L’Agence France-Presse (AFP) se retrouve en proie à de sérieuses difficultés financières en 2025 et 2026

Parmi les trois grandes agences de presse mondiales, l’AFP entre dans une zone de turbulences, décidée à faire jusqu’à 14 millions d’euros d’économies entre 2025 et 2026 (dont 70 postes à supprimer d’ici le printemps prochain), tout en essayant de continuer à se désendetter. Les aides de l’Etat ne suffisent plus.

« Rayonnement international de la France » et « rempart contre la désinformation », l’Agence France-Presse (AFP) poursuit sa trajectoire de désendettement et de réduction de ses dépenses, telle que prévue dans son contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028, signé avec l’Etat français il y a plus d’un an.
Alors que le projet de loi de finances 2026 a été présenté in extremis le 14 octobre par le gouvernement « Lecornu 2 », l’agence de presse française a la confirmation des aides d’Etat qui lui seront versées : 147,2 millions d’euros l’an prochain, soit 3 % d’augmentation. En plein déficits publics chroniques de la France, en quête désespérée de réductions budgétaires et surtout de recettes fiscales, l’AFP – que dirige Fabrice Fries (photo) – n’a pas à se plaindre. Cette manne de l’Etat – 124 millions d’euros pour assurer ses missions d’intérêt général et 23,2 millions d’euros d’abonnements payés par l’administration – a augmenté chaque année depuis le début de l’actuel COM en 2024. Et il va continuer comme prévu sa hausse jusqu’à la fin de ce contrat quinquennal, à 149 millions d’euros en 2028. Parmi les engagements pris auprès de l’Etat, l’AFP doit générer 9 millions d’euros d’économies sur ces cinq ans, tout en ramenant sa dette à zéro d’ici la fin 2028 – dans près de trois ans – contre 20,4 millions d’euros à fin 2024 (son endettement était supérieur à 50 millions d’euros en 2017).

Recettes en berne et suite de l’arrêt « Facebook »
Alors que l’Agence France-Presse peut se targuer d’avoir enchaîné depuis six années consécutives un résultat net positif (même de seulement 200.000 euros en 2024), les dépenses, elles, augmentent sérieusement car il lui faut assurer la couverture des guerres Russie-Ukraine et Israël-Gaza. Rien qu’en 2024, les « charge d’exploitation » se sont élevées à 303,5 millions d’euros, en augmentation de 2,5 % sur un an. Mais 2025 s’avère plus difficile que prévue. Les conflits armés n’expliquent pas tout : d’une part, les médias clients de l’AFP sont de plus en plus à la peine dans le monde entier en raison notamment du tsunami IA, et, d’autre part, un gros contrat que l’AFP avait signé avec Facebook s’est arrêté en début d’année. Sans parler du démantèlement de la radio publique Voice of America (VOA), engagé par l’administration Trump, provoquant en mars 2025 l’arrêt brutal du contrat avec l’AFP. Les recettes commerciales l’agence de presse de la place de la Bourse (son siège social à Paris) représentent (suite)

Community notes ou fact-checking : aucun des deux ?

En fait. Le 7 janvier, le patron de Meta, Mark Zuckerberg, a publié une vidéo dans laquelle il annonce que « nous allons nous débarrasser des fact-checkers et les remplacer par les community notes ». Depuis, polémiques et débats se sont enflammés dans le public et chez les politiques autour de la désinformation.

En clair. Facebook, Instagram et Threads, les trois médias sociaux du groupe Meta, suppriment les fact-checkers. Il s’agissait le plus souvent d’organisations tierces, soit plus de 80 extérieures au groupe de Mark Zuckerberg, chargées de vérifier les informations et les faits circulant sur les réseaux sociaux. En France, l’Agence France-Presse (AFP Factuel), Le Monde (Les Décodeurs), France 24 (Les Observateurs) ou encore 20 Minutes (Fake Off) en font partie.
Ces intermédiaires de la chasse à la désinformation sont certifiés « Poynter-IFCN », un label délivré par l’International Factchecking Network, un réseau créé il y a dix ans par l’école américaine de journalisme Poynter. Son fondateur Nelson Poynter (1903-1978), qui fut patron de presse en Floride, était plutôt démocrate et libéral (1). Autant dire que chaque média faisant office de fact-checker a sa propre sensibilité politique qui peut éventuellement l’amener à apporter un « biais » dans l’identification des faits qu’il considère comme « faux », « trompeurs » ou relevant de la « désinformation ». Au risque de passer pour des censeurs, les fact-checkers vérifient les informations et signalent les contenus « problématiques », mais ils ne les suppriment pas – l’algorithme de la plateforme s’en charge en les faisant moins apparaître ou… disparaître. Pour Meta, c’est ce système qui pose problème : « Trop de contenus inoffensifs sont censurés, trop de gens se retrouvent enfermés à tort dans la “prison Facebook”, et nous sommes souvent trop lents pour répondre quand ils le font. Nous voulons corriger cette situation et revenir à cet engagement fondamental envers la liberté d’expression », dit en substance Mark Zuckerberg (2). (suite)