Bruno Lasserre n’est pas contre un retour à un triopole, pourvu qu’il y ait « un Maverick de type Free »

Nommé il y a dix ans par décret du président de la République à la tête de ce qui s’appelait encore le Conseil de la concurrence, et entamant un nouveau mandat de cinq ans, Bruno Lasserre n’est pas hostile à un retour au triopole, à condition que Free – alias « Maverick » – empêche ou limite la hausse des prix.

Bruno Lasserre« Lorsque le Maverick [comprenez un franctireur ou un original à l’esprit libre et nonconformiste, ndlr] est un opérateur indépendant de type Free, on voit que le niveau des prix dépend beaucoup de la présence de Maverick – des gens qui ont faim et qui vont gagner coûte que coûte des parts de marché en pratiquant des prix agressifs », a expliqué le président de l’Autorité de la concurrence, Bruno Lasserre (photo), devant l’Association des journalistes économiques et financiers (AJEF) le 11 juin dernier.
S’il refuse de se prononcer publiquement sur les hypothèses de consolidation du marché français des télécoms – Orange- Bouygues Telecom ou SFR/Numericable-Bouygues Telecom –, il donne pourtant bien volontiers son avis à chacun des dirigeants concernés qui le lui ont déjà demandé et le sollicitent encore.

Internet et 3G/4G : après la bataille tarifaire, la guerre de la qualité de service ?

Pour contrer Free, Bouygues Telecom casse les prix – de 37 % à 45 %moins cher que ses concurrents – avec une offre triple play à 19,99 euros disponible depuis
le 3 mars. Cette fuite en avant tarifaire en fait oublier l’autre critère majeur pour
les consommateurs : la qualité de service.

Pour contrer Free, Bouygues Telecom casse les prix – de 37 %
à 45 %moins cher que ses concurrents – avec une offre triple play à 19,99 euros disponible depuis le 3 mars. Cette fuite en avant tarifaire en fait oublier l’autre critère majeur pour les consommateurs : la qualité de service.

Virgin Mobile va enrichir son offre VOD avec Videofutur

En fait. Le 18 septembre, Virgin Mobile a lancé un forfait quasi illimité (appels,
SMS, MMS et Internet 10 Go) incluant le prêt d’un smartphone sans engagement
de durée. Et ce, en présence du milliardaire Richard Branson, actionnaire à 45 % (via sa holding Blue Bottle) de la maison mère Omea Telecom.

En clair. Avec un forfait quasi illimité à 19,90 euros par mois incluant le prêt d’un smartphone (1) sans aucun engagement de durée, le premier MVNO français compte séduire suffisamment d’abonnés pour atteindre à nouveau les 2 millions de clients, seuil franchi fin 2011. Car Free Mobile est passé par là et Virgin Mobile se retrouve aujourd’hui avec 1,7 million d’abonnés. Mais comme pour les autres opérateurs mobile (2), excepté Orange qui a un partenariat avec Deezer, Virgin Mobile ne propose pas dans ce forfait 3G+ de contenus et n’envisage pas de le faire. « Nous, on considère que c’est au client individuellement de choisir ses contenus. On est, de manière un peu provocatrice, fiers d’être un fournisseur ou un “tuyau”, mais on a pas à dicter au client s’il veut obtenir telle offre de VOD ou telle offre de musique illimité. C’est à lui de choisir », a expliqué Geoffroy Roux de Bézieux, en réponse à notre question.
Que cela soit en 3G ou pour sa future offre 4G qui sera dévoilée fin septembre et lancée en 2014 en s’appuyant sur le réseau de Bouygues Telecom, Virgin Mobile ne proposera donc pas de contenu inclus dans le forfait mobile comme peut le faire Vodafone en Grande-Bretagne avec Spotify Premium « gratuit » ou SFR avec Napster (musique), CanalPlay (VOD) et Gameloft (jeux vidéo).

Civilisation numérique

Au fur et à mesure que nous avançons toujours plus loin au cœur du XXIe siècle, les nouvelles règles qui le régissent se font de plus en plus claires, et les liens qui nous retiennent encore au siècle dernier se dénouent peu à peu, les uns après les autres. L’Europe, peut-être plus que les autres continents, tardait visiblement à adopter les règles de cette nouvelle époque.
Le signal fut donné en 2013 lorsque nous apprîmes – après plusieurs décennies de forte croissance ininterrompue – que les marchés de l’économie numérique étaient eux aussi sensibles aux cycles économiques et plus particulièrement aux crises. Les marchés historiques du numérique – informatique, électronique grand public et télécommunications – enregistrèrent en 2012 une croissance ralentie, avec une progression au niveau mondial d’à peine 3 %, mais de seulement 0,1% pour le Vieux Continent. Plus important sans doute, le recul en termes de contribution directe des secteurs du numérique à la richesse globale s’accentua encore pour ne représenter, après plusieurs années de baisse régulière, que 6 % du PIB mondial.

« Cette Europe assiégée, qui n’avait pas réussi à
se positionner sur les vecteurs clés qu’étaient la
mobilité, le Cloud et le Big Data, se devait de réagir. »

Spectrum Crunch ?

La gestion des ressources rares, au-delà d’alimenter des discussions savantes entre économistes, a toujours des répercutions sur notre vie quotidienne. Certaines, comme l’eau, l’air, les métaux précieux ou l’espace pour les transports urbains sont très concrètes et nous percevons chaque jour un peu plus leur rareté. D’autres sont très longtemps restées dans l’ombre. Les fréquences hertziennes sont de celles-là, invisibles et discrètes pendant des décennies, puis s’invitant régulièrement dans les débats avec l’explosion des services mobiles et la multiplication des chaînes de télévision. Une pression telle que certains n’hésitèrent pas à prédire l’écroulement des plans d’allocation des fréquences ! La pression est en effet montée régulièrement à partir des années 2000 et à chaque changement de réseaux hertziens. Le basculement d’un Internet fixe vers
un Internet mobile, l’usage massif de la vidéo et surtout le développement exponentiel
des usages et du nombre des mobinautes, ont engagé les opérateurs et les Etats dans une course à la puissance des réseaux mobiles. Une course en escalier, où chaque marche correspond à une nouvelle génération de réseaux : 3G, 4G et 5G. Et pour chaque transition, tous les dix ans en moyenne, la question incontournable des fréquences disponibles pour satisfaire cette faim dévorante de spectre radioélectrique. N’oublions pas que, depuis 2010, le volume de données échangées sur les réseaux mobiles du monde entier a été multiplié par plus de 30, pour se monter aujourd’hui à 130 milliards de gigaoctets.

« Cette fameuse bande des 700 Mhz était
l’occasion de permettre une harmonisation spectrale
à l’échelle européenne mais aussi mondiale. »