa stratégie de convergence aux Etats-Unis et en Europe.

(Une semaine après la parution de cet article dans Edition Multimédi@ n°255, AT&T a annoncé le 17 mai 2021 qu’il allait fusionner sa filiale WarnerMedia avec le groupe de télévision Discovery, lequel est détenu à 21 % par John Malone).

Conflit avec TF1 sur la diffusion des chaînes gratuites : ni Orange, ni Free, ni Canal+ n’ont saisi le CSA

Le tribunal de commerce de Paris est-il en train de devenir le nouveau régulateur de l’audiovisuel français ? C’est à se le demander après que Orange et Canal+ aient préféré le saisir – plutôt que le CSA – pour porter plainte contre le groupe TF1 qui veut les faire payer pour la diffusion de ses chaînes.

« Le CSA n’a reçu aucune saisine d’Orange, Free ou Canal+ », a indiqué Nicolas Curien (photo), président du CSA depuis le 26 février (1), à Edition Multimédi@. Mais cela ne l’a pas empêché d’appeler dès le 6 mars au téléphone les groupes Canal+ et TF1 après que le premier ait interrompu, à partir de la nuit du 1er au 2 mars, la diffusion des chaînes du second dans ses offres Canal ADSL ou fibre, et son application MyCanal, mais aussi sur TNT Sat (1,5 million de foyers). Ce « dialogue » initié par
le régulateur de l’audiovisuel, lequel a aussi auditionné le 7 mars les deux parties en conflit, a payé : Canal+ a aussitôt rétabli le jour même, dans la soirée, le signal de TF1 – dont l’audience avait fléchi depuis cinq jours.

Etats-Unis : Internet bouscule le paysage audiovisuel

En fait. Le 11 décembre, le câblo-opérateur américain Comcast – propriétaire de NBCUniversal – a dit ne plus être intéressé par une partie de 21st Century Fox (famille Murdoch). Disney s’en est aussitôt emparé le 14. AT&T et Time Warner, eux, seront fixés au printemps 2018 pour savoir s’ils peuvent fusionner.

En clair. Ce qui se joue en ce moment aux Etats-Unis : le futur de la télévision. Les câblo-opérateurs comme Comcast et les opérateurs télécoms comme AT&T sentent le vent tourner à leur désavantage. De plus en plus d’Américains coupent le cordon du câble ou du satellite qui jusque-là leur était indispensable – mais coûteux – pour accéder aux chaînes, aux films et aux séries. Ce phénomène de cord-cutting profite à plein aux plateformes sur Internet telles que Netflix, Amazon Prime Video ou encore YouTube de Google, tandis que Facebook et Apple sont en embuscade et décidés
à proposer eux aussi leurs propres contenus audiovisuels à coup d’exclusivités sur Internet – dont la FCC a décrété le 14 décembre la fin de la neutralité.
Aussi, les opérateurs de réseaux sont condamnés à partir à la conquête de grands groupes de télévision et de cinéma comme Time Warner (pour AT&T) ou 21st Century Fox (pour Comcast avant de jeter l’éponge). Et ce, afin de jouer l’intégration verticale face aux Over-The-Top (OTT). D’autant que les géants de la télévision, du cinéma et du divertissement sont à la peine eux aussi, leur audience payante étant étroitement liée au nombre d’abonnés déclinant des « cablos » et des « telcos ». Le groupe 21st Century Fox de Rupert Murdoch (86 ans) – comprenant des studios de ciné et de télé, des chaînes thématiques comme FX et National Geographic, ainsi que 36 % de la plateforme Hulu ou encore 39 % du capital du groupe européen de télévision Sky – aurait été un bon parti pour Comcast qui possède NBCUniversal, DreamWorks et aussi une partie de Hulu (32 % via NBCUniversal). Mais le premier câblo-opérateur américain n’a finalement pas fait d’offre, craignant d’être confronté aux mêmes réticences des autorités antitrust que pour la tentative d’acquisition de Time Warner par AT&T. Verizon avait aussi regardé 21st Century Fox.
C’est finalement Disney qui rachète le lot d’actifs cédés pour 52,4 milliards de dollars, Murdoch ne gardant que des grandes chaînes (1) dans un « nouveau Fox ». Cette intégration horizontale d’une partie de Fox dans Disney ne devrait pas poser de problème vis-à-vis du droit de la concurrence. A noter qu’ensemble, ils détiennent
68 % du capital d’Hulu (2). De même, Time Warner – qui pourrait devoir céder CNN (à Altice ?) – serait aussi un bon parti pour AT&T qui, en octobre 2016, a mis sur la table 85 milliards de dollars pour s’en emparer (3). A suivre. @