Jeux sociaux : Zynga pourrait franchir en 2022 la barre des 3 milliards de dollars de chiffre d’affaires

Il y a 10 ans, Zynga s’introduisait à la Bourse de New York. Cofondé sous le nom de Presidio Media il y a près de 15 ans par Mark Pincus, lequel lui donne le nom de son bouledogue disparu, l’éditeur de jeux vidéo – dont « FarmVille » et « CityVille » – est devenu le champion du Social Gaming.

Lors de son introduction au Nasdaq de New York il y a 10 ans (le 16 décembre 2011), Zynga valait 10 dollars l’action. Une décennie plus tard, le titre « ZNGA » dépasse à les 6 dollars (au 01-12-21). Entre temps, le cours de Bourse du champion mondial des jeux sociaux – sur mobiles, réseaux sociaux (comme Facebook et Snapchat), mais aussi sur ordinateurs et consoles de jeux – a longtemps végété après un pic à 15 dollars en mars 2012 et un autre à plus de 12 dollars en février 2021.

Le « bouledogue » l plus sociable
Même le remplacement il y a cinq ans de son cofondateur, revenu deux ans plus tôt à la direction générale de l’entreprise (1), n’a pas vraiment redonné des couleurs au titre. Mark Pincus (photo) est toujours président du conseil d’administration de l’éditeur au bouledogue – ayant rebaptisé Presidio Media en Zynga en juillet 2007 en mémoire de son chien disparu… – et il possède encore aujourd’hui 7% du capital de l’entreprise basée à San Francisco où le siège social a été baptisé… « The Dog House ». La fortune personnelle de Mark Pincus atteint, selon Forbes, les 1,3 milliard de dollars (2).
L’éditeur de «FarmVille »(3), « CityVille », «Words With Friends » ou « Zynga Poker » propose en free-to-play des jeux gratuits avec la possibilité pour les utilisateurs d’acheter dans chaque jeu des articles virtuels et de gagner des crédits de jeu, et pour les annonceurs et marques partenaires d’acquérir des espaces publicitaires. Ces deux sources de revenus – 80 % pour dépenses en ligne et 20 % pour la publicité – représentent la quasi-totalité du chiffre d’affaires de Zynga, son partenariat historique et exclusif avec Facebook ayant généré il y a dix ans jusqu’à 20 % de ses gains.
Le « bouledogue » a depuis un peu lâché les baskets de la firme de Mark Zuckerberg, dont le nom avait d’ailleurs circulé des dernières années parmi les prétendants au rachat de Zynga : Facebook aurait été intéressé de tenir en laisse le « chien » de Mark Pincus, mais aussi Ubisoft ou Activision Blizzard. Et depuis deux ans, le pionnier du Mobile Gaming et du Social Gaming suscite un regain d’intérêt des investisseurs, dont les fonds Vanguard Group, Artisan Partners ou encore Blackrock présents à son capital. La valorisation boursière de dépasse aujourd’hui les 7,5 milliards de dollars. Lors de la présentation le 9 novembre dernier de ses résultats du troisième trimestre, l’éditeur de « FarmVille » – dont le nouvel opus « FarmVill 3 » (FV3) lancé mondialement début novembre a démarré sur les chapeaux de roue – a revu à la hausse ses prévisions de chiffres d’affaires annuel pour 2021, à 2,81 milliards de dollars (au lieu 2,8 milliards lors de la projection précédente), contre un peu plus de 1,9 milliard réalisés l’an dernier. Côté rentabilité : Zynga avait enregistré en 2020 une perte nette de 429,4 millions de dollars ; l’exercice 2021 se présente mieux puisque ce déficit devrait être ramené à 96,9 millions de dollars. Les employés à plein temps de Zynga sont au nombre de 2.245, surnommés les « Zyngites » (4). Zynga, qui a dépassé cette année en moyenne les 200 millions d’utilisateurs par mois dépensant environ 0,2 dollar mensuellement (5), a surtout grandi à coup d’acquisitions successives, soit plus d’une trentaine en près de quinze ans d’existence. La société turque Peak, rachetée en juin 2020 pour 1,8 milliards de dollars, est sa plus grosse acquisition à ce jour, suivie en valeur de Small Giant Games en décembre 2018 pour 560 millions de dollars, de NaturalMotion en janvier 2014 pour 527 millions de dollars, de StarLark en août 2021 pour 525 millions de dollars (sa dernière acquisition en date tout juste finalisée), de Gram Games en mai 2018 pour 250 millions de dollars, ou encore de Rollic en octobre 2020 pour 180 millions de dollars.
En outre, Zynga s’est emparé en mai 2021 du réseau de publicité programmatique (6) et de monétisation mobile Chartboost pour 250 millions de dollars. Marqué par une certaine instabilité au niveau de son management de direction, Zynga est dirigé depuis plus de cinq ans par Frank Gibeau, un ancien d’Electronic Arts. Mais la démission le 5 novembre dernier du directeur opérationnel Matt Bromberg, qui était à ce poste depuis plus de cinq ans également (lui aussi ancien d’EA), inquiète à nouveau les investisseurs. Matt Bromberg était chargé de l’expansion internationale des studios de développement de jeux ; il quittera l’entreprise en mars 2022 malgré les bonnes performances du « bouledogue ». @

Charles de Laubier

David Neichel, président du SELL : « Le jeu vidéo en France devrait croître de 7 % cette année »

Le président du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL), par ailleurs DG France d’Activision qui vient de sortir « Destiny », espère que la nouvelle génération de consoles de jeux vidéo va permettre au marché français de doubler au cours des prochaines années son chiffre d’affaires.

Propos recueillis par Charles de Laubier

David NeichelEdition Multimédi@ : Le chiffre d’affaires 2013 de l’industrie du jeu vidéo en France est estimé par GfK à 2,5 milliards d’euros, en léger recul de 0,4 % sur un an. Le SELL avance 2,7 milliards en 2013. Pourquoi ce différentiel ? Quel est le chiffre définitif et quelle croissance prévoyez-vous cette année ?
David Neichel : Effectivement, nos prévisions de l’année dernière ont été confirmées et le chiffre d’affaires du jeu vidéo en 2013 a été de 2,7 milliards d’euros (1). Le différentiel avec GfK s’explique par la difficulté à appréhender le marché du dématérialisé.
Ceci dit, nous sommes tout à fait d’accord avec GfK pour prévoir une croissance du marché du jeu vidéo en France de 7 % à fin 2014.

EM@ : Certains pensent que la 8e génération de consoles (PS4, Xbox One, Wii U, …) est la dernière, tant les jeux online et le Cloud Gaming vont les rendre obsolètes (à partir de 2017 environ). Etes-vous d’accord avec cette perspective tout-online ?
D. N. : Nous nous méfions des prévisions de ce type. On nous disait déjà que la 7e génération de consoles serait la dernière. Notre industrie se focalise davantage sur
les contenus que sur les plateformes. Nous irons là où veulent aller les joueurs.
Le dématérialisé est évidemment une tendance de fond, même si 64 % de la valeur
du marché est toujours générée par le jeu physique. Et une grande partie de la valeur du jeu en ligne, qui représente 25 % de la valeur totale, est réalisée sur consoles.
Les différents segments du marché que sont les consoles, les jeux et les accessoires ont eux-mêmes leur propre phénomène de cycle. Naturellement, la transition passe dans un premier temps par un fort développement du parc de consoles, ce qui permet ensuite à celui des jeux et des accessoires de progresser au fur et à mesure. Les consoles de génération 8 ont cependant connu un démarrage extraordinaire, favorable à l’ensemble de l’écosystème. Et de nombreux jeux sont attendus sur le second semestre 2014 (2).

EM@ : Selon l’industrie, chaque génération de consoles de jeu vidéo a permis de doubler son chiffre d’affaires : est-ce à dire qu’à l’issue de cette 8e génération qui devrait prendre fin dans cinq ans, la France du jeu vidéo pèsera 5 milliards d’euros ?
D. N. :
Nous ne pouvons que l’espérer ! Nous constatons en effet que le renouvellement de cycle est favorable à l’ensemble des acteurs du marché. Nous avons constaté qu’à chaque génération précédente, le chiffre d’affaires global a été multiplié par deux. Nous espérons donc qu’il en soit de même pour la génération 8 qui démarre très rapidement, dans l’ensemble de l’Europe. Les consoles connaissent sur
le 1er semestre 2014 une croissance sans précédent, ce qui prouve que le cycle est
en marche et cela promet de belles perspectives. Nous savons également que chaque génération est différente et que l’évolution des modes de consommation et distribution rendent le marché plus complexe à appréhender.

EM@ : Certains pensent que cette 8e génération de consoles est la dernière, tant les jeux online et le Cloud Gaming vont les rendre obsolètes (à partir de 2017 environ). Etes-vous d’accord avec cette perspective tout-online ?
D. N. :
Nous nous méfions des prévisions de ce type. On nous disait déjà que la 7e génération de consoles serait la dernière. Notre industrie se focalise davantage sur
les contenus que sur les plateformes. Nous irons là où veulent aller les joueurs. Le dématérialisé est évidemment une tendance de fond, même si 64 % de la valeur du marché est toujours générée par le jeu physique. Et une grande partie de la valeur du jeu en ligne, qui représente 25 % de la valeur totale, est réalisée sur consoles. Il n’est donc pas très pertinent d’opposer plateforme et mode de distribution.

EM@ : Vous avez eu, le 16 juillet dernier, un entretien avec Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du Numérique : que lui avezvous dit ? La réforme du crédit d’impôt jeu vidéo (CIJV) adoptée en décembre vous satisfait-elle ?
D. N. :
Nous avons en effet eu un échange fructueux avec Axelle Lemaire qui connaît bien notre industrie (3) et sait parfaitement ce que le jeu vidéo peut porter en matière d’innovation, de création de valeur et d’emplois. Parmi les sujets importants abordés,
la réforme du crédit d’impôt est un enjeu central pour l’industrie en France. Ce qui a
été voté à l’Assemblée nationale [loi de finances rectificative 2013, ndlr] nous convient : baisse du seuil d’éligibilité, allongement du temps de production et ouverture du crédit d’impôt aux jeux classés 18. Mais le rendre concret prend du temps et nous espérons que tous les détails techniques seront réglés rapidement.

EM@ : Des ayants droits estiment qu’en contrepartie du CIJV, le droit d’auteur devrait s’appliquer dans le jeu vidéo (malgré l’échec de la médiation Chantepie fin 2013) : qu’en pensez-vous ?
D. N. :
Sur la répartition de la chaîne des droits, toutes les professions du jeu vidéo parlent d’une seule voix, respectent et valorisent la place des auteurs, mais ne souhaitent pas qu’on applique des modes de répartition inadaptés à notre nature numérique. @

Claude Perdriel, cofondateur du Nouvel Obs, ne croit pas au payant sur Internet

Cofondateur du Nouvel Observateur il y a près d’un demi-siècle, Claude Perdriel
(87 ans) a confié qu’Internet l’ « inquiète » et le « désespère ». Alors que l’hebdo,
cédé au trio Niel-Bergé-Pigasse, devrait lancer le 15 avril une édition du soir pour tablette, il dit ne pas croire au payant sur Internet.

Par Charles de Laubier

Claude PerdrielL’une des figures emblématiques de la presse française
ne croit pas vraiment à Internet. Claude Perdriel (photo),
qui est encore pour quelques jours président du conseil de surveillance de la société Le Nouvel Observateur du Monde qu’il a cofondée et qu’il cède à la holding Le Monde Libre
du trio Niel-Bergé-Pigasse (déjà propriétaire du groupe Le Monde), a exprimé de sérieux doutes sur la révolution numérique des journaux.
« Internet m’inquiète et me désespère un peu pour ce qui concerne la presse écrite », a-t-il confié devant l’Association
des journalistes médias (AJM), le 20 mars dernier.

« Internet menace l’univers médiatique »
D’après lui, les recettes ne sont pas au rendez-vous. « Souvent, on vient me trouver pour faire tel ou tel service Internet. Mais je demande s’il y aura des internautes intéressés. On me répond que oui, quelques centaines de milliers. Bon, et je demande quelles seront les recettes de publicité. On me dit ‘’zéro’’, car tant que l’on n’est pas dans les millions d’internautes. Mais il faudra embaucher deux seniors et deux juniors pour couvrir cela. Donc, c’est 400.000 ou 500.000 euros [par an] pour zéro en recettes… », a-t-il regretté avec scepticisme.
Cela ne l’empêche pas de se dire content du site web Sciences & Avenir Santé :
« Je m’en occupe un peu car vraiment ça me passionne. Et on est très content ;
on se félicite : bravo ! Le malheur, c’est que je crois que l’on a zéro pour cent de
recette ! Il n’y a pas de recette car faire un site santé de Sciences & Avenir à 500.000 internautes n’apporte pas une miette de publicité. Comment on va faire pour vivre ou survivre ? », s’est inquiété Claude Perdriel.

Pour lui, point de salut en dehors de la gratuité financée par la publicité – à condition d’avoir des millions de visiteurs pour intéresser les annonceurs. « Moi, je ne crois pas au payant en matière d’Internet. En tout cas, absolument pas pour l’information généraliste. L’information est partout et elle est gratuite. Les internautes ne paieront jamais », a-t-il insisté. Même s’il peut admettre que faire payer peut avoir du sens pour une information thématique poussée ou un conseil de boursier : « Peut-être. Mais cela veut dire qu’il faut engager des gens spécialisés (…) deux cracks qui vont vous coûter 300.000 euros et deux community managers à 300.000… Et vous allez avoir quoi comme recettes ? Je ne crois pas au payant ». A tel point qu’il ne croit pas beaucoup aux chances de succès de l’édition quotidienne du soir payante pour tablettes que Le Nouvel Obs devrait sortir le 15 avril. « J’ai laissé (…) faire. En plus, elle est financée
par [le fonds Finp d’aide à la presse de] Google : alors je n’avais rien à dire ! Mais…
Je n’y crois pas beaucoup. Je pense que les gens ne vont pas s’abonner. D’ailleurs la question se pose aussi pour Challenges [qu’il conserve avec Sciences & Avenir, ndlr] puisqu’on va faire un quotidien du soir d’ici deux mois. Mais moi, je voudrais le faire gratuit car je préfère avoir plus d’internautes » (1). Car il ne conçoit pas faire tout ce travail pour quelques milliers d’internautes payant, alors que le site web de Challenges compte plus de 3,5 millions de visites par mois (selon l’OJD).
« Donc, voilà mon problème. (…) J’espère que je pourrai le faire gratuit ! », a-t-il lancé.
Pire : celui qui s’est lancé il y a trente ans avec succès dans les fameuses messageries roses sur Minitel (les 3615 Aline ou 3615 Jane), lesquelles lui ont permis de renflouer Le Nouvel Observateur, estime en revanche qu’Internet met en péril la presse :
« L’univers médiatique que je défends est menacé, y compris par Internet, par lui-même. Parce que l’univers d’Internet va à une vitesse vertigineuse. D’abord, pendant des années, Internet a été de l’écrit. Après, ce fut les photos. Maintenant, ce sont les vidéos qui l’emportent. Et les vidéos créent un univers très lointain du nôtre. (…) D’abord on sait pas faire : ça coûte trop cher ; faut prendre les vidéos des autres et
on ne sait pas où sera la marge. Et ça, c’est un peu inquiétant sur le numérique.
C’est quand même ce qui est en train de se passer ».

Rachat de Rue89 en 2012 : « Un peu cher » Enfin, questionné sur savoir s’il ne regrettait pas d’avoir acheté Rue89 pour 7,5 millions d’euros en janvier 2012, il a répondu : « C’était un peu cher. Mais là je dirais que j’avais une raison : j’aime beaucoup les gens de Rue89, ce sont des amis, des gens formidables ; ils étaient en péril, même gravement ; ils auraient peut-être disparu. Mais on a pas vraiment fait prendre la mayonnaise : on ne les a pas ramené à côté de l’Observateur, ce que Louis Dreyfus va faire [lire p 2]. Et je ne regrette pas de les avoir rachetés (2). Même si c’était un peu cher ». @

Charles de Laubier

Le Monde : les défis de Natalie Nougayrède pour fin mars

En fait. Le 21 février, Natalie Nougayrède – proposée par le trio actionnaire Bergé-Niel-Pigasse pour succéder à Erik Izraelewicz à la tête du Monde – a présenté son projet devant la rédaction du quotidien. Journaliste internationale, il lui est reproché de méconnaître la mutation numérique du journal.
(Depuis la publication de cet article dans Edition Multimédi@ n°74, Natalie Nougayrède a été élue à 79,4 % des suffrages exprimés le 1er mars 2013 )
NNEn clair. La future patronne du Monde, Natalie Nougayrède (photo), n’aura qu’un mois pour se mettre au diapason, entre le vote du 1er mars où elle doit recueillir au moins 60 % des suffrages de la rédaction pour valider sa nomination et le 31 mars où le journal doit étoffer son contenu imprimé et numérique.
Le président du directoire du groupe Le Monde, Louis Dreyfus, avait en effet esquissé mi-décembre deux grandes évolutions éditoriales prévues d’ici « fin mars » : sur le papier, un cahier quotidien sur l’économie sur le modèle des pages saumon du Figaro ; sur le web, des espaces premium à l’attention des abonnés.
Orchestrer papier et digital, articuler gratuit et payant
Ces enrichissements rédactionnels du quotidien du soir interviendra trois mois après être devenu généraliste le plus cher (1) avec 1,80 euro l’exemplaire papier (3,50 le weekend) et à 15 euros par mois pour la version numérique (24,90 par mois pour l’intégral papier-web-mobile-tablette).
Mais le grand défi de Natalie Nougayrède sera d’orchestrer une vraie rédaction bimédia (digital-papier) et d’accroître l’articulation freemium (gratuit-payant). Lors d’un débat sur la presse le 8 février dernier, Louis Dreyfus a indiqué que « 15 % des lecteurs achètent le journal en version digitale, on va arriver rapidement à 20 %, mais il faut quand même avoir des sites gratuits forts ». Continuer la lecture