L’Observatoire européen de l’audiovisuel voit « Net »

En fait. Le 3 septembre, l’Observatoire européen de l’audiovisuel – rattaché au Conseil de l’Europe – publie une nouvelle étude intitulée « Qu’est-ce qu’un service [vidéo] à la demande ? ». Tandis que la consultation de la Commission européenne sur le livre vert « TV connectée » est reportée à fin septembre.

En clair. Créé il y a plus de vingt ans (en décembre 1992), l’Observatoire européen de l’audiovisuel (OEA) y voit de moins en moins clair ! « Le paysage européen des services audiovisuels à la demande apparaît de plus en plus complexe, fragmenté et, par bien
des aspects, dépourvu de transparence », pointe Francisco Cabrera-Blázquez, auteur
de l’étude et analyste juridique de l’OEA, lequel héberge depuis 2005 la plateforme européenne des instances de régulation (EPRA). Cette dernière fédère les « CSA » en Europe. Or, constate Francisco Cabrera-Blázquez, « les ARN [Autorités de régulation nationales comme le CSA, ndlr] sont souvent confrontées à des offres audiovisuelles difficiles à classifier ». Que réguler lorsqu’il s’agit de sites Internet de journaux qui proposent des vidéos sur leurs sites web, lorsque des plate-forme vidéo comme YouTube et Dailymotion mettent en ligne des chaînes éditées professionnellement, lorsque des services tels que iTunes ou CanalPlay proposent de télécharger de vidéos en vue d’une location ou d’un achat ? « Le développement exponentiel de services de vidéos en ligne
a un impact de plus en plus important sur les mineurs et le public en général (le service YouTube en étant l’exemple le plus frappant). Il est donc désormais dans l’air du temps de critiquer le champ d’application de la réglementation, considéré comme trop étroit », écrit dans l’avant-propos de l’étude Susanne Nikoltchev, nouvelle directrice exécutive de l’OEA.
Pour tenter d’y voir plus clair et en prévision de la réforme de la directive de 2007 sur les services de médias audiovisuels (SMA) (1), l’observatoire a élargi sa base de données Mavise et recense maintenant non seulement plus de 10.000 chaînes de télévision, mais aussi près de 3.000 services audiovisuels à la demande. « Nous avons complété notre analyse en incluant des services qui ne relèvent pas a priori de la définition de la directive [SMA] : les services de partage vidéo, les services de NVoD (2) et les services de stockage sur PVR (3) (…), ainsi que (…) les ‘’chaînes de marques’’ dans le catalogue de iTunes ou de Xbox Vidéo ; les podcasts ainsi que les applications pour smartphones et tablettes permettant d’accéder à des catalogues à la demande, les applications pour Smart TV ou encore les plateformes de partage vidéo telles YouTube et Dailymotion », explique Francisco Cabrera-Blázquez. @

Le CSA pourrait avoir sa « CPD » comme l’Hadopi

En fait. Le 28 mai, le président du CSA – invité de l’Association des journalistes médias (AJM) – a été très prudent en prônant « d’abord une autorégulation concertée » de l’Internet et se défendant d’être le « gendarme du Net ». Mais il n’exclut pas de se doter d’une commission sur le modèle de la CPD de l’Hadopi.

En clair. « Si la loi prévoyait des missions [de régulation du Net], le CSA pourrait les confier à une Commission de protection et de prévention (CPP), comme il y a eu une Commission de protection des droits (CPD) à l’Hadopi », a indiqué Olivier Schrameck,
le président du CSA. La CPD, le « bras armé » de l’Hadopi (1), est en effet indépendante du collège : elle est composée de trois membres, dont un président, tous magistrats, et est habilitée à instruire des poursuites (réponse graduée) via une force d’intervention d’agents assermentés pour dresser des procès verbaux. Autrement dit, si le CSA se défend de vouloir être « le gendarme du Net », une commission indépendante pourrait
être créée en son sein et remplirait implicitement ce rôle juridictionnel. Surtout que deux textes lui imposeront cette séparation des pouvoirs de décision (collège) et d’instruction (commission pour l’Hadopi ou rapporteur comme à l’Autorité de la concurrence) : l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1798 et l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH). Pour l’heure, le projet de loi présenté en Conseil des ministres
le 5 juin confie à un rapporteur indépendant le soin d’engager des poursuites. S’il était confié au CSA « la régulation de l’offre légale » et « la régulation des MTP (2) » de l’Hadopi (rapport Lescure), le CSA laisserait à la CPP le soin d’infliger des amendes. Mais le président du CSA s’est montré prudent et rassurant, comme s’il ne voulait pas tenir à
la fois la carotte et le bâton. « Le CSA [doit] être en situation d’interlocuteur légitime, pas obligatoire ni contraignant, des acteurs de l’Internet dont je connais profondément la réticence à l’égard d’un organisme institutionnel quel qu’il soit, perçu comme une autorité ou un gendarme », a-t-il expliqué, en précisant avoir déjà engagé un dialogue avec
la direction de Google France. « Je ne viendrai pas voir [les acteurs du Net] avec un
képi ! », a-t-il insisté. L’Association des services Internet communautaires (Asic), fondée par Google, Dailymotion, Yahoo ou encore AOL, s’est inquiété le 16 mai dernier de la proposition du rapport Lescure, de « confier au CSA des missions de régulation touchant aux vidéos distribuées via Internet ». Autant dire que le nouveau président du CSA marche sur des œufs. @

L’Arcep autorise enfin le VDSL2 mais ignore le VDSL3

En fait. Le 29 avril, l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca) s’est inquiété de l’avis favorable au VDSL2 rendu le 26 avril dernier par le « comité d’experts pour l’introduction de nouvelles techniques sur la boucle locale de cuivre » (Arcep).

Catherine Mancini, présidente du Comité d'experts de l'Arcep

Fréquences et audiovisuel : rééquilibrage par la loi ?

En fait. Le 10 avril, lors de son colloque organisé au Sénat, le Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (Sirti) a demandé
aux parlementaires et au CSA présents à ce que la future loi de l’audiovisuel
soit « une loi d’égalité » entre les indépendants et les grands groupes.

En clair. Les radios et télévisions indépendantes espèrent beaucoup de la future loi de l’audiovisuel pour assurer un « rééquilibrage » entre elles et les grands groupes privés : Lagardère Active, NRJ Group, RTL Group et NextRadioTV. « La loi de l’audiovisuel doit permettre de répartir à parts égales les fréquences et de prévenir les abus de position dominante », prévient Philippe Gault, président du Sirti, qui dénonce la concentration dans les médias en France. Plus de dix ans après la loi sur la communication audiovisuelle du 29 juillet 1982, qui a mis fin aux monopoles de radiodiffusion et donné le coup d’envoi des radios libres et des télévisions locales, le combat du Sirti (créé en 1981) reste inchangé.
Mais, trente ans après, la diffusion numérique est aux yeux des indépendants du PAF l’occasion historique pour le CSA de revenir à un « partage équitable des fréquences » entre eux et les grands groupes audiovisuels. Le sort qui sera réservé aux radios indépendantes par la future loi de l’audiovisuel sera plus particulièrement révélateur de
la volonté de réforme du régulateur et du législateur. Marie- Christine Blandin, sénatrice, sous le patronage de laquelle était placé le colloque du Sirti, a appelé le CSA à la vigilance face à « quelques grands groupes audiovisuels aux dents qui rayent le plancher » !
Pour le syndicats regroupant 140 radios indépendantes, les conditions de concurrence sont inéquitables : « Sur les 1.642 nouvelles fréquences attribuées par le CSA de 2005
à 2012, 743 ont bénéficié au quatre groupes concentrés, contre 366 pour les 140 radios indépendantes membres du Sirti ».
La radio numérique terrestre (RNT), qui va être lancée cette année sur Paris, Marseille
et Nice (1) en attendant d’autres villes, est perçue comme le moyen de « corriger les injustices de développement qui se sont aggravées ces dernières années entre les
radios ». Mais le nouveau président du CSA, Olivier Schrameck, considère encore le lancement de la RNT comme « une expérimentation » – comme il l’a indiqué dans son intervention au colloque du Sirti. Le rapport RNT que le régulateur remettra « dans les prochains mois » aux parlementaires déterminera la suite. @

Audiovisuel : le numérique rend obsolète la loi de 1986

En fait. Le 10 avril, le nouveau président du CSA, Olivier Schrameck, a indiqué – lors du colloque « Quel avenir pour les indépendants de l’audiovisuel en France ? » organisé par le Sirti – que le rapport d’activité du CSA « achevé d’ici la fin du mois » proposera des évolutions législatives dans l’audiovisuel.

En clair. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) entend contribuer à la rédaction
de la future loi sur l’audiovisuel, que le gouvernement pourrait soumettre au Parlement
d’ici à la fin juin (1). Comme le prévoit la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, le régulateur de l’audiovisuel va, dans son prochain rapport annuel d’activité qui devrait être publié début mai, « suggérer les modifications de nature législative (…) que lui paraît appeler l’évolution technologique, économique, sociale et culturelle des activités du secteur audiovisuel » (2). Mais Olivier Schrameck a dévoilé quelques pistes pour réformer la loi de 1986 devenue obsolète à l’épreuve du numérique. « La loi du 30 septembre 1986 continue de distinguer entre les communications au public par voie électronique et les communications audiovisuelles. Mais nous devons constater que cette distinction est rendue poreuse par les évolutions des usages et des contenus. (…) Cela doit nous conduire à un réexamen sans tabous de la mission de régulation qui nous est confiée : son périmètre mais aussi ses méthodes », considère Olivier Schrameck. Autrement dit, le CSA souhaite que le législateur lui donne le pouvoir de réguler Internet (pluralisme et indépendance des médias, sauvegarde de l’ordre public, protection de l’enfance et de la dignité humaine, …), comme il l’a déjà exprimé après sa prise de fonction en janvier (3). Autre sujet sensible : il remet aussi en question le statut « des hébergeurs comme Dailymotion
ou YouTube, qui se font désormais éditeurs ou coéditeurs », sans exclure en outre
« un contrôle des contenus vidéo sur Internet », tout en trouvant intéressant la proposition du Conseil national du numérique (CNNum) d’introduire le principe de neutralité du Net dans la loi de 1986.
En outre, le président du CSA est partisan d’une « forme de labellisation » qui permettrait de remédier à l’« actuelle asymétrie de la régulation audiovisuelle »
entre les acteurs traditionnels « corsetés » et les formes nouvelles de communication
« affranchies ». Parmi les autres propositions du rapport d’activité, une concernera le régime de la déclaration obligatoire des services de médias audiovisuels à la demande (VOD, Catch up TV, …). En réalité, il s’agit moins d’« ancrer la régulation audiovisuelle
dans l’ère numérique » que de dompter Internet. @