Très haut débit : Les abonnés VDSL2 sont toujours plus nombreux que les abonnés FTTH

Dans le Gers, le 22 mars, le Premier ministre Edouard Philippe a fait un point d’étape sur le « Plan très haut débit pour tous en 2022 » poursuivi par Emmanuel Macron. L’Arcep, elle, a organisé le 26 mars une conférence « Territoires Connectés ». Mais un train (FTTH) peut en cacher un autre (VDSL2).

En novembre prochain, le quinquennat du président de la République arrivera à michemin. A mi-parcours aussi sera alors le « Plan très haut débit pour tous en 2022 » qu’Emmanuel Macron a voulu pour « garantir un accès au bon ou au très haut débit pour tous en 2020 et du très haut débit pour tous en 2022 » – en infléchissant au passage le plan « 2022 » de son prédécesseur François Hollande (1). Le Premier ministre Edouard Philippe (photo) a prévenu, lui, dans le Gers le 22 mars qu’« un certain nombre de foyers n’auront pas le haut débit avec la fibre en 2020 » (2).

Sur le total des prises FTTH, 35,4 % d’abonnés
Malgré les efforts du gouvernement pour tenter de parvenir à atteindre cet objectif politique ambitieux, il faut se rendre à l’évidence : le très haut débit à domicile par la fibre optique – en mode FTTH (3) – n’arrivera pas dans chacun des 29 millions de foyers français. Il suffit de voir sur Cartefibre.arcep.fr l’état des déploiements des prises raccordables en FTTH sur l’Hexagone – non seulement raccordables aux logements mais aussi aux locaux à usage professionnel – pour constater que le compte n’y est pas encore, loin s’en faut. De plus, à ce jour, sur les 13,5 millions de prises éligibles
au FTTH en France, seules 4,8 millions ont fait l’objet d’un abonnement. C’est encore très peu : à peine 35,4 % d’abonnés à la fibre par rapport au total des prises pourtant disponibles. Autrement dit, l’offre est là mais la demande est faible.
Il faut dire que le réseau de cuivre continue plus que jamais de faire de la résistance, notamment avec le très haut débit VDSL2 qui compte toujours plus d’abonnés – 5,9 millions (5.946.000 précisément au 31 décembre 2018) – que le FTTH (4,8 millions). D’autant que lorsque des équipements VDSL2 sont installés au niveau d’un noeud de raccordement d’abonnés dit NRA-MeD (MeD pour montée en débit) au niveau du sous-répartiteur (SR), les abonnés ADSL passent d’office et automatiquement au VDSL2 – les « box » des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) étant aujourd’hui compatibles avec cette technologie très haut débit sur cuivre. « La montée en débit sur le réseau cuivre permet d’augmenter les débits pour l’utilisateur. L’opération revient à raccourcir la longueur des lignes de cuivre et donc limiter la déperdition de débit : on parle alors d’‘’amener la fibre jusqu’au village’’. Précisément, il s’agit de remplacer un lien du réseau en cuivre d’Orange par de la fibre, afin de placer le point d’injection de tous les signaux DSL plus bas dans le réseau, en créant un nouveau NRA de montée en débit (NRA-MeD) au niveau du sous-répartiteur (SR) », explique l’Arcep dans son rapport sur la régulation au service des territoires connectés, publié en mars (4).
Depuis 2012, Orange propose justement aux collectivités locales – dans le cadre de leur politique d’aménagement numérique du territoire – une offre de création de points de raccordement mutualisé (PRM) pour leurs projets de montée en débit. Cette offre
de gros est régulée par l’Arcep et son tarif est soumis à une obligation d’orientation
vers les coûts. Les collectivités déploient dans les zones rurales ce que l’on appelle
des réseaux d’initiative publique (RIP), en recourant à différentes technologies. Lorsque ce n’est pas de la fibre optique jusqu’à l’abonné pour les « happy view », voire des réseaux hertziens, il s’agit le plus souvent de la modernisation du réseau téléphonique de cuivre grâce à ces opérations dites de « fibre au village ». « L’Etat mobilise 3,3 milliards d’euros pour soutenir les collectivités territoriales dans le cadre du Plan France très haut débit », a indiqué Edouard Philippe dans le Gers. Plus de 2.400 opérations de « fibre au village » – du FTTV (Fiber-To-The-Village) – ont été réalisées partout en France. Qu’il est loin le temps où, sous l’ère Hollande, Fleur Pellerin, alors ministre déléguée à l’Economie numérique, voulait enterrer la boucle locale de cuivre au profit de la fibre optique. Elle avait confié en 2013 une mission « Extinction du cuivre » à Paul Champsaur, ancien président de l’Arcep, en vue de fixer une date d’extinction de la paire de cuivre ADSL au profit du FTTH.

Emmanuel Macron n’enterre pas le cuivre
Mais le 19 février 2015, le rapport final de la «mission sur la transition vers les réseaux à très haut débit et l’extinction du réseau de cuivre » est remis à un certain… Emmanuel Macron, alors ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique. Il dissuade alors le gouvernement d’enterrer trop vite le cuivre. Cela serait trop coûteux car il faudrait indemniser l’opérateur historique Orange, dont l’actif « boucle locale de cuivre » aurait une valeur de… 15 milliards d’euros (5). Le cuivre vaut encore son pesant d’or, pas que sur le marché convoité des métaux ! @

Charles de Laubier