Sony généralise la convergence contenant-contenu

En fait. Le 9 février, à Tokyo, le futur DG de Sony, Kazuo Hirai – qui remplacera
le 1er avril Howard Stringer, après avoir redressé la division Sony Computer Entertainment – a dit qu’il allait réorganiser le groupe nippon autour des réseaux
et des contenus, comme il l’a fait pour la PlayStation.

En clair. Sony veut généraliser à tout le groupe la convergence entre les terminaux et
les contenus via des services en lignes, sur le modèle de ce que Kazuo Hirai a réussi à faire dans sa division Sony Computer Entertainment avec la console PlayStation et son écosystème de jeux en ligne (1). Prêt à remplacer le 1er avril le patron actuel du géant
de l’électronique, Kazuo Hirai veut appliquer sa méthode « contenant-contenu » online
aux autres activités de Sony. Il y a urgence car le groupe prévoit une perte annuelle de
2,2 milliards d’euros (2). La branche télévision déficitaire de Sony sera la première à s’inspirer de la PlayStation. « Je souhaite que la TV revienne rentable d’ici à mars 2014 »,
a-t-il rappelé. Comme la console, le téléviseur est au centre des foyers. « La plupart des consommateurs ont un téléviseur à la maison, ce qui leur permet de profiter des contenus audiovisuels », a expliqué Kazuo Hirai, qui croit aussi dur comme fer à la TV 3D. Lors du dernier salon CES de Las Vegas en janvier, il avait déclaré : « La télévision est rapidement en train de devenir la voie d’accès aux contenus d’Internet ». La gamme Bravia du japonais va donc proposer plus de contenus en ligne, production maison ou partenaires (comme M6 en France). Sony, qui mise en outre sur la complémentarité TV-tablette, soutient par ailleurs la Google TV. Autrement dit, Sony se doit d’évoluer du métier de fabricant vers une entreprise de divertissement en ligne. D’autant que la firme de Tokyo en a les
moyens : contrairement à Samsung et Apple, ses premiers concurrents, Sony est aussi une des majors de la musique avec Sony Music Entertainment (intégrant CBS Records (3) depuis 1988 et BMG depuis 2008) et l’un des grands producteurs de films d’Hollywood avec les studios Sony Pictures Entertainment (Columbia Pictures compris depuis 1989). Sur ses 168.200 employés dans le monde, 7.000 travaillent dans le film et 6.800 dans la musique. Et il y a Sony Computer Entertainment pour les consoles et l’édition de jeux vidéo. Malgré les cyber attaques dont ont été victimes le service PlayStaytion Network,
le service de musique online Qriocity et la plate-forme de jeux online pour ordinateur Sony Online Entertainment (SOE), Kazuo Hirai veut mettre tout Sony en ligne. Mais la convergence en ligne risque de ne pas suffire, Kazuo Hirai prévoyant aussi des licenciements et des réductions drastiques de coûts. @

La loi « Copie privée » est contestée devant le Conseil constitutionnel et l’Union européenne

La nouvelle loi sur la copie privée, prolongeant d’un an les taxes (pourtant annulées par le Conseil d’Etat), fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et d’un recours devant la Commission européenne.
Les industriels français estiment payer « 100 millions d’euros de trop ».

Selon les informations de Edition Multimédi@, le Syndicat des industries de matériels audiovisuels (Simavelec) et le Syndicat national des supports d’image et d’information (SNSII) ont déposé ce vendredi 10 février leur recours devant le Conseil constitutionnel pour faire annuler la nouvelle loi sur « la rémunération pour copie privée » – datée du
21 décembre dernier et promulguée le lendemain au JORF (1).

Cour de justice européenne en vue
Le Simavelec et le SNSII ont le soutien d’autres organisations professionnelles, que
sont la Fédération française des télécoms (FFT), le SFIB (technologies de l’information), le Gitep TICS (télécommunications), le Secimavi (fabricants et importateurs d’appareils électroniques grand public) et la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad). Contestant déjà devant le Conseil d’Etat les décisions de la commission « copie privée », laquelle relève de trois ministères (Culture, Industrie et Consommation), le Simavelec et le SNSII ont le droit de soulever une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). La plus haute autorité juridictionnelle de l’Etat devra dire si la nouvelle loi « copie privée » porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution française garantit.
Les industriels veulent faire annuler cette loi, tant au niveau français qu’européen, en la contestant devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). « Fin février, nous allons saisir la Commission européenne qui jugera si elle transfert notre dossier devant la CJUE », nous précise un proche du dossier. Selon les plaignants, la loi « copie
privée » va à l’encontre non seulement de la décision de la Haute juridiction administrative  du 17 juin 2011, mais aussi de l’arrêt (dit « Padawan ») de la CJUE, et de la directive européenne du 22 mai 2001 sur « l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information » (DADVSI). En France, le gouvernement avait obtenu des parlementaires de voter (2) la loi « copie privée », laquelle prolonge d’un an (jusqu’au 31 décembre 2012) les barèmes actuels. Ces taxes sont prélevées sur tous – ou presque (pas les ordinateurs…) – les supports de stockage numérique (CD/DVD, clés USB, baladeurs MP3, disques durs externes, smartphones, « box », décodeurs à disque dur, …) utilisés pour y copier musiques, films ou autres. Pourtant, ces taxes – qui rapportent près de 200 millions d’euros par
an aux ayants droits (3) – avaient été annulées par le Conseil d’Etat à compter du 22 décembre dernier (4).
A la suite de l’arrêt du Conseil d’Etat de daté du 11 juillet 2008, lequel avait rendu illégales toutes les décisions de la commission « copie privée » (5), la nouvelle loi permet aux acquéreurs professionnels de ces supports numériques de se faire rembourser ou, dans certains cas, d’être exonérés. Ce que fustigent les industriels :
« Cette loi impose aux professionnels d’acquitter une rémunération pour copie privée dont le droit communautaire interdit pourtant qu’ils puissent être débiteurs ». Ce point sera attaqué devant la Cour de justice de l’Union européenne, laquelle – dans son arrêt du 21 octobre 2010 (affaire « Padawan ») – avait exempté de la taxe les professionnels. Les industriels reprochent que les barèmes annulés par le Conseil d’Etat seront maintenus pendant 12 mois. « Une telle prorogation vient pénaliser les consommateurs qui pouvaient espérer que le nouveau barème vienne compenser seulement un manque à gagner pour les ayants droit du seul fait des actes de copie privée licite (6) », ont déjà expliqué les organisations professionnelles. Elles dénoncent donc le fait « qu’une intervention législative efface, du revers de la plume, les effets d’une décision du Conseil d’Etat et engage la responsabilité de l’Etat français devant les institutions européennes ». La saisine de la Commission européenne va intervenir au moment où cette dernière étudie une réforme des taxes pour copie privée (Private Copying Levies) pour éviter les abus et aboutir à une harmonisation au sein des Vingtsept (7). Pour les industriels, il ne s’agit pas de remettre en cause la « légitimité de la rémunération des ayants droit au titre de l’exception de copie privée » mais plutôt de remettre à plat le calcul : non pas en partant de la capacité des supports (méthode retenue à l’époque de l’analogique), mais plutôt du préjudice réel des ayants droit. Les industriels ont demandé au cabinet de consultants Eight Advisory d’évaluer ce « manque à gagner ».

Les tablettes taxées elles-aussi
Résultat : « Les constructeurs paient 100 millions d’euros de trop par an ! », a lancé Philippe Citroën, président du Simavelec (8), lors d’une conférence de presse le 6 février. Et ce n’est pas fini, car la commission « copie privée » a décidé le 9 février de taxer les tablettes jusqu’à 12 euros. Ce qui ajouterait jusqu’à 36 millions d’euros dans l’escarcelle des ayants droit, puisque 3 millions de tablettes seront vendues en France cette année (9). @

Charles de Laubier

Contenus illégaux signalés : et les œuvres piratées ?

En fait. Le 30 janvier, l’Association française des fournisseurs d’accès et de services Internet (AFA) a publié le bilan 2011 de son service Pointdecontact.net
qui permet de signaler en ligne des contenus dits « choquants » : sur les 7.820 contenus signalés en 2011, 1.966 ont été considérés comme illicites.

En clair. Seulement 25 % des contenus dits choquants signalés à l’AFA – dont Google France, France Télécom, SFR, Bouygues Telecom, Numéricâble et Darty Télécom sont membres – sont finalement illicites. Et sur ces 1.966 contenus, seulement 720 tombés sous le coup de la loi française – car hébergés en France – ont été transmis à l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC), pour que celui-ci (1) fasse procéder à leur fermeture ou à
leur blocage (2). L’AFA est en outre membre fondateur de la fédération internationale des hotlines Inhope (36 pays). Tout comme le site Internet-signalement. gouv.fr avec lequel il collabore, Pointdecontact.net permet ainsi de signaler – de façon anonyme – tout contenu illégal rencontré sur Internet, à savoir : pédopornographique, violent, contraire à la dignité humaine, raciste, xénophobe, terroriste ou encore incitation au suicide.
Mais Edition Multimédi@ a voulu savoir auprès de l’AFA pourquoi elle ne s’occupait
pas des contenus illicites comme les œuvres piratées sur Internet, qui peuvent être considérés comme « odieux » par les ayants droits. « Il y a deux procédures différentes de notification et de retrait (notice and take down) prévues par la loi “Confiance dans l’économie numérique” (LCEN), selon que l’on se trouve devant un contenu “odieux”
dont la liste est dressée (3) ou devant tout autre contenu, comme c’est le cas pour les contenus de propriété intellectuelle. (…) Les contenus de propriété intellectuelle diffusés ou reproduits sans autorisation de leur auteur ne peuvent donc pas être signalés au Point de Contact de l’AFA, car ils doivent lors de leur notification remplir une procédure plus stricte (4) qu’un simple signalement », nous a expliqué Carole Gay, responsable affaires juridiques et réglementaires de l’AFA. La loi Confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 a en effet considéré que les hébergeurs ne sont pas des juges et ne peuvent déterminer sans de plus amples informations qu’un contenu de propriété intellectuelle a été diffusé ou copié sans autorisation. « Les hébergeurs ne retireront le contenu que si la notification est complète et qu’ils estiment alors se trouver devant un contenu “manifestement” illégal pour ne pas risquer de retirer un contenu finalement légal. En cas de litige, le juge tranchera », a ajouté Carole Gay. @

En 2011, seuls 600 téléviseurs étaient connectés…

En fait. Le 7 février, le CSA invite pouvoirs publics, professionnels et journalistes pour installer le 16 février prochain le « Commission de suivi des usages de la télévision connectée ». Mais selon le Simavelec, seul un tiers des téléviseurs connectables vendus en France l’an dernier l’ont été.

En clair. Michel Boyon, le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA),
entame-là l’un de ses plus importants chantiers avant la fin de son mandat qui se
termine dans moins d’un an, le 13 janvier 2013 (1). Il s’agit notamment d’« alléger certaines réglementations pesant sur les chaînes » (chronologie des médias, plafond
de concentration, circulation des oeuvres, …), « sans porter atteinte aux intérêts des créateurs », tout en obligation pour toute entreprise tirant un revenu de l’exploitation
d’une oeuvre de « participer au financement de la création » (2).
Pour Philippe Citroën, président du Syndicat des industries de matériels audiovisuels (Simavelec), lequel regoupe en France les fabricants de téléviseurs (Samsung, LG,
Sony, Philips, Panasonic, …), « il y a une multitude de questions mais peu de réponses aujourd’hui, face aux problèmes soulevés par le passage d’un monde très normé comme l’audiovisuel à un monde totalement dérégulé de l’Internet ». Il attend beaucoup du régulateur. « Le manque de visibilité sur la maturité des contenus, notamment HbbTV, les incertitudes sur la neutralité du Net – et sur les débits –, devront être levés pour assurer le développement de cet “espace” », a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse, le 6 février. Pour l’heure, les usages ne décolleront pas vraiment. D’après le Simavelec, seulement « un tiers » des 1.740 téléviseurs connectables vendus l’an
dernier – sur un total des ventes record de 8.700 écrans de télévision – ont vraiment
été connectés à Internet. Autrement dit, à peine 580 téléviseurs ont été effectivement connectés… Soit à peine 7 % du parc vendu. Ce fossé, entre « connectables » et
« connectés » n’est pas sans rappeler le gap similaire entre les « raccordables » à
la fibre optique à domicile et les « raccordés » à ce même FTTH (3).
Selon les derniers chiffres en date de l’Arcep (4), si l’on compte 1.350.000 logements
« éligibles » (c’est-à-dire raccordables) au FTTH, l’on compte seulement 175.000 abonnés. Soit à peine 13 % du parc installé. Mais Philippe Citroën se veut optimiste :
« Pour 2012, 40 % des 7.000 téléviseurs qui seront vendus seront connectables [soit 2.800 d’entre eux, ndlr] et le taux de connexion sera en forte augmentation ». YouTube, Dailymotion, Facebook, Twitter ou toute application web devront encore attendre encore pour conquérir le salon. @

Philippe Gault, président du SIRTI : « Le CSA n’a aucun argument valable pour refuser de lancer la RNT »

Le président du Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI) – représentant environ 200 membres, près de 10 millions d’auditeurs – dénonce « l’ornière dans laquelle le CSA place la RNT ». Il en appelle au lancement de la Radio Numérique pour Tous.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@: En quels termes le CSA (1)
a répondu à votre « appel » du 13 octobre où vous demandez la délivrance des autorisations de radio numérique terrestre (RNT) de 2008 à Paris, Marseille
et Nice (2) ?
Philippe Gault :
La réponse du CSA est contraire à nos attentes et à celles des radios sélectionnées qui sont prêtes à lancer sans plus attendre la Radio Numérique pour Tous. La RNT, c’est la radio numérique selon le modèle historique qui a fait le succès de la radio (3). C’est la FM en mieux. Cette RNT-là, que nous préparons depuis près de 15 ans, le CSA n’en veut curieusement pas en ce début 2012, et le régulateur privilégie une autre radio numérique, payante, qui est la négation du paysage radio français construit depuis le début des radios libres. Le CSA répond à nos demandes de délivrance des autorisations en RNT de manière dilatoire. Il nous annonce l’ajout d’une nouvelle norme (4) : il sait très bien que, ce faisant, il enterre le dossier en recréant un affrontement de spécialistes et d’ingénieurs. S’il avait procédé ainsi pour la TNT, celle-ci ne serait pas encore lancée.

EM@ : Allez-vous saisir le Conseil d’Etat ?
P. G. :
Nous étudions toutes les possibilités pour sortir de l’ornière où nous place le CSA : juridique comme le Conseil d’Etat, mais aussi le débat public en cette année propice.

EM@ : Patrice Gélinet (CSA) a dit que la RNT est la solution à la saturation de la bande FM qui fête ses 30 ans : y a-t-il divergence au CSA ? Préserve-t-on les radios nationales privées ?
P. G. : Ce qui est visible, ce sont les errements de cette autorité de régulation sur le projet de la radio numérique : elle ne parvient toujours pas à faire appliquer la loi de 2007 (5), alors qu’elle est pour beaucoup dans ses termes. Quand les groupes radiophoniques nationaux réclamaient la RNT, le CSA préparait son lancement à marche forcée. C’est de là que viennent les présélections de radios pour lesquelles nous demandons la délivrance des autorisations. Depuis que les groupes de radios nationales [Europe 1, RTL, NRJ ou encore RMC, ndlr] ont créé le Bureau de la Radio, début 2009, ils ne veulent plus de la RNT et, depuis, le CSA n’a rien fait concrètement pour la lancer. Nous sommes allés de consultations en observatoires ; le champ de l’appel aux candidatures a été ramené de
19 villes à 3 villes (Paris, Marseille, Nice). Et maintenant, on enterre les sélections effectuées, sous couvert d’une norme qui n’est pas nouvelle. Le CSA accorde le moratoire du lancement de la RNT, sans date d’échéance. Le président du CSA, Michel Boyon, n’a même pas parlé de la radio numérique lors de ses voeux 2012, alors que cette année est la dernière de son mandat, ainsi que du conseiller en charge de la RNT [Rachid Arhab, ndlr].

EM@ : Accepteriez-vous que les fréquences de la bande III soient utilisées à autre chose que la RNT ?
P. G. :
Les fréquences de la bande III et L sont planifiées en France pour les éditeurs de
la RNT. Il n’est pas question qu’elles soient confisquées pour d’autres usages. Ce sont des décisions politiques. Si nos dirigeants ne veulent plus du média radio, parce qu’il
est encore trop libre et qu’il y a à la radio encore trop d’indépendance, qu’ils le disent franchement aux Français : c’est le moment !

EM@ : Lyon expérimente depuis un an la RNT. Nantes l’expérimente depuis 2007 et, depuis fin janvier 2012, l’étend à la Loire-Atlantique. Ces expérimentations locales doivent-elles s’étendre à toute la France ?
P. G. :
Les expérimentations ou démonstrations locales sont des initiatives portées par les radios indépendantes ou associatives, ainsi que par certains diffuseurs. Les participants ont bien du mérite, car ils entreprennent à contrecourant. Bien sûr, on pourrait imaginer un scénario de débordement dans lequel une série de diffusions locales sans autorisation lanceraient en fait la RNT. Evoquer ce scénario nous ramènerait avant 1981 : à l’époque,
il n’y avait pas de liberté des ondes, pas de loi, pas d’autorité de régulation. En est-on arrivé à ce point ? Est-ce ce que souhaitent les membres du CSA qui encouragent ces expérimentations sans délivrer les autorisations dans les zones où elles sont prêtes ? Il serait si simple d’appliquer la loi, de délivrer les autorisations dans les trois zones où il y a des sélections, et de donner un signal clair selon lequel il y aura la Radio Numérique pour Tous en France.

EM@ : Pourquoi ne pas miser sur la radio sur IP (6) ?
P. G. :
La radio sur IP existe déjà, mais elle n’est pas une alternative à la radiodiffusion hertzienne : l’IP ne remplacera pas la Tour Eiffel pour diffuser la radio à Paris. Où sont les réseaux mobiles à haut débit prêts à alimenter 45 millions d’auditeurs qui écoutent la radio près de 3 heures par jour en France ? Et combien leur en coûtera-t-il ? L’IP c’est très bien, mais c’est un mode de diffusion de complément. Le modèle de la radio depuis plus d’un siècle (7) est robuste (même en situation de crise), accessible à tous ; il ne peut pas être remplacé par l’IP dont la disponibilité s’effondre notamment dès que tout le monde demande le même service, sans parler des limitations imposées par les opérateurs.

EM@ : Le CSA a publié un appel à candidatures – jusqu’au 27 février – pour la distribution de services de radio numérique ou autres (8) par voie hertzienne terrestre sur la bande L. Que répondent les radios indépendantes du Sirti ?
P. G. :
Cet appel c’est du grand n’importe quoi ! Dans un pays qui a une des offres de radios existantes les plus diversifiées au monde, et où nombre des radios existantes demandent qu’on leur délivre les autorisations pour la RNT, on prétend lancer une offre
de radio numérique payante avec quelques dizaines de radios nouvelles qui seront pour
la plupart réalisées par une société du groupe Lagardère. Voudrait-on mettre dans les mains d’un seul distributeur privé la capacité de diffusion de la radio numérique ?

EM@ : Le Sirti se dit très attaché à la gratuité du média radio et s’oppose à la RNT payante sur la bande L : pourquoi, alors que le Bureau de la Radio ne l’exclut pas ? P. G. : Le Bureau de la Radio est très discret, car son travail de sape est en fait difficile
à justifier. Des groupes qui font énormément de profit, en particulier en radio en France,
ne sont pas prêts à payer quelques millions d’euros pour un réseau de radio numérique. C’est surréaliste, car la RNT leur promet une couverture nationale, une amélioration technique réelle, des données associées, une interactivité accrue, … Mais il y a deux points qui effarouchent ces groupes. Le premier est très court terme : depuis le début
de la crise, l’activité radio doit leur produire du cash qui leur préserve leur taux de marge pour investir dans d’autres domaines (télévision, Internet, téléphonie, et à l’international). Le second point est que ces groupes ont obtenu en France de réels privilèges en fréquences FM – et un tel renforcement du déséquilibre par rapport aux radios indépendantes dans ce qu’on a appelé FM+ – qu’ils craignent que la RNT ne relance
la concurrence.

EM@ : Quel sera le modèle économique de la RNT ? Fautil privilégier le DAB+ moins coûteux ?
P. G. :
Le modèle économique est simple : il faut une volonté politique, délivrer les autorisations à Paris, Marseille et Nice, faire la promotion des récepteurs disponibles, mettre en place des aides temporaires et limitées aux PME de la radio (sans commune mesure avec ce qui est accordé à la presse ou aux institutions culturelles), et la RNT sera lancée. On peut la lancer avec la norme qui est autorisée puis en ajouter une autre demain au choix des éditeurs, à l’instar de ce que nous a montré l’histoire de la TNT. @