Plus de 200 opérateurs mobiles, dans 80 pays, offrent la 5G à plus de 1 milliard d’utilisateurs

Les équipementiers télécoms – Samsung, Huawei, Ericsson, Nokia, Apple, Qualcomm, Intel ou ZTE – se frottent les mains : la cinquième génération de mobiles prend enfin son envol. Deux seuils sont dépassés cette année : plus de 200 opérateurs 5G et plus de 1 milliard d’utilisateurs dans le monde.

Pour les membres exécutifs de la Global Mobile Suppliers Association (GSA), que sont Samsung, Huawei, Ericsson, Nokia, Apple, Qualcomm, Intel et ZTE, le marché mondial de la 5G décolle enfin. Leur organisation internationale, basée au Royaume-Uni et présidée par Joe Barrett (photo), a publié fin juin auprès de ses adhérents un état des déploiements de la 5G dans le monde : sur près de 500 opérateurs télécoms (1) dans 150 pays et régions qui investissent dans un réseau 5G (y compris tests, achat de licences, projets, déploiements et lancements commerciaux), plus de 200 d’entre eux dans 80 pays ont lancé des services mobiles (2).

5G fixe (FWA) et 5G standalone (SA)
La GSA, dont le snapshot est établi à fin mai 2022 (voir 1er graphique), a recensé parmi ces opérateurs 85 dans 46 pays et territoires qui ont lancé des services de 5G fixe à la norme 3GPP (3), appelés aussi Fixed Wireless Access (FWA). Cela représente tout de même environ 40 % des opérateurs télécoms qui offrent de la 5G fixe. Preuve supplémentaire, s’il en était besoin, que la cinquième génération de mobiles ne sera pas uniquement au service de la mobilité. Elle est amenée aussi à concurrencer la fibre optique dans les foyers, dont certains n’hésiteront pas à remplacer leur « box » fixe (ADSL ou FTTH) par une « box » 5G (FWA).
Autre constat : quelque 108 opérateurs télécoms ont investi dans ce que l’on appelle la « 5G autonome » ou « 5G standalone » (5G SA), dont 28 d’entre eux sont des réseaux publics. Il s’agit de réseaux construits uniquement pour la 5G, contrairement à d’autres réseaux 5G qui s’appuient sur des réseaux 4G existants. L’avantage de cette 5G autonome – dotée de ses propres équipements – est qu’elle est bien plus performante, en termes de connexions disponibles, de temps de latence très faibles et de très haut débits dignes de ce nom. Mais cette « vraie » 5G suppose de la part des « telcos » des investissements plus importants. Partir des installations 4G déjà en place pour monter progressivement en puissance vers la 5G nécessite en effet de moindres dépenses, mais – contrairement à ce que croit le client abonné – les appels voix continuent de passer par la 4G et les données transitent par la 4G et la 5G. La 5G SA, elle, forte de son autonomie et de sa pleine puissance, est « 100% 5G » et peut même être une sérieuse alternative dans les zones rurales mal ou pas desservies par la fibre optique de bout-en-bout, pour peu que les opérateurs télécoms se donnent la peine d’investir de façon « autonome ».
Par exemple, en France, Bouygues Telecom (4), SFR, Free et Orange ont prévu de mettre en service dès 2023 leurs réseaux 5G standalone. Pour l’heure, selon les chiffres publiés le 7 juillet par l’Arcep au 31 mars 2022, l’Hexagone compte 4,1 millions d’abonnés 5G. Autrement dit, la France ne pèse que 0,4 % du milliard d’utilisateurs identifiés par CSS Insight. Ce cabinet d’étude britannique a publié fin juin une estimation du nombre d’utilisateurs 5G dans le monde : la barre du milliard est en train d’être franchie pour atteindre 1,2 milliard d’utilisateurs à la fin de cette année et, selon ses prévisions, ce nombre aura plus que doublé en 2024 (voir 2e graphique). La 5G devient réalité, du moins si la « vraie » 5G suit le mouvement. @

Charles de Laubier

Fibre sans fil : avec la 5G fixe, la concurrence des « box » dans le très haut débit pourrait être relancée

La 4G fixe est une alternative marginale dans l’accès haut débit. La 5G fixe, elle, pourrait se substituer à plus grande échelle aux « box » fixes de la fibre à domicile. Le Fixed Wireless Access (FWA) n’aura alors plus rien à envier au Fiber-To-The-Home (FTTH). Et sera bien moins coûteux à déployer.

Si la fibre optique jusqu’à l’abonné n’a pas à craindre la concurrence de la 4G fixe dans certains territoires, il devrait en être tout autrement avec la future 5G fixe. Car l’avènement à partir de 2020 du très haut débit sans fil pourrait changer la donne dans les foyers, notamment sur le marché assez figé des « box » en France. La box 5G pourrait rebattre les cartes de l’accès à Internet, à l’IPTV (1) et à la VOD (2). Imaginez YouTube ou Netflix sur box « fibre sans fil » !

FWA 5G versus FTTH
Demain, substituer une box 5G à une box fixe sera possible – pour peu que la fibre optique soit déployée au niveau du backhaul, c’est-à-dire du « réseau d’amené » comme disent les Québécois pour désigner le réseau intermédiaire assurant l’émission et la réception très haut débit jusqu’à l’antenne mobile située au plus proche de l’abonné. Alors qu’aux Etats- Unis Verizon prévoit de la 5G fixe en mode FWA (Fixed Wireless Access) sur des zones non desservies par le FTTH (Fiber-To-The-Home) de son offre fixe Fios, l’Europe est aussi tentée par cette « fibre sans fil ». Les débits sur les bandes de fréquences millimétriques peuvent atteindre 300 Mbits/s, voire 700 Mbits/s, a indiqué Viktor Arvidsson (photo), directeur de la stratégie et des affaires réglementaires d’Ericsson, aux 13es Assises du Très haut débit du 9 juillet dernier. L’équipementier suédois vante plus que jamais auprès des opérateurs télécoms les mérites de la 5G fixe dans les banlieues et les faubourgs européens, leur promettant dans son « FWA Handbook » publié en juin dernier « un retour sur investissement dans un délai de 18 mois » (3).
En prenant en exemple une banlieue en Europe avec une densité de 1.000 foyers par kilomètre carré et partant de l’ambition de déployer la 5G fixe sur 30 % de ce marché-là, le coût de déploiement de la solution FWA est inférieur à 500 dollars par foyer connecté. Alors que le FTTH, lui, nécessiterait 20.000 dollars par km. Vodafone et Swisscom sont aux avant-postes de la 5G en Europe. Le groupement international d’industriels 3GPP (4), qui assure le développement technique pour des normes mobiles comme la 5G NR (New Radio), prépare le FWA 5G pour un déploiement massif au niveau mondial. En France, l’Arcep a prévu – dans son projet des modalités d’attribution des fréquences 5G (5) – que l’opérateur mobile « s’engage à fournir, à compter du 31 décembre 2023 et dans des zones qu’elle identifie et rend publiques (…), un service d’accès fixe à Internet sur son réseau mobile ». Orange a déjà annoncé le lancement dans l’Hexagone de son offre 5G « au printemps 2020 » et prévoit aussi de proposer de la 5G fixe « là où la fibre optique n’est pas disponible » – après avoir testé cet « Internet très haut débit sans fil » en Roumanie dès 2018. Pour l’heure, sur l’Hexagone, les box 4G sont peu nombreuses : probablement quelques milliers seulement parmi les 3 millions d’abonnements dont le débit offert se situe entre 30 Mbits/s et moins de 100 Mbits/s, d’après les chiffres de l’Arcep au 30 juin 2019. Ce segment englobe toutes connexions VDSL2, câble coaxial, THD radio (6) et aussi la 4G fixe. La progression de ce très haut débit «moyen » a été de 16 % sur un an, ce qui n’est pas négligeable dans la mesure où – en ayant atteint cette barre de 3 millions d’abonnés – il dépasse maintenant les 10 % du total des accès à Internet en France. Et cette croissance devrait se poursuivre, notamment en 4G fixe qui suppose la mise en place d’une « box 4G » installée au domicile des utilisateurs. D’autant que le «New Deal mobile », signé début 2018 entre le gouvernement et les opérateurs télécoms en matière de couverture mobile, prévoit des obligations en faveur de la 4G fixe. Cet accord est contraignant pour Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free Mobile, qui sont tenus – depuis le 1er janvier 2019 – de proposer des offres 4G fixes grand public dans les zones géographiques bien identifiées. « De plus, le gouvernement peut demander aux opérateurs d’ouvrir, dans les zones qu’ils couvrent déjà en très haut débit mobile et dans un délai de 4 mois, une offre 4G fixe, si l’ouverture de cette offre ne dégrade pas la qualité du service de 4G mobile. Enfin, Orange et SFR ont l’obligation de déployer chacun, à la demande du gouvernement, jusqu’à 500 nouveaux sites afin d’apporter de la 4G fixe ; les zones géographiques à couvrir seront identifiées par le gouvernement, après consultation des opérateurs concernés », indique l’Arcep.

Pas de 4G fixe chez Free
Les quatre opérateurs mobiles ont aussi l’obligation de mettre à jour, outre leurs offres 4G fixes, les zones identifiées où elles sont proposées et de les rendre publiques sur le site web du régulateur (7). Or, selon nos constatations, seul Free ne dispose toujours pas à ce jour d’offre d’accès fixe à Internet sur son réseau 4G – alors que ses trois concurrents respectent leurs obligations « 4G fixe ». @

Charles de Laubier