Lagardère : acquisitions en vue pour être plus digital

En fait. Le 28 mai, Lagardère a tenu son « Investor Day » pour présenter les perspectives de croissance du groupe désormais recentré sur les médias, qui table sur plus de 3 % par an d’ici à 2018. Des « acquisitions ciblées » sont envisagées, notamment dans le numérique qui pèse aujourd’hui 10,4 % des revenus.

En clair. Arnaud Lagardère veut plus que jamais se renforcer dans le numérique qui ne génère pour l’instant que 10,4 % du chiffre d’affaires du groupe de médias. Et la montée
en charge du digital, pourtant le fer de lance de la nouvelle stratégie « pure media » du fils de feu Jean-Luc (EM@77), est plus lente que prévu. Car, il y a cinq ans, le numérique représentait 7% des revenus (1) et le groupe tablait déjà sur 10 % pour… 2010. Mais tout vient à point à qui sait attendre ! Le gérant commandité du groupe (2), lequel pèse 7,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2013 (en baisse de 2,1 % sur un an) pour un bénéficie net de 1,3 milliard en forte hausse (grâce à la cession d’EADS), n’a cette fois pas donné d’objectif dans le numérique. Non seulement la croissance digitale sera organique mais aussi externe par « acquisitions ciblées ». Dans son introduction aux investisseurs, Arnaud Lagardère a précisé que son groupe disposait de 2,1 milliards pour du développement interne et de 3,7 milliards d’euros de cash pour des acquisitions. Des sites web et des applications mobiles font partie des cibles numériques potentielles, Lagardère ayant acquis par le passé Newsweb, Doctissimo, LeGuide, BilletReduc ou encore DBDS/Tv-replay.fr.

Publicis se retrouve seul face aux géants du Net

En fait. Le 9 avril, les groupes publicitaires Publicis (français) et Omnicom (américain) ont annoncé l’abandon de leur projet de méga-fusion qui devait créer
le numéro 1 mondial de la publicité devant WPP (britannique). Les trois agences
se retrouvent confrontées aux Google, Yahoo et autres Facebook.

En clair. Les géants du Net – Google, Yahoo, Facebook, AOL ou encore Microsoft
– sont en train de siphonner le fond de commerce des grandes agences publicitaires – WPP, Omnicom et Publicis en tête. Numéro 1 mondial de la publicité en ligne, Google commence à faire de l’ombre aux grands acteurs historiques. Pour le groupe français Publicis, créé il y a 88 ans par Marcel Bleustein-Blanchet (1), se faire doubler par une start-up lancée il y a 16 ans par Larry Page et Sergueï Brin a quelque chose d’humiliant. Maurice Lévy, PDG du groupe depuis 27 ans, a bien annoncé le 19 mai un « accord pluriannuel » avec Facebook pour diffuser de la pub vidéo sur le réseau social et Instagram et conclu en 2007 une « collaboration » avec Google, les géants du Net exercent une pression concurrentielle sur le numéro trois mondial de la publicité (2). Publicis s’appuie en outre sur Microsoft, Yahoo et AOL, pour proposer aux annonceurs des audiences ciblées sur des réseaux multiples via VivaKi Nerve Center, plateforme dite AOD (Audience on Demand). Et depuis le rachat en octobre 2009 de Razorfish auprès de Microsoft, le groupe français a noué avec ce dernier (MSN) une « alliance stratégique ».

NETmundial : plus de divergences que de gouvernance

En fait. Les 23 et 24 avril, s’est tenu à Sao Paulo le NETmundial organisé par la présidente du Brésil, Dilma Roussef, sur l’avenir multipartite de la gouvernance de l’Internet, lequel ne soit plus dépendre des Etats-Unis via l’ICANN (dont les statuts doivent changer). Mais les divergences demeurent.

En clair. Le NETmundial était la première conférence mondiale sur la gouvernance de l’Internet. Dans la résolution publiée à la fin de ces deux journées (1), les participants
(180 contributions) ont émis des recommandations sur des principes de gouvernance multipartite du Net et une feuille de route fixant leur mise en oeuvre « d’ici la fin 2015 ». Mais plusieurs points ont été malheureusement renvoyés à des discussions ultérieures.
Il en va ainsi de l’attribution des rôles et responsabilités des parties prenantes dans la future gouvernance du Net, y compris sur la notion de « pied d’égalité ».
C’était pourtant une exigence de la présidente brésilienne, Dilma Roussef : « J’attache beaucoup d’importance à la perspective multilatérale, selon laquelle la participation [à
la gouvernance d’Internet] devrait se faire sur un pied d’égalité entre les gouvernements
de façon à s’assurer qu’aucun pays n’aura ou portera un poids plus grand par rapport
à d’autres pays », avait-elle déclaré dans son discours d’ouverture.
Autre point d’importance renvoyé à plus tard : la question de la juridiction dont relèvera tout ce qui touche à la gouvernance d’Internet, notamment en matière de cybersécurité, d’atteinte à la vie privée ou de cybercrime. La résolution renvoie aussi à l’après-NETmundial la manière de contrôler la mise en pratique des principes de gouvernance
de l’Internet, à travers du benchmarking et d’indicateurs.

Netflix, Amazon, Yahoo, Microsoft, … : guerre des séries

En fait. Le 28 avril, Microsoft et Yahoo ont annoncé respectivement deux séries originales et des proprammes de télévision pour la Xbox. Le 23 avril, Amazon annonçait une exclusivité avec HBO pour des séries en streaming. AOL, Sony
et Disney investissent aussi, comme Netflix avec « House of Cards ».

En clair. Le marché des séries originales pour Internet a le vent en poupe. Depuis que
le leader américain des séries en streaming Netflix investit dans des films – comme
la célèbre série politique « House of Cards » ou la tragi-comédie « Orange is the New Black » – avec un budget global d’acquisition des droits proche des 3 milliards de dollars, les autres acteurs du Net eux aussi sur des oeuvres audiovisuelles. Les séries originales permettent aux grands sites de VOD et aux grands portails du Net de se différencier
sur le marché hyper concurrentiel de la vidéo en ligne, en fidélisant une audience et en captant de ce fait une part croissante des recettes publicitaires jusqu’alors dévolue aux chaînes de télévision classiques. Mais les séries exclusives coûtent cher à produire, même si les candidats à l’acquisition des droits ne divulguent aucun chiffre. Selon le Wall Street Journal, Yahoo investirait entre 0,7 et 1 million de dollar par épisode.

Pourquoi M6 et TF1 échouent avec la chaîne TF6

En fait. Le 5 mai, le groupe Métropole Télévision – plus connu sous le nom de sa chaîne phare, M6 – a tenu son assemblée générale annuelle. Fin avril, il annonçait l’arrêt le 31 décembre prochain de la chaîne payante TF6 lancée 15 ans plus tôt et détenue à parts égales avec TF1. C’est un échec révélateur.

En clair. La génération des 15-34 ans, à qui s’adressait TF6 en tant que chaîne généraliste destinée à un « public de jeunes adultes » et diffusée sur la TNT (mais aussi en exclusivité sur CanalSat et Numericable), a de nouvelles pratiques de consommation en ligne de vidéos qui ne correspondent plus à certaines offres audiovisuelles traditionnelles. Qui plus est, linéaire et payante. Lancée il y a 15 ans, juste avant l’envolée du haut débit sur Internet et par la suite de la dé-linéarisation des programmes, TF6 proposait des programmes originaux, des séries inédites, des fictions et des films.
Mais, malgré une couverture mensuelle de 8 millions de téléspectateurs, cette «mini-généraliste » n’a jamais dépassé – au mieux – les 1,1 % de part d’audience (selon Médiamétrie), retombant même à 0,9 % fin 2013. Cet échec de M6 et TF1 (1) à vouloir
en faire « la première chaîne de divertissement dans l’univers du payant » pourrait un premier signe annonciateur de bouleversements à prévoir dans le paysage audiovisuel français (PAF) à l’ère du numérique. Officiellement, TF6 doit s’arrêter car le format a été
« fortement concurrencé par les chaînes de la TNT gratuite » et le recul des recettes publicitaires n’a pas été compensé par « les redevances des distributeurs de télévision payante » (CanalSat, Numericable). Mais les raisons sont sans doute plus profondes et
la conséquence des nouveaux comportements de la génération du « tout-gratuit » et du
« tout-Internet ». M6 et TF1 auraient pu demander au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de transférer leur chaîne commune vers la TNT gratuit, comme ils l’ont déjà fait pour respectivement Paris Première (M6) et LCI (TF1) ou comme songerait à le demander Canal+ pour Planète. Mais la concurrence sur la TNT gratuite est déjà telle que le jeu n’en valait pas la chandelle.