Cinéma : les malentendus demeurent avec Bruxelles

En fait. Le 24 octobre, ont débuté à Dijon les 23e Rencontres cinématographiques de l’ARP (association des Auteurs, réalisateurs et producteurs) qui avait invité
le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. Ce dernier a décliné.

En clair. Le Conseil de l’Union européenne consacré au numérique des 24 et 25 octobre à Bruxelles se tient en même tant que les Rencontres cinématographiques à Dijon. C’est la raison pour laquelle José Manuel Barroso a décliné l’invitation de l’ARP
à participer au débat « Le cinéma est-il euro compatible ? ». L’ARP avait motivé son invitation au président de la Commission européenne « pour, une bonne fois pour toutes, dissiper tout malentendu entre nous ». Le monde du cinéma français aurait voulu « lever certaines ambiguïtés ». Et ce, non seulement à la veille de la présentation par Bruxelles de la nouvelle communication « Cinéma », laquelle pourrait limiter les aides d’Etat au cinéma et les conditionner à la meilleure circulation des œuvres sur
les plateformes numériques (1), mais aussi avant les deux prochains rounds de négociation entre l’Union européenne et les Etats-Unis en vue d’un accord de libre-échange transatlantique (2).

Depuis le compromis trouvé par le Conseil européen du 14 juin dernier, consistant à
« discuter plus tard » (3) des services audiovisuels dans le cadre de ces négociations, l’inquiétude demeure chez les professionnels du cinéma et de la culture arc-boutés sur
l’« exception culturelle française ». Il faut dire que la polémique déclenchée avant l’été par la France avait amené José Manuel Barroso à fustiger dans l’International Herald Tribune du 17 juin la « vision anti-mondialisation réactionnaire » de ceux qui veulent exclure les services audiovisuels des négociations – provoquant l’ire de la France. Quatre mois et un premier round de négociation US-UE (8- 12 juillet à Washington) plus tard, les services audiovisuels à l’heure de la VOD et de la catch up TV planent toujours sur les négociations qui vont se poursuivre lors des deux prochains rounds prévus d’ici la fin de l’année. En sera-t-il question dans le rapport que le CNNum doit remettre d’ici fin mars 2014 à ministre Nicole Bricq sur les enjeux du TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) pour le secteur du numérique ? Le second round, qui était prévu du 7 au 11 octobre à Bruxelles, a dû être annulé en raison du shutdown de l’administration américaine. Quoi qu’il en soit, le président de la Commission européenne assure l’ARP de son « attachement personnel à la culture (…) et, en particulier, à la défense de la diversité culturelle ». @

Publicité : fin de la prime au leader

Finalement, la bonne nouvelle pour la télé, c’est qu’elle a su s’adapter à Internet sans connaître tout à fait le sort, parfois fatal, de la plupart des autres contenus numériques. Ce super média qu’est la télévision bénéficiait d’une armure protectrice connue sous le nom de « prime au leader »,
cette différence constatée entre la part d’audience des chaînes leaders et leur part du marché de la publicité TV
en valeur, laquelle lui est souvent très supérieure. C’est ainsi que la puissance médiatique des chaînes historiques leur a longtemps permis de pratiquer des tarifs supérieurs à ceux des outsiders et de générer des revenus plus importants comparativement à leur audience ou au volume de publicité qu’ils diffusaient. Ainsi, en France, la chaîne TF1, qui enregistrait une part d’audience moyenne de 23 % sur l’année 2012 (en forte baisse par rapport aux années précédentes), captait 42 % du marché de la publicité TV en valeur. De la même façon, ITV, la première chaîne privée au Royaume-Uni en termes d’audience, captait 43 % du marché publicitaire en valeur pour une part d’audience de seulement 16 %.

« Si la pub TV a fait la preuve de son efficacité,
c’est sa notion même qui a perdu de son sens.
Les spots sont désormais distribués en même
temps en live ou en catch up. »

Cet avantage permit à la télévision de disposer de temps pour s’adapter aux nouvelles règles du jeu imposées par Internet, un temps précieux qui manqua tant à la musique ou
à la presse. Malgré la concurrence indéniable des services de médias audiovisuels à la demande (SMAd), la télévision prolongea son statut à part de média dominant (taux d’adoption par toutes tranches d’âge et consommation importante en temps passé).
À la fois source d’information et de loisirs, la télévision, par sa capacité à générer une audience de masse, dispose d’une puissance incomparable. Il n’est donc pas surprenant que la télévision « gratuite » ait largement attiré les annonceurs en quête de visibilité et de construction d’image, devenant le premier support d’investissement publicitaire avec, en moyenne, 40 % des dépenses médias des annonceurs (en excluant les investissements hors-médias). Et ce, pendant que son chiffre d’affaires continuait de progresser alors que celui de la presse n’en finissait plus de s’effondrer. Pourtant, malgré cette apparente bonne résistance, de premiers signes d’essoufflement apparurent avant 2015, notamment sur les marchés occidentaux où la télévision commença à perdre des parts de marché face à Internet. La multiplication des chaînes fut à l’origine de la fragmentation de l’audience, préjudiciable à l’Audimat des grandes chaînes et donc à leurs recettes publicitaires. De plus, la consommation des programmes TV devenant plus personnelle, elle se reporta vers les « nouveaux » écrans, en temps réel ou différé. Or, face à la désintermédiation, la TV « broadcast » conserva et conserve encore certains avantages irréductibles. En termes de couverture, les grands networks américains avaient toujours, en 2013, un reach de l’ordre de 70 %, quand celui de YouTube n’était que de 32 % et celui de Hulu de 9 %. Ensuite, un téléspectateur américain restait contraint à une moyenne de 72 minutes de publicité TV par jour, contre 23 minutes par mois pour un utilisateur de vidéo online. Pourtant, le “coût par mille moyen” (CPM) sur un site de vidéo premium ou sur un site de chaîne de télévision tenait la comparaison : aux Etats-Unis, il évoluait entre 15 et 20 dollars sur un site comme Hulu, contre 14 dollars pour toucher 1.000 foyers via une chaîne nationale.
Si la publicité TV a largement fait la preuve de son efficacité, c’est sa notion même qui a perdu de son sens. La part des publicités uniquement diffusées sur l’écran de TV pendant le flux de programmes fait place aux spots publicitaires distribués en même temps qu’un programme TV, qu’il soit « broadcasté » ou « streamé », en live ou en catch up. Sur ce ring, où s’est livrée durant cette dernière décennie une lutte sans concession, le combat est en train de se terminer faute de combattants : par la disparition des distinctions classiques. Car tandis que les chaînes survivantes sont devenues à leur tour des
poids lourds d’Internet, les géants du Net ont continué à phagocyter leur part du
gâteau publicitaire… @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : Planète numérique
* Directeur général adjoint de l’IDATE.
Sur le même thème, le rapport « La publicité TV face
aux nouveaux médias », par Florence Leborgne.

Neelie Kroes, Commission européenne : « Avec la convergence, l’audiovisuel n’a plus besoin d’autant de régulation »

La vice-présidente de la Commission européenne, en charge de l’Agenda numérique, nous explique la raison d’un nouveau livre vert sur l’audiovisuel
et la télévision connectée, et dit ce qu’elle attend de la consultation publique.
Des décisions seront prises dès 2014 pour prendre en compte la convergence.

Propos recueillis par Charles de Laubier

NKEdition Multimédi@ : La Commission européenne lance
une consultation publique sur la convergence audiovisuelle.
En juillet 2011, elle mettait en route un précédent livre vert sur l’audiovisuel en ligne. En mars 2012, elle initiait une consultation publique sur les aides d’Etat au cinéma à l’heure de la VOD : ces sujets ne sont-ils pas liés et quand prendrez-vous des mesures ?

Neelie Kroes : Le livre vert de 2011 sur la distribution en ligne
d’œuvres audiovisuelles dans l’Union européenne (sous-titré
« Vers un marché unique du numérique : possibilités et obstacles ») portait sur le copyright et les droits de retransmission, dont les résultats devraient être publiés cette année.
En décembre 2012, la Commission européenne a réaffirmé ses engagements pour travailler à un cadre moderne du droit d’auteur dans l’économie du numérique. Il s’agit
de mener deux types d’actions parallèles : instaurer en 2013 un dialogue des parties prenantes et achever des études de marchés, des évaluations d’impact et des travaux d’élaboration juridique, en vue d’une décision en 2014 en fonction des propositions de réforme législative qui seront sur la table.
Le livre vert que nous avons adopté le 24 avril dernier concerne la convergence audiovisuelle mais pas le droit d’auteur ni les aides d’Etat au cinéma. Les travaux
sur ces différents sujets sont donc complémentaires.

« La convergence dans le secteur audiovisuel apporte
des opportunités pour tous les acteurs du marché.
(…) Face à d’éventuelles pratiques anticoncurrentielles,
la Commission européenne pourra intervenir. »

EM@ : La TV connectée bouscule les paysages audiovisuels historiques nationaux et abolit les frontières entre Internet et la télévision : soumettre les nouveaux acteurs OTT aux mêmes exigences réglementaires (diversité, protection des enfants, publicité, …) que les chaînes nationales ne reviendrait-il pas à réguler Internet, ce qui semble impossible car mondial ?
N. K. : La directive sur les services de médias audiovisuels (SMA) s’applique aux fournisseurs de services média, dont ceux distribuant des contenus sur Internet. Tant qu’un fournisseur a la responsabilité du choix du contenu et détermine la manière dont il est organisé, il tombe sous la juridiction de la directive SMA et doit respecter les règles audiovisuelles de l’Union européenne. Cette directive traite les services linéaires (les émissions de télévision) et ceux non-linéaires (les services à la demande) de différentes façons.
Le raisonnement est le suivant : puisque les consommateurs ont de plus en plus de choix et un contrôle plus grand sur ce qu’ils voient sur les services de médias audiovisuels à la demande (SMAd), il y a un besoin moindre de régulation dans les services à la demande. Cependant, la convergence et la TV connectée brouillent les lignes. Les consommateurs peuvent parfois avoir beaucoup de mal à faire la différence entre le linaire et le non-linéaire. Le livre vert sur « un monde audiovisuel totalement convergeant » cherche à savoir, et en demande la preuve, si le traitement différencié actuel ne provoque pas des distorsions de concurrence sur le marché de l’audiovisuel.

EM@ : Les fabricants de téléviseurs (Samsung, Toshiba, Philips, …) veulent
eux aussi conquérir l’écran de télévision et proposer des bouquets audiovisuels, mais ils sont confrontés aux éditeurs de chaînes de télévision qui veulent garder
– avec l’aide des ISP et de leur box IPTV – le contrôle de l’écran : les chaînes et les box IPTV sont-elles des freins à la concurrence ?
N. K. :
La convergence dans le secteur audiovisuel apporte des opportunités pour
tous les acteurs du marché. Pour les fabricants d’équipement et les développeurs technologiques, c’est l’occasion d’appréhender un marché en croissance avec des terminaux innovants, y compris avec des interfaces conviviales et des solutions d’accessibilité. Les opérateurs de réseau verront une demande accrue de bande passante avec un impact positif sur les investissements dans le très haut débit. Les créateurs de contenus peuvent trouver de nouvelles façons de maximiser leur audience, monétiser leurs œuvres et expériences avec des façons créatives de produire et de proposer les contenus. Les producteurs audiovisuels peuvent trouver plus de plates-formes pour distribuer leurs contenus et améliorer leurs offres interactives. Si certains facteurs gênent les possibilités de profiter de ces opportunités, alors nous espérons
en avoir un feedback durant la consultation publique.
Autrement, face à d’éventuelles pratiques anti-concurrentielles, la Commission européenne pourra intervenir, au besoin, en faisant usage des compétences que le
Traité de l’UE lui confère en matière de politique de la concurrence.

EM@ : Le 14 juin, le Conseil de l’Union européenne doit examiner le projet de mandat de négociation que la Commission européenne a adopté le 12 mars pour
un accord de libre-échange entre l’UE et les Etats-Unis : faut-il vraiment en exclure, comme le demande la France, les services audiovisuels, alors que l’audiovisuel en ligne s’affranchit des frontières ?
N. K. :
La culture n’est pas une marchandise, loin de là. Elle bénéficie d’un statut spécial dans la loi de l’Union européenne. La Commission est garante de ce principe et est même légalement obligée de défendre ce statut, conformément aux Traités européens. L’Europe ne mettra pas son exception culturelle en danger par des négociations commerciales.
Je suis d’accord avec les commentaires récents de mon collègue Karel De Gucht [commissaire européen en charge du Commerce, dans « L’exception culturelle ne sera pas négociée ! », le 22 avril (lire page suivante), ndlr].

EM@ : Le retard pris dans la révision de la directive IPRED sur les droits de propriété intellectuelle n’est-il pas un frein au développement de l’audiovisuel
en ligne sur le « marché unique numérique » que vous souhaitez rapidement ? Comment la chronologie des médias, qui accorde une exclusivité de plusieurs
mois à la salle au détriment de la VOD, doit-elle être réformée ?
N. K. :
La Commission européenne avait pris la décision d’ouvrir la procédure de la consultation publique pendant quatre mois, afin de permettre aux différents acteurs de donner leurs avis dans ce domaine qui est très sensible d’un point de vue politique. La décision sur l’éventuelle révision de la directive IPRED requiert une réflexion approfondie de la part du législateur européen. Quant à la question des fenêtres de diffusion dans
la chronologie des médias, elle est toujours en réflexion en interne à la Commission européenne et n’est donc pas explicitement reprise dans le livre vert. Cependant, nous sommes conscients qu’il y a différentes voix dans l’industrie. Par exemple, à la table ronde « Financement et distribution de films européens sur le marché numérique
européen : distribution transfrontalière et chronologie des médias » qui s’est tenue à Cannes le 9 octobre 2012 [à l’occasion du Mipcom, ndlr], plusieurs participants ont mentionné que le maintien rigide de l’actuel système de « fenêtrage » met l’innovation
en danger, et ils ont apporté leur soutien à des expérimentations de sorties simultanées
ou quasisimultanées de films – en salle de cinéma et en vidéo à la demande (VOD) –
qui ont lieu dans quelques pays. Avec ma collègue Androulla Vassiliou [commissaire européenne en charge Education et Culture, ndlr], nous avons pris ce jour-là une position communication. @

 

Audiovisuel : le numérique rend obsolète la loi de 1986

En fait. Le 10 avril, le nouveau président du CSA, Olivier Schrameck, a indiqué – lors du colloque « Quel avenir pour les indépendants de l’audiovisuel en France ? » organisé par le Sirti – que le rapport d’activité du CSA « achevé d’ici la fin du mois » proposera des évolutions législatives dans l’audiovisuel.

En clair. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) entend contribuer à la rédaction
de la future loi sur l’audiovisuel, que le gouvernement pourrait soumettre au Parlement
d’ici à la fin juin (1). Comme le prévoit la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, le régulateur de l’audiovisuel va, dans son prochain rapport annuel d’activité qui devrait être publié début mai, « suggérer les modifications de nature législative (…) que lui paraît appeler l’évolution technologique, économique, sociale et culturelle des activités du secteur audiovisuel » (2). Mais Olivier Schrameck a dévoilé quelques pistes pour réformer la loi de 1986 devenue obsolète à l’épreuve du numérique. « La loi du 30 septembre 1986 continue de distinguer entre les communications au public par voie électronique et les communications audiovisuelles. Mais nous devons constater que cette distinction est rendue poreuse par les évolutions des usages et des contenus. (…) Cela doit nous conduire à un réexamen sans tabous de la mission de régulation qui nous est confiée : son périmètre mais aussi ses méthodes », considère Olivier Schrameck. Autrement dit, le CSA souhaite que le législateur lui donne le pouvoir de réguler Internet (pluralisme et indépendance des médias, sauvegarde de l’ordre public, protection de l’enfance et de la dignité humaine, …), comme il l’a déjà exprimé après sa prise de fonction en janvier (3). Autre sujet sensible : il remet aussi en question le statut « des hébergeurs comme Dailymotion
ou YouTube, qui se font désormais éditeurs ou coéditeurs », sans exclure en outre
« un contrôle des contenus vidéo sur Internet », tout en trouvant intéressant la proposition du Conseil national du numérique (CNNum) d’introduire le principe de neutralité du Net dans la loi de 1986.
En outre, le président du CSA est partisan d’une « forme de labellisation » qui permettrait de remédier à l’« actuelle asymétrie de la régulation audiovisuelle »
entre les acteurs traditionnels « corsetés » et les formes nouvelles de communication
« affranchies ». Parmi les autres propositions du rapport d’activité, une concernera le régime de la déclaration obligatoire des services de médias audiovisuels à la demande (VOD, Catch up TV, …). En réalité, il s’agit moins d’« ancrer la régulation audiovisuelle
dans l’ère numérique » que de dompter Internet. @

Le CSA autorise TDF à expérimenter la diffusion multimédia mobile (B2M) sur la TNT

Selon nos informations, le CSA a autorisé TDF et ses partenaires du consortium B2M à expérimenter durant deux mois la diffusion audiovisuelle en DVB-T/T2 d’un bouquet de services multimédias (télévision, VOD, Catch up, presse, …) via un réseau de type broadcast, comme celui de la TNT.

ArchosC’est une révolution technologique à laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a donné son feu vert lors de sa séance plénière du 9 avril dernier.
Un an après avoir enterré la télévision mobile personnelle (TMP), en retirant les autorisations à seize éditeurs de chaînes de télévision délivrées en 2010 faute de modèle économique pour financer le réseau hertzien (1), le régulateur vient en effet d’autoriser TDF à expérimenter durant deux mois un projet encore plus ambitieux : B2M (Broadcast Mobile Multimedia).

Réception sur des tablettes Archos
Il s’agit de diffuser en mode « push VOD » ou en « filecasting » sur Paris, par voie hertzienne à partir de la Tour Eiffel et sur des fréquences UHF de la TNT, un bouquet de services multimédias en direction des terminaux mobiles (smartphones, tablettes, …).
Les émissions à la norme DVB-T/T2 (2) de ces flux « live » ou « on demand » débuteront avant l’été.
Une cinquantaine de mobinautes pourraient participer à cette phase exploratoire pour recevoir sur leur mobile – en l’occurrence une tablette du fabricant français Archos, partenaire du projet – plusieurs services : chaînes de télévision, vidéo à la demande (VOD), télévision et radio de rattrapage (catch up et podcast) ou encore une sorte de kiosque avec player pour lire la presse. Bref, tous les contenus multimédias qui peuvent être diffusés en mode broadcast vers des mobiles seront potentiellement concernés par ce système d’agrégation de contenus. Même des livres numériques pourraient être proposés à terme dans le bouquet B2M. TDF entend réussir là où la TMP avait échoué, comme l’explique Vincent Grivet, directeur à la direction de la stratégie et de l’innovation de TDF, à Edition Multimédi@ : « Contrairement à la TMP, où un seul service (la diffusion de chaînes de télévision linéaires) n’a pas permis de justifier l’utilisation d’un réseau broadcast, B2M permet de mutualiser les coûts de l’infrastructure sur un flux de contenus très large ». Toute la différence est là : diffuser sur mobile non seulement de la télévision linéaire mais aussi des services multimédias non linéaires. Cette expérimentation va permettre à TDF, et à sa filiale Cognacq-Jay Image, de faire connaître la plate-forme auprès de l’ensemble des acteurs qui pourraient être intéressés à utiliser cette solution
de distribution peu coûteuse. L’investissement pour couvrir par exemple 30 % de la population française (soit les plus grandes villes de France) serait, selon Vincent Grivet,
« bien inférieur à 50 millions d’euros ». L’autorisation du CSA s’inscrit dans un projet en gestation depuis 2011 et financé par le gouvernement – via les Investissements d’avenir (ex-Grand emprunt) et son Fonds national pour la société numérique (FSN) – à hauteur
de 30 % du budget total de 3 millions d’euros qui sont nécessaires à la mise au point de
ce prototype. Outre Archos qui a remplacé dans ses tablettes utilisées pour le test la réception 3G par la réception DVB-T/T2, sont partenaires du consortium B2M : l’Institut Télécom, Airweb (qui développe notamment le player), Parrot avec sa division Dibcom (qui fournit le circuit électronique du récepteur DVB), Expway (le middleware qui gère le mode « push »), et Immanens (pour l’édition électronique de contenus presse et la conception de kiosques numérique).
Quant aux opérateurs mobile, ils pourraient percevoir B2M et son réseau broadcast point-à-multipoint sur mobile comme un solution complémentaire à leurs réseaux 3G/4G mis à rude épreuve par la diffusion massive en mode point-à-point des contenus audiovisuels. TDF compte bien leur proposer de soulager leurs réseaux 3G/4G menacés de saturation face à l’explosion annoncée des flux de données. « Nous prônons la mise au point d’une technologie hybride entre le monde du broadcast traditionnel DVB (3) et le eMBMS (4)
qui arrive sur la 4G LTE. Une telle norme réunirait le meilleur des deux mondes : une intégration facile dans les terminaux grâce au LTE et une diffusion sur des zones plus grandes grâce aux atouts du broadcast traditionnel », nous précise Vincent Grivet. Son partenaire Expway a d’ailleurs présenté au Mobile World Congress de février dernier sa solution eMBMS qui permet aux opérateurs 4G d’alléger de 20 % le trafic de données sur leur réseau LTE.

Vers un réseau mixte DVB-T/eMBMS
Mais le eMBMS seul suffira-t-il face à l’explosion des vidéos sur mobile ? Le mixte des normes DVB-T/eMBMS apparaît donc comme la solution pour du broadcast mobile en haute définition et sans temps de latence. Comme TDF (5), France Télécom (Orange Labs) croit à cette technologique hybride et participe pour cela au projet M3 (Mobile MultiMedia) lancé en 2010 avec l’Agence nationale de la recherche. Le CSA, lui, pousse dans ce sens (6). @

Charles de Laubier